En bref:
- La refonte du bonus écologique en France pour 2024 réduit les aides à l’achat de voitures électriques, limitant le montant à 4 000 euros pour les ménages à faible revenu, avec un budget total considérablement diminué.
- Cette situation pourrait profiter aux constructeurs chinois, dont les véhicules deviennent plus compétitifs face aux modèles européens en raison de l’écart de prix accru, malgré les droits de douane élevés qui entravent leur développement.
- La part de marché des véhicules électriques en France pourrait stagner en 2024, ce qui pose des défis pour la transition vers une mobilité électrique durable.
Le paysage de la mobilité électrique en France connaît actuellement une transformation majeure avec la refonte du bonus écologique pour 2024. Cette évolution réglementaire, combinée aux récentes mesures douanières européennes, redessine les contours de la compétition entre constructeurs chinois et européens sur le marché français. Analyse d’une situation complexe aux multiples répercussions.
Une refonte significative du bonus écologique
Le nouveau dispositif d’aide à l’achat introduit une modulation selon les revenus, marquant un tournant dans la politique de soutien à la mobilité électrique. Le montant maximum de 4 000 euros ne sera accessible qu’aux ménages dont le revenu fiscal de référence est inférieur à 16 300 euros par part. Pour les foyers se situant entre 16 300 et 26 200 euros par part, l’aide sera plafonnée à 3 000 euros, tandis que les autres bénéficieront d’un bonus limité à 2 000 euros.
Plus préoccupant encore, l’enveloppe globale destinée à ces aides subit une réduction drastique, passant à 700 millions d’euros, soit moins de la moitié du budget précédent. Cette limitation implique que le dispositif pourrait s’interrompre avant la fin de l’année 2024, une fois l’enveloppe épuisée.
L’effet paradoxal sur les constructeurs chinois
Un rééquilibrage inattendu de la compétition
Contrairement aux attentes, cette diminution du bonus pourrait paradoxalement profiter aux constructeurs chinois. En effet, l’écart de prix entre les modèles européens et chinois, jusqu’alors partiellement compensé par le bonus, devient plus visible pour le consommateur final. L’avantage compétitif des constructeurs chinois, reposant sur des coûts de production nettement inférieurs – estimés entre 10 000 et 30 000 euros par véhicule selon les analyses de Forvia – prend désormais toute son importance.
Une illustration par les prix
La comparaison des tarifs est édifiante. Prenons l’exemple de la MG4, proposée à 24 990 euros sans bonus, face à la Renault Mégane E-Tech affichée à 30 000 euros bonus déduit. Dans le segment des citadines, la mini-T03 de Leapmotor s’affiche à 18 990 euros, tandis que la nouvelle Citroën ë-C3, produite en Slovaquie, ne descendra pas sous la barre des 21 300 euros même avec le bonus de 2 000 euros.
Les défis persistants pour les constructeurs chinois
Impact des droits de douane européens
Les constructeurs chinois doivent néanmoins composer avec les nouvelles mesures protectionnistes européennes. Les droits de douane, oscillant entre 27% et 47%, constituent un obstacle significatif à leur développement sur le marché européen. Ces taux varient selon les constructeurs :
- 17% pour BYD
- 18,8% pour Geely
- 35,3% pour SAIC
- 20,7% pour les autres groupes ayant participé à l’enquête européenne
Le défi de la production locale
Face à ces contraintes, certains constructeurs chinois envisagent d’établir des sites de production en Europe. Cette stratégie, déjà adoptée par BYD qui prévoit une usine en Hongrie, pourrait leur permettre de contourner les droits de douane tout en bénéficiant du label "Made in EU".
Les perspectives pour le marché français
Un contexte réglementaire en mutation
Au-delà du bonus écologique, d’autres évolutions réglementaires pourraient impacter le marché. L’URSSAF prévoit de considérer la recharge gratuite sur le lieu de travail comme un avantage en nature dès 2025, tandis que l’abattement fiscal de 50% sur les véhicules électriques de fonction pourrait disparaître.
L’impact sur les ventes
La part de marché des véhicules électriques en France, actuellement à 17% des immatriculations neuves, pourrait stagner en 2024. Cette situation contraste avec les prévisions initiales qui anticipaient une croissance continue. La complexification des aides et l’instabilité réglementaire créent un climat d’incertitude peu favorable à la transition électrique.
La redistribution des cartes sur le marché français des véhicules électriques s’annonce comme un défi majeur pour l’ensemble des acteurs. Si la réduction du bonus écologique pourrait paradoxalement renforcer la position des constructeurs chinois, l’équation reste complexe entre protection du marché européen et nécessité d’accélérer la transition électrique.