Guerre des prix des VE en Chine : Pékin change la donne, l’onde de choc menace-t-elle l’accès aux électriques abordables en France ?

En bref:

  • La Chine met fin à la guerre des prix des véhicules électriques afin de stabiliser son industrie, ce qui risque de limiter l’exportation de modèles low cost vers l’Europe, notamment la France.
  • Cette régulation pourrait entraîner une hausse des prix et une réduction de la diversité des VE abordables sur le marché français.
  • La dépendance stratégique à la chaîne d’approvisionnement chinoise reste un facteur clé, avec des impacts possibles sur les négociations commerciales et la transition énergétique européenne.

Depuis plusieurs années, la Chine était le théâtre d’une féroce guerre des prix sur le marché des véhicules électriques (VE), propulsant la démocratisation rapide de modèles low cost… et exerçant une pression inexorable sur les constructeurs européens. Cet été 2025, le signal venu de Pékin marque un véritable tournant : le Premier ministre chinois Li Qiang a officiellement appelé à une régulation de la concurrence et à une surveillance du prix des VE. Quel impact ce basculement aura-t-il sur le marché français et l’accessibilité des électriques d’entrée de gamme ? Analyse, enjeux et perspectives.


📉 Un changement de cap imposé par Pékin

Pendant plus de deux ans, la guerre des prix chinoise a vu s’affronter des dizaines de marques, alimentées par des subventions publiques massives, des innovations à cadence soutenue et un appétit féroce pour la conquête de parts de marché – y compris hors des frontières de l’Empire du Milieu. Le revers, cependant, n’a pas tardé : faillites à la chaîne chez les « petits » constructeurs, pertes record pour les leaders, et menaces sérieuses sur la stabilité d’un secteur érigé en fleuron national.

D’où la bascule opérée par le gouvernement. Lors d’une réunion décisive mi-juillet, Li Qiang a plaidé en faveur d’une « concurrence plus saine », tout en exhortant à renforcer la discipline tarifaire chez les constructeurs et à rémunérer justement les fournisseurs. L’objectif : mettre fin à une spirale déflationniste qui, selon le gouvernement, fragilise autant la viabilité industrielle que l’emploi.

📌 À retenir

  • Les marges des constructeurs chinois se sont effondrées en 2024-2025, avec des pertes cumulées de près de 12 % chez les industriels majeurs, malgré une hausse continue des volumes.
  • La « surproduction » et la ruée à l’export menaçaient la soutenabilité de l’ensemble du secteur, provoquant une réaction politique de Pékin.

🚗 Pourquoi ce tournant impacte-t-il le marché européen… et donc français ?

Jusqu’ici, l’Europe (et la France) profitaient indirectement de cette « folie baissière » : depuis 2023, les électriques chinoises à prix cassés – BYD Dolphin, MG4, Leapmotor T03… – se sont imposées sur le marché tricolore, dynamitant la concurrence locale. Les tentatives de l’Union européenne de freiner cette lame de fond à coups de droits de douane n’ont guère entamé l’attractivité tarifaire de ces modèles, dont certains tutoient désormais les 20 000 € bonus déduit.

Si Pékin parvient à instaurer une forme de « cartel vertueux » pour stabiliser les prix sur son marché domestique, il est hautement probable que la dynamique d’exportation de véhicules low cost vers l’Europe s’essouffle :

  • Les constructeurs chinois pourraient relever leurs prix pour restaurer leurs marges.
  • Une plus forte régulation pourrait réduire la concurrence extrême… et donc l’incitation à brader les modèles invendus sur le vieux continent.
  • Pékin pourrait utiliser sa maîtrise de la chaîne d’approvisionnement des terres rares et des batteries pour influencer l’équation coût global des VE.

ℹ️ Tableau comparatif : Quelle différence de prix ? (Exemples juillet 2025)

ModèlePrix Chine (équiv. €)Prix France 2025 (€)Écart (%)
BYD Dolphin (entrée)13 50022 990+70 %
MG4 Standard14 00019 990+43 %
Leapmotor T039 80020 990+114 %
Renault Twingo E-Tech— (non vendu)23 390

Source : données publiques, catalogue 2025 – Hors bonus écologique, hors options

👉 À noter : Malgré la guerre des prix, le transport, les taxes et la politique commerciale des filiales en Europe expliquent un écart considérable… mais il reste historiquement bas par rapport aux compétiteurs européens.


🔎 Quelles conséquences pour les consommateurs français ?

1. Fin des électriques low cost ?

Si la régulation chinoise s’avère efficace – ce qui reste incertain à court terme vu la fragmentation du secteur –, l’ère des petites électriques importées sous la barre des 20-22 000 € pourrait toucher à sa fin. Les constructeurs européens, asphyxiés par cette concurrence, risquent de voir leur pression tarifaire se relâcher… au détriment du consommateur.

2. Moindre diversité des modèles abordables

Moins de dumping signifie également une baisse du choix sur le segment des citadines, sacrifié ces dernières années par les Européens. Le tout-électrique à moins de 25 000 € redeviendrait l’exception, et non la norme.

3. Vers une nouvelle dépendance stratégique ?

Au-delà des prix, la Chine concentre toujours l’accès à la quasi-totalité des terres rares, composants électroniques et cellules de batteries. Tout durcissement de la régulation pourrait aussi servir de monnaie d’échange lors des négociations commerciales sino-européennes.


💡 Conseils d’expert pour anticiper la mutation du marché

  • Profitez des offres actuelles tant qu’elles durent : si vous envisagez une VE chinoise, les mois qui viennent pourraient constituer un « creux de vague » tarifaire avant resserrement.
  • Surveillez la politique européenne : d’autres mesures, comme une hausse des droits de douane ou des incitations à la relocalisation, pourraient rebattre les cartes dans les prochains trimestres.
  • Faites attention aux promesses trop optimistes : si la pression sur les prix devait cesser brutalement, il est peu probable que les constructeurs européens puissent compenser par des modèles équivalents à court terme.

📢 Analyses croisées : Constructeurs, marché, enjeux globaux

  • Les Européens s’organisent autour de feuilles de route communes, via un dialogue stratégique avec Bruxelles pour maintenir un semblant d’équité, mais reconnaissent leur retard structurel sur les coûts.
  • Le risque d’une industrie mondiale ultra-concentrée : la crise favorise la consolidation, risquant de voir disparaître certains challengers chinois… mais aussi d’affaiblir durablement l’offre accessible en Europe.
  • Transition sous contraintes : alors que les objectifs de réduction des émissions de CO₂ continuent de se durcir, toute remontée des prix complique plus que jamais la démocratisation de l’électrique.

Alors que le gouvernement chinois joue les pompiers dans son propre secteur, la tempête tarifaire pourrait bien toucher, en retour, les perspectives de motorisation propre pour tous en France. Vigilance et anticipation seront les clés, tant pour le consommateur que pour l’industrie, dans une période où la volatilité s’invite désormais au cœur de la transition énergétique automobile.

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