4680 en panne, sodium-ion en embuscade: et si le tournant des batteries arrivait dès 2026 ?

En bref:

  • Les 4680 de Tesla butent sur l’industrialisation (revêtement à sec, volumes faibles) et voient la demande inférieure aux capacités, remettant en cause la promesse d’un VE « à 25 000 $ ».
  • CATL lance la production de masse de sodium‑ion dès 2026 (≈170–175 Wh/kg) : moins cher, plus sûr et meilleur au froid, ciblant l’entrée de gamme, les flottes et le stockage.
  • Conséquence : pas de vainqueur unique — mix chimies/architectures (sodium‑ion/LFP/NMC) selon usages, avec un fort impact sur coûts et dépendances matérielles.

L’actualité batterie des derniers jours de 2025 est sans appel: pendant que Tesla peine à concrétiser ses promesses autour des cellules 4680, CATL fixe un cap clair vers le sodium-ion avec un lancement en grande série dès 2026. Au-delà du duel de titans, c’est tout l’équilibre coût–autonomie–dépendances géopolitiques du véhicule électrique qui pourrait basculer.

Le contraste est saisissant: un contrat de cathodes à 2,9 milliards de dollars réduit à… 7 386 dollars chez un fournisseur clé de Tesla, et, en face, le numéro 1 mondial des batteries précisant la feuille de route de sa technologie sodium-ion pour plusieurs segments, du petit véhicule au stockage stationnaire.

Ce qui vient de se passer chez Tesla

  • Un fournisseur coréen (L&F) a révisé de 99 % la valeur d’un contrat de matériaux de cathodes haut nickel destiné aux 4680, de 2,9 Md$ à environ 7 000 $. Motif indiqué dans le document réglementaire: « changement des quantités fournies ».
  • Cette chute reflète surtout deux réalités: la montée en cadence 4680 est loin des ambitions initiales, et le Cybertruck – seul modèle actuellement équipé des 4680 de Tesla – se vend très en deçà des capacités nominales. Des analystes évoquent un rythme annuel autour de 20 000-25 000 unités, pour une capacité installée bien supérieure à Austin.
  • Pour autant, parler « d’abandon » serait excessif: Tesla continue de produire des 4680 à Giga Texas. En Europe, Berlin a relancé l’assemblage de packs (projet interne « Coyote ») à partir de cellules venues d’Austin.
  • Les promesses du Battery Day 2020 (réduction massive des coûts, standardisation 4680 chez les fournisseurs, véhicule à 25 000 $) n’ont pas été atteintes à ce stade, et le projet d’« entrée de gamme » a changé de trajectoire.
  • Pendant ce temps, des concurrents avancent sur des cylindriques 46XX avec des fournisseurs établis (Samsung SDI, LG…), et des architectures cell-to-pack ou packs structurels arrivent en série.

📌 À retenir côté Tesla

  • 4680 = format, pas chimie: les cellules peuvent être NMC haut nickel ou fer-phosphate. Dans les faits, le Cybertruck exploite des 4680 haut nickel.
  • Le vrai nœud est industriel: le revêtement « à sec » des électrodes, clé des économies promises, reste difficile à stabiliser à grande échelle.
  • Impact concret: sans volume, pas d’effet d’échelle ni de baisse de coûts suffisante pour transformer la grille tarifaire des modèles.

CATL prépare le coup d’après: le sodium-ion en 2026

Le chinois CATL a officialisé un calendrier de déploiement massif de ses batteries sodium-ion dès 2026, avec un ciblage multiple: véhicules d’entrée/milieu de gamme, hybrides, véhicules commerciaux, swapping et stockage d’énergie. Le message est clair: le sodium n’entend pas remplacer le lithium partout, mais ouvrir une voie parallèle là où le coût et la robustesse priment.

  • Densité énergétique de génération annoncée: autour de 170-175 Wh/kg, proche des LFP modernes mais encore loin des NMC haut nickel.
  • Avantages mis en avant: coût matières (sodium abondant), meilleure tolérance au froid, sécurité accrue, chaînes d’approvisionnement moins critiques (moins de dépendance au lithium/nickel/cobalt).
  • Compatibilité et industrialisation: cellules conçues pour s’insérer rapidement dans des architectures pack type LFP, ce qui facilite l’adoption.
  • Des premiers véhicules en Chine sont attendus en 2026; l’Europe suivrait plutôt en seconde vague, via des segments prix serrés.

💡 Bon à savoir

  • Le sodium-ion est particulièrement pertinent pour les petites voitures urbaines, les utilitaires légers, les flottes et le stockage stationnaire.
  • Pour les berlines/SUV longue autonomie, le lithium (LFP/NMC) conserve l’avantage en densité énergétique à court terme.

4680: pourquoi ça coince (encore)

  • Industrialisation du « dry electrode »: en théorie, moins de solvants, moins d’étapes, donc du coût en moins. En pratique, l’homogénéité, l’adhérence et les rendements en production de masse restent difficiles à verrouiller.
  • Architecture véhicule: la promesse du pack structurel (cellules intégrées à la caisse) est exigeante en validation crash/thermal management. Peu de modèles hors Cybertruck l’emploient chez Tesla aujourd’hui.
  • Effet d’échelle bridé: moins de volume 4680 = capex amorti plus lentement, coûts $/kWh qui descendent trop peu pour changer le P&L des modèles.
  • Concurrence des packs prismatiques optimisés: les cell-to-pack/Qilin de CATL ou équivalents gagnent en densité au niveau pack, rognant l’avantage théorique du gros cylindrique.

Sodium-ion vs 4680: le match des compromis

Note préalable: 4680 désigne un format; ses performances varient selon la chimie (LFP, NMC…). Ci-dessous, on compare les « 4680 haut nickel actuelles » typiques du Cybertruck à la génération sodium-ion annoncée par CATL pour 2026.

  • Énergie massique
    • Sodium-ion CATL: ~170-175 Wh/kg (cellule)
    • 4680 haut nickel: ~250-280 Wh/kg (cellule) selon chimie et génération
  • Coût et matières
    • Sodium-ion: avantage structurel (Na abondant, cathodes sans métaux critiques)
    • 4680 haut nickel: soumis au nickel/cobalt/lithium, coûts volatils
  • Froid et sécurité
    • Sodium-ion: très bon comportement à basse température, stabilité thermique rassurante
    • 4680 haut nickel: bonnes protections mais chimie plus exigeante en gestion thermique
  • Intégration industrielle
    • Sodium-ion: « drop-in » possible dans des plateformes LFP, idéal pour marchés sensibles au prix
    • 4680: intérêt maximal si pack structurel et dry electrode fonctionnent à pleine échelle
  • Usages cibles
    • Sodium-ion: citadines, utilitaires, flottes, stockage, hybrides
    • 4680: véhicules nécessitant puissance et autonomie supérieures, si coût/volume suivent

📊 En un coup d’œil

  • Gagnant coût/robustesse: sodium-ion
  • Gagnant autonomie/compacité: 4680 haut nickel
  • Gagnant « time-to-market » 2026 sur l’entrée de gamme: sodium-ion
  • Gagnant potentiel long terme si l’échelle est atteinte: 4680, mais la fenêtre se referme

Coûts, dépendances, climat: un tournant systémique

  • Coûts: si le sodium-ion tient ses promesses industrielles, il pourrait tirer vers le bas le ticket d’entrée des VE, notamment en Chine dès 2026, puis sur marchés émergents et, par capillarité, en Europe sur des segments A/B et utilitaires.
  • Dépendances matières: moins de lithium/nickel/cobalt, donc une moindre exposition aux cycles de prix et à la géopolitique des métaux critiques. L’Europe y verrait un intérêt stratégique pour des véhicules abordables et le stockage réseau.
  • Empreinte carbone: fabrication potentiellement moins carbonée (matières moins critiques, process cathodes différents), un atout pour les bilans Scope 3 des constructeurs.
  • Concurrence technologique: LFP continuera de faire le gros des volumes, NMC gardera le haut de gamme, le sodium-ion se glissera entre les deux là où 150-300 km d’autonomie réelle suffisent au quotidien.

Pour l’acheteur et pour les marques: quoi changer dès maintenant ?

  • Si vous visiez une Tesla « à 25 000 $ » grâce aux 4680: n’attendez pas un déclic prix lié à cette technologie à court terme. La marque optimise plutôt ses plateformes existantes et ses versions « allégées ».
  • Si vous cherchez un VE très abordable pour trajets urbains/périurbains: surveillez les annonces 2026-2027, d’abord en Chine puis en Europe. Le sodium-ion pourrait faire basculer le rapport valeur/prix.
  • Pour les constructeurs: la stratégie « double chimie » (LFP + sodium-ion) sur la même plateforme devient crédible pour lisser coûts et approvisionnements, tout en réservant NMC aux besoins premium.

🧭 À retenir

  • Le coup d’arrêt chez un fournisseur clé des 4680 met en lumière les difficultés industrielles de Tesla et fragilise la promesse d’un VE très bon marché grâce à cette seule technologie.
  • CATL, de son côté, balise l’industrialisation du sodium-ion pour 2026: densité moindre, mais coût, sécurité et froid en progrès, avec un fort potentiel sur l’entrée de gamme et le stockage.
  • Le futur proche ressemble moins à un « vainqueur unique » qu’à un mix optimisé: sodium-ion pour l’accessible, LFP pour le mainstream, NMC (ou équivalents hautes densités) pour le haut de gamme—et des 46XX là où l’échelle industrielle suit.

En filigrane, une réalité s’impose: en 2026, ce n’est peut-être pas « la » batterie qui changera tout, mais la façon dont les constructeurs composeront intelligemment leur palette chimies/architectures pour tenir la promesse d’un VE à la fois abordable, robuste et sobre en ressources.

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