En bref:
- Les constructeurs chinois Neta et Zeekr sont accusés de gonfler artificiellement leurs chiffres de vente en Europe en enregistrant des « voitures d’occasion à zéro kilomètre » jamais réellement vendues.
- Cette pratique nuit à la crédibilité des marques chinoises, fausse les statistiques du marché électrique et suscite des réponses officielles incluant une interdiction possible de revente dans les six mois suivant l’immatriculation.
- Les consommateurs européens sont appelés à la vigilance en vérifiant l’historique des véhicules pour éviter les pièges liés à ces « fausses neuves ».
Dans un contexte d’explosion du marché des voitures électriques et d’arrivée massive de marques chinoises en Europe, la transparence des chiffres de vente est devenue un enjeu crucial. Ces derniers jours, les noms de Neta et Zeekr cristallisent la polémique autour d’une pratique contestée : celle des « voitures d’occasion à zéro kilomètre », soupçonnée de gonfler artificiellement leur succès apparent sur notre continent. Que se cache-t-il réellement derrière ce scandale, et quelles sont ses implications pour les consommateurs comme pour l’ensemble du secteur automobile européen ?
❓ Que signifie le scandale des « fausses neuves » ?
S’inscrire en tant qu’acteur crédible de la nouvelle mobilité passe, pour les constructeurs chinois, par des chiffres flatteurs. Mais le procédé actuellement mis en cause est loin d’être anodin :
- Principe : des véhicules neufs sont enregistrés et assurés comme s’ils étaient vendus, alors qu’ils restent en stock chez des concessionnaires ou des filiales des marques. Ils sont ensuite proposés comme « d’occasion zéro kilomètre » à d’éventuels acheteurs.
- Conséquence directe : les statistiques publiées par les constructeurs affichent des « ventes » qui, en réalité, n’en sont pas vraiment. Le terme de « voitures d’occasion à zéro kilomètre » désigne ces véhicules comptabilisés comme vendus sans être réellement livrés à un client.
📊 Analyse du scandale : chiffres, méthodes et acteurs
Un phénomène massif… et systémique
Chez Neta, selon des données recueillies sur la période janvier 2023 – mars 2024, plus de 64 000 véhicules sur les 117 000 prétendument « vendus » l’auraient été par ce biais, soit plus de la moitié du volume annoncé. Quant à Zeekr, une hausse brusque et suspecte des « ventes » a été observée fin 2024 dans certaines régions (jusqu’à 2 737 véhicules enregistrés en un mois à Xiamen, soit 14 fois la moyenne habituelle), alors que le nombre d’immatriculations effectives restait largement en deçà.
📌 À retenir
- Les victimes involontaires ? : Certains clients découvrent qu’une assurance était déjà active sur leur voiture neuve… avant leur acquisition officielle.
- Surplus de stock : Nombre de ces véhicules restent en fait invendus dans les entrepôts des distributeurs.
Le contexte : guerre des prix et surenchère
- Le marché chinois des véhicules électriques est marqué par une surcapacité chronique et une course aux volumes. Confrontés à la baisse des subventions, à l’intensification de la concurrence et à l’obligation de rassurer les investisseurs, les constructeurs jouent sur tous les leviers pour soigner leurs rapports trimestriels… parfois au détriment de l’éthique.
- Les conséquences sont multiples : fausse perception de succès, confiance entamée envers les nouvelles marques, et effet de trompe-l’œil sur la santé réelle du marché, notamment pour les filiales européennes de ces groupes.
🏛️ Réactions officielles et obligations à venir
Devant l’ampleur du phénomène, les autorités chinoises s’en sont saisies. Le 20 juillet 2025, le Ministère de l’Industrie proposait une interdiction de revente pendant six mois pour tout véhicule neuf immatriculé, manière de tarir la source des « fausses ventes ». Cette mesure, actuellement en consultation, vise justement à rétablir la sincérité des statistiques et limiter les distorsions de concurrence.
Zeekr a réagi publiquement, rejetant les accusations et affirmant que seuls des modèles de démonstration étaient concernés, sans vente réelle à des particuliers. L’entreprise promet transparence et enquêtes internes. Neta, de son côté, reste silencieuse — un mutisme d’autant plus notable que la marque traverse, en Chine, une crise de ventes et a entamé des procédures de faillite.
👁️ Impact pour l’Europe et les consommateurs français
Pourquoi ce scandale concerne-t-il aussi l’Europe ?
- Expansion à marche forcée : Les constructeurs chinois, freinés sur leur marché domestique, cherchent à s’imposer en Europe, y compris avec des méthodes douteuses héritées de la dynamique chinoise.
- Crédibilité sur le territoire européen : La confiance dans les chiffres de vente et la fiabilité déclarative est centrale pour l’acceptation des marques « venues d’ailleurs ».
💡 Conseil d’expert
Avant d’acheter un véhicule chinois d’occasion à faible kilométrage, vérifiez la date de première mise en circulation ET la date de souscription de la première assurance. Un historique suspect peut traduire un passé de « fausse neuve ».
📊 Tableau récapitulatif : points clés du scandale
Aspect | Détail |
---|---|
Marque(s) impliquée(s) | Neta, Zeekr (principalement) |
Pratique incriminée | Inscription et assurance de véhicules avant vente réelle (« zéro kilomètre ») |
Chiffres concernés | Neta : plus de 64 000 véhicules en 15 mois ; Zeekr : ventes multipliées par 14 à Xiamen |
Contexte | Surcapacité, guerre des prix, course aux investisseurs |
Réponse officielle | Projet d’interdiction de revente pendant 6 mois ; Zeekr nie, Neta ne répond pas |
Risque pour le client | Véhicule présenté comme neuf mais déjà comptabilisé, perte de confiance |
🔎 Ce que ça change pour la perception des marques chinoises
L’affaire fragilise l’image de ces nouveaux venus sur le marché européen, déjà dans le viseur pour leurs méthodes agressives et la rapidité de leur montée en puissance. Derrière les déclarations flatteuses des importateurs, ce scandale incite à la prudence : la réalité du succès commercial doit être examinée avec un esprit critique, surtout lorsqu’il s’agit de chiffres en provenance d’un marché intérieur aussi complexe – et désormais sous surveillance réglementaire aiguë.
La course à la mobilité électrique ne doit pas sacrifier la confiance, ni occulter les impératifs de sincérité et d’éthique indispensables à la crédibilité des acteurs sur le long terme.