L’Union européenne contre-attaque face à l’offensive chinoise sur le marché des voitures électriques

En bref:

  • L’Union européenne enquête sur les subventions chinoises dans le secteur des voitures électriques pour contrer une concurrence déloyale.
  • La Chine a mis en place une stratégie à long terme pour favoriser l’émergence de champions nationaux dans le domaine des véhicules électriques.
  • Les mesures européennes pour protéger l’industrie automobile pourraient entraîner des représailles de la part de la Chine.

Dans un contexte de transition énergétique accélérée, le marché des véhicules électriques est devenu un enjeu stratégique majeur pour les constructeurs automobiles. Cependant, l’arrivée massive de voitures chinoises à des prix défiant toute concurrence soulève de sérieuses inquiétudes au sein de l’industrie européenne. Face à cette offensive commerciale, l’Union européenne a décidé de passer à l’action en lançant une enquête approfondie sur les subventions accordées par Pékin à son secteur automobile électrique.

Une concurrence déloyale dénoncée par Bruxelles

Lors de son discours sur l’état de l’Union, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a dénoncé sans détour les pratiques chinoises. "Les marchés mondiaux sont aujourd’hui inondés de voitures électriques chinoises bon marché, dont le prix est maintenu artificiellement bas par des subventions publiques massives", a-t-elle affirmé, soulignant que ces aides faussent les règles de la concurrence au détriment des entreprises européennes.

Cette décision fait suite à de nombreuses alertes lancées par les constructeurs du Vieux Continent, qui peinent à rivaliser avec les tarifs proposés par leurs homologues chinois. En France, les voix de Luca de Meo, le directeur général de Renault, et de Carlos Tavares, son homologue chez Stellantis, se sont élevées avec force pour dénoncer ces distorsions de marché.

Un arsenal de subventions chinoises dévoilé

Selon les premières investigations de la Commission européenne, les fabricants chinois de véhicules électriques bénéficient de diverses formes de soutien étatique, les fabricants chinois de véhicules électriques bénéficient de diverses formes de soutien étatique. Parmi celles-ci figurent des transferts directs de fonds, des exonérations fiscales, ainsi que la fourniture de biens et services à des prix inférieurs aux coûts réels.

Ces subventions massives, estimées à 57 milliards de dollars par le cabinet de conseil AlixPartners, permettent aux constructeurs chinois de proposer des tarifs nettement plus agressifs par le cabinet de conseil AlixPartners, permettent aux constructeurs chinois de proposer des tarifs nettement plus agressifs que leurs concurrents européens. Une situation qui exerce une pression considérable sur les ventes, les parts de marché et les marges bénéficiaires des entreprises de l’Union.

Une stratégie chinoise de longue haleine

Cette offensive commerciale n’est pas le fruit du hasard, mais s’inscrit dans une stratégie de long terme mise en place par les autorités chinoises. Dès 2009, Pékin a activement encouragé les investissements dans le secteur des véhicules électriques dans le secteur des véhicules électriques, combinant incitations financières et mesures réglementaires.

L’un des objectifs clés de cette politique était de favoriser l’émergence de champions nationaux capables de rivaliser avec les géants mondiaux de l’automobile. Cette approche a porté ses fruits, avec l’ascension fulgurante de groupes tels que BYD et CATL et CATL, devenu en 2020 le premier fabricant mondial de batteries pour véhicules électriques, détrônant le japonais Panasonic.

Une réponse européenne en plusieurs volets

Face à cette offensive chinoise, l’Union européenne a décidé de riposter sur plusieurs fronts. Outre l’enquête sur les subventions, qui pourrait déboucher sur l’imposition de droits compensateurs, d’autres mesures sont envisagées pour protéger l’industrie automobile européenne.

En France, le gouvernement prépare une réforme des subventions accordées aux voitures électriques, qui serait conditionnée à un "score environnemental" susceptible de limiter les importations chinoises. Une initiative saluée par Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie, qui a évoqué un "bonus européen réservé à des produits industriels à contenu européen".

De son côté, la Commission européenne envisage de durcir les règles en matière d'aides d'État, afin de permettre aux États membres de soutenir plus efficacement leurs industries stratégiques, comme l’automobile. Cette révision des règles viserait à contrer les effets de distorsion causés par les subventions étrangères, tout en respectant les engagements internationaux de l’UE.

Un risque de représailles chinoises

Bien que justifiées par la nécessité de rétablir des conditions de concurrence équitables, ces mesures européennes ne sont pas sans risque. La Chine a déjà réagi avec virulence, menaçant d’un "impact négatif sur les relations économiques et commerciales" avec l’UE.

Pékin dénonce un "protectionnisme" de la part de Bruxelles et affirme que les subventions accordées à son industrie automobile électrique ne sont que le "résultat d’une innovation technologique ininterrompue". Un argument difficilement recevable au regard des sommes colossales investies par l’État chinois dans ce secteur stratégique.

Les tensions commerciales entre les deux géants économiques pourraient s’intensifier, avec un risque de représailles de la part de Pékin. Les constructeurs européens, qui ont massivement investi sur le marché chinois ces dernières années, pourraient se retrouver pris en otage dans ce bras de fer.

Une transition énergétique à préserver

Au-delà des enjeux commerciaux, cette bataille pour la suprématie sur le marché des véhicules électriques soulève des questions cruciales pour la transition énergétique de l’Union européenne. Avec des objectifs ambitieux en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, l’UE ne peut se permettre de laisser son industrie automobile sombrer face à la concurrence chinoise.

Cependant, comme le souligne Mairead McGuinness, commissaire européenne chargée des services financiers, il faudra "mettre en balance ces instruments avec nos objectifs en matière de transition énergétique". Une équation délicate, alors que l’UE dépend actuellement à 97% des importations, principalement en provenance de Chine, pour répondre à ses besoins en panneaux solaires.

Une bataille décisive pour l’avenir industriel européen

Au-delà du seul secteur automobile, l’issue de ce bras de fer avec la Chine pourrait avoir des répercussions majeures sur l’avenir industriel de l’Europe. Si les constructeurs européens venaient à plier face à la concurrence chinoise, d’autres industries stratégiques pourraient suivre, menaçant les ambitions de souveraineté économique de l’UE.

C’est pourquoi cette bataille pour la survie de l’industrie automobile européenne revêt une importance capitale. Elle constitue un test décisif de la capacité de l’Union à défendre ses intérêts face aux pratiques commerciales déloyales, tout en préservant ses objectifs environnementaux et sa compétitivité à long terme.

Les prochains mois seront donc cruciaux pour l’avenir de ce fleuron industriel européen. Une issue favorable pourrait ouvrir la voie à une riposte plus ferme contre les subventions chinoises dans d’autres secteurs clés, renforçant ainsi la souveraineté économique du Vieux Continent. En revanche, un échec risquerait d’ébranler durablement la confiance des Européens dans leur capacité à relever les défis posés par la montée en puissance de la Chine.

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