Ford repousse son passage au 100% électrique en Europe : quels impacts sur le marché ?

En bref:

  • Ford repousse son passage au tout électrique en Europe au-delà de 2030 en raison d’une demande plus faible que prévue pour les véhicules électriques.
  • Cette décision pourrait avoir des conséquences sur le marché automobile européen, notamment en ralentissant la transition vers une mobilité plus durable.
  • Ford opte pour une stratégie multi-énergies, combinant véhicules thermiques et électriques, pour répondre aux besoins divers des consommateurs tout en poursuivant sa transition vers l’électrique.

La transition vers la mobilité électrique est un défi majeur pour l’industrie automobile. Si de nombreux constructeurs se sont fixés des objectifs ambitieux pour électrifier totalement leurs gammes d’ici 2030, certains commencent à revoir leurs plans. C’est le cas de Ford, qui vient d’annoncer son intention de repousser son passage au 100% électrique pour les voitures particulières en Europe au-delà de 2030. Une décision lourde de conséquences pour le marché européen.

Un revirement stratégique surprenant

En février 2021, Ford avait pourtant annoncé la couleur : d’ici 2030, l’ensemble de sa gamme de voitures particulières en Europe serait 100% électrique. Un objectif ambitieux, mais en phase avec les réglementations européennes visant à interdire la vente de nouveaux véhicules thermiques d’ici 2035. Pour atteindre cet objectif, le constructeur américain avait même entamé l’arrêt progressif de la production de plusieurs de ses modèles emblématiques à moteur thermique, comme la Mondeo, l’EcoSport, la Fiesta ou encore le monospace S-Max.

Mais les choses ont changé. Lors d’un sommet sur l’avenir de l’automobile organisé par le Financial Times à Londres, Martin Sander, directeur général de Ford Europe, a lâché une bombe : la firme à l’ovale bleu pourrait finalement continuer à proposer des véhicules thermiques, notamment des hybrides rechargeables, au-delà de 2030 si la demande persiste. Un revirement de situation surprenant, qui remet en cause les plans initiaux du constructeur.

Une demande plus faible que prévu

Pour justifier ce changement de cap, Ford évoque une demande pour les véhicules électriques plus faible que ce qui avait été anticipé initialement. Malgré les incitations gouvernementales et les efforts des constructeurs pour proposer des modèles électriques toujours plus attractifs, les consommateurs européens semblent encore frileux à l’idée d’abandonner complètement les moteurs thermiques.

Cette frilosité s’explique par plusieurs facteurs. D’une part, le coût d’acquisition plus élevé des véhicules électriques, malgré les aides à l’achat, reste un frein pour de nombreux ménages. D’autre part, l’autonomie limitée de certains modèles et le manque d’infrastructures de recharge suffisantes sur tout le territoire européen alimentent les craintes d’une partie des automobilistes.

Enfin, l’attachement à la conduite "traditionnelle" et aux longues distances que permettent les moteurs thermiques joue également un rôle non négligeable dans la résistance au tout électrique.

Des conséquences en cascade

La décision de Ford de repousser son passage au 100% électrique en Europe pourrait avoir des conséquences en cascade sur le marché automobile européen. Tout d’abord, cela risque de freiner le développement des infrastructures de recharge, dont le déploiement est étroitement lié à la demande pour les véhicules électriques.

Ensuite, cela pourrait inciter d’autres constructeurs à revoir également leurs plans à la baisse, ralentissant ainsi la transition vers une mobilité plus durable. Enfin, cela pourrait semer le doute dans l’esprit des consommateurs quant à la réalité de cette transition, les incitant à repousser leur achat d’un véhicule électrique.

Cependant, il ne faut pas oublier que Ford reste engagé dans l’électrification de sa gamme. D’ici mi-2026, l’ensemble de ses modèles de voitures particulières en Europe seront soit 100% électriques, soit hybrides rechargeables. De plus, le constructeur prévoit que les deux tiers de ses ventes de véhicules utilitaires seront électriques ou hybrides rechargeables d’ici 2030.

Une stratégie multi-énergies pour répondre à la demande

Face à la demande hésitante des consommateurs européens, Ford semble opter pour une stratégie multi-énergies, en continuant à proposer des véhicules thermiques, notamment des hybrides rechargeables, en complément de sa gamme électrique.

Cette approche présente l’avantage de répondre aux différents besoins et attentes des clients, tout en permettant au constructeur de poursuivre sa transition vers l’électrique à un rythme plus progressif. Cependant, elle comporte également des risques, notamment celui de ralentir la dynamique d’adoption des véhicules électriques et de maintenir une dépendance aux énergies fossiles.

Pour atténuer ces risques, Ford devra redoubler d’efforts pour rendre ses modèles électriques toujours plus attractifs, en termes de prix, d’autonomie et de performances. Le constructeur mise notamment sur le lancement de nouveaux modèles abordables, comme le SUV compact Explorer attendu cette année, ou encore le SUV citadin Puma Gen-E prévu ultérieurement.

Une transition inévitable, mais à quel rythme ?

Malgré ce report, nul ne remet en cause l'inévitabilité de la transition vers le tout électrique dans l’industrie automobile européenne. Les réglementations environnementales, les attentes des consommateurs et les impératifs de développement durable poussent inexorablement les constructeurs à abandonner progressivement les moteurs thermiques.

La véritable question est de savoir à quel rythme cette transition se fera. Ford semble avoir choisi d’adopter une approche plus progressive, en continuant à proposer des alternatives thermiques, notamment hybrides, pour répondre à la demande actuelle. D’autres constructeurs, comme Jaguar, ont opté pour une stratégie plus radicale en annonçant un passage au 100% électrique dès 2025.

Quelle que soit l’approche choisie, les constructeurs devront faire preuve d’agilité et d’adaptation pour répondre aux évolutions du marché et des attentes des consommateurs. La transition vers une mobilité durable est un défi de taille, qui nécessitera des efforts concertés de l’ensemble des acteurs de la filière automobile.

En bref, si le report de Ford peut sembler décevant pour les plus fervents défenseurs du tout électrique, il reflète surtout la complexité de cette transition et la nécessité d’accompagner les consommateurs dans ce changement majeur. Une approche pragmatique, qui devra cependant s’accélérer dans les années à venir pour atteindre les objectifs environnementaux fixés.

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