En bref:
- Une étude de Transport & Environnement remet en question la neutralité carbone de l’e-fuel, un carburant synthétique présenté comme une alternative propre aux véhicules à combustion interne.
- L’industrie pétrolière souhaite abaisser le seuil de neutralité carbone de l’e-fuel de 100% à 70%, ce qui augmenterait significativement les émissions de CO2 des véhicules utilisant ce carburant.
- La production d’e-fuel doit respecter des normes strictes pour assurer une neutralité carbone réelle, notamment en utilisant uniquement de l’électricité renouvelable et en capturant le carbone de l’air.
La controverse sur l’e-fuel
Selon une enquête récente menée par Transport & Environnement (T&E), une organisation européenne engagée pour une mobilité plus verte, les véhicules propulsés par des carburants synthétiques ou « e-fuel » ne seraient pas aussi respectueux de l’environnement que ce que l’industrie pétrolière prétend. Cette étude, publiée le 5 octobre 2023, s’inscrit dans le cadre d’un débat européen plus vaste sur les alternatives aux carburants fossiles.
Depuis mars 2023, l’e-fuel a fait son apparition dans les discussions publiques en Europe. Ce carburant, encore peu connu du grand public, est présenté comme une solution propre pour les véhicules équipés de moteurs à combustion interne. Alors que plusieurs pays, dont l’Allemagne, ont réussi à imposer cette alternative lors des débats sur l’interdiction des véhicules thermiques en 2035, les lobbys pétroliers tentent déjà de réduire les contraintes réglementaires relatives à la production d’e-fuels.
Le bilan carbone de l’e-fuel remis en question
L’un des principaux axes de l’étude de T&E porte sur les émissions de CO2 des véhicules propulsés par l’e-fuel. Pour être éligibles à la dérogation européenne de 2035, les e-fuels doivent être neutres en carbone à 100%. Cependant, l’industrie pétrolière souhaite abaisser ce seuil à 70%. Une telle réduction aurait pour conséquence d’augmenter significativement les émissions de CO2 des véhicules utilisant ce carburant.
En effet, l’étude de T&E compare une voiture de taille moyenne (segment C) propulsée par de l’e-fuel et une voiture 100% électrique. Les résultats sont significatifs : si l’Europe acceptait un e-fuel neutre en carbone à seulement 70%, les émissions de CO2 d’un véhicule thermique seraient cinq fois plus élevées que celles d’un véhicule électrique, soit 61g de CO2/km pour l’e-fuel contre 13g de CO2/km pour le véhicule électrique.
La production d’e-fuel : un processus à surveiller
L’étude de T&E souligne que la production d’e-fuel doit respecter des normes strictes pour assurer une neutralité carbone. En effet, toute l’électricité utilisée dans le processus de production doit provenir à 100% de sources d’énergie renouvelable supplémentaire. De plus, le carbone utilisé doit également provenir à 100% de la capture directe de l’air (DAC) afin d’éviter toute émission supplémentaire de CO2 dans l’atmosphère.
Ces directives visent à garantir que les carburants de synthèse réduisent réellement les émissions de CO2 de 100%, comme promis. Si ces conditions ne sont pas respectées, la prétendue neutralité carbone de l’e-fuel ne serait qu’une illusion pour le grand public.
Le choix entre e-fuel et véhicules électriques
Le débat entre l’utilisation de l’e-fuel et des véhicules électriques est loin d’être clos. En effet, si l’e-fuel semble être une solution attrayante pour les véhicules équipés de moteurs à combustion interne, ses promesses de neutralité carbone sont mises en doute. D’autre part, les véhicules électriques, bien que plus respectueux de l’environnement en termes d’émissions de CO2, nécessitent une infrastructure de recharge adéquate et posent des questions quant à la production et au recyclage des batteries.
Cette controverse souligne l’importance de la transparence et de la rigueur dans la promotion des alternatives aux carburants fossiles. Il est essentiel que les consommateurs aient accès à des informations précises et fiables afin de pouvoir faire des choix éclairés en matière de mobilité durable.