Suzuki eVitara : une menace sérieuse pour les SUV électriques français ?

En bref:

  • Le Suzuki eVitara propose une gamme variée avec batterie Blade LFP sécurisée et robuste, mais souffre d’un poids élevé et d’une recharge rapide limitée à 90 kW.
  • Ses performances et équipements restent dans la moyenne du segment, tandis que son impact environnemental est mitigé : batteries plus vertueuses, mais fabrication en Inde.
  • Son succès face aux Peugeot e-2008 et Renault Mégane E-Tech dépendra principalement de son prix final et des coûts d’usage en France.

Sur un marché français déjà bien garni en SUV électriques compacts, Suzuki lance un nouveau joueur ambitieux : l’eVitara. Ce SUV électrique aux accents japonais vise clairement à empiéter sur le territoire des modèles phares français, tels que le Peugeot e-2008 ou la Renault Mégane E-Tech. Mais dispose-t-il réellement des atouts techniques, économiques et environnementaux pour s’imposer ? Décryptage approfondi.

Une gamme étendue et pragmatique

Suzuki n’y va pas par quatre chemins en proposant directement trois variantes de son SUV eVitara :

eVitara 49 kWh 2WD : 144 ch, autonomie WLTP de 346 km, poids de 1 702 kg
eVitara 61 kWh 2WD : 174 ch, autonomie WLTP jusqu’à 428 km, poids de 1 760-1 799 kg
eVitara 61 kWh 4WD (AllGrip-e) : 184 ch cumulés avec 2 moteurs (avant + arrière), autonomie WLTP entre 396 et 412 km, et un poids compris entre 1 860 et 1 899 kg

Les trois versions reposent sur une plateforme 100 % électrique baptisée Heartect-e. Bien que celle-ci constitue une véritable nouveauté pour Suzuki, elle se révèle cependant lourde en comparaison directe. À titre indicatif, la Peugeot e-2008 affiche 1 550 kg seulement. Ce surpoids risque d’impacter significativement le dynamisme, malgré un ratio poids-puissance plutôt correct de 10,1 kg/ch pour les versions 61 kWh.

Performances routières : dans la moyenne, sans briller

Côté performances pures, l’eVitara se situe dans la moyenne de la catégorie :

  • 0 à 100 km/h : en 9,6 secondes (49 kWh) jusqu’à 7,4 secondes pour l’AllGrip-e 4×4
  • Reprises 80-120 km/h : de 7,3 secondes à 5,5 secondes pour la version intégrale

Si ces valeurs permettent un confort routier correct pour une utilisation quotidienne, elles ne placent pas l’eVitara comme une sportive du segment. Suzuki privilégie manifestement une approche pragmatique et robuste plutôt que des performances décoiffantes.

Batterie Blade adoptée : la sécurité et la durabilité selon Suzuki

En partenariat avec BYD, Suzuki fait le choix de cellules Blade LFP (lithium-fer-phosphate) : une technologie réputée pour sa fiabilité accrue, son coût réduit, sa sécurité supérieure et surtout l’absence de cobalt, matériau controversé aux impacts sociaux et environnementaux négatifs avérés. Cette technologie est un véritable avantage sur le plan environnemental comparée à certaines cellules NMC encore largement utilisées par des concurrents français comme Peugeot ou Renault.

Toutefois, les performances de recharge rapide restent décevantes : plafonnées à seulement 90 kW de puissance maximale, elles nécessitent 45 minutes pour passer de 10 à 80 %. L’eVitara reste ainsi l’une des voitures électriques parmi les plus lentes à recharger sur autoroute. Ce handicap pourrait être rédhibitoire pour les acheteurs adeptes de longs trajets réguliers.

💡 Conseil d’expert : privilégiez l’option recharge à domicile ou sur borne publique en courant alternatif (chargeur intégré 11 kW), autrement plus efficace avec 4h30 à 5h30 pour un plein complet selon la version utilisée.

Technologies embarquées : limitées mais efficaces

À bord, l’eVitara propose des équipements utiles à défaut d’être révolutionnaires. On trouve notamment :

  • Une pompe à chaleur pour minimiser la consommation hivernale
  • Un préconditionnement manuel de la batterie (recharge rapide)
  • Un système de calcul précis de l’autonomie restante
  • Une connectivité moderne avec écran central 12 pouces (compatible Apple Carplay et Android Auto)

En revanche, le planificateur d’itinéraire intégré reste très limité : impossible d’optimiser intégralement un parcours long (il ne prévoit qu’un seul arrêt à la fois). Dommage sur un véhicule censé accélérer l’adoption de l’électrique pour un public large et exigeant.

Impact environnemental : avantage relatif pour Suzuki

Sur l’aspect écologique, l’eVitara présente des atouts incontestables mais nuancés :

  • Batteries LFP sans cobalt : positivement accueillies pour leur moindre impact écologique et leur sécurité accrue
  • Fabrication indienne : impact logistique plus élevé vers l’Europe, et réseau électrique indien davantage carboné comparé à la France, qui bénéficie d’un mix énergétique plus propre (nucléaire et renouvelables principalement)
  • Emissions globales probablement plus élevées à la fabrication que certains concurrents assemblés en Europe Occidentale, partiellement compensées par l’absence de cobalt dans ses batteries BYD

📌 A retenir toutefois l’approche ouverte vers le recyclage et le réemploi des matériaux mise en avant par Suzuki pour réduire durablement l’impact de sa chaîne de production.

Prix : une inconnue majeure à surveiller

Concernant les tarifs, Suzuki reste encore très discret, évoquant officieusement une fourchette allant de 31 000 euros à 39 000 euros, bonus inclus selon version et moteurs choisis. Ce positionnement, s’il se confirme, placerait l’eVitara de façon très compétitive face à ses homologues français comme le Peugeot e-2008 (à partir de 34 800 euros hors options selon tarifs au 8 mai 2025) ou la Renault Mégane E-Tech, légèrement plus chère mais plus performante et efficiente dans sa déclinaison 60 kWh.

Que penser face à la concurrence française ?

En résumé, le Suzuki eVitara coche clairement des cases essentielles pour séduire une clientèle pragmatique cherchant un SUV électrique urbain polyvalent et économique à l’usage. Sa robustesse présumée, ses technologies éprouvées et son aptitude au tout-chemin (version AllGrip-e 4×4 particulièrement originale sur ce segment) pourraient constituer des arguments de poids.

Cependant, face à des concurrents français aux prestations globales plus équilibrées comme l’e-2008 ou la Mégane E-Tech offrant une meilleure autonomie, recharge rapide optimisée et fabriqués en Europe avec une empreinte carbone potentiellement plus faible à la production, le défi reste de taille pour le SUV nippon.

Finalement, son attractivité dépendra fortement de sa politique de prix officielle à venir et surtout de ses coûts d’usage réels en conditions françaises, notamment en termes de maintenance et de durée de vie effective de ses batteries BYD Blade. Suzuki devra convaincre et rassurer une clientèle exigeante sur ce point essentiel à suivre attentivement lors du lancement estival en France.

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