Author Archives: Cédric

2035 vacille et la “jetabilité” inquiète: l’Europe face au vrai risque de la voiture électrique

En bref:

  • Berlin cherche à assouplir l’interdiction de vente de thermiques dès 2035, mais cela masque une crise industrielle : un délai politique n’efface pas le déficit de compétitivité face aux VE chinois.
  • La "jetabilité" vise la chute des valeurs résiduelles et des cycles de remplacement (pas la panne rapide des batteries) ; si elle se généralise, elle alourdit l’empreinte climatique, fragilise le leasing et l’emploi en Europe.
  • Pour éviter cela, il faut éco‑conception et réparabilité, passeport/garanties batterie, support logiciel long, remanufacturing et production locale de cellules ; les e‑fuels restent une solution de niche.

La remise en cause de l’échéance 2035 par Berlin s’entrechoque avec une autre inquiétude: la crainte d’un modèle de voiture électrique à durée de vie écourtée, “à la smartphone”. Derrière l’agitation politique, la question déterminante est moins 2035 en soi que la capacité de l’Europe à bâtir une filière durable — techniquement, économiquement et écologiquement.

Voici ce que change (vraiment) la pression allemande, et ce qu’impliquerait l’émergence d’une voiture électrique “jetable” pour l’industrie européenne.

2035 sous pression: symptôme d’une crise industrielle, pas son remède

  • Le chancelier allemand Friedrich Merz a demandé début octobre de lever l’interdiction européenne de vendre des voitures thermiques neuves à partir de 2035. Un “sommet de crise” avec les acteurs du secteur a suivi le 9 octobre.
  • Les raisons invoquées: compétitivité amoindrie face aux modèles chinois, demande plus faible que prévu, coûts énergétiques élevés, et pertes d’emplois dans une filière clef.
  • Bruxelles devait de toute façon réexaminer le dispositif en 2026; Berlin pousse à accélérer et à assouplir (prolongation de certains hybrides rechargeables, prise en compte de prolongateurs d’autonomie, etc.). Les Verts et une partie du SPD restent opposés.
  • L’exception e‑fuels, déjà arrachée en 2023 pour des niches (véhicules fonctionnant exclusivement aux carburants synthétiques), ne constitue pas une solution de masse à court terme: coûts élevés, rendements énergétiques faibles, priorisation probable pour l’aviation et le maritime.

📌 À retenir

  • Un assouplissement de 2035 peut offrir un répit politique, pas une stratégie industrielle. Sans gains rapides sur le coût, la qualité, le logiciel et l’écosystème après‑vente des VE, l’écart avec la Chine ne se comble pas.

La voiture électrique “jetable”: un risque réel… mais surtout de marché

La thèse de la “jetabilité” ne signifie pas que les VE meurent vite; elle pointe un raccourcissement des cycles de possession, sous l’effet d’une innovation très rapide et d’une crainte sur la valeur résiduelle.

  • Cycle de possession: des analyses récentes indiquent que les VE restent en moyenne 3 à 4 ans chez leur premier propriétaire, bien moins que les thermiques (plus de 13 ans en moyenne aux États‑Unis). Effet “early adopters”, nouveautés fréquentes et autonomies en hausse expliquent une partie du phénomène.
  • Valeur résiduelle volatile: les baisses de prix de certains constructeurs, l’arrivée de nouvelles chimies (LFP, LMFP) et d’architectures de batteries, ou encore des logiciels en progression rapide, bousculent les marchés de l’occasion.
  • Perception vs physique: la plupart des batteries actuelles (Li‑ion) tiennent 8 à 15 ans, avec 300 000 à 450 000 km possibles en usage standard; garanties constructeur souvent 8 ans/160 000 km. La dégradation annuelle typique tourne autour de 2 à 3 %. On est loin d’un produit “jetable”… si le marché accepte de faire durer.

✅ Faits techniques clefs sur la longévité des VE

  • Durée de vie batterie: 8–15 ans typiques; cas réels au‑delà selon usage et gestion thermique.
  • Dégradation: ~2–3 %/an en moyenne; pertes de 10–20 % après 8 ans considérées normales.
  • Progrès attendus: meilleure gestion thermique, chimies LFP/LMFP robustes, BMS plus fins, recyclage et seconde vie.

Pourquoi la “jetabilité” deviendrait un problème systémique pour l’Europe

Si les cycles de remplacement s’accélèrent et si la valeur d’occasion s’érode, la filière européenne encaisse double peine.

  • Empreinte industrielle et climat: produire plus souvent des voitures “obsolètes” alourdit l’empreinte amont, met sous tension les matières critiques et complique l’atteinte des objectifs climatiques.
  • Modèle économique: des valeurs résiduelles instables renchérissent les loyers de leasing, clés pour l’adoption. Les acteurs européens, déjà sous pression coûts, perdent en compétitivité.
  • Service et emplois: une économie de reconditionnement et de réparation mal structurée prive le continent d’un levier industriel (réemploi, remanufacturing, pièces reconditionnées).
  • Acceptabilité sociale: si les ménages estiment “qu’un VE ne dure pas”, ils se replient sur le thermique ou retardent l’achat — alimentant la crise des volumes.

Deux trajectoires possibles

  • Trajectoire “jetable”

    • Mise à jour rapide des modèles sans politique d’upgrade.
    • Packs structurels peu réparables, batteries scellées.
    • Opacité sur l’état de santé (SoH), anxiété sur l’occasion.
    • Leasing cher, adoption qui plafonne, dépendance accrue aux importations.
  • Trajectoire “durable”

    • Éco‑conception pour démontage/repair, modules échangeables.
    • Transparence SoH via passeport batterie, marché de l’occasion fluidifié.
    • Réseaux de reconditionnement paneuropéens, pièces remanufacturées.
    • Valeurs résiduelles stabilisées, TCO en baisse, adoption de masse.

2035 assoupli: ce que cela changerait… et ce que cela ne règle pas

ℹ️ Ce que pourrait apporter un assouplissement

  • Une marge de manœuvre politique dans certains pays et segments professionnels.
  • Un maintien temporaire d’emplois sur la chaîne thermique/hybride.
  • Un lissage de l’investissement pour certains constructeurs.

🚫 Ce que cela ne règle pas

  • La compétitivité face aux VE chinois sur prix/qualité/logiciel.
  • La dépendance aux chaînes d’approvisionnement asiatiques.
  • La “jetabilité” perçue des VE, qui relève de la conception produit, du service et du marché de l’occasion — pas du calendrier réglementaire.
  • L’efficacité climatique: prolonger des PHEV mal utilisés n’apporte pas les réductions attendues en usage réel.

Levier par levier: comment éviter une voiture électrique “jetable”

  1. Éco‑conception et réparabilité
  • Standardiser modules, connecteurs et interfaces HV; proscrire les packs irréparables.
  • Rendre obligatoires les procédures d’extraction/remplacement de modules par des réseaux indépendants certifiés.
  1. Transparence et confiance
  • Généraliser le passeport batterie avec SoH certifié, accessible à la revente.
  • Afficher des garanties étendues sur batterie et logiciel (10–12 ans), avec seuils de capacité contractuels.
  1. Software et “droit à durer”
  • Imposer un minimum de support logiciel et sécurité de 12–15 ans, mise à disposition des pièces électroniques clés.
  • Encadrer les fonctionnalités sous abonnement pour éviter la dévalorisation artificielle des véhicules d’occasion.
  1. Économie circulaire industrialisée
  • Soutenir des centres de reconditionnement batterie/power electronics dans chaque grand bassin automobile.
  • TVA réduite sur packs remanufacturés et pièces reconditionnées; bonus‑malus intégrant la réparabilité.
  1. Marché de l’occasion robuste
  1. Coûts et compétitivité
  • Accélérer la baisse du coût pack via LFP/LMFP locales, cathodes moins critiques, intégration verticale cell‑to‑pack.
  • Énergie industrielle compétitive et décarbonée pour la production européenne.
  1. Infrastructures et usages

📊 Chiffres clés à surveiller (baromètre “durabilité VE”)

  • Taux moyen de dégradation batterie à 5 et 8 ans (SoH).
  • Valeur résiduelle VE à 36/48/60 mois vs thermique équivalent.
  • Part de packs remanufacturés dans les réparations HV.
  • Durée moyenne de possession 1er/2e propriétaire.
  • Part des VE d’occasion avec passeport batterie consulté.

Et les e‑fuels dans tout ça ?

  • Utile pour des niches (collection, luxe, certains usages professionnels) et des secteurs difficiles à électrifier (aviation, maritime).
  • Peu crédible en volume pour le parc auto de masse à horizon 2035–2040, pour des raisons de coût et d’efficacité énergétique.
  • Ne répond pas au cœur du sujet: faire durer les VE produits, stabiliser leur valeur, structurer l’après‑vente.

Bon à savoir

  • La plupart des VE ne seront pas “à jeter” au bout de 8 ans: le plus souvent, on roule simplement avec 10–20 % d’autonomie en moins.
  • Une seconde vie stationnaire des batteries, puis le recyclage avec objectifs de récupération de métaux critiques, font partie du cadre européen déjà en place.

Conseils d’expert: comment “faire durer” son VE (et sa valeur)

  • Privilégier les chimies LFP si vos usages le permettent (robustes, tolérantes aux charges hautes).
  • Charger majoritairement en AC, garder une plage 20–80 % au quotidien; réserver la charge 100 % aux longs trajets.
  • Mettre à jour le BMS, pré‑conditionner la batterie avant recharge rapide, éviter les stationnements prolongés à forte chaleur.
  • Exiger et conserver l’historique SoH et les rapports de diagnostic à chaque entretien.
  • À l’achat d’occasion: demander le passeport batterie, vérifier la garantie restante et la réparabilité du pack.

En filigrane de la bataille de 2035 se joue donc l’essentiel: prouver que l’Europe sait produire des voitures électriques qui durent, se réparent, se revalorisent — bref, tout sauf “jetables”. Sans cela, l’assouplissement du calendrier ne ferait que retarder le problème, pas le résoudre.

Ferrari Elettrica face au coup de froid BMW: le grand écart du luxe européen peut-il durer ?

En bref:

  • Ferrari a dévoilé l’âme technologique de la Elettrica : architecture 800–880 V, batterie 122 kWh, 4 moteurs >1 000 ch, focalisation sur l’ingénierie et le positionnement ultra‑luxe à faible volume.
  • BMW abaisse ses objectifs 2025 à cause d’un recul en Chine et de tensions de trésorerie; la « Neue Klasse » 2026 doit industrialiser l’électrique/logiciel pour rétablir marges et volumes — deux stratégies européennes divergentes face à la transition.

L’Europe de l’auto de luxe vit un moment de vérité. D’un côté, BMW abaisse ses prévisions et subit la pression d’un marché chinois devenu brutal. De l’autre, Ferrari dévoile, à Maranello, le cœur technologique de sa première voiture 100% électrique, un manifeste d’ingénierie à quatre moteurs et 122 kWh. Deux actualités, deux philosophies. Et une même question: la fuite vers l’ultra-luxe et la très haute performance est-elle la voie de survie d’une automobile européenne d’exception en pleine transition ?

Ce que Ferrari a vraiment dévoilé à Maranello

Ferrari n’a pas montré la carrosserie. Mais l’essentiel y était: châssis, architecture, moteurs, onduleurs, batteries et logistique industrielle. La Elettrica (nom provisoire) sera un modèle à quatre portes et quatre places, « de grande série » à l’échelle de Ferrari. Le design final et les prix arriveront en 2026, via un dévoilement en trois temps. Le PDG Benedetto Vigna, physicien de formation, assume une stratégie: posséder la technologie clé, de la batterie aux moteurs, pour imprimer la signature Ferrari à l’ère électrique.

📌 À retenir – Ferrari Elettrica (premiers éléments officiels)

  • Plateforme 800–880 V, batterie NMC en pochettes (fournisseur SK), 122 kWh brut
  • Autonomie annoncée: >530 km
  • 4 moteurs (deux par essieu), puissance cumulée >1 000 ch en mode boost
  • 0 à 100 km/h: 2,5 s; Vmax: 310 km/h
  • Masse cible: ~2 300 kg; répartition 47/53
  • Recharge DC: jusqu’à 350 kW
  • Direction arrière indépendante (jusqu’à 2,15°) et suspensions actives de 3e génération
  • Essieu avant débrayable: bascule RWD/AWD en 0,5 s

L’ingénierie, pas le simple assemblage

  • Batterie et pack: cellules NMC SK achetées, modules et pack conçus et industrialisés en interne. Packaging pensé pour la sécurité et l’inertie (85% du poids des modules sous plancher, le reste sous la banquette), modules remplaçables pour prolonger la durée de vie du véhicule — une approche de « VE pour longtemps ».
  • Machines électriques: rotors à aimants permanents en configuration type Halbach (héritage compétition) pour maximiser la densité de couple; stators en tôles 0,2 mm et bobinages Litz pour réduire les pertes à haute fréquence. Vitesse de rotation jusqu’à 30 000 tr/min à l’avant et 25 500 tr/min à l’arrière.
  • Inverseurs SiC maison: 93% d’efficacité à charge max, 9 kg seulement, fréquence de découpage pilotée (10 à 42 kHz) pour concilier rendement, acoustique et thermique.
  • Châssis et liaisons: suspensions actives (capteurs à 1 ms, action à 5 ms), sous-châssis arrière isolé pour filtrer vibrations, direction arrière indépendante. Un cerveau central orchestre couple, direction et amortissement roue par roue.

💡 Astuce d’ingénierie
Entre des moteurs indépendants, une direction aux quatre roues et une suspension pilotée, Ferrari se donne les moyens d’un contrôle « 6D » de la dynamique: propulsion/freinage, braquage et débattement, à chaque roue. Si l’intégration logicielle est au niveau, l’expérience de conduite pourrait être une référence, électrique ou pas.

Côté expérience, Ferrari préserve des codes maison: manettino évolué, modes de conduite du feutré au radical, et un travail assumé sur le son et le « rétrogradage » simulé, ici utilisés comme retours d’information au conducteur plus que comme gadget nostalgique.

🛠️ Industriellement, la Elettrica sortira du nouvel « E-Building » de Maranello. Le design a été mené avec LoveFrom (Marc Newson et Jony Ive). Un pari esthétique audacieux, attendu en 2026.

Pendant ce temps, BMW sonne l’alarme

Mercredi 8 octobre, BMW a abaissé ses objectifs 2025:

  • Marge opérationnelle automobile révisée à 5–6% (contre 5–7%)
  • ROCE groupe ramené à 8–10% (9–13% auparavant)
  • Résultat opérationnel attendu en légère baisse (vs stabilité visée)
  • Cash-flow libre annuel divisé par deux: 2,5 Md€ (décalage des remboursements de surtaxes douanières et dégradation opérationnelle >1,5 Md€ pointée par des analystes)

Deux causes majeures:

  • Volumes inférieurs aux attentes en Chine; concurrence locale féroce sur l’électrique, marché immobilier en difficulté et pression sur le financement. BMW prévoit d’achever le redimensionnement de son réseau de concessionnaires locaux d’ici fin S1 2026.
  • Hypothèses douanières non concrétisées, repoussant à 2026 des remboursements attendus en 2025.

Réaction de marché: l’action a cédé ~7% à Francfort, entrainant les pairs. Les analystes restent partagés: prudents à court terme (Chine), mais confiants sur l’enjeu stratégique de la « Neue Klasse », nouvelle architecture logicielle et électrique dont les premières livraisons (iX3 nouvelle génération notamment) sont attendues au T1 2026.

📢 Ce qu’en disent les brokers

  • Oddo BHF: message prudent déjà perceptible à l’IAA; surprise sur l’ampleur du trou de cash, au-delà du seul timing douanier.
  • UBS: point noir durable, la Chine; stabilisation via réseau attendue d’ici mi-2026, mais volumes sous pression.
  • Bernstein: l’implémentation douanière échappe à BMW; « Neue Klasse » jugée clé pour briser la pression sur les valorisations des constructeurs traditionnels.

Deux Europe du luxe auto, deux tempos de l’électrique

  • Ferrari choisit la rareté maîtrisée et la haute technicité. La marque vise un mix 2030 équilibré (thermique/hybride/100% électrique) et positionne sa première EV comme un objet d’ingénierie total, au prix de « plusieurs centaines de milliers d’euros ». Son modèle économique — faible volume, forte marge, carnet rempli — la met à l’abri des guerres de prix et des cycles régionaux.
  • BMW incarne le « premium de volume » global confronté à la normalisation des marges, au prix de l’électrification de masse, à la compétition chinoise sur le VE connecté et à la contrainte logicielle. Sa réponse est systémique: plateforme, logiciel, batteries de nouvelle génération, industrialisation à coûts cibles. Le passage 2025–2026 sera la zone de turbulence.

📊 Éclairage express

SujetFerrari ElettricaBMW 2025
Cœur de newsTech reveal châssis/groupe motopropulseurAvertissement sur résultats
Capex/TechMoteurs et inverseurs maison, pack batterie interne, 800–880 VPlateforme Neue Klasse SDV/BEV (lancement 2026)
MarchéUltra-luxe, faible volume, pricing powerPremium global, volumes en Chine sous pression
RisquesPoids/complexité, design à confirmer, fenêtre 2026Transition 2025–2026, exécution Chine/logiciel, cash-flow

La fuite vers l’ultra-luxe: plan de survie ou impasse polie ?

  • Atouts

    • Pricing power et files d’attente soutiennent les marges malgré la hausse des coûts des packs hautes capacités.
    • Vitrine technologique: contrôle logiciel fin (couple/roue, 4WS, suspension active) et 800+ V deviennent des standards du haut de gamme, avec retombées potentielles sur des VE plus accessibles.
    • Image: le fait que Ferrari assume une EV halo crédibilise l’électrique jusque chez les passionnés.
  • Limites

    • Non-scalable par définition: l’ultra-luxe ne résout pas l’équation de l’électrification de masse ni la bataille des coûts.
    • Empreinte matérielle: 122 kWh et quatre moteurs, c’est performant mais matériellement intensif; le « mieux avec moins » restera le juge de paix environnemental.
    • Risque d’exécution: intégration logicielle multi-axes, gestion thermique et répétabilité des performances sont des défis de production, pas seulement de R&D.

Pour les « premiums » allemands, la vraie alternative durable passe par:

  • Des plateformes BEV efficientes et mutualisées (dense en logiciel, sobres en coûts)
  • Une localisation/coopération renforcée en Chine (logiciel et UX au niveau des attentes locales)
  • Une discipline prix/valeur pour éviter la spirale des remises sur VE
  • Des revenus logiciels/services crédibles, pas accessoires

Contexte: une crise qui ne touche pas tout le monde pareil

  • 2024–2025: fortes baisses de bénéfices chez Mercedes et Porsche, volumes et marges sous pression, notamment en Chine; recul du marché BEV européen en 2025 (-11%) et environnement réglementaire incertain.
  • Ferrari fait figure d’exception résiliente, avec un mix produit/marge qui amortit les chocs conjoncturels.

🎯 À retenir

  • Ferrari montre une EV d’ingénieurs: 4 moteurs, SiC, pack maison, contrôle dynamique total — une proposition de conduite qui peut marquer l’ère électrique.
  • BMW paie la note de 2025 avant son reboot « Neue Klasse » en 2026; la Chine reste la variable critique.
  • L’ultra-luxe n’est pas une stratégie de secteur, mais une niche à très forte valeur qui peut tracter l’image du VE sans résoudre l’équation de coûts du marché de masse.

En creux, cette double actualité dit la même chose: l’électrique n’est plus un label, c’est une architecture industrielle et logicielle. Ferrari la pousse au sommet pour séduire, BMW doit l’industrialiser pour survivre. La décennie décidera lesquels y parviennent vraiment.

Ferrari Elettrica: techno flamboyante, bourse glaciale. Décryptage d’un grand écart

En bref:

  • Ferrari présente l’Elettrica : pack 122 kWh (880 V, recharge 350 kW), 4 moteurs >1 000 ch, intégration verticale (batterie/moteurs/onduleurs) pour préserver l’ADN dynamique malgré ~2,3 t.
  • La Bourse punit la prudence stratégique : mix VE limité à 20% en 2030, prix/volumes et endurance inconnus — message d’exclusivité et CAPEX élevé pèse sur les perspectives financières.

Ferrari a levé le voile sur les entrailles de sa première 100% électrique, l’Elettrica. Un concentré d’ingénierie maison qui veut traduire l’ADN de Maranello à l’ère des électrons. Et pourtant, l’action RACE a décroché. Pourquoi les marchés ont-ils sanctionné ce qui ressemble, sur le papier, à une démonstration technologique ?

Plongeons dans la technique, puis dans la finance. Car c’est bien l’écart entre les deux qui raconte l’instant Ferrari.

Ce que Ferrari a réellement montré

Pas de carrosserie, pas de prix. Ferrari a choisi une « présentation en 3 temps »: le cœur techno aujourd’hui, davantage de détails et la grille tarifaire en 2026, le dévoilement complet juste avant les premières livraisons (attendues en 2026). En revanche, le fond est là.

📌 À retenir (spécifications-clés communiquées)

  • Batterie: 122 kWh, architecture 880 V, recharge DC jusqu’à 350 kW
  • Autonomie visée: > 530 km
  • Chaîne de traction: 4 moteurs (un par roue), > 1 000 ch en mode boost
  • 0 à 100 km/h: 2,5 s • Vitesse max: 310 km/h
  • Masse: ~2 300 kg • Répartition: 47/53
  • Transmission: désaccouplement de l’essieu avant pour passer AWD → RWD en 0,5 s
  • Dimensions: empattement 2 960 mm • 4 portes (Ferrari confirme: ce n’est pas une supercar)

Une électrification « made in Maranello »

Ferrari internalise l’essentiel:

  • Pack et modules batterie conçus et assemblés en interne (cellules NMC SK fournies par un partenaire). Modules pensés pour être remplaçables et réparables: l’idée d’un « EV pour durer ».
  • E-axles compacts et très denses, avec rotors à aimants permanents en configuration Halbach (gain de densité de couple, masse réduite), tôles de stator ultra-minces et bobinages Litz pour limiter les pertes à haute fréquence.
  • Onduleurs en carbure de silicium (SiC), rendement annoncé jusqu’à 93% à pleine charge, fréquence de découpage pilotée (10 à 42 kHz) pour arbitrer rendement, acoustique et thermique.
  • Contrôle-commande centralisé: gestion synchronisée du couple (4 moteurs), de la suspension active et des roues arrière directrices (jusqu’à 2,15°).

🔧 Suspension: troisième génération d’amortissement actif (vue sur Purosangue et F80), capteurs à 1 ms de latence et action en 5 ms. Sous-cadre arrière séparé pour filtrer vibrations et bruits non masqués par un moteur thermique.

💡 Conseil d’expert
À ce niveau de performance, la clé ne tient pas au « chiffre de puissance » mais à la capacité à la répéter, gérer la chaleur et maintenir la précision du châssis. L’intégration verticale (moteurs/ondulateurs/gestion thermique) est plus déterminante que la course aux chevaux.

Batterie: pack, packaging et promesse dynamique

  • 210 cellules (15 modules de 14), densité pack annoncée à 195 Wh/kg (cellule à 305 Wh/kg).
  • Placement des masses optimisé: 85% du poids des modules sous le plancher, le reste à l’arrière afin de raccourcir l’empattement et réduire l’inertie de lacet.
  • Objectif déclaré: maximiser l’agilité et la « sensation Ferrari » malgré plus de 2,3 t.

✅ En bref

  • Architecture 880 V et 350 kW: compatible avec des courbes de charge rapides, sous réserve du maintien de la puissance sur la durée (refroidissement pack/prises/inverters).
  • Quadri-moteur + roues arrière directrices + suspension active: potentiel de vectorisation « total » (longitudinal, latéral, vertical) pour une finesse de contrôle rarement vue en grande série.

Ce qui manque encore (et ce qui inquiète)

  • Design et aérodynamique: invisibles à ce stade. On sait que l’auto aura 4 portes et sera « produite en volume… à l’échelle Ferrari ».
  • Prix: absent. Étant donné le positionnement, on peut raisonnablement viser très au-delà de 300 000 €, mais rien d’officiel.
  • Données d’endurance et de piste: maintien des performances après plusieurs tours, gestion thermique, « repeatability » des launches… tout reste à vérifier.
  • Sonorité: Ferrari travaille un « langage sonore » spécifique à l’EV. Prometteur pour l’émotion, mais non détaillé.

ℹ️ Bon à savoir
Ferrari a inauguré son « e-building » à Maranello: batteries HV, e-axles et onduleurs y sont produits. L’industriel investit aussi pour réduire ses émissions directes (solaire, fermeture d’une centrale gaz), ce qui compte dans la trajectoire climat sans tout miser sur la part de VE.

Pourquoi l’action a décroché malgré la vitrine techno

La sanction boursière ne vise pas la techno en tant que telle, mais le plan 2030 et la trajectoire produits/finances.

📉 Ce que disent les marchés

  • Objectifs 2030 jugés timides: 9 Md€ de revenus (sous le consensus), révision de la part de VE à 20% en 2030 (contre 40% visés en 2022), le reste se partageant entre thermiques (40%) et hybrides (40%).
  • Réaction: jusqu’à -16/-17% en séance à Milan; autour de -10% côté US en pré-marché selon les premières cotations.
  • Message de la direction: privilégier l’exécution et l’exclusivité plutôt que courir après le volume. « Nous ne pouvons pas nous engager sur quelque chose que nous ne pouvons pas atteindre », a rappelé Benedetto Vigna.

En clair, Ferrari rassure le puriste (ADN, rareté, hybrides performants) mais refroidit l’investisseur qui espérait une accélération électrique génératrice de nouveaux relais de croissance. La très probable addition CAPEX + R&D EV, face à des volumes volontairement contraints, comprime l’upside à court/moyen terme, surtout si le deuxième EV n’arrive pas avant 2028.

🧭 À lire entre les lignes

  • Ferrari protège sa marge via les séries limitées et la personnalisation; la montée en VE sera mesurée pour ne pas diluer l’exclusivité.
  • L’Elettrica est un « statement » technologique plus qu’un pivot de mix à court terme.
  • Le marché doute de la profondeur de la demande pour des EV ultra-haut de gamme, là où d’autres (Porsche, Lamborghini) ont déjà ajusté le tempo.

Elettrica face au segment: prouesse technique, pari émotionnel

  • Performance: les chiffres sont dans la cible des GT électriques extrêmes, mais Ferrari met l’accent sur l’agilité et la sensation de conduite plutôt que sur la seule cavalerie.
  • Intégration verticale: le choix de tout faire ou presque en interne (moteurs, onduleurs, pack) est cohérent avec l’obsession de la réponse châssis et de l’agrément. C’est coûteux, mais différenciant.
  • Expérience: vectorisation fine, roues AR directrices et suspensions actives augurent d’une signature dynamique très lisible… si la calibration est au niveau.
  • Image/ADN: le son, la direction, la pédale de frein, la progressivité du couple seront déterminants pour convaincre la base historique.

📢 Citation
« Je pense que les gens attendaient un chiffre d’affaires plus élevé — mais il est important d’exécuter ce que nous disons; nous ne pouvons pas nous engager sur quelque chose que nous ne pouvons pas atteindre », a insisté Benedetto Vigna durant la présentation à Maranello.

Les zones de risque à surveiller d’ici 2026

  • Courbe de charge réelle et préconditionnement: les 350 kW annoncés seront-ils maintenus sur une large plage de SOC et par température élevée ?
  • Gestion thermique piste: puissance répétable, fade des freins, stabilité du pack après plusieurs cycles intenses.
  • Calibration du « torque vectoring »: promesse de précision vs ressenti naturel au volant.
  • Masse et pneus: usure, coût d’usage, compromis confort/bruit, en particulier avec 4 moteurs.
  • Prix et allocations: positionnement tarifaire et rareté réelle, qui conditionneront l’élasticité de la demande.
  • Mix produit Ferrari: l’effet d’éviction potentiel sur des V12/V8 emblématiques et sur la marge unitaire.

Bilan provisoire

  • Techniquement, l’Elettrica coche les cases d’un EV d’exception et assume des choix coûteux mais cohérents avec l’ADN Ferrari: contrôle fin des mouvements, vectorisation exhaustive, composants maison, pack réparable.
  • Stratégiquement, Ferrari temporise: 20% d’EV en 2030, priorité aux hybrides et à l’exclusivité. Le message plaît aux clients historiques, moins aux analystes en quête d’un catalyseur de croissance plus visible.
  • Marché du luxe électrique: validation que même une icône avance « à pas comptés ». Le signal envoyé à la concurrence est clair: l’innovation doit coexister avec l’expérience traditionnelle — quitte à décevoir la Bourse à court terme.

Au fond, Ferrari n’a pas raté sa copie technique; elle a simplement choisi de ne pas promettre un futur qu’elle ne contrôle pas. Les investisseurs ont entendu la prudence plus que la performance. Reste à voir si, volant en mains en 2026, l’Elettrica saura faire taire le marché par ce que Ferrari sait encore le mieux faire: l’émotion.

Bolt à 30 000 $ : la vraie menace pour Tesla… et pour la Renault 5 ?

En bref:

  • Chevrolet relance la Bolt 2027 à ~29 000 $ avec batterie LFP ~65 kWh, 255 miles EPA, 150 kW et port NACS — une vraie offre <30 000 $ qui met la pression sur l’entrée de gamme Tesla (Model 3/Y « Standard » plus spartiales mais plus chères).
  • En Europe, le signal redéfinit l’« abordable » : la Renault 5 et l’ë‑C3 jouent la carte 20–33 k€ avec LFP/LMFP et charge modérée ; la victoire se jouera sur fiche technique réelle, disponibilité et coût total d’usage.

La guerre des prix des voitures électriques s’intensifie aux États‑Unis. D’un côté, Tesla dégraisse ses Model 3 et Model Y pour afficher de nouveaux prix d’appel. De l’autre, Chevrolet relance sa Bolt en 2027 à moins de 30 000 $, avec une fiche technique enfin à la hauteur des usages réels. Au-delà du duel américain, c’est le baromètre de ce que “abordable” veut dire en électrique — et ce signal va forcément résonner en Europe, où arrivent Renault 5 et ë‑C3.

Ce que change la nouvelle Chevrolet Bolt (2027)

Chevrolet a levé le voile, lors d’un événement propriétaire, sur une Bolt profondément mise à jour, positionnée agressivement.

  • Prix annoncé: 28 995 $ (LT), 29 990 $ pour la Launch Edition (frais inclus selon les participants)
  • Batterie et chimie: pack LFP d’environ 65 kWh (longévité, coût maîtrisé)
  • Autonomie: 255 miles (estimation GM)
  • Recharge DC: 150 kW (10 à 80 % en 26 min, environ 3× plus rapide que l’ancienne)
  • Port de charge: NACS (compatibilité native avec le réseau Supercharger)
  • Groupe motopropulseur: 210 ch (moteur issu de l’Equinox EV), traction
  • Équipement: combiné 11", écran central 11,3", Super Cruise en option
  • Industrialisation: fabrication à Fairfax (Kansas) dès le début de l’année prochaine
  • Détails stratégiques: cellules LFP importées de Chine au lancement, bascule prévue vers un sourcing domestique

Points faibles assumés: style très évolutif (pas de rupture), ergonomie Chevrolet (sans Apple CarPlay/Android Auto sur les derniers modèles GM), et incertitude initiale sur l’éligibilité au crédit d’impôt fédéral (batteries LFP importées).

Tesla “abordable” : des Model 3/Y Standard plus spartiales mais toujours efficaces

Tesla a dégainé des versions “Standard” de la Model 3 et du Model Y qui jouent la carte du coût de production minimal, sans changer d’architecture.

  • Model 3 Standard: à partir de 36 990 $ (hors frais), 321 miles EPA, 0‑60 mph en 5,8 s, batterie ~69 kWh, recharge jusqu’à 225 kW
  • Model Y Standard: à partir de 39 990 $ (hors frais), 321 miles EPA, 0‑60 mph en 6,8 s, 225 kW
  • Décontenting: sièges, volant et rétros à réglages majoritairement manuels, pas de sièges arrière chauffants, moins de coloris, retrait de l’écran arrière et d’Autosteer en série, équipements simplifiés
  • Logiciel et réseau: expérience Tesla et Superchargeur préservées, FSD (Supervised) en option
  • Disponibilités: premières livraisons annoncées fin 2025–début 2026 aux États‑Unis

La proposition de valeur reste solide côté efficacité/logiciel/réseau, mais l’effort prix ne gomme pas l’écart face à la Bolt annoncée.

Deux philosophies de “bas coût” diamétralement opposées

  • Chevrolet compacte ses coûts “hard” (chimie LFP, plateforme connue, cockpit rationalisé), sécurise l’usage (150 kW, NACS), et cible un ticket d’entrée visible “< 30 000 $”.
  • Tesla taille dans les équipements “soft” (finition, fonctions, confort), mais garde la promesse cœur de marque: efficience, charge rapide, écosystème logiciel.

Sur le papier, Chevrolet gagne la bataille du ticket d’entrée. Tesla garde l’avantage perçu sur l’expérience globale et la valeur de revente. Reste l’arbitrage final des ménages: prix facial vs. agrément et écosystème.

📌 À retenir

  • Bolt 2027: la seule “vraie” nouveauté sous 30 000 $ avec 150 kW et NACS.
  • Tesla: baisse l’accès, pas la plateforme — bien plus cher, mais réseau et software en prime.
  • Crédit d’impôt US: volatil selon l’origine des cellules et composants. À surveiller pour le prix “réel”.

Et l’Europe dans tout ça ? Le miroir déformant

La référence américaine bouscule l’idée d’“abordable”, mais les marchés diffèrent: TVA, coûts logistiques, normes, et incitations varient. La Bolt n’est pas annoncée en Europe. En revanche, le signal prix/produit impacte directement la façon dont on jugera les citadines électriques du Vieux Continent.

  • Renault 5 E‑Tech
    • À partir de 24 990 € prix catalogue (finition Five, 40 kWh, 95 ch), hors bonus
    • Versions 52 kWh dès 33 490 € (410 km WLTP annoncés selon versions)
  • Citroën ë‑C3
    • Lancement autour de 23 300 € selon versions, avec une déclinaison annoncée “sous 20 000 €” à l’horizon 2025
  • Dacia Spring et MG4 maintiennent une pression prix constante sous les 25–30 k€

En clair, l’“abordable” s’ancre désormais sous 25 000 € en segment B européen (bonus non déduit), et sous 30 000 € en segment C simplifié. C’est précisément l’espace que Chevrolet vise aux États‑Unis, mais transposé une taille au-dessus.

📢 Esprit critique

  • Comparer “30 000 $ US” et “25 000 € EU” demande prudence: taxes, livraisons, équipements et standards de sécurité ne sont pas identiques.
  • L’atout NACS qui change la donne en Amérique n’existe pas en Europe (CCS2 reste la norme).
  • LFP séduit par le coût et la durabilité, mais impose des packs plus lourds et de moindres performances à froid: calibrage-climat à surveiller pour nos latitudes.

Où se joue la menace pour Tesla… et pour Renault 5 ?

  • Pour Tesla: la Bolt 2027 exerce une vraie pression dans l’entrée de gamme américaine. Si Chevrolet réussit son ramp-up industriel et décroche une éligibilité au crédit d’impôt, elle peut ramener l’EV “utile” à un prix psychologique clé, au risque d’éroder le réservoir de primo‑accédants Tesla. En Europe, l’enjeu est plutôt la concurrence sino‑européenne sous les 30 000 € qu’une hypothétique Bolt.
  • Pour Renault 5 (et ë‑C3): la bataille se jouera sur le “prix total d’usage” et la cohérence produit.
    • Un prix d’attaque clair, un réseau de recharge simple et dense (partenariats), et des autonomies réelles en usage mixte seront décisifs.
    • Le recentrage sur LFP/LMFP pour les petites batteries, des intérieurs malins mais pas cheap, et une offre logicielle sans surpromesses forgeront l’adhésion.

💡 Conseil d’expert

  • Le “prix affiché” n’est qu’un début. Calculez le coût total: financement, conso réelle (kWh/100 km), entretien, pneu, assurance, et surtout la valeur de revente. À équipements équivalents, la décote peut faire varier le coût mensuel de 50 à 100 €.

Comparatif express: le point sur les fondamentaux prix/produit

Modèle (US/EU)Prix d’accès indicatifBatterie (chimie)Autonomie annoncéeDC maxRéseau/port
Chevrolet Bolt 2027 (US)28 995–29 990 $~65 kWh (LFP)255 miles (GM est.)150 kWNACS
Tesla Model 3 Standard (US)36 990 $ (hors frais)~69 kWh321 miles (EPA)225 kWNACS
Tesla Model Y Standard (US)39 990 $ (hors frais)~69 kWh321 miles (EPA)225 kWNACS
Renault 5 Five (EU)24 990 € (hors bonus)40 kWh (LFP)jusqu’à ~300 km WLTP80–100 kW env. (selon version)CCS2
Renault 5 52 kWh (EU)33 490 € (hors bonus)52 kWhjusqu’à ~410 km WLTP100–150 kW env. (selon version)CCS2
Citroën ë‑C3 (EU)~23 300 € (selon marchés)~44 kWh (LFP)~320 km WLTP~100 kWCCS2

Note: autonomies et puissances de charge varient selon versions/équipements et cycles (EPA vs WLTP).

Ce que cela redéfinit: “abordable” en 2026–2027

  • États‑Unis: la vraie barre psychologique pour massifier, c’est “< 30 000 $” avant incitations, 150 kW de charge mini et 230–260 miles réels sur autoroute modérée. La Bolt 2027 coche (presque) tout.
  • Europe: pour une citadine polyvalente, “abordable” vise 20–25 000 € hors bonus, 300–350 km WLTP, 80–100 kW DC, et une UX simple. Renault 5 et ë‑C3 sont dans la cible — à condition de livrer en volumes et de maintenir les loyers LLD attractifs.

En filigrane, c’est la maturité industrielle de l’électrique qui s’exprime: chimies LFP/LMFP, plateformes optimisées, décontenting raisonné, et un recentrage sur l’essentiel. Le marché ne veut plus de promesses, mais des EV “justes” et accessibles.

Au final, la Bolt à 30 000 $ n’enterre ni Tesla ni la Renault 5, mais elle remet l’aiguille à l’heure: l’abordable ne se décrète pas, il se prouve par la fiche technique, la disponibilité et le coût d’usage réel. C’est exactement sur ce triptyque que se gagnera la prochaine manche, des États‑Unis à l’Europe.

Tesla d’occasion privée de Superchargeurs: le signal d’alarme pour l’Europe

En bref:

  • Aux États‑Unis, des Tesla d’occasion, malgré un dossier administratif “propre”, se voient privées de Superchargeurs (voire de recharge DC) si le constructeur les flagge “salvage”, obligeant inspections/réparations payantes — un risque qui peut se reproduire en Europe.
  • Il faut des garde‑fous (transparence des statuts numériques, procédure contradictoire, plafonnement des coûts, accès pour réparateurs indépendants) et des vérifications systématiques à l’achat pour protéger les acheteurs.

L’affaire peut sembler anecdotique, elle ne l’est pas. Aux États‑Unis, un acheteur découvre après coup que sa Model 3 d’occasion est bannie des Superchargeurs Tesla. Motif: le véhicule est considéré “salvage” dans les systèmes de la marque, donc “non supporté” pour la recharge rapide. Au‑delà du cas individuel, c’est une alerte pour le jeune marché européen de l’électrique d’occasion: la possibilité d’une “décertification” logicielle, qui transforme une bonne affaire en piège coûteux.

Dans un univers de voitures de plus en plus pilotées par le logiciel, qui décide de ce qui reste actif ou non après revente? Et selon quelles garanties pour l’acheteur?

Ce qui s’est passé aux États‑Unis

  • Un Américain, ravi de sa Model 3 2022 achetée en seconde main, se retrouve incapable de recharger sur plusieurs Superchargeurs.
  • Tesla lui confirme que l’auto est “unsupported for supercharging” et que les garanties sont annulées car le véhicule est considéré “salvage” (véhicule ayant connu des dommages importants). Le titre administratif était pourtant “clean” selon le vendeur.
  • Des cas similaires existent: un véhicule peut être “propre” administrativement mais classé “salvaged” dans la base Tesla après un choc mal réparé ou une intervention hors réseau.
  • Pour réactiver la recharge rapide, Tesla propose une inspection sécurité haute tension et fast‑charge, payante (environ 2 000 $ signalés par la presse spécialisée), puis d’éventuelles réparations, elles aussi à la charge du propriétaire.

Point important: chez Tesla, le blocage peut viser le Supercharger, mais aussi, selon le statut interne du véhicule, la recharge rapide DC en général. Dans ce cas, même un chargeur tiers (Ionity, etc.) ne fonctionne plus: seule la recharge AC reste possible.

📌 Autre élément rapporté outre‑Atlantique: des constructeurs et réseaux concurrents disent ne pas pratiquer ce type de bannissement post‑accident, ce qui singularise la politique Tesla.

Pourquoi c’est un vrai sujet pour l’Europe

  • Le marché européen de l’électrique d’occasion accélère, avec l’arrivée massive d’ex‑véhicules de flotte et de premières générations de BEV. La valeur de ces autos tient autant à l’état batterie qu’à l’accès à la recharge rapide.
  • En Europe, il n’existe pas de “salvage title” à l’américaine. Les régimes d’accident/réparation et d’immobilisation (ex: VEI/VGE en France) varient, les historiques sont fragmentés. Or Tesla n’a pas besoin d’un titre “salvage” officiel pour restreindre la fast‑charge: un simple flag logiciel interne peut suffire.
  • Le risque pour le consommateur: acheter une Tesla administrativement “propre”, mais “décertifiée” pour la fast‑charge. Résultat: voyages compliqués, décote immédiate, facture de remise en conformité potentiellement lourde (inspection + pièces HV).

Au passage, paradoxe européen: alors que Tesla ouvre progressivement ses Superchargeurs à d’autres marques (via CCS), certains propriétaires de Tesla peuvent, eux, s’en voir exclus si leur véhicule est “flaggué” en interne.

Le fond du sujet: sécurité vs. pouvoir logiciel

  • L’argument de Tesla: un pack batterie ou un circuit HV mal réparé peut rendre la charge à très haute puissance dangereuse. Les inspections et réparations visent à écarter tout risque incendie/électrique.
  • Le contre‑argument: l’opacité. Ni la cause exacte du blocage, ni la preuve technique, ni le coût de remise en conformité ne sont toujours transparents pour l’acheteur. Et la décision d’interdiction émane d’un acteur privé qui opère aussi le plus grand réseau de charge rapide.

En clair, la sécurité est une exigence, mais elle doit s’exercer avec des garde‑fous: traçabilité, procédure d’appel, coûts raisonnables et interopérables.

À retenir

  • Une Tesla peut être privée de fast‑charge (Supercharger et parfois DC tiers) même avec un dossier administratif “propre”, si Tesla la considère “salvage” ou non conforme HV.
  • Le retour à la normale passe par une inspection constructeur payante et, au besoin, des réparations coûteuses.
  • Sans transparence et garanties, l’occasion électrique peut perdre en confiance… et la transition en pâtir.

Comment acheter une Tesla d’occasion sans mauvaise surprise

Avant l’achat (chez un pro ou un particulier):

  • Exiger une démonstration de fast‑charge: 15–20 minutes sur un Superchargeur ET/OU un HPC tiers (Ionity, Fastned…), avec capture d’écran de la puissance (kW), VIN visible sur l’écran/compte et facture de session.
  • Obtenir une attestation écrite du vendeur sur:
    • l’accès actif à la recharge rapide (Supercharger et DC tiers, le cas échéant),
    • l’absence de blocage logiciel connu,
    • l’absence d’accident majeur structurel ou, le cas échéant, le détail des réparations et des pièces HV remplacées.
  • Vérifier la connectivité et les services: application Tesla appairée, OTA fonctionnelles, localisation, mises à jour.
  • Demander les factures d’entretien/réparation, idéalement réalisées dans le réseau Tesla ou par un réparateur indépendant certifié HV, avec pièces d’origine.
  • En France: consulter HistoVec, le certificat de situation administrative, les procès‑verbaux de CT, et, si possible, un rapport d’expertise post‑sinistre.
  • Faire réaliser un contrôle HV par un spécialiste VE (outillage isolé, mesure d’isolement, inspection pack/refroidissement). Des indépendants accèdent légalement aux données techniques via SERMI et abonnements officiels.

Clauses contractuelles utiles:

  • Condition suspensive “accès fast‑charge”: possibilité d’annuler ou de renégocier si la voiture est désactivée dans les 30–90 jours.
  • Garantie de conformité étendue aux “éléments numériques”: mentionner explicitement la recharge rapide dans la description du bien.
  • Prise en charge partielle des inspections/réparations si un flag logiciel survient post‑vente sans faute de l’acheteur.

💡 Conseil d’expert
Privilégiez une Tesla d’occasion certifiée par Tesla (programme officiel) ou, à défaut, un vendeur pro acceptant de passer une inspection HV préalable chez Tesla. Le surcoût est souvent inférieur à la décote d’une auto “bloquée” en fast‑charge.

Ce que l’Europe doit encadrer dès maintenant

Pour éviter qu’un simple flag logiciel ne fasse basculer l’occasion électrique dans la défiance, plusieurs garde‑fous sont souhaitables:

  1. Transparence et traçabilité
  • Certificat européen des fonctions numériques critiques à la revente (accès fast‑charge, connectivité, ADAS actifs), fourni par le constructeur sur VIN.
  • Historique de statut fast‑charge consultable par le propriétaire et transmissible au futur acheteur (alignement avec le Data Act sur l’accès aux données des objets connectés).
  1. Procédure contradictoire et plafonnement des coûts
  • Obligation d’une procédure d’inspection standardisée, avec devis détaillé et justification technique du blocage.
  • Plafond réglementaire des frais d’inspection “sécurité HV” pour éviter les abus, et possibilité d’inspection par un tiers agréé indépendant.
  1. Interopérabilité et droit à la réparation
  • Interdiction de désactiver la charge DC au‑delà du strict nécessaire de sécurité, obligation de proposer une voie de remise en conformité raisonnable et documentée.
  • Accès garanti des réparateurs indépendants aux procédures et outillages HV (déjà amorcé via SERMI), y compris pour lever un blocage après réparation validée.
  1. Passeport batterie et santé du pack
  • Intégrer au futur passeport batterie européen des indicateurs de sécurité/étanchéité HV et des interventions lourdes, pour éclairer la revente.
  • Standardiser un “état de santé” (SoH) minimum à afficher, avec méthode de mesure harmonisée.

📢 À méditer
Sans règles claires, la “voiture définie par logiciel” peut devenir une “occasion définie par le constructeur”. La confiance du marché dépendra d’un équilibre net entre sécurité, transparence et droits de l’acheteur.

Et si votre Tesla est déjà “bloquée” en fast‑charge

  • Contacter le support Tesla pour connaître précisément le statut et l’éligibilité aux inspections HV/fast‑charge.
  • Demander un devis écrit, pièces et opérations listées.
  • En parallèle, faire établir un second avis chez un spécialiste HV indépendant.
  • Si l’auto a été vendue récemment par un professionnel, activer la garantie légale de conformité (en France, 24 mois minimum) et, le cas échéant, invoquer la pratique commerciale trompeuse si l’accès à la fast‑charge a été présenté comme acquis.
  • Conserver toutes les preuves de sessions de charge avortées et des échanges avec le constructeur.

En définitive, l’incident américain n’est pas un épiphénomène: il révèle un angle mort de l’écosystème électrique d’occasion. Pour que la transition reste désirable et équitable, la sécurité doit s’accompagner d’obligations de transparence, de voies de recours et de coûts maîtrisés — faute de quoi, la “bombe à retardement” sera celle de la défiance des acheteurs.

Bannie des Superchargeurs après l’achat: l’alerte qui guette l’occasion en Europe

En bref:

  • Un acheteur américain de Tesla d’occasion s’est vu refuser l’accès aux Superchargeurs après achat car le VIN était marqué "salvage" ; Tesla peut à distance désactiver des fonctions et propose une inspection payante pour réactiver la charge rapide.
  • Risque européen réel : un véhicule importé ou réparé peut garder un flag logiciel, dégrader la valeur et poser un problème juridique — vérifiez l’historique du VIN, testez la charge DC et faites transcrire par écrit le transfert des options.

L’affaire paraît anecdotique, elle ne l’est pas. Aux États‑Unis, un acheteur de Tesla d’occasion a découvert, une fois la voiture payée, que son accès au réseau de Superchargeurs était… bloqué. Au‑delà du cas individuel, ce scénario dit beaucoup de la “voiture-logiciel” et des zones grises qu’elle introduit sur le marché de l’occasion, y compris en Europe.

En jeu, des fonctions qui peuvent disparaître après la revente, un contrôle quasi total du constructeur et une dévalorisation à la clé. Avec une question lourde: que possède‑t‑on vraiment quand on achète une voiture définie par logiciel?

Le cas américain qui fait réfléchir

Selon une enquête de CBS Chicago publiée début octobre, Daniel Boycott, nouveau propriétaire d’une Model 3 2022 achetée chez un revendeur, a découvert au premier long trajet que sa voiture refusait de charger sur un Superchargeur. Le service client de Tesla lui a confirmé que le véhicule était “non pris en charge pour la Supercharge” car identifié comme “salvage” (véhicule déclaré économiquement irréparable/gravement accidenté dans le jargon américain), invoquant un risque sécurité côté batterie et haute tension.

  • Le vendeur et un rapport d’historique affichaient un titre “propre”, mais une analyse plus poussée a révélé un accident antérieur et des réparations jugées médiocres par un technicien Tesla.
  • Tesla propose désormais une inspection pour rétablir l’accès à la charge rapide, facturée autour de 2 000 dollars aux États‑Unis, hors éventuelles remises à niveau.
  • CBS affirme avoir contacté d’autres constructeurs et réseaux de charge: ceux qui ont répondu indiquent ne pas pratiquer ce type de bannissement lié à l’historique d’accident.

Au‑delà de l’énervement bien compréhensible de l’acheteur, ce cas illustre la particularité de Tesla: un constructeur qui contrôle aussi une large partie de l’infrastructure de charge et peut, à distance, autoriser ou interdire des fonctions clés.

📌 À noter

  • Tesla a, par le passé, bloqué la charge rapide sur des véhicules “salvage”, parfois y compris sur des bornes tierces, avant d’introduire une procédure d’inspection pour un rétablissement conditionnel. Les modalités exactes évoluent et varient selon les marchés.

Pourquoi l’Europe est directement concernée

Même si le vocabulaire administratif diffère (VEI/VGA en France, Cat S/N au Royaume‑Uni…), les ingrédients sont là pour reproduire ce scénario de ce côté‑ci de l’Atlantique.

  • Une base mondiale: l’éligibilité d’un VIN à la Supercharge relève d’un statut logiciel côté Tesla. Une voiture importée et précédemment “salvage” aux USA peut rester flaguée en Europe.
  • Un contrôle vertical unique: contrairement aux marques qui s’appuient sur des réseaux tiers (Ionity, Fastned, TotalEnergies…), Tesla opère son propre réseau. En pratique, cela lui permet de filtrer l’accès – y compris pour ses propres véhicules.
  • Des options “à la carte”: Acceleration Boost, Autopilot/FSD, sièges chauffants, connectivité premium… Autant de fonctions activables/désactivables à distance. Des cas documentés montrent que des options visibles lors de la vente ont parfois été retirées ultérieurement après audit côté constructeur.

💡 Bon à savoir (Europe)

  • Les autres réseaux CCS en Europe ne consultent pas de “statut de titre” : ils parlent au BMS via le protocole, point. En revanche, si un constructeur désactive la charge rapide DC dans le logiciel du véhicule, la limitation s’applique partout.

La voiture-logiciel, ou l’ambiguïté de la propriété

La montée en puissance des fonctions logicielles a des vertus (sécurité, mises à jour OTA, nouvelles features), mais elle bouscule la notion de propriété.

  • Ce que vous payez n’est pas toujours “ancré” dans le bien: certaines fonctionnalités clés ne sont qu’une licence attachée au VIN et, parfois, révocable.
  • La valeur résiduelle devient volatile: un véhicule privé de charge rapide ou d’options payées se déprécie fortement. L’impact sur la revente et les conditions d’assurance/crédit est réel.
  • Un débat juridique naissant: en Europe, la vente de biens comportant des éléments numériques est encadrée par les directives 2019/770 et 2019/771 (transposées en droit national). Elles imposent une obligation de conformité et d’info sur les mises à jour. Mais l’applicabilité précise aux options logicielles post‑vente ou au blocage d’accès réseau reste un terrain encore peu balisé.

🧭 Cadre réglementaire à garder en tête

  • UE/ONU: obligations de cybersécurité et de gestion des mises à jour (R155/R156) pour l’homologation, focalisées sur la sûreté et la traçabilité, pas sur la portabilité des options.
  • Droit de la consommation (UE): devoir d’information du vendeur, garantie de conformité, vices cachés. Un blocage post‑achat d’une fonction “essentielle” pourrait, selon les cas, relever d’un défaut de conformité.
  • “Right to repair” et accès aux données: débats en cours à Bruxelles sur l’accès standardisé aux données et aux fonctions des véhicules connectés. Les arbitrages attendus pèseront lourd sur l’après‑vente.

Comparaison rapide: Tesla vs “le reste du marché”

  • Réseau propriétaire: Tesla est quasiment le seul constructeur à pouvoir couper l’accès à “son” réseau à une voiture particulière. Les autres marques n’ont pas ce levier, s’appuyant sur des opérateurs indépendants.
  • Filtrage logiciel: n’importe quel constructeur peut limiter la charge rapide via logiciel s’il estime la sécurité compromise. Mais Tesla a historiquement le plus de précédents médiatisés et une procédure de réactivation à sa main.
  • Transfert d’options: chez Tesla, la règle générale veut que les options restent liées au véhicule, mais des retraits après revente ont déjà été constatés. Ailleurs, le risque existe aussi (monétisation de fonctions, abonnements), mais reste moins visible car la charge rapide n’est pas “maison”.

Acheter une Tesla d’occasion en France/Europe: le check complet

Avant de signer, jouez la transparence technique et logicielle. Idéalement, testez l’usage réel.

  • Historique et statut

    • Demandez un historique complet (France: HistoVec, rapports d’expertise, factures de carrosserie/haute tension). Si import, contrôlez l’historique US/UK (Carfax/Experian) et la présence d’une mention salvage/VEI/VGA/Cat S/N.
    • Identité du pack batterie et interventions HV (rapports d’atelier Tesla si disponibles).
  • Fonctions et options

    • Vérifiez dans l’interface les options actives (EAP/FSD, Acceleration Boost, sièges chauffants, connectivité premium) et obtenez une attestation écrite du vendeur listant les features “livrées”.
    • Clarifiez leur transférabilité: abonnement vs licence liée au VIN, durée, éventuels frais de réactivation.
  • Recharge, sans hypothèse

    • Faites un test de charge rapide DC avant achat: idéalement un branchement sur Superchargeur avec le vendeur (compte du vendeur) et un test sur une borne CCS tierce. Relevez la puissance atteinte et la stabilité.
    • Si un doute subsiste, sollicitez une inspection HV/”fast‑charge safety” auprès d’un Service Center. Le tarif européen n’est pas public; aux USA, on parle d’environ 2 000 $ hors réparations.
  • Compte et transfert

    • Assurez‑vous que le transfert de propriété dans l’app Tesla est possible et qu’aucune restriction ne bloque l’activation de services (appli, paiement Superchargeur).
    • Exigez que tout blocage connu (Superchargeur, DC rapide) soit divulgué. Faites‑le stipuler au contrat.
  • Contrats et recours

    • Achetez auprès d’un professionnel lorsque c’est possible: vous bénéficiez de la garantie légale de conformité. Faites préciser par écrit qu’aucun flag “salvage/équivalent” n’est actif dans les systèmes du constructeur.
    • Conservez des preuves du fonctionnement des fonctions essentielles le jour de la vente (captures, vidéos du test de charge).

🛠️ Conseil d’expert
Si la voiture a subi une réparation structurelle ou HV, un contrôle indépendant par un spécialiste VE (contrôle du pack, isolation, connectique HV, refroidissement) est un excellent investissement, même si le Service Center propose sa propre inspection.

Ce que l’affaire révèle, sans passion ni procès d’intention

  • Oui, il est légitime pour un constructeur de prévenir un risque sécurité sur la haute tension. Un pack endommagé et mal réparé peut être dangereux, pour l’utilisateur comme pour l’infrastructure.
  • Non, il n’est pas satisfaisant pour le client que des fonctions décisives (charge rapide, options payées) puissent disparaître sans procédure claire, transparente et proportionnée – a fortiori après revente.
  • Pour Tesla, l’ouverture progressive des Superchargeurs aux autres marques en Europe rend ces blocages encore plus sensibles: voir un Tesla‑owner refoulé là où des concurrents chargent via l’app est une dissonance d’image.
  • Pour le marché, l’incertitude logicielle est un facteur de décote. La filière VO a besoin de règles lisibles, d’outils de vérification et, côté législateur, de garde‑fous sur la portabilité fonctionnelle et la réparabilité.

En filigrane, la voiture-logiciel appelle un contrat‑client plus explicite: ce qui est vendu, ce qui est loué, ce qui peut être restreint, par qui, comment et sous quelles garanties. Tant que ces réponses resteront floues, chaque bannissement médiatisé pèsera sur la confiance — et sur la valeur — de l’occasion électrique.

Tesla d’occasion bannie des Superchargeurs : la “brique numérique” qui menace le marché européen

En bref:

  • Tesla peut bloquer l’accès aux Superchargeurs d’une voiture d’occasion via un flag "salvage"/sécurité, sans empêcher la charge AC ni l’usage des réseaux CCS2 tiers ; cela réduit fortement l’attractivité et la valeur du véhicule.
  • Avant d’acheter, vérifier le VIN auprès de Tesla (preuve écrite), demander l’historique HV et inclure une clause contractuelle/inspection pour couvrir une éventuelle réactivation ou remise en état.

L’achat d’une voiture électrique d’occasion ne se résume plus à l’état de la batterie ou à l’historique d’entretien. Un risque plus discret émerge: le bannissement logiciel. Aux États‑Unis, un propriétaire a découvert après coup que sa Tesla de seconde main était “débranchée” du réseau Supercharger. Au-delà de l’anecdote, le cas interroge: que se passe‑t‑il si, en Europe, vous héritez d’un véhicule parfaitement roulant… mais numériquement bridé par le constructeur?

Ce qui s’est passé aux États‑Unis, et pourquoi cela nous concerne

Un acheteur américain a pris possession d’une Model 3 d’occasion, avant d’apprendre au pied d’un Superchargeur que la voiture était “non prise en charge” pour la charge rapide. En cause, selon Tesla: un statut de véhicule endommagé (salvage) et des réparations jugées inadéquates. Le constructeur avance un motif de sécurité: connecter au courant continu haute puissance un véhicule dont l’intégrité du pack batterie ou du système HV n’est pas garantie représenterait un risque.

  • Plusieurs témoignages outre‑Atlantique relatent des cas similaires: voiture affichée “propre” chez le vendeur, mais “salvage” dans les systèmes de Tesla.
  • Depuis fin 2022, Tesla a mis en place un processus d’inspection payante permettant, si la voiture est jugée sûre, de réactiver l’accès aux Superchargeurs. Le tarif évoqué se situe autour de 2 000 dollars, auxquels peuvent s’ajouter des réparations.

Pourquoi c’est pertinent pour l’Europe? Parce que la politique ne dépend pas du type de prise, mais du numéro de série (VIN) et des flags internes de sécurité. Autrement dit, même en Europe où les Tesla utilisent le standard CCS2 et où les Superchargeurs s’ouvrent progressivement à d’autres marques, Tesla peut techniquement autoriser ou non l’accès de ses propres véhicules à son réseau, voiture par voiture.

À retenir

  • La charge AC (domicile, bornes publiques en 22 kW) n’est pas concernée.
  • La charge rapide sur réseaux tiers (Ionity, Fastned, TotalEnergies, Allego, etc.) reste en principe accessible aux Tesla européennes via CCS2. Le bannissement évoqué concerne l’accès au réseau Supercharger de Tesla.

Banni pour “salvage” : comment Tesla justifie et encadre la pratique

  • Origine de la politique: des incidents et des craintes liés à l’intégrité HV après accident. Tesla a d’abord désactivé l’accès pour les véhicules à titre “salvage”, avant d’introduire une procédure de réintégration conditionnée à une inspection.
  • Inspection/re-certification: contrôle approfondi du pack, des organes de charge et de sécurité. En cas de succès, la charge rapide peut être réactivée; sinon des réparations (chez Tesla) sont proposées, aux frais du propriétaire.
  • Controverse: coût élevé, manque de transparence perçu par certains acheteurs d’occasion, et cas rapportés de divergences entre l’historique administratif (titre “propre”) et l’état interne du dossier Tesla.

Important: d’autres constructeurs et opérateurs de recharge ne rapportent pas de politique comparable de bannissement réseau basée sur un historique “salvage”. C’est un enjeu d’écosystème propriétaire: Tesla maîtrise à la fois le véhicule, le logiciel et le réseau.

Spécificités européennes: ce que dit le cadre, ce que peut faire Tesla

  • Pas de “salvage title” au sens américain. En France et dans plusieurs pays européens, on parle de “véhicule endommagé” (expertises type VEI/VGA, immobilisation administrative, levée après réparation conforme). Les points de contrôle et les circuits d’expertise existent mais diffèrent des titres US.
  • Tesla conserve néanmoins la main sur l’accès à son réseau: un flag interne de sécurité peut suffire à bloquer un VIN, indépendamment du statut administratif national, tant que cela s’appuie sur des motifs de sûreté.
  • Droits des consommateurs: si un vendeur professionnel promet (ou laisse entendre) l’accès Supercharger et que la voiture est en fait “bannie”, on peut tomber dans le “défaut de conformité” au sens du droit européen, avec recours possibles. À l’inverse, si l’accès n’est pas contractuellement garanti et que Tesla justifie un blocage pour raison de sécurité, la marge de manœuvre dépendra des preuves et des informations fournies avant la vente.
  • “Droit à la réparation” et services numériques: l’UE avance sur la réparabilité et la transparence logicielle. Mais l’accès à un réseau privé reste un service distinct. L’exigence, à minima, portera sur une information claire et préalable à l’achat.

Conséquences très concrètes sur le marché de l’occasion

  • Valeur résiduelle: une Tesla privée d’accès Supercharger perd une part de son attrait, surtout pour les gros rouleurs. La décote peut être significative.
  • Adhésion à l’électrique: ce type d’incident nuit à la confiance, alors que l’EV d’occasion est le principal vecteur de massification est le principal vecteur de massification.
  • Ressort concurrentiel: l’avantage compétitif du réseau Tesla peut se muer en levier de suspicion si l’acheteur craint un “verrou logiciel” post-achat.

📌 Bon à savoir

  • Des précédents existent aussi sur des options logicielles (ex.: Autopilot/FSD, connectivité premium) retirées après revente si l’activation n’était pas conforme aux conditions de Tesla. L’accès Supercharger s’ajoute à cette zone grise des “droits numériques” attachés au véhicule.

Comment se prémunir en Europe avant d’acheter une Tesla d’occasion

Checklist express à exiger du vendeur (pro ou particulier) :

  • Identité du véhicule
    • VIN complet et historique d’accidents/assurances (HistoVec en France, rapports d’historique tiers).
    • Factures et photos de réparations éventuelles, avec détail des pièces HV si impactées.
  • Statut d’accès Supercharger
    • Demander une attestation écrite du vendeur stipulant l’éligibilité au réseau Supercharger à la date de vente.
    • Contacter un service Tesla avec le VIN pour vérifier l’absence de “restriction” connue. Exiger une trace écrite (e‑mail, ticket).
  • État HV et batterie
    • Rapport d’état de santé (SOH) batterie issu d’un outil de diagnostic crédible.
    • Inspection indépendante orientée HV si le véhicule a subi un choc (connecteurs, pack, structure).
  • Contrat de vente
    • Clause spécifique: “accès Supercharger garanti” ou, à défaut, prise en charge contractuelle de l’inspection/réactivation si blocage découvert après la vente.
    • Mention des options logicielles présentes (Autopilot, connectivité, chauffage arrière, etc.) avec engagement de maintien post‑transfert.

💡 Astuce d’expert

  • Si l’historique révèle un accident, budgétez d’emblée le coût potentiel d’une inspection/re-certification chez Tesla. Négociez le prix en conséquence ou conditionnez la vente au résultat de l’inspection.

Et si votre Tesla est déjà “bannie” ?

  • En Europe, vous pouvez continuer à rouler, charger à domicile et sur la majorité des bornes publiques AC.
  • Pour la charge rapide, les réseaux tiers en CCS2 (Ionity, Fastned, TotalEnergies, Allego, Engie Vianeo, etc.) restent accessibles. La contrainte principale est le maillage et le coût, variables selon corridors et opérateurs.
  • Option de réactivation: sollicitez l’inspection Tesla. Le coût évoqué outre‑Atlantique (~2 000 $) donne un ordre d’idée; renseignez-vous localement sur le tarif et l’étendue des contrôles/réparations possibles.

📊 Comparatif rapide (indicatif)

  • Supercharger Tesla: densité élevée, intégration native, tarification dynamique avantageuse pour les propriétaires éligibles.
  • Réseaux tiers CCS2: maillage désormais conséquent sur autoroutes européennes, prix et fiabilité variables selon opérateurs et stations; expérience parfois moins plug‑and‑play qu’un Superchargeur, mais progrès constants.

Quel rôle pour les autorités et la filière?

  • Transparence minimale: imposer l’affichage clair de l’éligibilité au réseau propriétaire lors de la vente d’une EV, au même titre que l’autonomie WLTP ou l’état de santé batterie, serait un progrès simple et mesurable.
  • Normalisation des rapports HV: un standard européen d’inspection post‑accident des systèmes HV, reconnu par les constructeurs, permettrait d’éviter les divergences entre dossiers internes et administratifs.
  • Veille concurrentielle: à mesure que les réseaux se multiplient et s’ouvrent, verrouiller l’accès post‑achat pour motifs non transparents pourrait attirer l’attention des régulateurs.

✅ À retenir, en trois lignes

  • Le risque de “brique numérique” existe: une Tesla d’occasion peut être privée de Superchargeur pour raisons de sécurité liées à son historique.
  • En Europe, cela ne bloque pas la charge sur réseaux tiers CCS2, mais l’attractivité et la valeur du véhicule en pâtissent.
  • La parade, c’est l’anticipation: vérifications documentées, clause contractuelle, et, en cas de doute, inspection avant achat.

En somme, la maturité du marché passe par plus de clarté. Aux acheteurs de réclamer des preuves, aux vendeurs d’apporter des garanties, et aux constructeurs d’expliquer leurs décisions quand elles débranchent, sans prévenir, une partie de l’expérience promise.

Mort dans un Cybertruck: quand les portes électroniques deviennent un piège — alerte pour l’Europe

En bref:

  • Une plainte en Californie affirme qu’une passagère est morte piégée dans un Cybertruck dont les portes 100% électroniques n’ont pas fonctionné après un choc — le secours mécanique existait mais était dissimulé; la NHTSA et d’autres autorités enquêtent sur des cas similaires.
  • Au‑delà de Tesla, le dossier met en lumière le risque des poignées affleurantes et appelle à des règles européennes et industrielles pour des commandes mécaniques d’évacuation visibles, standardisées et faciles d’accès; en attendant, repérez les issues manuelles et gardez un brise‑vitre à portée.

Une plainte déposée en Californie accuse Tesla d’un défaut de défaut de conception sur le Cybertruck: des portes 100% électroniques qui auraient piégé une passagère dans un véhicule en feu. Au-delà de ce drame, c’est toute une tendance de design — poignées affleurantes et ouvertures électriques — qui se retrouve sous les projecteurs. Avec, en filigrane, une question simple pour l’Europe: jusqu’où peut-on “électrifier” une porte sans compromettre l’évacuation d’urgence?

Ce que l’on sait du dossier américain

  • Jeudi, les parents de Krysta Tsukahara, 19 ans, ont poursuivi Tesla en justice en Alameda County (Californie). Ils affirment que leur fille, assise à l’arrière d’un Cybertruck en novembre 2024, a survécu au choc mais est morte de brûlures et d’inhalation de fumées faute d’avoir pu sortir.
  • Les portes extérieures du Cybertruck s’ouvrent via des boutons électriques sur les montants; à l’intérieur, un secours mécanique existe, mais l’actionneur arrière est dissimulé sous un tapis de poche de porte. Des témoins disent avoir tenté les boutons sans succès, puis brisé une vitre pour extraire le passager avant; la passagère arrière n’a pas pu être sortie.
  • Les circonstances du crash sont graves: vitesse élevée et conducteur sous l’emprise d’alcool et de stupéfiants, selon les rapports cités par la presse locale et l’AP. Les familles estiment cependant qu’un “accident survivable” est devenu fatal par impossibilité d’évacuation.
  • Contexte réglementaire: la NHTSA enquête depuis septembre sur des portes Tesla (notamment Model Y 2021) devenues inopérantes, avec plus de 140 plaintes de consommateurs recensées par Bloomberg depuis 2018 sur des portes bloquées ou inactives. L’agence cible d’abord l’impossibilité d’ouverture de l’extérieur lorsqu’il n’existe pas de commande manuelle.
  • Réponse du constructeur: Tesla n’a pas commenté ces plaintes précises au moment d’écrire ces lignes. Son designer en chef, Franz von Holzhausen, a toutefois indiqué mi-septembre sur un podcast travailler à une commande “plus intuitive en situation de panique”, combinant électronique et secours mécanique. Un procès dans l’affaire Tsukahara est d’ores et déjà programmé pour février 2027, selon Bloomberg.

📌 À retenir

  • Les griefs visent moins l’électronique en soi que l’accessibilité du secours mécanique, jugé trop caché pour un usage en urgence, surtout aux places arrière.
  • Le sujet dépasse Tesla: l’industrie entière pousse des poignées affleurantes et des ouvertures à bouton, au nom de l’aérodynamique et du style.

Portes électroniques, poignées affleurantes: comment ça marche (et où ça peut coincer)

  • Extérieur: plus de poignée saillante, mais un bouton tactile/électrique (Cybertruck) ou une poignée affleurante motorisée (autres marques). Sans alimentation 12 V, ces dispositifs peuvent rester inertes.
  • Intérieur: la réglementation impose une ouverture depuis l’habitacle. Les constructeurs ajoutent donc un câble mécanique. Problème: la facilité d’identification et d’accès varie beaucoup.
    • Sur Cybertruck: à l’avant, une tirette proche des commandes de vitre; à l’arrière, une languette/câble derrière un revêtement de poche de porte (il faut ôter un insert).
  • Post‑choc: un crash peut sectionner ou isoler l’alimentation 12 V; la haute tension est coupée par pyrofusibles. Si le 12 V chute, les commandes électriques peuvent cesser de répondre. La seule issue devient le secours mécanique, qui doit être évident à trouver… et c’est précisément là que le bât blesse.

💡 Bon à savoir

  • Les portes “dures” (acier/inox) et vitrages renforcés améliorent la sécurité… mais compliquent l’accès des secours quand les ouvrants ne répondent plus. Le compromis doit être anticipé dès la conception.

Que disent les régulateurs — et où se situe l’Europe ?

  • États‑Unis: la NHTSA a lancé une évaluation préliminaire sur l’opérabilité des ouvertures électroniques, notamment depuis l’extérieur. C’est la première marche vers une éventuelle action corrective.
  • Canada: Transport Canada a ouvert sa propre collecte d’informations en 2025 sur l’évacuation quand le système 12 V est compromis.
  • Chine: des autorités ont évoqué un encadrement renforcé des poignées affleurantes après des données inquiétantes de “pop‑out” en choc latéral, selon la presse spécialisée.
  • Europe: les règles de type‑approbation (règlement UNECE R11 sur loquets/charnières) exigent une ouverture depuis l’intérieur sans outil ni connaissance spéciale. Beaucoup de véhicules à poignées affleurantes sont conformes… mais la norme ne détaille pas toujours l’ergonomie, la signalétique et l’accessibilité “en panique”, notamment pour les places arrière. Euro NCAP évalue déjà l’“aide au sauvetage”, mais pourrait durcir ses protocoles sur l’identification des sorties d’urgence.

📊 Le point réglementaire (propositions qui montent)

  • Rendre obligatoire un dispositif mécanique visible, unique et clairement signalé à chaque place, y compris à l’arrière.
  • Standardiser le pictogramme et l’emplacement (ex. proximité poignée/accoudoir).
  • Exiger un accès de secours extérieur mécanique simple pour intervenants (cache‑rupture sur montant).
  • Éclairage/photoluminescence des commandes d’évacuation.
  • Fiches de secours ISO 17840 enrichies (localisation exacte des trappes/cordons).

Le débat de fond: style vs. sécurité d’évacuation

Pourquoi ces poignées affleurantes? Pour l’aérodynamique (moins de traînée), la propreté de ligne et, parfois, la gestuelle “tech”. Elles ne sont pas intrinsèquement dangereuses. Mais un design “tout‑électronique” qui relègue l’issue mécanique à une languette dissimulée est problématique:

  • En stress aigu, la mémoire procédurale domine: on cherche un levier, pas une astuce sous un tapis.
  • Les passagers arrière connaissent rarement les spécificités du véhicule.
  • Les secours extérieurs perdent des secondes précieuses quand il n’existe pas de voie mécanique d’ouverture facilement repérable.

Comme le résume l’un des avocats de familles plaignantes: on peut être responsable du crash et reprocher au constructeur d’avoir rendu l’évacuation trop difficile. Les deux réalités coexistent.

Fréquence et risque: garder la mesure, agir vite

  • Les incendies post‑crash sur VE demeurent rares à l’échelle du parc, et l’immense majorité des accidents n’implique pas d’embrasement. Mais lorsque survient une perte d’alimentation et/ou un départ de feu, toute seconde compte.
  • L’“entrapment” post‑choc n’est pas propre aux VE: des systèmes électriques abondent désormais sur toutes motorisations. L’exigence doit donc être universelle: un secours mécanique simple, évident et standardisé.

Implications pour les constructeurs européens

  • Raccourcir la “chaîne cognitive” en urgence: un seul geste, un seul endroit, un marquage clair.
  • Revoir les ouvrants arrière: bannir les cordons cachés, généraliser une tirette dédiée, visible et rétro‑éclairée.
  • Prévoir une ouverture mécanique externe normalisée (cache à arracher/poussoir) pour premiers intervenants.
  • Logiciel: préserver une réserve 12 V sur les circuits d’ouverture en cas de choc, avec temporisation d’alimentation, tout en respectant l’isolement HV.
  • Communication: pictos sur portes, chapitre “issue de secours” simplifié dans l’appli/écran, tutoriels à la livraison.

✅ Conseils pratiques pour les automobilistes (VE et thermiques)

  • Repérez à froid les commandes d’ouverture manuelle à toutes les places, surtout à l’arrière.
  • Conservez la fiche de secours (ISO 17840) du véhicule, accessible aux secours (porte‑soleil, QR code).
  • En cas de choc avec portes inertes: tentez les manuels intérieurs; à l’extérieur, viser les vitres latérales trempées (pas le pare‑brise feuilleté) en frappant près des bords.
  • Équipez‑vous d’un petit brise‑vitre homologué, rangé à portée immédiate.
  • Parents: testez la réouverture des portes arrière depuis l’extérieur véhicule coupé, pour identifier les limites de votre modèle.

Et maintenant ?

Le dossier californien ne préjuge pas du jugement final. Mais il révèle une faiblesse évitable: des issues de secours trop peu accessibles. Entre enquêtes des régulateurs et promesses d’évolution de design, l’industrie a l’occasion de corriger le tir rapidement. En attendant, mieux vaut connaître — et savoir montrer — par où sortir.

Assurance auto 2026 et parc vieillissant: le «double ciseau» qui peut freiner l’électrique

En bref:

  • En 2026 les primes repartent à la hausse (auto +4–6%, MRH +7–8%) et les sinistres/complexité (batteries, ADAS) maintiennent un surcoût d’assurance pour les VE ≈+15%, tandis qu’un parc vieillissant pousse les ménages à différer le neuf et à réduire les garanties.
  • Risque de frein à l’adoption électrique («double ciseau»), mais des leviers existent : leasing social, offres assureurs ciblées, réparabilité et montée en compétences des ateliers pour contenir les coûts.

La facture d’assurance auto repart à la hausse en 2026, alors que le parc automobile français vieillit. Pour les ménages, l’étau se resserre: des primes plus chères, des véhicules conservés plus longtemps, et un un coût de réparation qui demeure supérieur pour les électriques pour les électriques. Un cocktail qui peut ralentir l’adoption du VE, malgré des coûts d’usage toujours plus compétitifs.

Décryptage chiffré, impacts possibles sur la transition, et leviers concrets pour ne pas subir la hausse.

Ce que l’on sait des hausses 2026

  • Assurance auto: +4 à +6% selon Facts & Figures, +5 à +5,5% selon Addactis.
  • Montant moyen estimé: 563 € HT/an en auto (Addactis).
  • Habitation (MRH): +7,5 à +8% (Addactis), largement au‑dessus de l’inflation (0,9% en août, Insee).
  • Causes principales: multiplication des sinistres climatiques (grêle, inondations, orages), hausse des coûts de réparation, sophistication croissante des véhicules (ADAS, batteries, électronique de puissance).

📌 À retenir

  • La hausse 2026 est un cran en dessous de 2025, mais reste significative et structurelle (climat + coût des réparations).
  • Les assureurs développent des offres «low cost» avec garanties réduites et franchises plus élevées: attention aux angles morts de couverture.

Pourquoi les primes VE restent plus élevées que les thermiques

Les données de sinistres confirment un différentiel de coût de réparation pour les électriques:

  • France 2024: +14 à +15% en moyenne vs thermique à gravité d’accident équivalente.
  • Europe: +15 à +25% selon marchés et modèles.

Les postes qui renchérissent la remise en état:

  • Batterie et sécurité haute tension: procédures de mise en sécurité, contrôles, dépose éventuelle; risque d’«épave économique» en cas d’atteinte.
  • ADAS et électronique: recalibrations (caméras, radars, lidars), logiciels, outillage spécifique.
  • Matériaux/structures: aluminium, composites, gigacasting → méthodes et certifications spécifiques.
  • Protocoles HV: temps opératoires additionnels et personnels formés.

Chiffres récents côté assurance:

  • Au 02/10/2025, Selectra mesure un surcoût d’assurance pour un VE vs essence de +12,7% (tiers) à +22,1% (tous risques). Exemple tous risques: 55,76 €/mois (essence) vs 67,69 € (électrique).

✅ Bonne nouvelle malgré tout: la «gravité moyenne» des sinistres VE baisse lentement avec la montée en compétence des ateliers et l’amélioration de l’accès aux pièces. L’écart persiste, mais se stabilise autour de ~15%.

Parc vieillissant: quelles conséquences assurantielles?

Le maintien en circulation de voitures plus anciennes traduit la tension budgétaire des ménages. Effets possibles:

  • Plus de «tiers simple» et franchises relevées pour contenir la prime, au risque d’un reste à charge important en cas d’accident.
  • Sur les thermiques âgés, la valeur vénale basse accélère le basculement en épave économique; sur les VE, un choc touchant batterie/structures peut aussi faire grimper la facture.
  • Allongement des délais et inflation des pièces entretiennent la hausse générale de la sinistralité indemnisée.

En clair, l’âge du parc et la complexité technique co‑alimentent la hausse des coûts… que la prime répercute mécaniquement.

L’effet «double ciseau» sur l’électrique

  • Lame 1: primes en hausse (conjoncture 2026) + surcoût structurel VE à l’indemnisation.
  • Lame 2: budgets contraints → ménages repoussent l’achat neuf, gardent leur thermique plus longtemps, basculent vers garanties minimales.

Risque: retarder l’adoption du VE chez les foyers les plus sensibles au coût total de possession… alors même que l’électrique reste gagnante à l’usage:

  • Selectra calcule un coût énergie ≈ 3,29 €/100 km en VE (mix 83% domicile, 17% rapide) vs ≈ 10,20 €/100 km en essence.
  • Plus on roule, plus l’avantage VE se creuse, assurance incluse.

🔎 Leasing social: un contre‑poids utile

  • De retour depuis le 30/09/2025 pour les ménages modestes (<200 €/mois sans apport, sous conditions). Volume limité, non cumulable avec le bonus écologique 2025, mais effet d’accessibilité réel pour entrer dans l’électrique malgré l’assurance plus chère.

Trois scénarios crédibles pour 2026

  1. Ralentissement de l’adoption VE «budget serré»
  • Hausse de prime + parc vieillissant + franchises relevées → arbitrages défavorables aux VE chez les ménages contraints.
  1. Stabilisation grâce aux contre‑feux
  • Leasing social, offres assureurs mieux ciblées VE (garanties batterie, ADAS mutualisés), montée en compétence ateliers → écart de prime contenu.
  1. Accélération de la réparabilité
  • Procédures batterie modulaires, pièces de réemploi/remanufacturées, centres de calibration partagés → baisse progressive du coût de sinistre VE à partir de 2026/2027.

Comment payer moins cher son assurance VE en 2026 (sans se découvrir)

  • Comparer systématiquement, à garanties équivalentes (écarts jusqu’à ~470 €/an en tous risques observés sur certains profils).
  • Ajuster intelligemment la franchise: la relever modérément peut baisser nettement la prime; éviter les franchises «pièges» sur bris de glace/ADAS.
  • Exiger une garantie batterie claire (dommages, vol, incendie) et la couverture des équipements de recharge (câbles, borne).
  • Vérifier l’assistance 0 km (panne d’énergie incluse) et le remorquage vers réparateur certifié haute tension.
  • Choisir un assureur qui privilégie pièces de réemploi/échange standard et réseaux agréés formés HV/ADAS.
  • Déclarer la borne à l’assurance habitation (couverture incendie/surtension).
  • Téléma­tique/usage-based: si vous roulez peu et propre, les offres au kilomètre peuvent être gagnantes.
  • Sécuriser son VE: stationnement, antivols, mises à jour logicielles → réduction du risque et parfois de la prime.
  • Côté véhicule, privilégier des modèles au design «réparable» (pack batterie modulaire, pièces de carrosserie dissociées des capteurs).
  • Conduite préventive: ménager pneus et trains roulants (poids/couple) réduit la fréquence sinistre.

💡 Conseil d’expert
Demandez le détail du «panier ADAS» dans votre contrat: un pare‑brise ou un bouclier avec capteurs peut embarquer recalibrations et immobilisation. Une option spécifique bien négociée coûte souvent moins cher que des actes hors garantie.

Les leviers collectifs pour ne pas casser la trajectoire VE

  • Constructeurs: packs batterie modulaires et réparables, documentation de réparation validée, pièces disponibles hors réseau captif.
  • Filière réparation: montée en compétences HV/ADAS, mutualisation des bancs de calibration, filières de pièces remanufacturées.
  • Assureurs: incitations aux réparations certifiées, barèmes distincts pour calibrations, prise en charge du véhicule de remplacement pour limiter la casse sociale.
  • Pouvoirs publics: soutien à la formation carrossiers-électriciens, facilitation de l’accès aux pièces, cadrage du réemploi, amplification des dispositifs ciblés (CEE, leasing social) pour mitiger la hausse des primes sur les publics modestes.


Au moment où les primes 2026 repartent à la hausse, la bataille se jouera dans le détail: garanties bien calibrées, réparabilité pensée en amont et outils publics finement ciblés. Sans cela, le «double ciseau» assurantiel et du parc vieillissant risque de couper l’élan de l’électrique là où elle est la plus utile: chez ceux qui comptent chaque euro.

TT à 5 000 €: l’électrique mexicaine qui bouscule l’Europe

En bref:

  • La TT est une micro‑voiture électrique mexicaine annoncée à ~100 000 pesos (~5 000 €) pour ~50 km d’autonomie, rendue possible par une batterie minuscule, 80 % de pièces locales et une industrialisation frugale (lancement 12/2025, 20 unités/semaine).
  • Impossible en l’état en Europe pour une voiture M1 (normes de sécurité/homologation, coûts batteries/main‑d’œuvre) — l’équivalent réaliste serait un quadricycle L7e très dépouillé (≈ 7–12 k€) ou des politiques ciblées pour faire baisser les prix.

Le Mexique présentera en décembre une petite voiture électrique à… environ 5 000 €. La “Totalmente Tlaxcalteca” (TT), dévoilée au Forum Automobile de Tlaxcala 2025, promet une mobilité urbaine basique, locale et ultra-abordable. Derrière le coup d’éclat, une question qui pique: pourquoi un tel prix paraît impossible en Europe, alors que Renault 5 E-Tech et Volkswagen ID.2 visent toujours le plancher des 25 000 €?

Ce que l’on sait, et ce que l’on ne sait pas encore

  • Prix annoncé: 100 000 pesos (≈ 5 000–5 450 € selon le taux de change du moment)
  • Lancement: décembre 2025 (production initiale: 20 unités/semaine)
  • Fabrication: 80 % de composants produits au Mexique (État de Tlaxcala)
  • Positionnement: “dernière/avant-dernière mile” en ville, pas de concurrence frontale avec les grandes marques
  • Capacité: 5 places annoncées
  • Autonomie: env. 50 km par charge
  • Projet: privé (porté par un entrepreneur local), avec accompagnement institutionnel
  • Ambition: alternative économique aux motos et micro-voitures thermiques dans les agglomérations denses

Points en attente/zone grise:

  • Protocoles de sécurité et crash-tests: pas de détails publics à ce stade; les autorités locales évoquent des essais “pas à pas”
  • Homologation nationale et export: inconnue; la TT vise clairement un usage urbain local
  • Distribution, garantie, après-vente: non détaillés

📌 À retenir

  • La TT n’est pas une “rivale” de la Renault 5 ni de la future VW ID.2: c’est un engin urbain à très faible autonomie, pensé pour des trajets courts et un pouvoir d’achat limité.

Comment arrive-t-on à 5 000 €?

Un tel prix ne tombe pas du ciel. Il résulte d’un cumul de leviers industriels, techniques et réglementaires spécifiques au contexte mexicain.

  1. Une batterie minuscule
  • 50 km d’autonomie urbaine suggèrent un pack de l’ordre de 4 à 6 kWh. À prix cellule actuel, cela pèse quelques centaines d’euros, loin des 4 000–6 000 € d’un pack “européen” de 40–50 kWh.
  1. Un véhicule volontairement simple
  • Puissance modeste, vitesse urbaine, équipement réduit, peu d’électronique embarquée, pas d’ADAS sophistiqués: autant d’économies en matériel et en validation.
  1. Intégration locale de la chaîne d’approvisionnement
  • 80 % de pièces locales: moins de logistique longue distance, plus de flexibilité. Tlaxcala dispose d’un écosystème de sous-traitants auto, mobilisé pour ce projet.
  1. Une industrialisation “frugale”
  • Démarrage à faible cadence (≈ 1 000 unités/an) avec des moyens limités. CAPEX contenu, assemblage potentiellement plus manuel: coûts fixes bas, mais marges probablement serrées.
  1. L’environnement politique et concurrentiel
  • Soutien institutionnel non financier (mise en relation, réseaux de fournisseurs).
  • Contexte mexicain: discussions sur des droits de douane élevés (jusqu’à 50 %) sur les voitures/motos chinoises, ce qui protège temporairement des offres importées extrêmement agressives.

🎯 Chiffres clés

  • 100 000 pesos ≈ 5 000–5 450 €
  • 80 % de contenu local
  • 50 km d’autonomie annoncée
  • 20 véhicules/semaine au lancement

Pourquoi l’Europe ne peut pas (encore) suivre sur ce terrain

La “barrière du low-cost” en Europe est d’abord réglementaire et sociétale, avant d’être industrielle.

  1. Le mur réglementaire (et pour de bonnes raisons)
  • Homologation M1 “véritable voiture”: crash-tests complets, structure absorbante, airbags, ESC/ABS, eCall, protection piétons, etc.
  • Nouvelles obligations GSR2 (AEB, ISA, assistance intelligente, enregistreur de données…), cybersécurité (R155), mises à jour logicielles (R156), conformité batterie (R100/R10) et “battery passport” européen: tout cela ajoute des milliers d’euros et des mois d’essais/validation.
  1. Le mur industriel
  • Batterie et énergie: coûts de l’énergie plus élevés en Europe, gigafactories encore en montée en cadence, coût pack supérieur à l’Asie.
  • Main d’œuvre, garantie, réseau: standards de service et d’assurance qualité élevés, distribution structurée, protections juridiques clients: des coûts réels que le client européen attend… et paie.
  1. Le mur des attentes des usagers
  • En Europe, même “entrée de gamme” rime avec 4/5 places exploitables, 250–350 km WLTP, clim, connectivité, charge AC rapide, sécurité active: on est à des années-lumière d’un engin à 50 km d’autonomie.

📌 Comparatif express

CritèreTT (Mexique)Renault 5 E-Tech / VW ID.2 (Europe)
Prix cible≈ 5 000 €“< 25 000 €” annoncé
Autonomie≈ 50 km (urbain)300 km WLTP et +
Équipements sécuritéBasique (détails non publics)Équipements GSR2 complets
UsageTrajets urbains courts, “dernière mile”Voiture polyvalente, y compris voies rapides
HomologationLocale (à préciser)M1 UE, exigences élevées

Note: la Dacia Spring (fabriquée en Chine) illustre ce plancher européen actuel: ≈ 19 000–22 000 € hors bonus pour une petite citadine autour de 230–250 km WLTP. Côté “ultra-urbain”, l’équivalent le plus proche en Europe reste la catégorie L6e/L7e (type Citroën Ami): prix bas, mais prestations et sécurité limités, et pas une “voiture” M1.

TT, Olinia et la stratégie mexicaine: un laboratoire du “juste assez”

Le TT s’inscrit dans une dynamique locale qui mise sur la mobilité “suffisante”:

  • Olinia (projet fédéral à Puebla): mini-VE urbains entre 90 000 et 150 000 pesos, production distribuée, partenariats académiques (IPN, TecNM). Objectif: répondre à des besoins quotidiens concrets, à bas coût, avec des composants locaux.
  • Positionnement assumé: ne pas “battre Tesla”, mais offrir une alternative crédible à la moto ou à la micro-voiture essence dans la trame urbaine mexicaine.

💡 Conseil d’expert

  • Le “low-cost utile” n’est pas le “low-cost européen”: la TT démontre que l’abordabilité extrême suppose d’accepter une autonomie très faible, un périmètre d’usage restreint et des standards de sécurité beaucoup plus limités.

Ce que ce cas révèle des impasses (et des options) en Europe

Obstacles:

  • Réglementation: difficilement compressible sans renoncer à des avancées de sécurité routière majeures (Vision Zero).
  • Industrialisation: même avec des plateformes simplifiées, l’addition homologation + tests + fournisseurs UE + garanties ne descendra pas vers 5 000 € pour une M1.
  • Acceptabilité sociale et politique: difficile d’assumer publiquement un “retour en arrière” sur la sécurité ou de promouvoir des véhicules incapables de sortir d’un périmètre urbain.

Pistes crédibles:

  • Accélérer la catégorie L7e “électrique de proximité” (quadricycles lourds) pour des usages ciblés urbains et intermodaux, avec un cadre clair de sécurité minimale et d’infrastructures dédiées.
  • Mutualiser plateformes et composants entre constructeurs sur l’entrée de gamme, et cibler un vrai palier “sous 20 000 € TTC” (le programme Twingo électrique annoncé pour 2026 et les futurs “ID.1/ID.2” montrent la direction).
  • Achats groupés publics (collectivités, opérateurs de services) pour créer des volumes initiaux sur des micro-VE normalisés et tirer les coûts vers le bas.
  • Politique batterie: sécuriser des kWh LFP “européens” à bas coût pour les petites citadines, et simplifier la validation quand c’est techniquement justifié.
  • Maintenir des bonus ciblés sur les petites batteries, plutôt que des aides uniformes qui favorisent les gros packs.

📢 Bon à savoir

  • Le TT n’existerait pas à ce prix en Europe en catégorie M1. En revanche, un équivalent “quadricycle” L7e électrique, très dépouillé, est réaliste entre 7 000 et 12 000 € TTC… pour des usages et des performances très proches.

Les angles morts et les risques du modèle TT

  • Sécurité: en l’absence de données d’essai, il faut rester prudent. Même en ville, la collision avec des véhicules lourds (SUV, utilitaires) met à l’épreuve les structures légères.
  • Viabilité économique: à 20 véhicules/semaine, la structure de coûts dépend d’une extrême frugalité et de marges minimes. La montée en cadence sera déterminante.
  • Service et garantie: le coût total de possession (durabilité batterie, pièces, réseau d’entretien) reste une inconnue clé pour le client final.
  • Socle réglementaire: si le cadre mexicain se durcit (sécurité, environnement), le prix pourrait remonter.

En filigrane: une leçon de segmentation

La TT ne “bat” pas la R5 ou l’ID.2: elle joue une autre partition. Elle rappelle plutôt ceci:

  • L’électrique n’est pas un bloc monolithique. Entre la citadine polyvalente européenne et l’ultra-urbaine mexicaine, il existe des marchés, des contraintes et des attentes radicalement différentes.
  • Vouloir le “vrai low-cost” en Europe suppose d’assumer des véhicules de catégorie différente (L7e) et de mieux articuler leur place dans l’écosystème (vitesse, voies d’accès, assurance, stationnement, recharge).

Au fond, la TT pose une question simple: préférons-nous des voitures électriques “pour tout faire” à 25 000 €… ou des engins très ciblés à 5 000–10 000 € pour 80 % des trajets urbains? La réponse est politique autant qu’industrielle, et elle dessinera la mobilité d’entrée de gamme de la décennie.

Californie: fin du “passe-droit” HOV pour les électriques — le signal que l’Europe doit entendre

En bref:

  • La Californie supprime l’accès solo des véhicules électriques aux voies HOV (fin du programme CAV dès le 1er oct. 2025), ce qui fluidifiera les voies réservées, augmentera la pression sur les voies générales et risque de freiner légèrement l’achat de VE chez les navetteurs.
  • Le signal pour l’Europe : privilégier l’occupation plutôt que la motorisation, rendre les avantages temporels conditionnels et réversibles, et coupler voies réservées et mesures ciblées (tarification dynamique, incitations vérifiées, plateformes de covoiturage).

L’un des symboles de l’essor des voitures électriques aux États‑Unis vit ses dernières heures. À partir du 1er octobre, la Californie met fin à l’accès des véhicules à faibles émissions aux voies réservées au covoiturage (HOV) lorsqu’ils roulent seuls. Un détail de signalisation? Pas vraiment. C’est un marqueur de maturité du marché, avec des effets tangibles sur le trafic, l’attractivité des VE et, surtout, un avertissement utile pour les métropoles européennes qui déploient leurs propres voies réservées.

Ce qui change en Californie

  • Fin du programme Clean Air Vehicle (CAV) le 1er octobre 2025, faute de réautorisation fédérale.
  • Environ 500 000 conducteurs dotés d’un autocollant actif perdent l’accès solo aux HOV; plus d’un million de vignettes ont été délivrées depuis 2000.
  • Période de tolérance de 60 jours: avertissements jusqu’au 1er décembre; ensuite, amende à partir de 490 dollars.
  • Fin des remises sur certains péages et voies express pour les véhicules portant l’autocollant.
  • 13 États au total seront concernés par la fin du dispositif fédéral.

📌 À retenir

  • Le programme avait été prolongé jusqu’en 2027 côté californien, mais sans base fédérale il s’éteint.
  • L’objectif initial — accélérer l’adoption des VE — se heurte désormais à leur massification: plus d’un véhicule sur quatre vendu en Californie était zéro émission en 2024/2025.

Un tournant révélateur d’un marché devenu adulte

La “fast lane” gratuite a longtemps été un puissant levier d’adoption: des travaux académiques ont montré que l’accès HOV a pesé lourdement dans les achats de PHEV/BEV en Californie au début des années 2010, précisément parce qu’il apporte un gain de temps quotidien, donc un bénéfice perçu immédiat. Mais à mesure que le parc électrique a explosé, le paradoxe est apparu: la voie conçue pour regrouper des passagers s’est remplie de conducteurs seuls… en VE.

Ce retrait acte trois réalités:

  1. L’incitation a atteint sa limite d’efficacité: la rareté (et donc le gain de temps) a disparu quand trop de véhicules y accèdent.
  2. Le maintien d’un privilège “solo” pour une motorisation brouille la finalité des HOV: réduire le nombre de véhicules, pas seulement leurs émissions.
  3. La politique d’incitations doit évoluer avec la maturité du marché: de l’amorçage (perks visibles) vers des mécanismes plus fins et ciblés.

Trafic: à quoi s’attendre à court terme?

  • HOV plus fluides: le retour aux critères d’occupation (2+ ou 3+ selon les tronçons) devrait restaurer la vitesse commerciale des voies réservées.
  • Lignes générales plus denses: l’intégration de centaines de milliers de solos-VE dans le flux ordinaire ajoutera de la pression aux heures de pointe, surtout dans la Bay Area, LA et Silicon Valley.
  • Effet carpool: une part des ex-bénéficiaires cherchera à conserver l’accès via le covoiturage réel. Dans les corridors où l’offre (aires de rabattement, applis, “casual carpool”) est mature, le report peut être significatif.

ℹ️ Bon à savoir
Le CHP appliquera une période pédagogique de 60 jours. Les tags de type FasTrak CAV basculent en mode standard: plus de rabais de péage sans respecter l’occupation.

Adoption des VE: risque de coup de froid?

L’accès HOV a historiquement compté parmi les incitations non financières les plus efficaces, précisément parce qu’il transforme un achat vert en gain quotidien. Sa suppression n’effondrera pas le marché — dont les ressorts sont aujourd’hui plus divers (autonomie, réseau de recharge, TCO, offres d’occasions) —, mais elle enlève un argument décisif pour une frange d’acheteurs pendulaires.

Ce risque est d’autant plus sensible que:

  • certains crédits ou rabais évoluent ailleurs dans l’écosystème;
  • le marché de l’occasion se structure, où un “perks gap” se ressent plus fortement;
  • l’infrastructure de recharge reste inégale selon les bassins d’emploi.

Dans ce contexte, on peut s’attendre à un léger tassement de la demande “utilitaire” (navetteurs) si aucune incitation de substitution n’émerge (ex. réductions ciblées de péage conditionnées à l’occupation, stationnement préférentiel covoituré + VE, etc.).

Le précédent norvégien: quand les privilèges saturent

La Norvège a, elle aussi, offert l’accès aux voies de bus aux VE… avant de restreindre localement lorsque la part de VE a commencé à dégrader la vitesse des bus, parfois en conditionnant l’accès au nombre d’occupants ou à des créneaux horaires. Le message est clair: quand la transition réussit, l’incitation “voie dédiée” doit être recalibrée pour préserver la performance du réseau et l’équité d’usage.

L’Europe est prévenue: calibrer sans sur-promettre

En France et en Europe, les voies réservées (VR2+, losange) se déploient progressivement sur des axes congestionnés (Grenoble A48, entrées de Lyon sur A6/A7, Rennes, Strasbourg, Île‑de‑France, etc.). Le cadre de la LOM permet de réserver des voies aux covoitureurs, transports collectifs, taxis, et potentiellement aux véhicules à très faibles émissions — mais la pratique, à juste titre, privilégie l’occupation plutôt que la motorisation.

Le cas californien suggère trois règles d’or:

  • Priorité à l’occupation, pas à la motorisation: l’objectif d’une HOV est de transporter plus de personnes par véhicule.
  • Dynamique avant tout: activation aux heures de pointe, seuils d’occupation ajustés par corridor, supervision par “radars de covoiturage”.
  • Équité et lisibilité: pas de privilège solo durable pour une technologie, au risque d’une révolte des usagers et d’une performance en chute.

💡 Conseil d’expert

  • Évitez la promesse d’un accès “VE solo” aux VR2+. Si incitation il y a, qu’elle soit conditionnée au covoiturage (VE + 2/3 personnes) ou à des fenêtres horaires très limitées, et réversible.
  • Couplez VR2+ et tarification intelligente: bonus de péage pour véhicules réellement covoiturés (capteurs/OD pass), indépendamment de la motorisation.
  • Soutenez l’offre: aires de covoiturage bien placées, voies d’entrecroisement dédiées, applications temps réel et intégration MaaS pour créer un “covoiturage de transit” crédible.

Quelles alternatives d’incitation quand le marché mûrit?

  • Incitations financières mieux ciblées: bonus à l’achat modulé par revenus, soutien aux flottes et à l’utilitaire léger, aides à l’occasion et au retrofit.
  • Coûts d’usage optimisés: tarifs nocturnes attractifs, abonnements workplace charging, facilités de stationnement résidentiel pour VE partagés.
  • Avantages “temps” conditionnels: réduction de péage pour covoiturage vérifié, voies express à tarification dynamique, mais sans passe‑droit de motorisation.
  • Politiques de demande: zones à faibles émissions cohérentes, management du stationnement en centre, information voyageur intégrée avec l’offre ferroviaire/RER métropolitain.

✅ À surveiller en Europe

  • Déploiement des radars de covoiturage (Rennes, Strasbourg, Paris) et leur acceptabilité.
  • Les seuils d’occupation adoptés sur les grands corridors (2+ vs 3+ en très forte charge).
  • La tentation d’“acheter” de l’adoption VE via un accès solo: le cas californien montre que le retour en arrière est coûteux politiquement et techniquement.

En refermant le chapitre HOV pour les VE solos, la Californie rappelle une évidence parfois oubliée: une incitation qui marche finit par devoir s’effacer. Aux métropoles européennes d’anticiper cet “après”, en gardant le cap sur l’efficacité des voies réservées — le covoiturage réel — tout en réinventant des incitations adaptées à un marché électrique devenu majoritaire.

Offensive de charme ou cheval de Troie ? Pourquoi le centre R&D de Xiaomi à Munich bouscule l’automobile européenne

En bref:

  • Xiaomi inaugure à Munich un centre R&D/ design auto clé pour préparer son entrée en Europe (objectif 2027) en misant sur le logiciel, l’UX et l’écosystème "Human x Car x Home".
  • Cette stratégie menace les constructeurs européens sur le terrain techno/prix/UX, mais se heurte à des garde‑fous réglementaires (batterie, cybersécurité, data) et à des défis après‑vente/valeur résiduelle.
  • Réponse attendue des Européens : accélérer le "software‑defined vehicle", simplifier les gammes et capitaliser sur la sécurité, la qualité perçue et le réseau.

Xiaomi a inauguré à Munich son premier centre de R&D et de design automobile hors de Chine. Un symbole fort, au cœur de l’écosystème BMW, mais surtout une pièce maîtresse d’une stratégie à horizon 2027: faire entrer l’automobile européenne dans l’ère “Human x Car x Home”, où la voiture n’est plus un objet isolé mais un nœud d’un écosystème logiciel.

Au-delà du vernis marketing, cette implantation est un mouvement offensif, calculé et potentiellement déstabilisant pour les constructeurs traditionnels. Décryptage, enjeux et lignes de faille.

Pourquoi Munich, et pourquoi maintenant

  • Un hub d’ingénierie unique en Europe: fournisseurs, laboratoires, compétences châssis/logiciel, essais et homologation. Nio, Xpeng et Li Auto y ont déjà des équipes; Xiaomi s’inscrit dans cette concentration de talents.
  • Un signal aux clients et aux régulateurs européens: adapter en amont produits et process aux standards UE (sécurité, qualité, cybersécurité, mises à jour OTA).
  • Une rampe de lancement 2027: Xiaomi a confirmé son ambition de commercialiser ses EV en Europe à partir de 2027. Le centre munichois prépare les produits, les usages et le go-to-market.

📌 À ce stade, l’entité démarre autour d’une cinquantaine de collaborateurs, avec recrutements en cours (ingénierie, design, fonctions marché). Plusieurs profils-clés issus de BMW ont rejoint l’équipe, dont des responsables design. Des sources de place citent également une direction locale confiée à un ex-cadre de BMW Motorrad.

Ce que Xiaomi vient vraiment chercher: déplacement de la bataille vers le logiciel

Xiaomi transpose dans l’auto la recette qui a fait son succès dans l’électronique grand public:

  • Intégration écosystémique “Human x Car x Home”: continuité smartphone/maison connectée/voiture, services et mises à jour rapides, expérience utilisateur homogène.
  • R&D focalisée sur l’intelligence embarquée: conduite assistée/automatisée, dynamique véhicule, plateformes électriques de nouvelle génération, UX et services connectés.
  • Itération produit accélérée: cycles courts hérités du monde tech, avec des releases logicielles fréquentes et des roadmaps publiques.

Bon à savoir

  • Xiaomi a rejoint l’“Industriepool” du Nürburgring et est partenaire de la piste. La SU7 Ultra y a signé un “temps de référence” médiatisé. Comme toujours sur la Nordschleife, la définition exacte d’un “record” dépend des catégories et conditions: prudence sur les comparaisons brutes.

La pression sur les constructeurs européens: trois fronts à défendre

  1. Logiciel et expérience
  • Force de Xiaomi: OS maison, interface fluide, services intégrés, time-to-market. L’auto devient terminal connecté.
  • Risque pour les européens: dette technique, hétérogénéité des stacks, promesses ADAS/OTA parfois décalées. Le marché ne pardonne plus les UX datées.
  1. Coûts et cadence
  • En Chine, la SU7 a atteint 200 000 livraisons en 119 jours selon la marque. Effet d’échelle, maîtrise batterie/électronique et structure de coûts compétitive.
  • En Europe, tarifs et logistique renchériront l’équation. Mais une stratégie d’import au lancement, puis d’assemblage local ou de partenariats industriels, pourrait lisser l’atterrissage.
  1. Image et confiance
  • Les marques premium allemandes gardent un capital perçu unique: qualité perçue, dynamique, réseau, valeur résiduelle.
  • Xiaomi travaille son identité (recrues design, finitions), mais devra convaincre sur la sécurité des réseaux de communication véhiculaire, la protection des données et l’après-vente.

Vers une guerre des prix ? Les garde-fous européens

  • Tarifs anti-subventions, exigences d’origine et audits de chaîne de valeur batterie limitent l’arbitrage pur par le prix.
  • Batterie: le “passeport batterie” de l’UE devient obligatoire dès 2027, avec transparence CO2 et matières premières.
  • Cybersécurité: conformité UN R155/R156 (gestion cyber/OTA), homologation UE, exigences de data governance (RGPD, Data Act) et potentielles contraintes de localisation des données.
  • Marché atone: la demande EV européenne est plus heurtée qu’en 2021-2022, ce qui rend une guerre des prix à grande échelle risquée pour tous.

En clair: Xiaomi peut frapper sur le rapport techno/prix, mais devra composer avec une ceinture réglementaire serrée et un marché exigeant. La “guerre des prix” existe déjà en Chine; en Europe, elle sera plus encadrée.

Ce que révèle le centre de Munich sur la stratégie 2027

  • Produit: finaliser l’adaptation aux normes UE des SU7/YU7 et possibles variantes, affiner châssis/ADAS pour les routes européennes, travailler l’acoustique et la qualité perçue.
  • Go-to-market: indices d’un modèle “agency” (pilotage central de la distribution), avec recrutement retail/logistique/after-sales pour bâtir un réseau agile et numérique.
  • Partenariats: coopération annoncée avec universités et instituts, et ouverture à des partenaires industriels pour la smart mobility et l’IA “responsable”.

Astuce d’expert

  • Les premiers volumes pourraient viser des marchés à homologation plus fluide et infrastructures denses, avant d’élargir. Attendez-vous à une montée en puissance progressive par vagues, plutôt qu’un big bang.

Ce qui reste (volontairement) flou

  • Usine européenne: aucun site annoncé. Sans production locale, les coûts d’accès et la logistique pèseront; avec une usine, l’acceptabilité politique grimpe mais le capex aussi.
  • Gamme UE: Xiaomi ne confirme pas quels modèles arriveront en premier, ni les spécifications européennes (batterie, charge, ADAS).
  • Services et monétisation: quelles briques seront incluses, lesquelles sous abonnement, et à quels prix ? Le différenciateur logiciel dépendra beaucoup de ces arbitrages.

Les faiblesses potentielles de Xiaomi en Europe

  • Après-vente et pièces: bâtir un réseau robuste prend des années. Les délais de pièces détachées et la qualité d’intervention seront scrutés.
  • Valeur résiduelle: l’inconnue majeure pour les flottes et particuliers. Sans historique, les offres LLD/LOA devront être agressives.
  • Perception sécurité/données: indispensable de clarifier l’architecture data (stockage, anonymisation, accès) et la gouvernance IA.

Ce que doivent faire les constructeurs européens, maintenant

  • Accélérer le “software-defined vehicle” avec des stacks cohérentes, OTA fiables, OTA fiables et des interfaces irréprochables.
  • Recentrer l’offre: moins de variantes, plus de pertinence. Optimiser plateformes, réduire coûts fixe/variable, sécuriser la batterie (chimie, sourcing).
  • Capitaliser sur les atouts européens: dynamisme routier, ergonomie, sécurité active, qualité perçue. Et lier ces atouts à des services simples et lisibles.

✅ À retenir

  • Le centre R&D de Xiaomi à Munich n’est pas un simple relais marketing: c’est la clef de voûte d’une entrée en Europe par le logiciel, l’UX et l’écosystème.
  • 2027 sera un test grandeur nature: alignement réglementaire, réseau, confiance clients… et capacité de Xiaomi à conserver son avantage de cadence.
  • La menace n’est pas seulement le prix: c’est la redéfinition du “produit automobile” en service numérique sur roues. Les marques européennes doivent répondre sur ce terrain.

En une phrase, l’implantation munichoise de Xiaomi acte le déplacement de la bataille automobile européenne vers le logiciel et l’écosystème: l’offensive de charme pourrait bien être, pour les acteurs établis, un cheval de Troie redoutablement efficace.

Bosch supprime 13 000 postes : signal d’alarme pour la filière électrique française

En bref:

  • Bosch supprime 13 000 postes d’ici 2030 (objectif 2,5 Md€ d’économies) : signal d’alerte sur les surcapacités, la pression prix chinoise et le ralentissement de la bascule vers le BEV en Europe.
  • Risque de contagion pour la filière française (Valeo, Forvia, OPmobility et PME fournisseurs), particulièrement les rangs 2/3 exposés aux réallocations et à la guerre des prix.
  • Préconisations clés : basculer vers l’électronique/logiciels BEV, sécuriser contrats/plafonds matières, montée en intégration et compétences, et appui public (énergie, visibilité réglementaire, achats stratégiques).

La décision de Bosch de supprimer 13 000 emplois d’ici 2030, principalement en Allemagne, sonne comme un coup de tonnerre dans la supply chain automobile européenne. Au-delà du choc social, c’est un révélateur des tensions structurelles de la transition vers l’électrique sur le Vieux Continent. La question se pose désormais sans détour : la filière française (Valeo, Forvia, OPmobility, et tout l’écosystème de sous-traitants) peut-elle éviter l’effet domino ?

Ce que dit l’annonce de Bosch — et ce qu’elle signifie

  • 13 000 postes supprimés d’ici 2030, près de 10 % des effectifs en Allemagne et environ 3 % du total mondial.
  • Objectif financier explicite : combler un écart de coûts de 2,5 milliards d’euros par an dans la division Mobility.
  • Sites allemands particulièrement visés, avec des exemples déjà cités comme Reutlingen (jusqu’à 1 100 postes en moins d’ici 2029) et une fermeture prévue à Waiblingen.
  • Contexte assumé par la direction : production mondiale « atone », surcapacités, concurrence asiatique agressive, retards européens en électromobilité et conduite automatisée, et incertitudes réglementaires autour de 2035.

À retenir, surtout, le message sous-jacent : la marche pour être compétitif dans les technologies de la voiture électrique et logicielle s’est encore élevée en Europe. Et la la pression sur les prix, tirée par la Chine, dicte le tempo.

Trois chocs simultanés qui bousculent l’Europe

  • Demande moins dynamique que prévu en Europe
    Adoption électrique plus lente, infrastructures encore inégales, arbitrages budgétaires des ménages défavorables aux véhicules chers. Les plans produits et les capacités installées se heurtent à une demande qui n’est pas (encore) au rendez-vous.
  • Concurrence par les coûts et par le rythme industriel
    Les acteurs chinois produisent vite, bien et à moindre coût, avec une intégration verticale poussée (batterie, électronique de puissance, software). Ils imposent une pression accrue sur les prix des composants.
  • Incertitudes réglementaires
    L’horizon 2035 reste politiquement sensible, créant un « entre-deux » défavorable : l’ICE recule sans disparaître, le BEV n’absorbe pas assez vite, et les lignes de coûts restent trop lourdes pour deux mondes à la fois.

Le risque de contagion en France

La France est imbriquée dans la chaîne de valeur allemande et européenne. La La contraction de volumes chez les constructeurs d’outre-Rhin (Volkswagen annonce 35 000 suppressions en Allemagne, Daimler Truck 5 000) finit toujours par remonter vers les fournisseurs transfrontaliers.

  • Valeo
    Exposée à l’électrification (e-moteurs, power electronics, gestion thermique, ADAS) mais toujours liée à des volumes ICE résiduels et à une forte pression sur les prix. Sa force en électronique/logiciel est un atout… à condition de préserver les marges face à la guerre des prix.
  • Forvia (Faurecia + Hella)
    Mix produit contrasté : sièges/intérieurs sous pression de coûts, « clean mobility » encore dépendante de l’ICE (exhaust), montée en puissance de l’électronique/éclairage avec Hella. Le désendettement reste clé dans un contexte de volumes erratiques et de renégociations tarifaires serrées.
  • OPmobility (ex-Plastic Omnium)
    Modules/carrosserie exposés aux cycles, pari sur l’hydrogène et l’éclairage, mais cadence BEV lente et investissements lourds à amortir.
  • La sous-traitance de rangs 2 et 3
    C’est le maillon le plus vulnérable : délais de paiement qui s’allongent, re-sourcing à bas coûts, exigences de productivité incessantes. Les régions françaises industrielles (Hauts-de-France, Grand Est, Bourgogne-Franche-Comté, Auvergne-Rhône-Alpes) seront en première ligne.

Chiffres clés — pour situer l’onde de choc

  • 13 000 suppressions de postes chez Bosch d’ici 2030, après 9 000 déjà annoncées depuis 2024 (environ la moitié réalisées).
  • 2,5 milliards d’euros d’économies annuelles visées dans la division Mobility.
  • Croissance attendue « < 2 % » en 2025 pour Mobility, bien en deçà des plans initiaux.
  • En toile de fond : Continental, ZF, Schaeffler ont aussi engagé des coupes ; Ford, VW et Daimler Truck réduisent la voilure en Allemagne.

Pourquoi c’est un avertissement pour l’électrique en France

  • Le « trou d’air » de volumes. La bascule BEV ne compense pas encore les reculs du thermique. Les chaînes BEV tournent trop souvent en sous-charge, d’où l’obsession des coûts.
  • Le contenu local sous tension. Les batteries et l’électronique de puissance pèsent le plus dans la valeur d’un BEV. Tant que ces briques ne sont pas massivement européennes, la valeur créée localement reste inférieure aux attentes.
  • Le pricing power s’effrite. Avec une offre chinoise agressive, les constructeurs exigent des baisses continues auprès de leurs fournisseurs. Le risque de « délocalisation par les prix » réapparaît, y compris sur des pièces à plus forte valeur ajoutée.

Ce que peuvent faire les acteurs français — leviers concrets

  • Re-mix produit au pas de charge
    Accélérer le basculement vers les lignes à forte valeur sur BEV (power electronics, software embarqué, thermal management intelligent, ADAS), et sortir plus vite des lignes ICE résiduelles où la demande s’érode et les prix s’effondrent.
  • Verrouiller des contrats pluriannuels avec clauses de matières/énergie
    Indexation transparente pour éviter l’érosion des marges dans un contexte de volatilité.
  • Monter en intégration sélective
    Internaliser des sous-ensembles critiques (cartes de puissance, contrôle-commande, mécatronique) quand cela sécurise la marge et la propriété intellectuelle.
  • Nouveaux débouchés « adjacents »
    Stockage stationnaire, seconde vie et recyclage batteries, rétrofit pro/petites séries, modules de charge, thermal management pour data centers — des marchés moins sensibles aux cycles auto.
  • Alliances et consolidation ciblées
    Partage R&D, plateformes communes de composants, achats groupés de semis/batteries, co-investissements dans des lignes critiques (SiC/GaN).
  • Compétences et reconversion
    Requalifier vite (opérateurs mécanique → tests/qualif électronique, câblage HV, sécurité fonctionnelle). Sans accélération massive de la formation, le « gap » de compétences restera le premier goulet d’étranglement.

Le rôle des politiques publiques — où appuyer

  • Accélérer la compétitivité-coût des sites européens
    Énergie à prix stable pour l’industrie, amortissements accélérés, prêts longs dédiés aux relocalisations de briques critiques (électronique de puissance, BMS, chimie d’électrodes).
  • Visibilité réglementaire
    Stopper le « stop & go ». Une trajectoire claire sur 2030-2035 (normes, critères d’empreinte carbone des véhicules et des batteries) conditionne les plans industriels.
  • Demande et accès au marché
    Dispositifs de bonus/score environnemental intelligents, mais lisibles et durables pour soutenir l’absorption de volumes BEV européens. Politiques d’achats publics exemplaires (flottes État/collectivités).
  • « Buy Europe » stratégique et accords de réciprocité
    Sans fermer le marché, exiger des conditions équitables sur les subventions, l’accès aux marchés publics et la transparence des chaînes de valeur.

Scénarios 12–24 mois pour la filière française

  • Scénario central
    BEV en progression modérée, pression prix persistante. Les grands fournisseurs accélèrent les redéploiements internes et sauvent les marges par la productivité. Sous-traitance de rang 2/3 en risque élevé, concentration accrue.
  • Scénario bas
    Demande BEV européenne déçoit, guerre des prix s’intensifie. Nouvelles coupes d’effectifs chez plusieurs équipementiers, rationalisation d’empreintes industrielles en France et en Allemagne.
  • Scénario haut
    Stabilisation macro en Europe, montée en cadence des gigafactories et de l’électronique de puissance locale. Reprise progressive des commandes BEV, meilleure captation de valeur en France sur les modules critiques.

Les signaux à surveiller de près

  • Calendrier et modalités définitives autour de 2035 en Europe.
  • Rythme de montée en cadence des usines batteries/electronique de puissance en France et voisins.
  • Conditions de marché: intensité de la concurrence chinoise et évolutions tarifaires commerciales.
  • Indicateurs de marge brute et de book-to-bill chez Valeo, Forvia, OPmobility.
  • Annonces d’alliances industrielles (co-développement, plateformes communes, achats semis/batteries).

En clair, Bosch ne fait pas qu’annoncer un plan social : il pointe le cœur du problème européen, celui d’une d’une transition électrique mal synchronisée entre demande, compétitivité et contenu local. La filière française a des atouts — électronique, logiciels, thermal management — mais elle doit accélérer la reconfiguration et sécuriser sa profitabilité dans un marché qui impose désormais sa loi des coûts et du tempo industriel.

Vigoz Cixi à 120 km/h en pédalant : révolution utile ou mirage séduisant ?

En bref:

  • Vigoz: tricycle caréné français (2 avant/1 arrière), 22 kWh pour ~160 km, 120 km/h visés, pédalier générateur (PERS) pour participation active, catégorie L5e (permis B/B1), 2 places en tandem.
  • Proposition séduisante (sobriété, autoroute, mobilité active) mais le pédalage apporte peu d’énergie; risques majeurs = homologation/sécurité à 120 km/h, prix/industrialisation et modèle commercial encore flous.

Le Vigoz de Cixi fait parler de lui: un tricycle électrique caréné, 120 km/h sur autoroute, et… un pédalier pour participer à la propulsion. Entre prouesse d’ingénierie et promesse de mobilité plus sobre, l’engin interroge autant qu’il intrigue. Peut-il vraiment bousculer la micro-mobilité et remplacer une petite voiture au quotidien, ou n’est-ce qu’une fausse bonne idée?

À retenir

  • Vélomobile tricycle (3 roues) conçu en France, combinant moteur électrique et pédalier électronique sans chaîne (PERS).
  • Vitesse visée 120 km/h, autonomie annoncée ~160 km (batterie 22 kWh), charge complète en ~6 h sur prise 220 V.
  • Positionnement réglementaire: tricycle à moteur (catégorie L5e), permis B1/B, immatriculation et assurance; accès aux autoroutes en principe possible pour un L5e conforme.
  • Sécurité annoncée: structure à zones de déformation, ceintures 3 points, inclinaison active, cockpit fermé (clim/chauffage), Isofix arrière.
  • Commercialisation: calendrier et tarifs non confirmés; Cixi évoque un modèle par abonnement plutôt que la vente.

C’est quoi, exactement, le Vigoz ?

Vigoz est un “véhicule actif” conçu par la start‑up savoyarde Cixi: un tricycle fermé (2 roues avant, 1 arrière) pensé comme un hybride entre vélo couché et micro‑voiture. Le conducteur est en position semi‑couchée, un second siège (ou volume de chargement) est disposé en tandem derrière, avec un long espace traversant annoncé (des skis tiennent à bord). Côté gabarit, la tête du conducteur culmine à ~130 cm, la hauteur totale serait d’environ 1,65 m: assez pour rester visible dans le trafic.

Fiche express:

  • Batterie: 22 kWh sous le plancher
  • Autonomie cible: ~160 km
  • Vitesse max: 120 km/h (prototypes déjà testés à ~100 km/h)
  • Masse: ~550 kg
  • Architecture: carénage intégral, inclinaison active des trains, freinage régénératif
  • Confort/usage: ventilation, clim/chauffage, vitres ouvrantes, tandem 2 places, Isofix

📌 Bon à savoir: à ce stade, ni prix public ni liste d’attente officiels n’ont été annoncés. C’est un signe que la phase d’industrialisation et d’homologation n’est pas totalement bouclée.

Pédaler pour aller à 120 km/h: comment ça marche (vraiment) ?

Le pédalier PERS (Pedaling Energy Recovery System) n’entraîne pas les roues: c’est un générateur (série) qui convertit l’effort humain en électricité. On pédale à son rythme; le système module l’assistance, gère l’accélération et peut même commander le ralentissement.

Ce que le pédalage apporte… et ses limites:

  • Contrôle et ressenti: doser la vitesse à la pédale est intuitif pour certains, motivant pour d’autres (on “conduit” en restant actif).
  • Un appoint énergétique modeste: un humain soutenu produit 100–200 W en continu. En 30 minutes, cela représente 0,05–0,1 kWh. Rapporté à une conso cible autour de 12–15 kWh/100 km, c’est tout au plus quelques centaines de mètres d’autonomie “gagnés”. Autrement dit, l’intérêt du pédalage est surtout comportemental (santé, implication) et fin de gestion d’énergie, pas un véritable “rechargeur” de batterie.
  • Efficacité: le carénage et l’aérodynamique feront bien plus pour l’autonomie que le pédalage lui‑même.

💡 Conseil d’expert: si vous cherchez à “recharger en pédalant”, gardez l’ordre de grandeur en tête. Même 200 W pendant 1 h, c’est 0,2 kWh — symbolique face à un pack de 22 kWh. L’intérêt principal du système est la conduite active et la sobriété induite.

Homologation et cadre légal: où se situe le Vigoz ?

  • Catégorie probable: L5e (tricycles à moteur). Cixi met en avant une conception “toutes routes”, y compris autoroutes, à la vitesse de 120 km/h.
  • Permis: B1 (dès 16 ans) ou permis B.
  • Autoroute: les tricycles L5e homologués et aptes à tenir l’allure (au‑delà de 80 km/h) peuvent y accéder. Des modèles comme les Can‑Am/MP3 y circulent déjà. Le Vigoz s’inscrirait dans cette logique.
  • Casque: pour un tricycle fermé avec ceintures, le port du casque n’est en général pas requis.
  • Pistes cyclables/bus: le Vigoz n’est pas un vélo; il relève des voies et règles des véhicules motorisés.

Important: début septembre 2025, plusieurs médias et Cixi mentionnent l’homologation “toutes routes”. Mais on ne trouve pas encore de détails publics sur la réception européenne (type, variantes, puissances, dispositifs obligatoires). Tant qu’aucun numéro de réception ni conditions précises ne sont publiés, il faut considérer que la mise en circulation reste à confirmer dans ses modalités.

Sécurité: mieux qu’un vélo, moins qu’une voiture

Cixi évoque des zones de déformation, un habitacle fermé, des ceintures 3 points et un système d’inclinaison pour la stabilité. C’est d’ores et déjà bien supérieur à un vélo ou à un vélomobile artisanal. Reste que:

  • La catégorie L n’exige pas les mêmes crash‑tests qu’une voiture M1 (airbags, intrusion latérale, compatibilité choc, etc.).
  • À 120 km/h, les contraintes de sécurité passive deviennent celles du “monde auto”. Sans normes M1 (ou équivalent), il ne faut pas attendre les niveaux de protection d’une citadine moderne.
  • L’inclinaison active et un centre de gravité bas sont des atouts dynamiques, mais s’évalueront sur route, en charge, sur chaussée dégradée et par vent latéral.

📢 Point de vigilance: un L5e aussi rapide est inédit. Les assurances, les autorités et Euro NCAP observeront de près la cohérence entre performances et niveau de protection.

Où se place le Vigoz face à Ami, Twizy, Microlino… et la future Twingo électrique ?

  • Citroën Ami (L6e, 45 km/h): très accessible, urbaine pure, pas d’autoroute. Vigoz vise un autre usage (péri‑urbain, voies rapides).
  • Renault Twizy (L7e, 80 km/h): plus dynamique, mais ouvert, rustique, et limité en vitesse. Vigoz promet confort et autoroute.
  • Microlino (L7e, ~90 km/h): proche d’une micro‑voiture “lifestyle”, chère et urbaine chic. Vigoz se veut utilitaire/actif, 2 vraies places en tandem, et 120 km/h.
  • Twingo électrique (M1 attendue vers 2026): vraie voiture, 4 places, sécurité automobile complète, services, réseau. Consommation comparable ou meilleure en ville, mais masse et empreinte matière supérieures. Vigoz jouera la carte sobriété matérielle et “mobilité active”.

Ce que Vigoz change:

  • Il ouvre le champ de la micro‑mobilité aux voies rapides et à l’autoroute, seuil symbolique et pratique pour des trajets péri‑urbains et inter‑villes.
  • Il combine confort/capotage et engagement physique, une proposition unique pour réduire la sédentarité… sans renoncer à la vitesse.

Ce qui peut coincer:

  • Le coût. Une batterie de 22 kWh, une structure carénée, l’inclinaison active, la clim: l’addition grimpe vite. Beaucoup de micro‑EV finissent au‑delà de 15–20 k€; certains dépassent 25–30 k€.
  • L’acceptabilité. Pédaler pour commander un “véhicule” peut dérouter. Et sur autoroute, il faudra convaincre du sérieux du package sécurité.
  • La polyvalence. 2 places en tandem, peu de volume latéral: pratique à deux, moins familial qu’une petite voiture.

Empreinte énergétique et usage réel

  • Consommation visée: avec 22 kWh pour 160 km, on tourne autour de 13–14 kWh/100 km, soit le niveau des meilleures citadines électriques. Un bon score sur voie rapide, excellent en péri‑urbain si l’aérodynamique tient ses promesses.
  • Sobriété matérielle: ~550 kg et 3 roues, c’est bien moins de matière qu’une M1 (~1–1,3 t). À l’échelle du cycle de vie, c’est un argument fort.
  • Climat et réseau: charge AC 2,3 kW (prise domestique) en ~6 h; facile à loger, à garer, et compatible avec un usage quotidien. L’hiver en montagne (usage historique de Cixi) sera le juge de paix: chauffage + relief = stress test.

Modèle économique et industrialisation: le grand écart à éviter

Cixi met en avant une fabrication en Haute‑Savoie (Poisy) et un modèle par abonnement. La promesse: un coût mensuel “compétitif face aux petites électriques”. Reste à connaître:

  • Le ticket d’entrée (caution, durée d’engagement, services inclus, assurance).
  • Le dimensionnement du réseau après‑vente (pièces, réparation carrosserie, calibration de l’inclinaison).
  • Le calendrier: malgré des présentations riches, on ne voit pas encore de carnets de commande publics ni de tarifs. Plusieurs acteurs de ce segment ont trébuché sur ce point.

🧭 Repère marché: Microlino a percé en assumant le côté “objet-plaisir” plus que l’outil rationnel. Le Vigoz prétend l’inverse: utilitaire, actif et “autoroutier”. Il devra tenir cette promesse dans la vraie vie (et au bon prix).

Vraie innovation ou fausse bonne idée ?

Le Vigoz coche beaucoup de cases techniques et philosophiques: moins de matière, plus d’efficience, autoroute possible, mobilité active intégrée. C’est une proposition rare, cohérente avec la transition (décarboner la tonne‑kilomètre et la sédentarité). Mais trois écueils restent devant lui: l’homologation détaillée, le prix (même en LLD) et la crédibilité sécurité à 120 km/h vis‑à‑vis d’une M1. Si Cixi apporte des preuves solides sur ces trois points, le Vigoz pourrait inventer un vrai nouveau segment. Sinon, il restera une brillante curiosité d’ingénieurs dans un marché impitoyable.


Sources consultées: communications Cixi (fiche Vigoz, technologie PERS), New Atlas, Designboom, Electrek, presse régionale et spécialisée (Mobiwisy, Auto Plus, L’Automobiliste, etc.). Informations techniques et réglementaires vérifiées au 25/09/2025 dans le cadre des catégories L en France.

Rappel pour risque d’incendie et Poissy à l’arrêt: double pression sur Stellantis et ses petites électriques

En bref:

  • Stellantis rappelle ~16 000 PHEV (2019–2022) pour risque d’emballement thermique : contact concession, ne pas recharger et prise en charge gratuite (maj BMS ou remplacement de batterie).
  • L’arrêt de 15 jours de l’usine de Poissy (≈2 000 salariés concernés) révèle un marché européen atone et fragilise la compétitivité des petites électriques du groupe ; priorité à la transparence sur la panne, à la gestion après‑vente et à une feuille de route industrielle claire.

La fin septembre tourne au test de résistance pour Stellantis. D’un côté, un rappel de 16 000 hybrides rechargeables pour risque d’incendie de batterie. De l’autre, l’usine de Poissy (Yvelines) à l’arrêt pendant trois semaines en octobre, avec 2 000 salariés en chômage partiel ou en congés. Deux secousses, techniques et industrielles, qui retombent sur un même enjeu: la compétitivité des petites électriques et hybrides européennes du groupe, déjà malmenées par un marché plus heurté et une concurrence frontale.

Sans alarmisme mais sans angélisme, décryptons ce que cela signifie pour les clients, les équipes industrielles et la trajectoire électrique de Stellantis en Europe.

Rappel batteries: ce que l’on sait, ce que cela implique

  • Modèles concernés (produits entre 2019 et 2022): Peugeot 3008 V2 et 508 V2, Citroën C5 Aircross, DS 7 Crossback, Opel Grandland X.
  • Volume en France: environ 16 000 véhicules (campagne publiée sur RappelConso le 19 septembre; communication opérée par le constructeur à partir du 22–23 septembre). À l’échelle européenne, des extensions sont possibles.
  • Le risque: défaut de batterie haute tension pouvant provoquer une surchauffe et, dans des cas extrêmes, un incendie. À ce stade, la presse ne fait pas état d’accidents graves liés à ce défaut en France.
  • Les consignes: contacter son concessionnaire, vérifier le VIN (n° de série) via RappelConso ou le site de la marque. Par prudence, ne pas recharger la batterie avant prise en charge.
  • Les remèdes possibles:
    • mise à jour du logiciel de gestion de batterie (BMS) – environ 45 minutes,
    • remplacement complet de la batterie – 6 à 7 heures selon le modèle.
    • Toutes les opérations sont prises en charge par le constructeur, même hors garantie.
  • Contexte sécurité: l’emballement thermique d’une batterie lithium‑ion reste un événement rare, mais ses conséquences pouvant être sévères, les autorités et industriels appliquent un principe de prudence maximal.

📌 Bon à savoir

  • Les codes campagne recensés par la presse spécialisée: MYF (Peugeot), GK8 (Citroën/DS), KT8 (Opel).
  • Le groupe a mené plusieurs rappels ces derniers mois (logiciel moteur en avril, ceintures de 308 en août, moteurs 1.5 BlueHDi l’été dernier), signe d’une pression qualité forte et d’une coordination après-vente sollicitée.

Poissy à l’arrêt trois semaines: un signal industriel préoccupant

  • Calendrier: arrêt de production du 13 au 31 octobre (15 jours ouvrés).
  • Effectifs: environ 2 000 salariés en chômage partiel et/ou en congés.
  • Motif avancé: “marché difficile en Europe” et pilotage des stocks avant fin d’année.
  • Modèles produits sur site: Opel Mokka et DS 3 (en thermique, hybride et électrique selon versions); cadence d’environ 420 véhicules/jour selon la direction.
  • Sous-jacent commercial: des sources industrielles et syndicales évoquent des ventes en retrait, notamment du Mokka.
  • Inquiétudes locales: les représentants du personnel redoutent un affaiblissement de la charge à moyen terme, d’autant que l’arrêt du Mokka est annoncé pour 2028 et qu’aucun successeur n’est officiellement affecté à la ligne. En toile de fond, le site de Poissy fait l’objet d’appétits externes (projet de stade), ce qui renforce les crispations.

✅ À retenir

  • 15 jours d’arrêt industriel en Île‑de‑France, un fait rare, avec effets en chaîne probables chez sous‑traitants et équipementiers.
  • La direction annonce des travaux et des formations durant la pause, signe qu’elle cherche à maintenir les compétences et la performance du site.

Pourquoi cette double alerte pèse sur la stratégie “petites électriques”

  • Confiance technologique: même si le rappel vise des PHEV de segments supérieurs, chaque incident batterie rejaillit sur l’ensemble des technologies électrifiées. Or la bataille de 2025–2026 se joue aussi sur des B‑SUV et citadines électriques/hybrides accessibles (Mokka‑e, DS 3 E‑Tense, e‑208, ë‑C3). Toute érosion de confiance peut peser sur l’adoption.
  • Ressources après‑vente: diagnostics BMS et éventuels remplacements de batteries mobilisent du temps atelier, des packs et des compétences HV. À grande échelle, cela peut frictionner la disponibilité commerciale et le service client si l’orchestration n’est pas fluide.
  • Pression économique: au premier semestre 2025, Stellantis a enregistré une perte nette de 2,3 Md€. Les campagnes qualité (logistique, pièces, immobilisations) se chiffrent vite, alors que les prix de vente sont sous tension. Dans le même temps, les petites électriques européennes subissent la concurrence par les coûts (constructeurs chinois, offres agressives) et la montée des hybrides.
  • Signaux de demande: l’arrêt de Poissy pour piloter les stocks révèle un décalage entre offre et demande sur des véhicules cœur de marché. Dans un contexte d’aides publiques moins généreuses et de taux de crédit encore élevés, le client arbitre âprement le prix au kilomètre.
  • Empreinte industrielle: sans perspective produit claire pour Poissy au-delà de 2028, la crédibilité de la filière “petites voitures” en Île‑de‑France s’étiole. C’est pourtant un atout stratégique pour amortir des plateformes polyvalentes (BEV/PHEV/HEV) au plus près du marché français et européen.

💡 Conseil d’expert

  • La clé, à court terme, est la transparence sur la cause racine du défaut batterie et la vitesse de résolution. À moyen terme, l’équation sera gagnée avec des petites électriques à coûts battus (chimie LFP/LFMP, packs simplifiés, standardisation) et une visibilité industrielle solide pour sécuriser sites et compétences.

Ce que Stellantis doit réussir maintenant

  • Stabiliser la qualité perçue:
    • préciser le périmètre du rappel et l’avancement des corrections,
    • garantir des délais courts en atelier et un parc de batteries de remplacement suffisant,
    • accompagner les clients (mobilité, communication proactive).
  • Protéger Poissy:
    • annoncer un modèle de remplacement compatible avec les attentes européennes (B‑SUV/C‑SUV compacts, versions HEV et BEV),
    • renforcer la flexibilité multi‑énergies sur ligne pour lisser les à‑coups de demande.
  • Repositionner l’offre “petites électriques”:
    • sécuriser des versions d’entrée à prix plancher avec chimies moins coûteuses,
    • clarifier la stratégie d’hybridation légère/pleine pour franchir les normes CO2 sans casser le ticket d’entrée,
    • accélérer les volumes là où la demande est la plus réactive (flottes, LLD à mensualités contenues).
  • Maîtriser les coûts:
    • achats de cellules mutualisés, packs “design‑to‑cost”,
    • simplification des variantes et options pour concentrer l’outil industriel.

Les 5 questions à suivre dans les prochaines semaines

  1. Le taux de véhicules nécessitant un remplacement complet de batterie (et la disponibilité des packs).
  2. Les délais de rendez‑vous atelier et l’expérience client sur la campagne.
  3. La trajectoire des commandes de Mokka‑e/DS 3 E‑Tense, e‑208/ë‑C3 face aux Renault 5, MG4, BYD Dolphin et Dacia Spring remaniée.
  4. Un éventuel engagement produit pour Poissy après 2028.
  5. Les signaux financiers du T3: stocks, mix (HEV vs BEV), marge sous pression ou stabilisation.

📊 Chiffres clés

  • 16 000 véhicules rappelés en France (PHEV 2019–2022) pour risque d’incendie batterie.
  • 15 jours d’arrêt à Poissy en octobre; environ 2 000 salariés concernés.
  • 2,3 Md€ de perte nette au S1 2025, dans un contexte de ventes en retrait et de marché européen compliqué.

Que faire si votre véhicule est concerné

  • Vérifiez votre VIN (carte grise, champ E) sur RappelConso ou le site de la marque.
  • Contactez votre concession pour diagnostic. Par prudence, évitez de recharger avant la prise en charge.
  • Demandez:
    • la nature de l’intervention (mise à jour BMS vs remplacement),
    • un moyen de mobilité si immobilisation,
    • une attestation d’intervention pour vos dossiers assurance/CT.
  • Surveillez toute alerte bord, odeur inhabituelle, montée anormale en température; garez‑vous et contactez l’assistance en cas de doute.

En filigrane, cette double alerte rappelle une réalité du moment: la transition s’accélère, mais elle exige une exécution industrielle et qualité sans faille. À Stellantis désormais de transformer cet épisode en sursaut de méthode, pour rassurer ses clients et sécuriser l’avenir de ses petites électriques en Europe.

Fin du bonus US à 4 000 $ sur l’électrique d’occasion: ruée, trou d’air… et leçons pour l’Europe

En bref:

  • Aux États‑Unis, la fin du crédit d’impôt de 4 000 $ pour l’électrique d’occasion déclenche une ruée avant le 30/09, des tensions de stock et un risque de « trou d’air » au T4 ; la prime a amélioré la liquidité mais rendu le marché dépendant des aides.
  • Pour l’Europe, éviter les coupures brutales en faveur de trajectoires pluriannuelles et d’aides ciblées au point de vente (micro‑bonus pour ménages modestes), renforcer la confiance via un passeport batterie standardisé et lisser l’accès au leasing plutôt que des primes ponctuelles.

Dernière ligne droite aux États‑Unis: le crédit d’impôt fédéral pour voitures électriques d’occasion (jusqu’à 4 000 $) s’éteint le 30 septembre 2025. À une semaine de l’échéance, la mécanique s’emballe: stocks qui fondent, remises spectaculaires, files d’attente chez les concessionnaires. Mais que reste‑t‑il une fois l’incitation retirée? L’expérience américaine éclaire utilement les choix européens, où l’électrique d’occasion peine encore à se démocratiser.

Ce qui se passe aux États‑Unis cette semaine

  • Ruée avant l’extinction: selon Cox Automotive, les ventes d’EV neufs ont atteint un record en août (146 332 unités, 9,9 % de part de marché), tandis que l’occasion a bondi à près de 41 000 unités (+22 % sur un mois, +59 % sur un an). L’accélération devrait se prolonger jusqu’au 30/09.
  • Stocks en tension: le “days’ supply” des EV neufs est tombé à 62 jours (plus bas de 2025). Côté occasion, 36 jours seulement en moyenne, avec Tesla à 26 jours.
  • Prix et comportements: un indice de gros des valeurs d’EV d’occasion progresse de 1,2 % sur un mois à fin août, signe d’une pression de la demande avant l’arrêt. Près d’un acheteur sur deux déclare avancer son achat pour verrouiller le crédit (Cars.com).
  • “Loophole” de dernière minute: l’IRS autorise le crédit si un contrat “binding” est signé et un paiement effectué avant le 30/09, même si la livraison intervient après. Le rapport “time of sale” du concessionnaire reste indispensable.
  • Leasing en première ligne: la fin du crédit appliqué aux baux (via le régime “commercial”) renchérit fortement les loyers — un point crucial car l’EV se loue plus qu’il ne s’achète aux USA.
  • Après le 30/09: la plupart des analystes anticipent un “trou d’air” au T4, puis une normalisation graduelle. Certains constructeurs (ex. GM) ajustent déjà la cadence de production à une demande attendue plus molle, malgré des records de ventes juste avant l’échéance.

📌 À retenir

  • Le crédit d’occasion (jusqu’à 4 000 $) n’était accessible que sous 25 000 $ de prix de vente, créant un “sweet spot” très liquide sur ce créneau.
  • Les remises constructeurs ont parfois pris le relais pour préserver le volume, mais le retrait des incitations sur le leasing pèsera mécaniquement sur les mensualités.

Le crédit d’occasion a‑t‑il structuré un vrai marché?

Bilan nuancé plutôt que verdict expéditif.

  • Oui, pour la liquidité et le “match” offre‑demande sur l’entrée de gamme: le plafond de 25 000 $ a fluidifié l’écoulement des retours de LOA/LLD et des véhicules en fin de garantie, créant un référentiel de prix lisible pour les ménages sensibles au budget.
  • Non, pour les fondamentaux: les freins structurels (assurance élevée dans certains États, hétérogénéité de la recharge publique, incertitude perçue sur l’état de batterie) n’ont pas été “réparés” par une subvention. Ils réapparaissent dès que l’incitation disparaît.
  • Effet collatéral: une “latéralisation” vers le leasing, dopé par la possibilité de capter l’intégralité du crédit au point de vente. Côté revente, cette dynamique gonfle l’offre future d’occasion… mais au prix d’une volatilité quand l’incitation s’arrête brutalement.
  • Prix: les données disponibles suggèrent un soutien temporaire des valeurs avant l’échéance (légère hausse à gros), mais un reflux probable post‑crédit, surtout sur les modèles qui “tenaient” leur prix grâce au coup de pouce. À l’inverse, des baisses d’MSRP côté neuf pourraient s’amplifier pour compenser la disparition des aides — sans forcément neutraliser l’effet sur les loyers.

En bref, le crédit d’occasion a contribué à créer un marché plus liquide et plus lisible… mais sa suppression met à nu la dépendance aux incitations lorsque les fondamentaux (coût total de possession, qualité de recharge, transparence batterie) ne sont pas au niveau attendu par le grand public.

Leçons concrètes pour l’Europe (et la France)

L’Europe n’a pas d’outil homogène dédié à l’électrique d’occasion. Quelques enseignements très opérationnels se dégagent du cas américain.

  1. Éviter les “falaises budgétaires”
  • Les à‑coups (“on/off”) provoquent ruées, puis trous d’air. Préférer des trajectoires pluriannuelles, dégressives et annoncées très en amont. Côté États‑Unis, l’annonce puis l’extinction au 30/09 ont créé un pic artificiel suivi d’un risque de creux.
  1. Miser sur des aides ciblées, simples, au point de vente
  • L’efficacité tient autant à la simplicité qu’au montant. Un mécanisme point‑de‑vente, ciblé sur les ménages modestes et les véhicules à forte utilité (familles, ruraux, pros), maximise l’effet sans inflationner tout le marché.
  • Éviter les seuils “magiques” (25 000 $, 30 % du prix) qui rigidifient les stickers et créent des effets de bord.
  1. Outiller la confiance dans l’occasion
  • Instituer un “passeport batterie” standardisé à l’échelle européenne (état de santé certifié, historique de charge, garanties transférables).
  • Étiquetage TCO (coût total de possession) normalisé sur l’occasion: énergie, maintenance, assurance, garanties.
  • Harmoniser et étendre la recharge AC/DC là où l’occasion se joue (grands ensembles, zones rurales, voirie).
  1. Jouer le levier fiscal local plutôt que la subvention brute partout
  • Exonérations de TVS/CG/parkings résidentiels, gratuités zones ZFE, TVA réduite sur la rénovation/diagnostic batterie: autant de leviers moins procycliques que des primes “cash”.
  • Renforcer les scrappages conditionnés (prime à la conversion) applicables à l’occasion zéro émission.
  1. Cadencer l’offre par les flottes
  • L’occasion se nourrit des retours de flotte: fixer des quotas d’EV dans les marchés publics et les grandes flottes privées, avec durées/ kilométrages optimisés pour l’arrivée sur l’occasion à bon TCO.
  1. Sur le leasing: préserver l’accessibilité
  • Si l’on subventionne un élément, que ce soit le loyer lui‑même (et non une ristourne amont), pour lisser l’effort mensuel et éviter un choc à l’arrêt du dispositif — le point faible observé aux États‑Unis.

💡 Conseil d’expert

  • L’aide la plus “structurelle” pour l’occasion n’est pas toujours une prime achat: généraliser un diagnostic batterie standard, opposable et peu coûteux, peut avoir plus d’impact sur la valeur résiduelle et la confiance que 1 000 € de subvention.

Où en est la France?

  • Pas d’aide nationale spécifique à l’électrique d’occasion depuis la suppression du bonus dédié. En revanche, la prime à la conversion (mise au rebut d’un ancien véhicule) reste mobilisable pour l’achat d’un EV neuf ou d’occasion selon conditions.
  • Depuis juillet 2025, le “coup de pouce” via les CEE soutient l’achat neuf, avec un bonus additionnel de 1 000 € à partir du 1er octobre pour les modèles européens dotés de batteries produites en Europe. Ce sont des aides “neuf”: l’occasion reste en retrait.
  • LLD sociale: le dispositif de location longue durée à bas loyer doit être relancé (moins de 200 €/mois annoncés) — un point clé pour alimenter l’occasion dans 2 à 4 ans via les retours de location.

🎯 Pistes très pragmatiques pour 2026

  • Créer un “micro‑bonus” ciblé sur l’EV d’occasion sous un seuil de prix réaliste (ex. 18–22 k€), réservé aux ménages modestes, versé au point de vente et conditionné à un passeport batterie normalisé.
  • Flécher une part des CEE vers la remise en état/garantie batterie (reconditionnement, diagnostics certifiés), avec TVA réduite sur ces prestations.
  • Expérimenter dans 3 métros et 3 territoires ruraux un pack “occasion zéro émission”: aide à l’achat + carte de recharge publique + stationnement résidentiel gratuit 12 mois + assurance à tarif encadré pour premiers acquéreurs.

Impact attendu en Europe si rien n’est fait

  • Dépréciation encore plus rapide de certaines générations d’EV occasion, faute de confiance batterie et de filet d’aides ciblées.
  • Retard de massification sur les foyers modestes, ceux-là mêmes qui structurent le marché de seconde main.
  • Volatilité accrue des mensualités de LOA/LLD à la merci des politiques “stop‑and‑go”, avec effets de ciseaux sur la valeur résiduelle.

🎙️ Parole de terrain
“Ce qui met vraiment en confiance un acheteur d’EV d’occasion, c’est la preuve de l’état de la batterie et des coûts d’usage prévisibles. La prime ne suffit pas si on ne sait pas ce qu’on achète.” Un leitmotiv entendu chez les distributeurs comme chez les associations de consommateurs.

Ce qu’il faut surveiller dans les 6 prochains mois

  • États‑Unis: l’ampleur du “dip” post‑30/09 sur l’occasion, l’évolution des loyers de leasing, et l’ajustement des MSRP sur les modèles cœur de marché.
  • Europe: annonces nationales 2026 sur l’occasion (Pays‑Bas, pays nordiques, Italie/Allemagne après la réduction des aides), et initiatives locales (villes/ZFE) côté stationnement et recharge résidentielle.
  • France: calendrier précis de la LLD sociale 2.0, éventuelle intégration d’un passeport batterie dans la réglementation, et articulation CEE/occasion.

En définitive, l’extinction brutale du bonus US à 4 000 $ n’enterre pas l’électrique d’occasion, mais elle rappelle une évidence: sans politiques stables, ciblées et centrées sur la confiance (batterie, TCO, recharge), les incitations créent des pics… puis des creux. L’Europe a l’occasion de choisir la voie de la prévisibilité et du “service” au client d’occasion plutôt que celle des montagnes russes budgétaires.

Poids des électriques : pourquoi Volvo réinvente la sécurité à l’ère des batteries

En bref:

  • Les VE sont 20–30 % plus lourds, donc plus d’énergie à dissiper et un risque de mauvaise compatibilité en collision.
  • Volvo repense l’architecture: la batterie devient partie intégrante de la cage de sécurité (caisson central, chemins de charge, front réinventé) — démontré sur l’EX90.
  • Les protocoles de crash doivent évoluer (scénarios variés, compatibilité, intégrité batterie) pour que l’industrie conçoive des voitures « crash‑first » plutôt que plus lourdes.

L’électrique a réglé le problème des émissions au pot d’échappement, pas celui… des kilos. Au moment où les packs batteries gonflent l’autonomie, ils alourdissent aussi dangereusement les voitures. Chez Volvo, la patronne du centre de sécurité, Åsa Haglund, l’assume : il faut « repenser » la sécurité des VE en profondeur. Que signifie concrètement cette réinvention, pour Volvo et pour toute l’industrie, du crash-test à l’architecture des carrosseries ?

Le poids, un défi d’ingénierie… et de physique

Plus de masse, c’est plus d’énergie à dissiper en cas de choc (E = 1/2 m v²). Or, une voiture électrique équivalente pèse typiquement 20 à 30 % de plus qu’une thermique. Exemple parlant cité par Volvo: l’EX90 est environ 25 % plus lourd que le XC90 de taille proche. Les raisons sont connues:

  • batteries logées dans le plancher (densité énergétique encore limitée)
  • renforts structurels pour protéger la batterie
  • pneus et freins dimensionnés en conséquence

Ce surpoids a deux implications majeures:

  • compatibilité de choc: un véhicule lourd expose davantage un véhicule plus léger en face-à-face
  • gestion d’énergie: la structure doit proposer plus de « chemins de charge » pour absorber et détourner l’effort sans intrusion dans l’habitacle ni atteinte au pack batterie

Åsa Haglund: intégrer la batterie au cœur de la « cage de sécurité »

La ligne directrice de Volvo est claire: faire de la batterie un élément de la cage de sécurité, pas un point faible.

  • Batterie intégrée au caisson central: rigidité accrue, protection contre intrusion et débris
  • Avant repensé: l’absence de gros moteur n’offre plus le « bloc » qui absorbait naturellement l’effort. Il faut créer des longerons et boîtes de crash capables de s’activer selon des obstacles variés (véhicule, poteau, rebord…)
  • Multiplication des chemins de charge: la face avant ne vise plus seulement le test « barrière plate », mais des géométries réelles et complexes
  • Avantage annexe: plus de réservoir essence à l’arrière, donc moins de risques de fuite/embrasement post-choc

« Notre métier est de rendre chaque voiture sûre », résume Haglund. Sur un VE, c’est d’abord une affaire d’architecture.

Ce que Volvo a déjà changé (et montré)

Volvo a orchestré une démonstration publique inédite: une séquence de trois crashs avec des EX90 électriques. D’abord, un freinage automatique a évité un premier impact à 50 km/h. Puis une autre EX90 a violemment percuté latéralement le véhicule à l’arrêt, à 55 km/h, en plein centre d’habitacle. Les mesures sur mannequins concluent à l’absence de blessures graves probables, grâce:

  • à une cage de sécurité qui détourne et absorbe l’effort latéral
  • aux airbags latéraux et rideaux déclenchés instantanément
  • à la gestion d’énergie latérale renforcée, dimensionnée pour des masses élevées

Objectif affiché: dépasser les exigences réglementaires en s’alignant sur des accidents « du monde réel », pas uniquement sur les scénarios standardisés.

Crash-tests: pourquoi les protocoles doivent évoluer

Les organismes de notation ont, eux aussi, commencé à s’adapter à l’évolution du parc (SUV plus lourds, électriques).

  • IIHS (États-Unis): depuis 2021, le test de choc latéral a été durci avec une barrière mobile plus massive (~1 900 kg) lancée plus vite (60 km/h), pour mieux mimer l’impact d’un SUV moderne. Plusieurs modèles ont d’abord peiné avant de se hisser au niveau.
  • Euro NCAP (Europe): la barrière mobile déformable progressive (MPDB) introduite en 2020 évalue mieux la « compatibilité » entre véhicules, c’est-à-dire la manière dont la masse/rigidité de l’un affecte l’autre. Euro NCAP a aussi ajouté le « far-side » (protection côté opposé) et renforce progressivement les critères ADAS.

Prochaine étape logique? Intégrer davantage de scénarios multi-impacts, d’angles variés, et des évaluations spécifiques aux risques batterie (intégrité du pack, coupure HV, maîtrise thermique), déjà pris en compte par les constructeurs rigoureux, mais encore trop partiellement normés côté consommateur.

📌 À retenir

  • Le surpoids des VE change l’équation sécuritaire: plus d’énergie à dissiper, compatibilité de choc clé.
  • Les structures doivent multiplier les « chemins de charge » et protéger la batterie comme un organe critique.
  • Les protocoles de tests évoluent, mais l’écart se réduit lentement avec la complexité des accidents réels.

Les chantiers techniques ouverts par l’électrique

  • Structure et matériaux: généralisation d’aciers à très haute résistance et d’alliages d’aluminium, traverses « crash boxes » multi-étagées, traversées de plancher renforcées autour du pack.
  • Intégration batterie: caissons étanches et rigidifiés, fixations anti-arrachement, surveillance électronique (coupure HV automatique), séparation thermique des modules.
  • Face avant sans moteur: besoin de longerons et renforts calibrés pour déclencher l’absorption avec des obstacles variés (bordures, poteaux, chocs décalés).
  • Habitacle: airbags centraux et ceintures à prétensionneurs multi-étages pour contenir le déplacement des occupants dans les chocs latéraux et « far-side ».
  • Aides actives: capteurs (caméra, radar, LiDAR) pour éviter/atténuer le choc. La meilleure énergie à dissiper, c’est celle qu’on n’a pas accumulée.

💡 Conseil d’expert
Ne jugez pas la sécurité d’un VE à sa seule note « étoiles ». Surveillez les sous-notes de choc latéral durci, de compatibilité, la présence d’airbag central, et la robustesse de l’assistance active (AEB piétons/cyclistes, carrefours).

Le poids n’est pas qu’une histoire de batterie

Les VE ne sont pas seuls en cause: la montée en taille/hauteur des SUV, la quête d’équipements et de confort alourdissent tout le marché. Mais la batterie fixe une « assiette » de masse élevée, centrée dans le plancher, qui:

  • abaisse le centre de gravité (bon pour l’évitement)
  • rigidifie le plancher (bon pour l’intégrité)
  • exige une excellence en gestion d’énergie crash (sinon, risque d’intrusion/endomagement du pack)

À moyen terme, l’industrie mise sur des packs plus denses (cell-to-pack, chimies NMC/LMFP optimisées, puis semi‑solide/solide) pour réduire la masse à autonomie constante, et sur l’optimisation logicielle (ADAS) pour éviter les scénarios les plus sévères.

Ce que cela change pour toute l’industrie

  • Conception: les VE modernes doivent être dessinés « crash-first » autour de la batterie, avec des faces avant polyvalentes et des caissons centraux extrêmement rigides.
  • Essais: vers des matrices de tests enrichies (angles, multi-impacts, vitesses plus élevées) et des critères batterie explicites côté consommateurs.
  • Marché: la sécurité ne doit pas reposer sur la masse. La « compatibilité » entre véhicules de tailles différentes doit devenir un indicateur clé, au risque sinon d’une spirale du « toujours plus lourd ».

✅ Chiffres-clés

  • +20 à +30 %: surpoids typique d’un VE vs thermique équivalent
  • ~1 900 kg et 60 km/h: barrière et vitesse du nouveau choc latéral IIHS
  • 55 km/h: vitesse du choc latéral démonstrateur EX90 (séquence à trois véhicules)

En filigrane, l’électrique oblige à remettre les fondamentaux sur la table: répartir, guider et dissiper l’énergie d’un choc avec des structures « intelligentes », sans se contenter d’un bon bulletin aux tests historiques. Volvo en fait une doctrine; le reste du marché devra suivre, protocole après protocole.

Poignées affleurantes: Pékin change la donne, les constructeurs européens sous pression

En bref:

  • La Chine veut interdire d’ici juillet 2027 les poignées totalement affleurantes dépourvues de secours mécanique, pour garantir l’ouverture après choc ou panne électrique (un an de transition), en réponse à incidents par grand froid, inondations et enquêtes (ex. NHTSA/Tesla).
  • Conséquence: les constructeurs mondiaux devront ajouter une redondance mécanique (poids/coût en hausse) — les gains aérodynamiques réels sont modestes (~0,005–0,01 de Cd, ≈0,6 kWh/100 km) — et l’industrie devrait harmoniser une solution « mécanique+tech » pour tous les marchés.

Les poignées de porte rétractables, devenues le symbole des voitures “tech” et des électriques efficientes, sont dans le viseur des autorités chinoises. Un projet de norme vise à interdire, dès juillet 2027, les poignées totalement dissimulées sans redondance mécanique, avec une période de transition d’un an. Pour un marché clé, c’est un tournant qui bouscule l’équilibre entre design, aérodynamisme et sécurité… et met au défi Tesla, Volkswagen, Mercedes et consorts.

Au-delà du débat esthétique, l’enjeu est concret: sécurité d’extraction après choc, fiabilité par grand froid ou sous fortes pluies, et gains énergétiques parfois surestimés. Décryptage, chiffres à l’appui, et scénarios pour l’Europe.

Ce que prépare la Chine

  • Champ: tous les véhicules neufs vendus en Chine seraient concernés.
  • Principe: interdiction des poignées entièrement affleurantes si elles ne disposent pas d’une alternative mécanique d’ouverture accessible en toutes circonstances.
  • Calendrier visé: entrée en vigueur autour de juillet 2027, avec un an de transition.
  • Objectif officiel: garantir l’accessibilité immédiate des ouvrants pour les occupants et les secours, y compris en cas de perte d’alimentation électrique.

ℹ️ Le projet est avancé mais encore en discussion. L’orientation est claire: bannir les systèmes entièrement escamotés sans secours mécanique et exiger une redondance tangible.

Pourquoi ce durcissement maintenant

Les régulateurs s’appuient sur une accumulation d’incidents et de données techniques.

  • Incidents documentés par temps froid (moteurs de poignées gelés) et lors d’inondations (court-circuits).
  • Après accident, des secours retardés par l’absence de prise manuelle évidente.
  • Enquête ouverte aux États‑Unis par la NHTSA sur ~174 000 Tesla Model Y (année 2021) pour des poignées devenues inopérantes après coupure d’alimentation 12 V.
  • Témoignages et plaintes consommateurs recensés depuis plusieurs années, notamment sur Tesla.

📌 Chiffres clés

  • 67%: taux d’ouverture post‑collision latérale pour des poignées électroniques, contre 98% pour des poignées mécaniques classiques (indice C‑IASI cité par la presse spécialisée chinoise).
  • 0,005 à 0,01: gain de coefficient de traînée (Cd) attribué aux poignées affleurantes dans des études ingénierie (bien inférieur aux 0,03 parfois revendiqués).
  • ~0,6 kWh/100 km: économie d’énergie typique associée aux poignées affleurantes, selon des estimations relayées par l’industrie.
  • Jusqu’à 12%: part des interventions après‑vente liée à ces poignées chez certains constructeurs.
  • x3: surcoût d’une poignée motorisée face à une poignée mécanique; +7 à +8 kg de mécanismes estimés selon modèles.

L’aérodynamisme: efficacité réelle vs promesse marketing

L’argument aérodynamique est juste… mais son ordre de grandeur compte.

  • À vitesse stabilisée, gagner 0,005 à 0,01 de Cd se traduit par une baisse de traînée mesurable, mais modeste au regard des autres sources de frottement (rétroviseurs, soubassements, pneumatiques, jantes).
  • L’économie d’environ 0,6 kWh/100 km reste faible en coût d’usage (≈0,12 € aux 100 km à 0,20 €/kWh), et peut être partiellement annulée par le poids et les pertes des mécanismes.
  • Des gisements d’efficience plus “rentables” existent: gestion active des entrées d’air, soubassements carénés, optimisation des roues/jantes, pneumatiques à faible résistance au roulement.

💡 Conseil d’ingénierie
Pour préserver l’autonomie WLTP et sur autoroute, les constructeurs gagneront plus à optimiser l’ensemble “front-end + soubassement + trains roulants” qu’à conserver des poignées entièrement escamotées sans secours mécanique.

Les marques face au mur: qui doit changer quoi

  • Tesla
    • Très exposée symboliquement (modele S/3/Y). Le patron du design, Franz von Holzhausen, a indiqué travailler sur une solution fusionnant commande électronique et commande mécanique pour une action unique et intuitive, y compris en cas de perte d’alimentation. Un pas vers la conformité chinoise et les attentes de la NHTSA.
  • Volkswagen Group
    • A déjà privilégié des poignées semi‑affleurantes en Chine. FAW‑Audi déploie des solutions hybrides (micro‑contacts, cordon mécanique d’urgence visible qui se déploie après choc).
  • Mercedes‑Benz et BMW
    • Nombre de modèles premium utilisent des poignées affleurantes ou escamotables (EQE/EQS, iX3, etc.). Les versions chinoises devront intégrer une prise mécanique évidente, voire revenir à une poignée semi‑dissimulée.
  • Coréens, Chinois, autres
    • Hyundai/Kia, Nio, Xpeng, BYD… Tous les modèles vendus en Chine passeront à une poignée avec redondance mécanique explicite; certains ont déjà commencé à “re‑mécaniser” la cinématique.

📊 Impact industriel

  • Conception: nouvelle architecture de serrure/loquet, masse et coût en hausse, revalidation crash et compatibilité avec déclencheurs pyrotechniques de déverrouillage.
  • Production: éviter deux façonnages de porte et deux gammes de poignées (Chine vs reste du monde) plaide pour une solution mondiale unique.
  • Marketing/produit: “semi‑affleurant” et “secours mécanique visible” deviendront des arguments sécurité, non un compromis.

Europe et États‑Unis: suivisme, divergence ou convergence?

  • États‑Unis: pas d’interdiction annoncée, mais des investigations ciblées (NHTSA) et un débat grandissant sur l’accessibilité d’urgence. Des évolutions de design sont déjà en cours chez certains constructeurs.
  • Europe: pas de projet de bannissement à ce stade. En revanche, les protocoles Euro NCAP évoluent: pénalisation des fonctions vitales reléguées au tout‑tactile, intérêt accru pour l’accessibilité post‑choc. La Chine, premier marché mondial, peut créer un effet d’entraînement industriel dont l’Europe pourrait bénéficier sans légiférer.

Scénarios pour l’UE (2026‑2028)

  • Minimal: statu quo réglementaire, mais bascule “de fait” des poignées vers des solutions avec levier mécanique visible sur les véhicules globalisés.
  • Intermédiaire: exigences d’identification/accès du secours mécanique, intégrées dans les évaluations sécurité.
  • Maximal (peu probable à court terme): encadrement strict du tout‑escamotable, sur le modèle chinois.

Quelles alternatives de design “safe by default”

  • Poignées semi‑affleurantes à traction mécanique, avec capteur capacitif pour le confort mais ouverture purement mécanique en secours.
  • Déverrouillage pyrotechnique post‑choc couplé à une mise en saillie mécanique de la prise de main (ressort), sans dépendance électrique.
  • Languette/cordon d’urgence rouge, normé et immédiatement visible après collision (extérieur et intérieur).
  • Levier intérieur mécanique unique, clairement signalé et accessible aux places arrière (éviter les trappes cachées).
  • Conception anti‑givre: joints chauffants localisés, gouttières d’évacuation, motorisations protégées (IP renforcé).

✅ À retenir

  • Les gains aérodynamiques des poignées affleurantes existent mais restent modestes; la sécurité d’extraction pèse désormais plus lourd.
  • Le projet chinois impose une redondance mécanique et met fin aux poignées totalement dissimulées sans secours.
  • L’industrie n’a ni l’envie ni l’intérêt économique de maintenir deux architectures de poignées: la solution “mondiale” sera mécaniquement redondante.
  • En Europe, la pression viendra d’abord de l’évaluation sécurité et de la standardisation industrielle, plus que d’un bannissement.

💬 Astuce sécurité (utilisateurs)
Repérez dès maintenant le levier mécanique d’ouverture d’urgence de votre voiture (y compris aux places arrière) et montrez‑le à vos proches. En cas de choc ou de panne 12 V, ce réflexe compte.

En somme, la poignée “tech” va devoir redevenir d’abord une poignée “utile”: intuitive, visible et mécaniquement fiable. Les constructeurs perdront un peu d’épure aérodynamique… pour gagner beaucoup en crédibilité sécurité, sans sacrifier l’autonomie là où elle se joue vraiment.

Inde–Afrique du Sud : l’axe électrique qui peut surprendre l’Europe

En bref:

  • Un axe Inde–Afrique du Sud émerge : l’Inde crée des volumes bas‑coût sur 2/3‑roues et petites voitures, tandis que l’Afrique du Sud devient un hub d’assemblage NEV soutenu par des incitations et des investisseurs chinois.
  • Pour l’Europe, double risque et opportunité — perte de parts sur l’entrée de gamme et débouchés export — la réponse exige des EV abordables (<20–25k€), localisation industrielle (JVs, batteries) et soutien financier/géopolitique.

L’Europe scrute la Chine et les États-Unis. Mais, discrètement, un nouvel axe se dessine entre l’Inde et l’Afrique du Sud — production, investissements et marchés à conquérir — qui pourrait rebattre les cartes de la transition automobile mondiale.

L’Inde vient de franchir le cap symbolique du million de véhicules électriques vendus sur l’exercice 2024-2025, pendant que Pretoria déroule le tapis rouge aux constructeurs chinois pour produire localement des hybrides et des VE. Entre menace concurrentielle et relais de croissance, les constructeurs européens n’ont plus le luxe de regarder ailleurs.

Chiffres-clés à avoir en tête

  • Inde: plus d’1 000 000 de VE vendus en FY2024-25, tirés par les deux-roues (+21% sur un an) et surtout les trois-roues (+57%). Les voitures particulières restent minoritaires mais progressent rapidement.
  • Afrique du Sud: discussions avancées avec plusieurs marques chinoises (BYD, Chery, Geely, Leapmotor, Changan…) pour assembler des hybrides et VE à East London ou Gqeberha (ex-Port Elizabeth).
  • Incitations:
    • Afrique du Sud: super-déduction fiscale de 150% sur les investissements industriels dans l’électrique dès 2026, enveloppe publique dédiée et possible taxe sur les batteries importées.
    • Inde: programme FAME (subventions à l’achat, GST réduit), forte pression à la localisation et soutien à l’infrastructure de recharge.
  • Concurrence: parts de marché des importations chinoises en hausse en Afrique du Sud; en Inde, les modèles importés chers patinent, la règle est la production locale.

Inde: le laboratoire de masse (et de coûts)

L’Inde ne convertit pas d’un coup son parc automobile à la voiture électrique… mais elle électrifie à marche forcée les segments du quotidien: scooters, motos légères et rickshaws. C’est là que se joue l’effet volume, l’apprentissage industriel et la baisse des coûts des composants (batteries, moteurs, électronique de puissance).

  • Politique publique: FAME subventionne l’achat, l’État pousse la production locale et le maillage de bornes. Condition essentielle: fabriquer sur place pour capter l’essentiel des aides et échapper aux droits d’importation punitifs.
  • Marché: les offres « import » premium peinent. Exemple emblématique, l’arrivée de Tesla, handicapée par des droits avoisinant 70% sur les véhicules entiers, s’est traduite par quelques centaines de commandes seulement après le lancement du Model Y à prix stratosphérique pour le pouvoir d’achat local.
  • Nouveau jeu d’acteurs: émergence accélérée de champions locaux (Tata, Mahindra) et de challengers asiatiques agressifs. Le vietnamien VinFast a déjà activé la carte « usine locale + prix plancher » pour casser les seuils psychologiques.

📌 Bon à savoir
L’Inde expérimente des alternatives techniques pour réduire la dépendance aux terres rares (moteurs sans aimants permanents, procédés de test adaptés), à la faveur des restrictions chinoises sur les minerais critiques. Production possible à court terme selon des fournisseurs locaux: un signal lourd pour l’amont de la filière.

Afrique du Sud: un hub d’assemblage NEV en gestation

L’Afrique du Sud est le pôle industriel auto le plus structuré du continent. Mais sa spécialisation historique dans les thermiques destinés à l’export (notamment vers l’Europe) est menacée par l’agenda d’interdiction du thermique neuf à horizon 2035 dans l’UE. D’où un pivot stratégique vers les « NEV » (véhicules électrifiés).

  • Politique industrielle: APDP II (2021-2035), super-déduction fiscale de 150% dès 2026 pour les investissements dans les VE/batteries, protection tarifaire renforcée contre les importations low-cost.
  • Terrain: 15 marques chinoises déjà actives; l’installation de lignes d’assemblage locales (East London, Gqeberha) réduirait coûts logistiques et ouvrirait l’accès aux incitations.
  • Contexte concurrentiel: les Européens (BMW, Mercedes, VW) restent forts sur le premium et l’hybride rechargeable, Toyota domine l’hybride. Mais la poussée chinoise s’accélère et vise le cœur du marché prix/équipement.

⚠️ Point de vigilance
La fiabilité du réseau et les épisodes de délestage imposent des architectures de recharge résilientes (solaire + stockage, microgrids industriels). Les projets d’usines et de flotte devront intégrer ces CAPEX d’infrastructure.

Un « axe Sud » aux effets d’entraînement

Au-delà des deux cas, on observe une dynamique plus large du « Sud Global »: BYD qui duplique ses usines hors de Chine (Hongrie, Turquie) pour contourner les barrières; Xpeng qui tisse des réseaux de distribution au Maghreb; l’Afrique australe qui attire les investissements d’assemblage; l’Inde qui consolide un écosystème de composants compétitif.

  • Effet coût: l’Inde et l’Afrique du Sud combinent main-d’œuvre qualifiée, marchés domestiques en croissance et incitations fiscales — un cocktail propice à la descente en gamme de coûts.
  • Effet chaîne d’approvisionnement: proximité de ressources (manganèse, platinoïdes, nickel) et volonté politique de « local content » sur batteries et pièces critiques.
  • Effet marché: montée en puissance des segments abordables (2/3-roues, utilitaires compacts, petites citadines) susceptibles de percoler vers l’Afrique et le Moyen-Orient.

💬 À retenir
Les volumes de 2 et 3-roues indiens créent une « école des coûts » que les constructeurs chinois savent exploiter. Si cet ADN prix/robustesse irrigue les citadines et SUV compacts assemblés en Afrique du Sud, l’Europe verra arriver, à moyen terme, des produits concurrentiels… ou perdre des débouchés export pour ses propres usines.

Ce que cela change pour l’Europe

Opportunité et risque se télescopent. Les stratégies « China+1 » et « Africa+1 » des groupes asiatiques visent à mitiger droits de douane et risques géopolitiques. L’Europe doit réagir à trois niveaux: produit, industrie, géopolitique.

1) Produit: l’incontournable EV abordable

  • Développer une offre sous 20 000–25 000 € TTC (batteries LFP, architectures 400 V sobres, infotainment rationalisé), avec TCO compétitif.
  • Adapter aux usages émergents: utilitaires légers électriques, micro-urbaines, flottes partagées. Ce sont précisément les segments qui montent au Sud.

2) Industrie: localiser et agréger des volumes

  • Inde: impossible de durer sans production locale ni partenaires. JVs, plateformes partagées, sourcing batterie sur place pour capter FAME et les GST réduits.
  • Afrique du Sud: utiliser la base existante (BMW, VW, Toyota, Mercedes) pour basculer des lignes vers l’électrique/hybride rechargeable, sécuriser des accords batterie locaux, et bénéficier de la super-déduction à 150%.
  • S’appuyer sur des corridors d’approvisionnement Afrique–Europe pour les minéraux de batterie, avec des critères ESG exigeants.

3) Géopolitique et commerce: prévenir l’érosion

Inde vs Afrique du Sud: où sont les fenêtres d’opportunité pour les Européens ?

ThèmeIndeAfrique du Sud
Accès marchéTrès restrictif sans production locale; aides FAME conditionnéesIncitations fiscales fortes aux investissements; protection contre import low-cost
Segments porteurs2/3-roues, citadines/duo-usage, utilitaires légersHybrides/VE compacts, SUV accessibles, flottes B2B
InfrastructuresRythme de déploiement rapide mais inégal selon ÉtatsContraintes réseau, solutions off-grid à intégrer
ConcurrenceLocaux (Tata/Mahindra) + chinois; imports premium pénalisésChinois agressifs; Européens encore forts sur premium
Stratégie gagnanteLocalisation, alliances, EV « value »Re-tooling des usines locales, intégration batterie, prix maîtrisés

💡 Conseil d’expert
Éviter l’erreur « Europe first » sur les spécifications. Co-concevoir avec des partenaires locaux des trims simplifiés, des packs LFP dimensionnés au juste besoin, et des services (maintenance, financement) adaptés. Le soft (télématique, OTA, gestion de flotte) est un différenciateur à coût marginal.

Points d’ombre à surveiller

  • Accessibilité: même subventionnés, les VE restent chers pour une large part des ménages indiens et sud-africains; le financement est clé.
  • Infrastructures: densité et fiabilité de la recharge, qualité réseau (Afrique du Sud), contraintes climatiques locales (les pertes d’autonomie en froid extrême observées en Himalaya pour certains VE doivent inspirer des calibrages batterie/thermal management adaptés aux marchés ciblés).
  • Matières premières: arbitrages politiques sur l’export des minéraux critiques et exigences de transformation locale.
  • Politique commerciale: l’Europe peut durcir ses barrières; les groupes asiatiques y répondent déjà par la localisation hors Chine (Hongrie, Turquie). Le jeu reste mouvant.

En filigrane, l’axe Inde–Afrique du Sud n’est pas seulement un relais de production à bas coûts: c’est un accélérateur d’apprentissage industriel et de parts de marché sur les segments qui feront la diffusion de masse de l’électrique. Pour l’Europe, c’est une alerte… et une carte à jouer, tant qu’il en est encore temps.

Ford coupe à Cologne, la France patine : vraie crise de la demande VE ou faux procès européen ?

En bref:

  • La demande BEV progresse en Europe (volumes et parts en hausse) mais de façon inégale et en‑dessous des prévisions : pas d’effondrement généralisé, juste une croissance contrariée.
  • Le cas Ford à Cologne reflète surtout des faiblesses de "legacy" (coûts, positionnement produit, exécution), pas une panne de la demande européenne.
  • La France décroche (–6,4% H1 BEV) en raison d’aides instables, prix d’accès élevés et d’une demande tirée par les flottes; des aides stables et des VE abordables peuvent inverser la tendance.

Face à l’annonce de Ford de supprimer jusqu’à 1 000 postes supplémentaires à Cologne en invoquant une « demande insuffisante » de voitures électriques, et au moment où le marché français décroche quand l’Europe accélère, une question s’impose : assiste-t-on à une crise de la demande en Europe, ou à des fragilités spécifiques, chez certains constructeurs historiques et sur le marché français ?

Les données du premier semestre 2025 dessinent un tableau moins caricatural qu’il n’y paraît. La demande européenne progresse, mais elle est inégale, inférieure aux prévisions de l’industrie, et met à nu les contradictions d’un continent qui exige d’aller vite, tout en changeant trop souvent les règles du jeu.

Ce que disent les chiffres (et ce qu’ils ne disent pas)

  • Europe élargie (UE + UK, Norvège, Suisse, Islande) H1 2025: 1,19 million de BEV, +24,9% vs H1 2024, soit 17,5% de parts de marché (ACEA).
  • Union européenne seule H1 2025: 869 000 BEV, 15,6% de parts de marché (ACEA).
  • Juillet 2025: 186 440 BEV immatriculés en Europe élargie, +33,6% vs juillet 2024. Allemagne +58%, Espagne +127%, France +14,8% (ACEA).
  • France H1 2025: 148 332 BEV, –6,4% vs H1 2024; part de marché BEV 17,6% (ACEA). La hausse de juillet est surtout tirée par les entreprises (+70%), les particuliers reculant (~–15%).

📌 À retenir

  • Il n’y a pas d’effondrement européen des VE. Les volumes et la part de marché progressent, mais plus lentement que prévu par l’industrie.
  • La France fait figure d’exception négative en 2025, alors même qu’elle reste le 3e marché BEV du continent.

Ford à Cologne : symptôme d’une crise, ou cas d’école d’un malaise « legacy » ?

Ford va réduire à une équipe à partir de janvier 2026 et supprimer jusqu’à 1 000 postes sur son site VE de Cologne (Explorer et Capri, base technique MEB), s’ajoutant aux plusieurs milliers de coupes déjà annoncées en Allemagne (Saarlouis a cessé son activité). Motif avancé par le constructeur américain: la demande de VE en Europe est « bien en deçà des prévisions ».

Analyse critique:

  • Demande sous les attentes, pas en chute libre: l’argument de Ford est factuel… si l’on parle de prévisions. En agrégé, le marché progresse. Mais pas assez pour remplir certaines usines au rythme planifié.
  • Mix-produit et positionnement: face à Tesla, à l’offensive chinoise et à des modèles européens plus récents, les Explorer/Capri peinent à imposer une proposition de valeur prix/technos/efficience réellement différenciante.
  • Coûts et héritage industriel: produire des VE compétitives sur des sites à coûts élevés exige du volume et des plateformes optimisées. Les « legacy » subissent la double peine: marges comprimées et ramp-up trop lent.
  • Dépendances externes: le choix d’une base MEB (VW) a accéléré la mise sur le marché, mais ajoute des contraintes techniques et économiques.

Dit autrement, Cologne raconte moins une « panne » de la VE en Europe qu’une difficulté d’exécution et de compétitivité chez un constructeur historique dans un contexte de concurrence dure et de prix volatils.

Pourquoi la France décroche quand l’Europe accélère

La contre-performance française en 2025 n’est pas une fatalité technologique, mais la combinaison de facteurs économiques, politiques et psychologiques.

  • Instabilité des aides: coups de rabot, pauses, révisions, retour partiel des dispositifs… Ces zigzags entretiennent l’attentisme des ménages. Les pics liés au leasing social 2024 l’ont montré; la nouvelle vague attendue fin septembre 2025 pourrait relancer ponctuellement, sans régler le fond.
  • Prix d’accès encore trop élevés: les citadines à 25–30 000 € et les familiales à 35–40 000 € restent hors de portée d’une large partie des ménages, malgré une baisse tendancielle des coûts batteries.
  • Bascule entreprises > particuliers: les flottes, contraintes par la fiscalité et le TCO, tirent la demande. Les particuliers, eux, temporisent.
  • Freins d’usage et perceptions: obsession de l’autonomie, crainte de la recharge lors des grands trajets, désinformation sur l’empreinte carbone et la durabilité des batteries, malgré l’essor et la fiabilisation du réseau.
  • Hybrides dynamiques: les HEV/HYBRID et PHEV gagnent du terrain en 2025, offrant une « solution de compromis » qui détourne temporairement une partie de la demande.

📊 Chiffres France à mi-année

  • 148 332 BEV (–6,4% vs H1 2024)
  • Part de marché BEV: 17,6%
  • Juillet: +14,8% vs juillet 2024, porté par les entreprises; particuliers en retrait

L’Europe face à ses contradictions

  • Objectifs CO₂ vs réalité de marché: pour respecter les cibles 2025–2030, les constructeurs doivent élever fortement le mix bas-carbone. Plusieurs analystes estiment qu’un mix BEV autour de 20% en 2025 facilite la conformité moyenne… L’UE est encore en dessous, créant une pression accrue sur le S2 2025 et 2026.
  • Fiscaux nationaux décisifs: là où l’écart de coût total de possession entre thermique et électrique est massif (Danemark, Belgique, pays nordiques), la part BEV explose. Là où l’écart est modeste (France, Italie, Espagne), l’adoption piétine.
  • Aides volatiles, messages brouillés: l’UE maintient 2035, mais la valse des primes nationales (Allemagne, Suède…) a provoqué des à-coups. Le consommateur lit l’incertitude… et attend.
  • Industrie sous tension: plans d’économies et réductions d’effectifs (Ford, VW, Audi, Porsche, équipementiers) coexistent avec des besoins d’investissement massifs dans plateformes, logiciels, batteries. La compression des marges accentue la prudence commerciale.
  • Montée des PHEV: utile pour le CO₂ à court terme, mais pas substitut durable aux BEV, surtout si l’usage électrique réel est faible.

💡 Astuce marché
Pour lisser les à-coups, les pays les plus performants couplent des aides d’achat stables, une fiscalité de détention différenciée, et un cadre clair pour les flottes (qui irriguent ensuite le marché de l’occasion).

Ce qui peut véritablement changer la donne d’ici 2026

  • Stabilité pluriannuelle des dispositifs: des règles lisibles au moins sur 24–36 mois pour redonner confiance aux ménages.
  • Électrique abordable, de série: generaliser des modèles européens sous 25 000 € bien équipés, efficients, et frugaux en batterie, plutôt que la « course aux kWh ».
  • Financement et occasion: booster le leasing social dans la durée, démocratiser la LOA d’occasion avec garanties batterie standardisées et des taux attractifs.
  • TCO transparent: factures énergétiques lisibles, tarifs de recharge maîtrisés et interopérables; fiabilité des bornes mieux mesurée et publiée.
  • Flottes publiques et privées: accélérer la bascule, car elles alimentent le parc d’occasion abordable 18–36 mois plus tard.
  • Compétitivité industrielle: plateformes dédiées petites/moyennes VE, simplification des gammes, accords batteries européens, et baisse des coûts fixes dans les usines historiques.

🔎 À surveiller (S2 2025 – 2026)

  • Effet réel de la nouvelle vague de leasing social en France (volumes, mix modèles).
  • Intensité des remises et immatriculations tactiques fin d’année.
  • Part BEV européenne vs « seuils implicites » de conformité CO₂ 2025–2026.
  • Capacité des « legacy » à sortir des VE à 25–30 k€ profitables.

En bref, l’Europe n’est pas en crise de demande électrique généralisée, mais en rattrapage contrarié: la croissance est là, inégale et inférieure aux plans initiaux. Le cas Ford illustre surtout la difficulté des constructeurs historiques à atteindre rapidement la compétitivité-coût et le bon produit-marché. La France, elle, paie l’instabilité de ses signaux et la frilosité des particuliers. Les prochains mois diront si la nouvelle salve d’aides, des offres mieux positionnées et des coûts en baisse suffisent à refermer l’écart avec ses voisins.

Thermique interdit en Éthiopie : 9 leçons (et mises en garde) pour l’Europe de 2035

En bref:

  • L’Éthiopie a interdit l’import de voitures thermiques et misé sur les VE appuyés par le gigantesque barrage GERD (5 150 MW) pour réduire la facture carburant : adoption urbaine rapide mais bornes, réseau et maintenance insuffisants.
  • Leçon pour l’Europe : synchroniser réglementation VE et renforcement des réseaux/charge, sécuriser tarifs compétitifs, filières locales et compétences, et garantir la résilience (stockage, V2G, mégawatts) avant d’imposer la bascule.

Alors que l’UE discute encore du cap 2035, l’Éthiopie a tranché: les importations de voitures essence et diesel sont interdites. En parallèle, le pays vient d’inaugurer le plus grand barrage hydroélectrique d’Afrique. Coup de force ou pari risqué? Au-delà du symbole, cette expérience grandeur nature livre des enseignements utiles — et quelques signaux d’alerte — pour la transition européenne.

Ce que l’Éthiopie a fait (et pourquoi)

  • Interdiction des importations de véhicules thermiques depuis 2024, une première mondiale.
  • Incitations massives pour l’électrique (exemptions fiscales), embryon d’assemblage local, marché tiré par les marques chinoises (BYD en tête).
  • Objectif affiché: 500 000 VE d’ici 2030 (ministère des Transports). Parc actuel: environ 115 000 VE sur 1,5 million de voitures.
  • Motivation prioritaire: économique. Le pays dépensait près de 4,5 à 5 milliards de dollars par an en carburants importés, avec une pénurie chronique de devises et des files interminables aux stations.
  • Contexte énergétique: électricité très majoritairement hydraulique (≈97%) et mise en service début septembre 2025 du Grand barrage de la Renaissance (GERD), 5 150 MW, doublant la capacité de production nationale (sources AP/AFP/ABC/TrtWorld).

👉 En un mot: couper la dépendance aux carburants importés et basculer sur une électricité domestique, moins chère et (en théorie) abondante.

Résultats sur le terrain… et limites

  • Les VE se banalisent dans Addis-Abeba; les coûts d’usage chutent (un taxi passe d’environ 20 000 birrs/mois en carburant à <3 000 birrs en recharge, témoignages locaux).
  • Mais l’infrastructure ne suit pas: un peu plus de 100 bornes pour tout le pays, presque toutes dans la capitale; objectif officiel >2 200 stations.
  • Réseau électrique fragile: coupures fréquentes, tension sur la distribution.
  • Hors de la ville, les trajets restent imprévisibles; l’adoption est très urbaine.
  • Prix d’achat élevés malgré les exonérations; marché de l’occasion déformé par l’explosion des taxes avant l’interdiction.
  • Camions: pas de feuille de route électrique à court terme; dépendance persistante au diesel pour le fret stratégique (port de Djibouti).

📌 À retenir: la bascule administrative a été radicale; la bascule physique (réseau, bornes, maintenance, compétences) demande du temps.

Le barrage GERD, pivot énergétique… et zone de risque

  • 5 150 MW, lac de retenue géant, ambition d’exporter de l’électricité vers le Kenya, le Soudan ou le Sud-Soudan.
  • Effet attendu: baisse des coupures, baisse du coût marginal de l’énergie, soutien à l’essor de la recharge et à l’industrialisation (y compris l’assemblage de VE).
  • Fragilités: réseau de transport et de distribution à renforcer; vulnérabilité climatique (sécheresses) inhérente à l’hydraulique; tensions géopolitiques avec l’Égypte et le Soudan sur les débits du Nil.

💡 Leçon structurelle: une offre électrique bon marché n’est utile à la mobilité électrique que si le réseau aval, la planification et l’infrastructure de charge sont au rendez-vous.


Neuf leçons utiles pour l’Europe

  1. Souveraineté énergétique et pétrole:
    L’Éthiopie illustre l’effet levier d’un basculement rapide pour réduire une facture d’importation. En Europe, réduire l’empreinte pétrolière des transports (près d’un baril sur deux va à la route) reste un objectif de sécurité énergétique autant que climatique.
  2. Synchroniser politiques auto et politiques réseaux:
    La contrainte réglementaire (2035, normes CO2) doit avancer de concert avec la capacité réseau (HTA/BT) et la densité de bornes. L’UE a l’AFIR; l’enjeu désormais, c’est le raccordement réel et rapide (délai de connexion, puissance disponible, foncier).
  3. Infrastructure d’abord, injonction ensuite:
    La séquence éthiopienne montre le coût social d’un «ban» sans capillarité de recharge. En Europe, la priorité 2026-2030 doit être la fiabilité et l’homogénéité pan-européenne (corridors autoroutiers, zones rurales et périurbaines, copropriétés).
  4. Pouvoir d’achat et TCO:
    L’avantage à l’usage (électricité vs carburant) est déterminant. L’Europe doit sécuriser des tarifs de recharge compétitifs, encourager le «smart charging», et massifier les offres abordables (A/B-segment, leasing social, marché de l’occasion et batteries LFP).
  5. Stabiliser la trajectoire réglementaire:
    L’incertitude freine l’investissement. L’UE doit clarifier la place résiduelle des e-fuels (niches) sans brouiller le signal principal sur le VE, et préserver une visibilité pluriannuelle sur bonus/malus, ZFE, et normes CO2.
  6. Chaîne de valeur locale:
    L’Éthiopie tente l’assemblage pour capter compétences et emplois; l’UE doit sécuriser mines (alliances), raffinage, cellules, packs, recyclage, et software — au-delà des seules gigafactories. La compétitivité prix/qualité est clé face à l’offensive chinoise.
  7. Compétences et service après-vente:
    Penser formation (électriciens, opérateurs réseau, techniciens VE, carrossiers HV), disponibilité des pièces, et logistique batterie. Un réseau de réparation capillaire est un accélérateur d’adoption… et de confiance.
  8. Des usages différenciés:
    La ville électrifie plus vite. L’UE doit soutenir les corridors et les zones blanches, mais aussi accélérer l’électrification des flottes (taxis/VTC, utilitaires) qui maximisent les km électriques, tout en préparant l’offensive sur le poids lourd (dépôts, mégawatts, MCS) et, selon les cas, l’hydrogène.
  9. Résilience électrique:
    Les blackouts éthiopiens rappellent l’impératif de robustesse. En Europe: effacement, tarification dynamique, V2G/V2H, stockage stationnaire, et ENR corrélées pour lisser les pics de recharge. L’objectif: une électricité fiable et compétitive pour faire du VE un «no brainer».

Repères chiffrés — Éthiopie (septembre 2025)

  • Interdiction d’import des thermiques: depuis 2024
  • VE en circulation: ≈115 000 (objectif 500 000 en 2030)
  • Bornes publiques: un peu plus de 100 (cible nationale >2 200)
  • Mix électrique: ≈97% hydraulique
  • GERD: 5 150 MW, capacité nationale doublée, inauguration 9 septembre 2025
  • Facture carburants d’avant bascule: ≈4,5–5 Md$ par an

Ce qui n’est pas transposable tel quel

  • La «rente hydro» éthiopienne n’a pas d’équivalent européen; l’UE devra composer avec un mix varié, des prix volatils et des contraintes d’équilibrage plus complexes.
  • Le top‑down politique éthiopien a permis la décision rapide; en Europe, la transition exige consensus, protection des ménages et compétitivité industrielle.
  • La taille et l’âge du parc diffèrent: électrifier un parc ancien et massif en Europe implique un rôle majeur du marché de l’occasion, des conversions ciblées et des contrats de performance énergétique.

Check-list européenne 2026–2030

  • Accélérer les raccordements des hubs de charge (délais, puissance, CAPEX)
  • Déployer massivement le smart charging et des tarifs heures creuses lisibles
  • Densifier les bornes en zones rurales/périurbaines et en habitat collectif
  • Sécuriser une offre VE abordable (segments A/B), et structurer l’occasion
  • Accélérer l’électrification des flottes captives (taxis/VTC, utilitaires)
  • Industrialiser recyclage/2e vie batteries et logistique pack
  • Consolider la filière batterie européenne (matières, cellules, BMS, software)
  • Préparer le «megawatt charging» pour VD/PL et les connexions dépôt-réseau

En miroir des débats européens, l’Éthiopie offre un laboratoire: audace réglementaire, ancrage énergétique domestique, mais aussi rappel sévère d’une vérité simple — sans réseau solide, bornes fiables et électricité compétitive, la promesse du véhicule électrique reste théorique. À l’Europe de réussir la synchronisation fine entre industrie, énergie et usages pour transformer l’essai de 2035.

Pour 3 Français sur 4, la voiture est un luxe : le boom de l’occasion électrique aux USA peut-il changer la donne en Europe ?

En bref:

  • La voiture est perçue comme un luxe mais reste indispensable; aux États‑Unis la forte décote des VE d’occasion a rendu l’électrique accessible et fait décoller le marché.
  • L’Europe peut suivre si elle règle trois verrous : transparence batterie (passeport 2027 + certificats), garanties/réparabilité/assurance, et financement/offres recharge fiables (leasing, pack wallbox, réseau de bornes).

L’automobile est perçue comme un luxe par 74 % des Français. Dans ce contexte de tension sur les budgets, le marché américain de l’occasion électrique, en plein essor grâce à une chute spectaculaire des prix, fait figure d’ovni. Simple exception américaine ou vraie piste pour accélérer – enfin – l’accès à la mobilité zéro émission en Europe ?

Sans biais ni angélisme, on décrypte ce que nous dit l’expérience américaine, ce qui est transposable en Europe… et ce qu’il faudra corriger pour que l’électrique de seconde main devienne un levier crédible de transition.

À retenir

  • 74 % des Français estiment que la voiture est devenue un luxe, mais 63 % la jugent indispensable (étude Leocare).
  • Aux États-Unis, l’occasion électrique explose… parce que les prix s’effondrent.
  • En Europe, la décote des VE s’accélère aussi (jusqu’à -51 % en < 2 ans selon des données Cox Automotive Europe).
  • Le marché peut décoller si trois verrous sautent: transparence batterie, garanties/entretien, financement/assurance.

La voiture, un luxe… indispensable: la tension française en chiffres

  • 74 % des Français considèrent la voiture comme un luxe, tandis que 63 % la jugent indispensable au quotidien.
  • Le prix moyen d’une voiture neuve dépasse désormais 35 000 € en France, en forte hausse depuis 2020, sur fond d’équipements imposés, de normes et de montée en gamme.
  • 50 % des Français disent avoir renoncé à acheter/remplacer un véhicule faute de moyens; l’âge moyen du parc dépasse 11 ans.
  • Dans les dépenses perçues comme les plus lourdes: entretien/réparations, carburant, puis financement/achat.

Dans ce contexte, l’électrique souffre d’un surcoût perçu et d’une méfiance sur la batterie. Résultat: l’accès par le neuf reste limité pour de nombreux ménages. La clef pourrait donc être… l’occasion.

Outre-Atlantique: quand l’occasion électrique devient l’ascenseur social de l’EV

  • Les prix des VE d’occasion ont nettement baissé aux États-Unis, au point de passer sous ceux de l’occasion thermique sur de nombreuses références.
  • Multiplication des remises constructeurs et des incitations, retour massif de flottes (leasing), prix du neuf en baisse (guerre des prix initiée par Tesla) et technologies évoluant vite: cocktail qui accélère la décote.
  • Effet système: plus d’offre, des prix accessibles, et un marché de l’occasion qui s’anime.

Symbole: la part de marché de Tesla dans le neuf est tombée à 38 % en août 2025 (contre ~80 % à son pic) selon Cox Automotive/Reuters. La concurrence reine pèse sur les prix du neuf… et tire l’occasion vers le bas. Pour l’acheteur, c’est un tremplin vers l’électrique. Pour les valeurs résiduelles, c’est rude.

L’Europe peut-elle répliquer le “modèle US” ?

Comparatif express:

  • Prix: l’Europe observe déjà une baisse nette des VE d’occasion (environ -20 % en 2024, prix moyen proche de 22 000 €), et des décotes records (jusqu’à -51 % < 2 ans). Le mouvement existe, mais de façon moins explosive.
  • Offre: la vague des retours de LOA/LDD 2023–2026 (e-208, Zoe, ID.3, Model 3, etc.) commence à abonder l’occasion.
  • Demande: plus hésitante qu’aux USA, la faute à la crainte batterie, au coût d’assurance, à l’hétérogénéité des bornes et au prix de l’électricité perçu comme volatil.
  • Politiques publiques: marché fragmenté par pays, incitations inégales, retrait de primes (ex. Allemagne) qui a refroidi le neuf et, indirectement, les valeurs résiduelles.

Conclusion intermédiaire: la dynamique américaine est partiellement transposable, car les mécanismes de décote et l’effet flottes sont universels. Mais l’Europe doit lever des freins structurels propres à son marché.

Les trois verrous à faire sauter

  1. Transparence et confiance batterie
  • Ce qui manque au client d’occasion: une mesure standardisée, opposable et lisible de l’état de santé (SoH) de la batterie, ainsi que l’historique de charge/maintenance.
  • Bonne nouvelle: l’UE impose un “passeport batterie” numérique à partir du 18 février 2027 (règlement 2023/1542). Accessible via QR code, il doit structurer l’information (origine, empreinte carbone, maintenance, performances).
  • D’ici là: généraliser des certificats batterie indépendants, tests de charge rapide encadrés et états de santé publiés par les labos/labels VNVO.
  1. Garanties, réparabilité et coûts d’usage
  • Les garanties batterie constructeur (souvent 8 ans/160 000–240 000 km) existent, mais elles sont inégales et méconnues.
  • Il faut: programmes VO labellisés avec 12–24 mois de garantie additionnelle incluant la batterie, modules de réparation disponibles, réseaux habilités HV, devis de remplacement transparents.
  • L’assurance doit revenir à des primes compétitives (formation des experts, disponibilité de pièces, protocoles de réparation).
  1. Financement, énergie, bornes
  • Le leasing d’occasion, les crédits attractifs et des offres packagées (voiture + wallbox + tarif heures creuses) font toute la différence.
  • Stabiliser le coût du kWh pour l’automobiliste (offres heures creuses/WE, pilotage de la charge) est clé pour verrouiller le TCO.
  • Côté bornes: accélérer la fiabilité et la maintenance. Un réseau stable rassure… et soutient la valeur de revente.

Opportunités concrètes pour accélérer

  • Label VO électrique paneuropéen incluant un “score batterie” harmonisé.
  • Buy-back garanti et valeurs résiduelles transparentes dès le neuf (limite la casse à la revente).
  • Offres “tout-en-un” d’occasion: financement + garantie + recharge + assistance, à mensualité maîtrisée.
  • Incitations ciblées sur l’occasion (prime à la conversion bonifiée pour VE d’occasion récents et sobres).
  • Formation réseaux: évaluation batterie, diagnostic HV, pédagogie client.
  • Économie circulaire: reconditionnement de modules et seconde vie stationnaire, pour sécuriser la fin de vie et alléger la crainte “batterie”.

Leçons américaines utiles… sans copier-coller

  • La transparence des prix et la concurrence tirent l’occasion vers le bas: à encourager, tout en pilotant les risques de décote avec des buy-back.
  • Les flottes sont le cœur du réacteur: un flux massif et standardisé crée des VO lisibles et abordables.
  • La pédagogie gagne toujours: expliquer la réalité de la longévité batterie (souvent 80–90 % de capacité après de forts kilométrages sur batteries bien gérées thermiquement), l’usage des charges lentes et le TCO réel.
  • Attention aux effets boomerang: une guerre des prix trop brutale plombe les valeurs résiduelles et renchérit les loyers au neuf. L’équilibre se travaille.

Freins perceptifs à adresser

  • Hybride “plus rassurant” pour beaucoup: il décote moins, offre une continuité d’usage et met la pression sur le VO électrique. Il faudra convaincre avec des preuves techniques (certificats batterie, garanties) et économiques (mensualités + coût au km).
  • Image et fiabilité perçues: le reconditionnement sérieux, des campagnes de rappel bien exécutées, et la stabilité du réseau de charge pèsent davantage que les fiches techniques.

Achat d’un VE d’occasion en 2025: la check-list utile

  • Batterie: demander un certificat de SoH indépendant, vérifier la vitesse de charge DC réelle et la part d’usage en charge rapide.
  • Garantie restante: batterie et chaîne de traction; exiger les conditions écrites et leur transférabilité.
  • Logiciels/BMS: s’assurer des mises à jour, vérifier qu’aucune alerte HV n’est active.
  • Historique: factures, opérations HV, sinistres, immersion, rappels constructeurs.
  • Équipement: présence d’une pompe à chaleur (hiver), câbles (T2/CCS), pneus adaptés (indice de charge).
  • Essai réel: parcours mixte, contrôle conso et autonomie affichée vs estimée; test de charge sur borne publique si possible.
  • Recharge à domicile: faisabilité et coût (abonnement, heures creuses, installation d’une wallbox).
  • Assurance: devis comparatif avant signature.

📌 Bon à savoir

  • Dès 2027, le “passeport batterie” européen rendra la traçabilité obligatoire sur les VE: un vrai catalyseur pour le VO.
  • Les retours de flottes 2025–2027 feront baisser encore les prix: rester à l’affût des programmes VO certifiés.

En clair, l’Europe n’a pas besoin d’importer le modèle américain: elle doit en retenir l’essentiel – transparence batterie, protection de l’acheteur et financement intelligent – pour transformer la décote en opportunité. C’est à ce prix que l’électrique d’occasion cessera d’être un pari… et deviendra, pour beaucoup, la voie d’entrée réaliste vers la mobilité zéro émission.

E-car à 15 000 €: l’ambition européenne à l’épreuve de la très concrète Honda N‑ONE e

En bref:

  • L’UE veut relancer une "E‑car" européenne (<15 000 €) — petite électrique simple, légère et produite localement — et la Honda N‑ONE e (Japon) montre que la philosophie est faisable mais nécessite adaptations (sécurité, largeur, équipement).
  • Pour atteindre 15 k€ il faudra standardisation, batteries européennes, volumes/plates‑formes partagées et assouplissements réglementaires : sans ces leviers, le prix de lancement sera plutôt 16–18 k€ et la concurrence chinoise restera vive.

L’Europe veut réinventer la mini-citadine électrique. Deux jours après l’annonce d’Ursula von der Leyen d’une catégorie “E-car” pour des électriques simples, légères et fabriquées en Europe à moins de 15 000 €, Honda déploie au Japon une N‑ONE e très proche de cette philosophie. Un miroir utile pour jauger la faisabilité, les compromis réglementaires… et l’intérêt stratégique face aux électriques chinoises à bas coût.

Au-delà du symbole, que peut réellement livrer l’E-car européenne, et à quelles conditions peut-elle devenir une arme industrielle et climatique crédible ?

Ce que l’UE met sur la table (et pourquoi maintenant)

  • Objectif affiché: créer une nouvelle catégorie entre les quadricycles (L6e/L7e) et les voitures particulières (M1), pour permettre des électriques ultra-compactes, essentielles et abordables.
  • Cadre en gestation: étude EY, premières bornes techniques évoquées par des travaux de recherche (longueur ≤ 3,8 m, masse ≤ 1 000 kg, puissance contenue).
  • Cap politique: “Nous proposerons de travailler avec l’industrie sur une nouvelle initiative relative aux voitures abordables et de petite taille”, a déclaré Ursula von der Leyen le 10 septembre.
  • Impératif industriel: reconquérir un segment A sinistré par le surcoût réglementaire (GSR2, ADAS obligatoires) et le coût des batteries. Jean‑Philippe Imparato (Stellantis) rappelait: “Avant les règles d’homologation de 2018, un million de mini‑citadines étaient vendues en Europe à moins de 15 000 €. Maintenant, nous sommes à 90 000.”

📌 À retenir

  • Cible prix: < 15 000 € TTC
  • Production: en Europe, avec chaînes d’approvisionnement européennes
  • Esprit: “E” pour environnementale, économique, européenne
  • Agenda: réunion stratégique Commission/constructeurs à Bruxelles le 12 septembre pour esquisser le cadre réglementaire

Pourquoi regarder le modèle japonais des kei cars

Les kei cars ont façonné la mobilité urbaine nippone depuis les années 1950:

  • Encombrement limité (env. 3,40 m x 1,48 m), puissance plafonnée (64 ch), fiscalité et usage urbain favorisés.
  • Énorme popularité locale grâce à des coûts d’achat/usage bas, une maniabilité exemplaire et une offre pléthorique.

Mais l’Europe part d’un autre contexte:

  • Réseaux routiers plus rapides, attentes de sécurité et de confort plus élevées, réglementation M1 plus exigeante.
  • Pas (encore) de fiscalité avantageuse spécifique aux très petites voitures, ni d’avantages de stationnement comparables.

ℹ️ Bon à savoir (classes L6e/L7e vs M1)

  • L6e: 45 km/h, 6 kW max, permis AM dès 14 ans (quadricycles légers).
  • L7e: au‑delà de 45 km/h, puissance > 6 kW, permis B1/B (quadricycles lourds).
  • M1: voitures particulières, cadre sécurité le plus strict (crash-tests, ADAS, etc.).
    L’E‑car viserait une “inter‑catégorie” allégée par rapport à M1, mais bien plus protectrice qu’un quadricycle.

Honda N‑ONE e: la preuve par l’objet

Présentée au Japon en juillet, la Honda N‑ONE e incarne la “petite électrique utilitaire du quotidien”:

  • Format kei (≈ 3,40 m), design rétro épuré, bandeau noir intégrant les prises.
  • Autonomie annoncée: 270 km sur cycle japonais WLTC.
  • Technologie V2H (Vehicle‑to‑Home): possibilité d’alimenter une habitation.
  • Choix frugal assumé: intérieur minimaliste, pas d’écran central tactile.

Honda a même montré à Goodwood un prototype “Super EV” adapté à des standards européens: élargisseurs d’ailes (largeur portée à ~1,60 m), 64 ch et 162 Nm. Une démonstration intéressante des ajustements nécessaires dès qu’on renforce sécurité et tenue de route.

Points forts observés

  • Simplicité, efficience, compacité: tout ce que l’E‑car vise.
  • V2H: valeur d’usage énergétique concrète.
  • Design rationnel qui facilite la fabrication.

Points d’attention européens

  • Autonomie WLTC japonaise ≠ WLTP: conversion probable à la baisse.
  • Mise à niveau sécurité/ADAS et élargissement: poids et coût en hausse.
  • Rien n’est officialisé pour l’Europe: adapter la voiture et le modèle économique reste non trivial.

Les verrous européens: réglementaires, culturels, industriels

  • Sécurité/équipements: GSR2 (freinage d’urgence, maintien de voie, ISA, etc.) a renchéri les petites voitures. Une E‑car devra définir un “socle de sécurité essentiel” sans refaire grimper la facture.
  • Usages et attentes: roulages périurbains rapides, autoroute occasionnelle, protections perçues face aux SUV, habitabilité à 4… L’Europe tolère moins le “strict essentiel” que le Japon.
  • Coûts fixes et supply chain: batteries (même LFP), électronique de puissance, réseaux de fournisseurs européens encore en montée en cadence.
  • Concurrence chinoise: effets de volume, intégration verticale et subventions ont comprimé les prix. Des droits correctifs aident, mais ne remplacent pas la compétitivité intrinsèque.

Peut‑on vraiment faire 15 000 € ?

Le prix plancher se joue sur quelques curseurs clés:

  • Batterie contenue (20–28 kWh), chimie LFP locale, pack simplifié.
  • Plateforme standard commune (multi‑marques) pour volumes et dépréciation R&D.
  • Intérieur frugal (écran réduit ou instrumentation simple), ADAS limités mais conformes au “socle E‑car”.
  • AC 7–11 kW de série, DC modeste en option (40–60 kW), architecture 400 V “simple”.
  • Assemblage dans des sites compétitifs en Europe, logistique courte.

🎯 Leviers déterminants

  • Normalisation européenne: pièces communes, process partagés.
  • Allègements ciblés de contraintes M1 tout en garantissant l’essentiel (crash, structure, AEB).
  • Incitations d’usage: stationnement résident, zones apaisées, fiscalité locale.
  • Socle de services: car‑sharing, flottes publiques, TPE/collectivités pour amorcer le volume.

Analyse réaliste: atteindre 14 990 € TTC dès le lancement sera difficile sans volumes et sans arbitrages clairs sur l’équipement. Un atterrissage à 16–18 000 € paraît plus probable au départ, avant baisse par l’effet série.

Une vraie riposte aux petites électriques chinoises ?

Partiellement, si:

  • la catégorie E‑car autorise de vraies économies d’ingénierie,
  • l’Europe accélère batteries et composants “made in EU”,
  • et si l’on obtient rapidement des volumes via commandes publiques et flottes.

Sinon, la compétitivité prix restera sous pression. L’E‑car est d’abord un “droit à la simplicité” redonné aux constructeurs européens. Sans ce cadre, ils restent condamnés à sur‑spécifier de petites autos… donc à les rendre trop chères.

💡 Conseil d’expert

  • Ne pas surdimensionner la recharge rapide: privilégier l’AC 7–11 kW de qualité, et un DC d’appoint. L’économie réalisée est majeure.
  • Résister à la “SUVisation” et à l’inflation d’écrans: chaque kilo et chaque watt‑heure compte.

Ce qu’il faut trancher à Bruxelles (dès aujourd’hui)

  • Définition du “socle sécurité” E‑car: structure/crash minimum, AEB, ISA, etc.
  • Plafonds de masse, puissance et vitesse adaptés aux usages réels européens.
  • Exigences batterie (sécurité thermique) et réparabilité.
  • Équipements de base obligatoires vs options (clim, multimédia, DC).
  • Règles d’homologation simplifiées et délais raccourcis.
  • Cadre d’incitation: TVA réduite locale, avantages stationnement, marchés publics.
  • Contenu local: cellules, modules, électronique de puissance.
  • Calendrier et clause de revoyure pour ajuster sans tuer le modèle.

N‑ONE e vs E‑car: convergence et divergences utiles

Convergences

  • Philosophie: petite, efficiente, accessible, pensée pour la ville.
  • Puissance modérée (≈ 64 ch), format court, batterie raisonnable, V2H.

Divergences à anticiper en Europe

  • Sécurité/largeur: l’élargissement à ~1,60 m du proto Goodwood illustre l’impact des normes.
  • Coûts: ADAS, crashworthiness, post‑traitement logiciel.
  • Culture d’usage: plus d’exigences en périphérie/autoroute, confort et insonorisation.

La N‑ONE e montre la voie: la frugalité peut séduire si elle s’accompagne d’une valeur d’usage claire (facilité de ville, coûts contenus, V2H). À l’Europe de créer le cadre qui autorise cette frugalité, sans compromis inacceptables sur la sécurité.

En somme, l’E‑car peut réallumer le segment A si l’on accepte des choix tranchés: limiter l’appétit en équipements, standardiser à grande échelle et accompagner par des politiques locales pro‑petites voitures. Face à la Chine, c’est moins une question de slogans que de vitesse d’exécution et de discipline technique.

BMW et E.ON lancent (enfin) le V2G en Allemagne : jusqu’à 14 000 km “gratuits”… et un nouveau rôle pour la voiture électrique

En bref:

  • BMW et E.ON lancent en Allemagne la première offre V2G grand public (BMW iX3 + Wallbox Pro + contrat E.ON) promettant jusqu’à 720 €/an — soit l’équivalent de ~14 000 km de charge — en échange de la mise à disposition de la batterie.
  • Potentiel fort pour intégrer les renouvelables et réduire les coûts de flexibilité, mais la valeur réelle dépend du temps de connexion, des marchés locaux, des compteurs intelligents, des standards et des garanties sur la batterie.

BMW et E.ON officialisent en Allemagne la première offre commerciale de Vehicle-to-Grid (V2G) pour particuliers. Au-delà de l’annonce, c’est un test grandeur nature d’un nouveau modèle: la batterie du véhicule devient un actif énergétique, rémunéré pour stabiliser le réseau. Une bascule symbolique pour la transition, mais qui arrive avec conditions, garde‑fous et questions ouvertes.

Ce qui est lancé, concrètement

Annoncée le 10 septembre 2025, l’offre associe:

  • Le BMW iX3, premier modèle compatible avec recharge bidirectionnelle.
  • Une BMW Wallbox Professional, faisant le lien entre la voiture et le réseau.
  • Un contrat d’électricité V2G chez E.ON, avec pilotage logiciel commun BMW/E.ON.

Promesse client:

  • Bonus pouvant atteindre 720 € par an, en échange de la mise à disposition de la batterie pour des services au réseau.
  • Équivalent annoncé: jusqu’à 14 000 km chargés à domicile “sans frais” chaque année.
  • Pilotage “à la carte”: l’utilisateur fixe ses objectifs de charge pour garantir ses trajets.

📌 À retenir

  • Première offre V2G grand public en Allemagne; déploiement iX3 en tête, puis extension progressive à d’autres BMW.
  • Rémunération indexée sur le temps de connexion et l’énergie réinjectée, avec visualisation en temps réel.
  • BMW affirme “ne pas impacter” la durée de vie de la batterie grâce à des algorithmes de gestion (à confronter aux conditions de garantie et aux limites d’exploitation).

Comment la voiture “gagne” de l’argent pour vous

Le V2G valorise deux choses:

  • La flexibilité: être branché quand le système a besoin de consommer ou restituer.
  • L’énergie restituée: réinjection dans le réseau lors des pics de demande ou des ajustements de fréquence.

Le bonus E.ON/BMW s’alimente:

  • À chaque minute/heure de connexion utile (flexibilité mobilisable).
  • À chaque kWh renvoyé au réseau (énergie valorisée en services systèmes/équilibrage).

💡 Ordre de grandeur

  • 14 000 km “gratuits” correspondraient à environ 2 200–2 800 kWh (16–20 kWh/100 km).
  • À 0,25–0,35 €/kWh, on retombe bien sur une fourchette 550–980 €, cohérente avec le plafond de 720 € annoncé. La réalité dépendra du temps de connexion, de votre profil d’usage et des signaux du marché.

Pourquoi c’est important pour le système électrique

  • Intégration des renouvelables: les batteries des VE stockent le surplus (éolien nocturne, solaire à midi) et rendent l’énergie quand le réseau en a besoin.
  • Réduction des coûts de flexibilité: moins de recours à des centrales thermiques d’appoint, moins de “curtailment” d’énergies renouvelables.
  • Vision d’écosystème: BMW et E.ON annoncent à terme un couplage avec photovoltaïque, pompe à chaleur et domotique, pour optimiser la maison et la mobilité comme un tout.

✅ Impact potentiel

  • Des études européennes estiment des économies cumulées massives à l’échelle 2030–2040 si la régulation s’aligne et si le parc VE est largement mobilisable.
  • Pour l’usager, plusieurs centaines d’euros/an sont envisageables selon l’intensité de participation. Ce n’est pas un “salaire”, mais un amortisseur de coûts.

Les limites et angles morts à surveiller

  • Compteurs intelligents peu déployés en Allemagne: moins de 10 % des foyers équipés, freinant une monétisation fine et à grande échelle de la flexibilité.
  • Fragmentation des réseaux de distribution: multiplicité de gestionnaires locaux, avec des règles et capacités hétérogènes.
  • Standards et interopérabilité: la norme ISO 15118‑20 balise le dialogue véhicule/borne, mais l’harmonisation AC/DC, les certifications et l’agrégation multi‑marques restent des chantiers.
  • Cadre réglementaire encore mouvant: fiscalité, comptabilisation énergétique, statut juridique des batteries de VE comme ressources de réseau.
  • Promesse de “pas d’impact batterie”: plausible avec des fenêtres de charge limitées (soC, profondeur de décharge, température), mais à sécuriser via garanties explicites et transparence des algorithmes.
  • Périmètre initial réduit: iX3 + wallbox dédiée + contrat E.ON en Allemagne; le passage à d’autres modèles/pays sera progressif et dépendant des régulations locales.

🔎 Esprit critique

  • Le plafond de 720 € n’est pas automatique: il suppose de brancher souvent, aux bons moments. Un conducteur risquant de rentrer tard, repartir tôt, ou sans place de stationnement privée, capturera moins de valeur.
  • Les revenus V2G fluctuent avec les marchés de l’électricité et la disponibilité locale du réseau: ce n’est pas un forfait, c’est une valorisation variable.

Qui peut vraiment en profiter dès aujourd’hui ?

Profil favorable:

  • Stationnement privatif avec accès à une wallbox dédiée, connexion internet fiable.
  • Horaires laissant de longues plages de connexion (soir/nuit/journée en télétravail).
  • Appétence pour un contrat énergétique spécifique et la gestion de quelques réglages.
  • Bonus: un toit photovoltaïque amplifie l’intérêt, surtout quand l’écosystème maison sera pleinement intégré.

Profil moins adapté:

  • Pas de place de parking privative ou de possibilité d’installer une wallbox.
  • Petites fenêtres de stationnement à domicile.
  • Priorité absolue à la charge rapide hors domicile.

En Allemagne, le V2G avance, mais pas en terrain totalement préparé

  • Incitations en voie de consolidation: Berlin travaille sur des leviers fiscaux et un cadre pro‑flexibilité, mais l’exécution prendra du temps.
  • Projets pilotes multiples: industriels et énergéticiens testent déjà l’agrégation de flottes en “centrales virtuelles”; la bascule commerciale commence maintenant avec BMW/E.ON.
  • L’échelle, talon d’Achille: sans smart meters généralisés, standards consolidés et process harmonisés chez les opérateurs de réseau, le V2G restera concentré sur des niches volontaires.

Et pour la France, quel signal ?

  • Effet d’entraînement européen: l’industrialisation côté constructeur (BMW) et fournisseur d’énergie (E.ON) va accélérer la normalisation, les interfaces et la crédibilité du modèle.
  • Conditions transposables mais locales: en France, la réussite passera par l’agrégation des VE dans les marchés de réserve, un maillage de bornes bidirectionnelles, et des offres réellement lisibles pour le grand public.
  • Message clé: le V2G devient un produit “banalisable” — pas seulement un pilote de R&D — mais il lui faut un cadre régulatoire clair et des parcours clients sans friction.

Foire aux questions rapides

  • Quand? Lancement Allemagne, communiqué du 10/09/2025; extension à d’autres BMW prévue progressivement.
  • Où? D’abord en Allemagne, via E.ON.
  • Combien? Bonus jusqu’à 720 €/an, variable selon votre participation.
  • Quel matériel? BMW iX3 compatible + BMW Wallbox Professional + contrat V2G E.ON.
  • Batterie et garantie? BMW affirme préserver la longévité; vérifiez les conditions précises de garantie et les paramètres de pilotage (plages de SoC, cycles, température).

💬 Conseil d’expert

  • Maximisez votre temps branché aux heures de forte valeur (soirée, matinée selon le réseau), paramétrez un seuil de charge mini suffisant pour vos trajets, et surveillez votre “compte bonus” pour mesurer l’intérêt réel dans votre cas d’usage.

En bref, BMW et E.ON transforment une promesse technologique en produit client: un jalon important pour le V2G européen. La valeur est réelle mais conditionnelle — elle dépend de votre profil d’usage et des avancées réglementaires et techniques à venir.

États‑Unis: la fin du bonus EV à 7 500 $ déclenche une ruée — et une leçon pour l’Europe

En bref:

  • La fin du crédit d’impôt fédéral US au 30/09/2025 provoque un pic de préachats (Q3) suivi d’un risque important de recul des ventes EV en Q4 — exacerbée par de nouveaux tarifs (~+4 000 $) et une compétition qui érode la part de Tesla.
  • Leçon pour l’Europe : éviter les à‑coups budgétaires — préférer des cadres pluriannuels et ciblés (entrée de gamme, occasion, flotte) et renforcer bornes/réseau pour une transition stable.

D’ici au 30 septembre, l’Amérique vit une parenthèse électrique: concessions bondées, offres “à saisir”, livraisons anticipées. La cause? L’extinction du crédit d’impôt fédéral jusqu’à 7 500 $ pour l’achat d’un véhicule électrique (et 4 000 $ pour un modèle d’occasion), actée par le “One Big Beautiful Bill” de l’administration Trump.

Cette poussée de fièvre, avant un probable trou d’air, illustre les effets pervers d’incitations en stop-and-go. Volatilité des ventes, guerre des remises, parts de marché qui bougent (Tesla recule), et, surtout, adoption ralentie une fois la perfusion retirée. Un cas d’école dont l’Europe ferait bien de s’inspirer… à temps.

À retenir

  • ⏳ Crédit d’impôt US expirant le 30 septembre 2025: jusqu’à 7 500 $ (neuf) et 4 000 $ (occasion).
  • 🧾 Assouplissement IRS: un “contrat écrit contraignant” + un paiement avant le 30/09 permet de conserver le crédit même si la livraison a lieu plus tard.
  • 🚀 Rush de fin d’été: EV à ~9% de part de marché en août selon Cox Automotive, jusqu’à ~12% d’après J.D. Power; Q3 attendu record.
  • 🧊 Après la ruée, la chute? Cox et plusieurs analystes anticipent un net ralentissement en Q4; certains voient la part EV retomber temporairement très bas.
  • 💸 “Double peine”: fin du crédit + tarifs à l’importation, avec un surcoût attendu autour de 4 000 $ par véhicule.
  • 📉 Tesla passe sous 40% de part de marché EV aux USA en août (≈38% selon Cox), au plus bas depuis 2017.
  • 🔭 EY révise la trajectoire: 50% de parts de ventes pour les EV en 2039 (5 ans plus tard que prévu), ~11% en 2029 (vs 8,1% en 2024).
  • 🇪🇺 Avertissement pour l’Europe: éviter les falaises budgétaires, sécuriser un cap lisible et pluriennal, surtout en entrée de gamme.

Ce qui se passe aux États‑Unis

Un compte à rebours qui dope les ventes

  • Les distributeurs et constructeurs multiplient promos et communication pour “vider” le stock avant la date butoir.
  • En juillet, les ventes d’EV ont bondi (≈130 000 unités, +26% m/m, données Cox). En août, la part EV atteint environ 9,1% selon Cox Automotive; J.D. Power évoque un pic proche de 12%.
  • Plusieurs observateurs anticipent un Q3 record sur l’électrique, porté par le phénomène de pré‑achat.

La règle IRS qui offre un peu de souplesse

  • Le fisc américain considère désormais qu’un véhicule est “acquis” à la date d’un contrat écrit contraignant assorti d’un paiement (acompte ou reprise), même si la mise à disposition intervient après le 30 septembre.
  • En pratique: ruée sur les bons de commande, notamment pour sécuriser des configurations en pénurie.

La marche arrière après l’euphorie

  • Une “cassure” des immatriculations est attendue en Q4 une fois l’incitation supprimée.
  • Un analyste (iSeeCars) prévient d’un risque de chute brève de la part EV sous 4% juste après l’échéance; d’autres scénarios sont moins sévères mais convergent vers un ralentissement net.
  • EY repousse de cinq ans (à 2039) le moment où l’électrique atteindrait 50% des ventes US; d’ici 2029, la part ne monterait qu’à ~11%.

Tarifs et prix: la double peine pour l’EV

  • Les droits de douane supplémentaires sur véhicules et composants devraient renchérir le prix d’un EV d’environ 4 000 $ en moyenne (estimation J.D. Power).
  • Tant que les constructeurs absorbaient une partie du choc, l’effet prix restait contenu. Ce coussin s’amincit.

Tesla perd du terrain au pays

  • La part de Tesla sur l’EV américain tombe à ~38% en août (Cox), première incursion sous 40% depuis 2017.
  • En toile de fond: une concurrence qui s’élargit, une gamme Tesla vieillissante et des promotions agressives chez GM, Ford ou les nouveaux entrants.
  • Paradoxalement, Q3 pourrait rester solide pour Tesla aux USA grâce au “pull‑forward”, avant un reflux en Q4.

Des incitations en stop‑and‑go, un marché en montagnes russes

  • Tirer la demande vers l’amont (“pull‑forward”) crée une illusion de vigueur, suivie d’un “air pocket” qui déstabilise la planification industrielle.
  • Le jeu des remises s’intensifie: rabais constructeurs, loyers de leasing retravaillés, ristournes équivalentes au crédit d’impôt (Lucid propose déjà un chèque maison de 7 500 $ sur certaines formules).
  • Le “leasing loophole”, qui permettait de passer le crédit via les captives financières, doit aussi être refermé fin septembre, retirant un amortisseur clé.
  • Résultat: marges sous pression, incertitude d’investissement sur batteries et outillages, et volatilité des valeurs résiduelles sur le marché de l’occasion.

Comment les constructeurs tentent d’amortir le choc

  • Accélérer livraisons et immatriculations avant le 30/09, y compris via des contrats “binding”.
  • Offres ciblées: coupons équivalents au crédit, packs borne + installation, financement subventionné.
  • Repricing tactique après l’échéance: baisses de prix ponctuelles sur certains modèles pour maintenir le volume, au détriment des marges.
  • Ajustement production/allocations: éviter les stocks EV immobilisés en Q4, quitte à prioriser hybrides et versions thermiques à forte rotation.

📌 Info pratique (USA): l’État de New York maintient une remise “Drive Clean” jusqu’à 2 000 $ au concessionnaire. D’autres aides locales subsistent, mais leur portée reste limitée face à la disparition du crédit fédéral.


La leçon pour l’Europe

L’épisode américain illustre un principe simple: l’EV est très sensible au cadre public. Quand l’incitation disparaît brutalement, l’adoption ralentit, surtout en phase de transition où les coûts restent plus élevés.

Or l’Europe n’est pas immunisée contre ces aléas:

  • L’Allemagne a mis fin abruptement à son Umweltbonus fin 2023; la France a resserré l’accès au bonus via un score environnemental.
  • La compétition chinoise tire les prix vers le bas hors USA; en Europe, la réponse par les droits additionnels réduit l’exposition mais pas l’exigence de rendre l’EV abordable.
  • Les calendriers CO2 et l’échéance 2035 exigent une trajectoire lisible pour ménager les investissements et le pouvoir d’achat.

Cinq pistes concrètes pour éviter l’effet “falaise” en Europe

  1. Stabiliser un cadre pluriannuel: enveloppes budgétaires votées sur plusieurs années, trajectoires de dégressivité publiques à l’avance.
  2. Cibler l’entrée de gamme et le segment B/C: bonus conditionné au prix plafond et à la fabrication européenne, pour massifier.
  3. Soutenir l’occasion électrique: aides à l’achat d’EV d’occasion, garanties batterie encadrées, fiscalité douce sur les VUL/VO électrifiés.
  4. Harmoniser avec l’entreprise: aligner avantage en nature, TVS, amortissements, pour sécuriser le canal flotte (moteur du renouvellement et de l’approvisionnement VO).
  5. Investir dans l’infrastructure et la flexibilité réseau: bornes rapides sur axes et zones denses, tarification intelligente, soutien aux copropriétés.

💡 Conseil d’expert: le meilleur anti‑volatilité reste une “rampe de sortie” claire. Mieux vaut un bonus qui décroît linéairement (et prévisiblement) qu’une générosité ponctuelle suivie d’un couperet.


Indicateurs à surveiller d’ici fin 2025

  • Taux d’inventaire EV aux USA (days’ supply) et ampleur des remises moyennes.
  • Part du leasing dans les ventes EV après fermeture de la “passerelle” fiscale.
  • Révisions de prix catalogue sur les modèles cœur de marché (SUV compacts).
  • Part de marché Tesla aux USA et en Europe; cadence de lancement de nouveaux modèles.
  • Valeurs résiduelles des EV en VO et écart de TCO vs thermique/hybride.
  • En Europe: annonces budgétaires 2026, évolution des tarifs anti‑dumping et calibrage du bonus écologique.

En clair, la séquence américaine combine un sprint avant l’obstacle et un risque de faux-plat prolongé. Pour l’Europe, l’enseignements est limpide: si l’on veut une électrification soutenable — pour les ménages, les industriels et le climat — il faut des règles stables, lisibles et ciblées, pas des à-coups. La transition n’aime ni les falaises ni les virages serrés.

Raid à la gigafactory Hyundai (Géorgie) : l’alerte sociale que l’Europe doit anticiper

En bref:

  • Le raid HSI en Géorgie (475 interpellations, majoritairement de Sud-Coréens) met en lumière les zones grises visas/sous‑traitance sur les chantiers de batteries et a stoppé la construction du site.
  • L’Europe, qui multiplie les gigafactories, court le même risque (dépendance à des experts étrangers, chaînes d’avoirs profondes et contrôle social insuffisant).
  • Il faut agir vite: transparence des sous‑traitances, contrôles droits‑travail sur site, visas techniques encadrés, formation locale et sanctions ciblées pour éviter interruptions et crises diplomatiques.

Le plus grand raid de l’histoire d’HSI (Homeland Security Investigations) s’est déroulé la semaine dernière sur le méga-site Hyundai–LG en Géorgie. 475 personnes ont été interpellées, majoritairement des ressortissants sud-coréens employés par des contractants et sous-traitants sur la partie batterie du site. Les images de travailleurs menottés, de bus pénitentiaires et de chantiers à l’arrêt ont fait le tour du monde.

Derrière l’événement, un message clair: les méga-projets industriels de l’électrique reposent sur des chaînes de sous-traitance tentaculaires, des compétences rares… et des zones grises juridiques. Alors que l’Europe accélère ses propres gigafactories, peut-elle éviter un déraillement social et légal du même ordre?

Ce qui s’est passé en Géorgie, factuellement

  • 475 personnes arrêtées sur le site Hyundai–LG près de Savannah, lors d’une opération issue d’une enquête de plusieurs mois sur des “pratiques d’emploi illégales et autres crimes fédéraux” (DHS/HSI).
  • La majorité des personnes interpellées sont des ressortissants sud-coréens; d’autres nationalités sont mentionnées (dont Mexique).
  • Selon Hyundai, aucun des arrêtés n’est employé direct du constructeur; ils travaillent pour des contractants/sous-traitants. La production d’EV n’a pas été interrompue; la construction de l’usine de batteries, si.
  • Côté visas et statuts: cas de franchissement illégal, d’overstays, et d’entrées sous programme de dispense de visa (ESTA) non autorisées pour travailler. Des avocats avancent que certains ingénieurs/installeurs opéraient dans le cadre de missions techniques de courte durée (B-1/ESTA), juridiquement sensibles si l’activité déborde vers l’exécution.
  • Séoul a exprimé sa “préoccupation et regret” et a affrété un vol charter pour rapatrier plus de 300 de ses ressortissants, avec un départ attendu dès mercredi (selon CNN). LG Energy Solution a suspendu la majorité de ses déplacements vers les États-Unis et dépêché sa DRH sur place.
  • Les autorités américaines parlent de “plus grande opération d’exécution sur un seul site de l’histoire d’HSI”. La Maison Blanche défend un cap: intensifier les contrôles en entreprises.

📌 À retenir

  • 475 arrestations, dont plus de 300 Sud-Coréens
  • Cible: chantier de batterie (JV Hyundai–LG), pas la ligne d’assemblage EV
  • Pas d’employés directs Hyundai arrêtés (selon le constructeur)
  • Raids motivés par des soupçons d’emploi illégal; enquête pénale en cours, sans poursuites annoncées à ce stade
  • Séoul affrète un avion pour un retour “volontaire” rapide de ses ressortissants

Pourquoi cette affaire dépasse Hyundai

Cette opération révèle une une tension structurelle de la transition auto-électrique: construire très vite, à (très) grande échelle, avec des technologies nouvelles et des équipements industriels souvent fournis, installés et mis au point par des spécialistes étrangers. Lorsque les calendriers se tendent, les lignes entre “assistance technique” (tolérée sous certaines conditions de visas) et “travail” (interdit sans autorisation) peuvent être franchies. S’y ajoute un millefeuille de sous-traitance où l’obligation de conformité se dilue.

Aux États-Unis, l’exécutif a choisi d’en faire un axe de politique publique: contrôler les lieux de travail, dissuader les schémas d’emploi illégaux, et rappeler qu’un investissement étranger ne vaut pas dérogation. La conséquence est double: image et diplomatie bousculées, chantiers ralentis, compétences critiques indisponibles à court terme.

L’Europe, championne des gigafactories… mais prête côté social?

Le Vieux Continent aligne les projets: ACC (France/Allemagne/Italie), Verkor (Dunkerque), Northvolt (Suède/Allemagne), des projets en Hongrie, en Espagne, et les extensions autour de Berlin. Des milliers d’emplois, des délais serrés, et la même dépendance à des experts en mise au point d’équipements (sécheurs, calendrage, enrobage, formation du SEI, systèmes de BMS, etc.) rarement disponibles localement à court terme.

L’Europe dispose de garde-fous, mais ils sont hétérogènes et souvent focalisés sur l’environnement et la due diligence amont (matières premières), moins sur le contrôle social “sur site”:

  • Droit du travail et contrôles nationaux (inspection du travail, obligations de vérification du droit au travail, carte BTP en France, déclarations SIPSI pour travailleurs détachés, solidarité financière du donneur d’ordre, etc.).
  • Directive sur le détachement et son application (cadre pour travailleurs intra-UE).
  • Lois nationales de vigilance (France) et lois chaînes d’approvisionnement (Allemagne). Le règlement batteries impose des obligations de diligence sur les matières premières, pas sur la main-d’œuvre des chantiers.

Le risque? Un angle mort social sur des chantiers à très forte sous-traitance, où des contingents extra-européens (coréens, japonais, chinois, américains, etc.) interviennent pour installer, calibrer et former, avec des statuts et des missions parfois mal cadrés.

Le nœud du problème: sous-traitance et visas techniques

  • Compétences rares: pour certaines lignes batteries, il faut 3 à 5 ans pour former un installateur/ metteur au point. D’où l’envoi par les OEM d’équipements d’équipes “commissioning” qui tournent de site en site.
  • Frontière juridique: l’“assistance technique” à l’installation (supervision, réglage, formation) peut être permise sous certains titres de séjour/visas. Mais la participation directe à l’exécution (montage, génie civil, production) ne l’est pas. La nuance se joue dans les contrats, et… au quotidien sur site.
  • Chaîne à tiroirs: le client (gigafactory) contracte un intégrateur, qui sous-traite, qui re-sous-traite… Jusqu’au prestataire de main-d’œuvre. À la fin, qui contrôle quoi, et qui assume?

💡 Conseil d’expert
Formalisez une “matrice d’activités autorisées” par profil/visa et par zone de chantier. Affichez-la, formez les chefs d’équipe, et couplez-la à un contrôle d’accès par badge (avec statut légal vérifié et horodaté). Ce qui n’est pas autorisé n’entre pas.

Ce que l’Europe peut et doit faire dès maintenant

  1. Exiger la transparence totale de la chaîne de sous-traitance
  • Registre public des contractants/sous-traitants de rang 1 à n.
  • Obligation de déclaration nominative des personnels affectés (nationalité, statut de séjour/travail, rôle précis) et mise à jour en temps réel.
  1. Verrouiller la conformité à l’entrée du site
  • Contrôle droit au travail et correspondance “mission/visa/contrat”.
  • Badge nominatif lié au périmètre d’intervention autorisé; blocage automatique hors périmètre.
  1. Auditer les “missions techniques” étrangères
  • Cartographie des compétences critiques externes (par équipement).
  • Procédure fast-track nationale/UE pour visas de courte durée dédiés au commissioning, avec périmètre d’activités explicite, traçabilité et reporting.
  1. Encadrer l’intérim et la main-d’œuvre détachée
  • Déclarations préalables (type SIPSI) systématiques et contrôles inopinés.
  • Clauses de solidarité renforcées: le donneur d’ordre paie en cas d’infraction (salaires dus, pénalités, hébergement indigne).
  1. Séparer nettement assistance et exécution
  • Cahiers des charges qui distinguent supervision/formation et travaux d’exécution, avec pénalités contractuelles si mélange des genres.
  1. Mettre en place des “lignes rouges” sociales
  • Hébergements conformes, transport, EPI, temps de repos: checklists auditées.
  • Canaux d’alerte anonymes multilingues; droit syndical garanti sur site.
  1. Publier des indicateurs trimestriels
  • Effectifs par statut (CDI, CDD, intérim, détachement, mission étrangère).
  • Taux d’accidents, audits réalisés, non-conformités et mesures correctives.
  1. Sanctionner vite… et sans arrêter la transition
  • Amendes, déréférencement de sous-traitants récidivistes, voire suspension ciblée d’un lot. Objectif: corriger sans paralyser l’ensemble du projet.
  1. Mutualiser la ressource rare
  • Académies régionales des compétences batteries (ligne pilote, formation en conditions réelles) pour réduire la dépendance à l’expertise importée.
  1. Prévoir l’imprévisible
  • Plans de continuité: “que se passe-t-il si 200 techniciens étrangers doivent quitter le site sous 72 h?” Équipes de relève, réordonnancement critique, clauses contractuelles d’assistance à distance.

🧭 À l’usage des donneurs d’ordre

  • “Three lines of defense”: 1) auto-contrôle du sous-traitant (preuves), 2) audit du titulaire de rang 1, 3) audit inopiné du maître d’ouvrage.
  • Bonus-malus social dans les contrats: rémunération variable indexée sur des KPIs de conformité (zéro travail illégal, zéro hébergement indigne, zéro accident grave).

Et pour les travailleurs? Mieux protéger, c’est aussi sécuriser les projets

  • Information claire, dans la langue du travailleur, sur droits/devoirs et périmètres d’activité autorisés.
  • Accès à des conseils juridiques indépendants; médiation en cas de litige de mission/visa.
  • Hébergements décents, contrôlés; transport sécurisé; médecine du travail sur site.
  • Encadrement des heures et repos: la pression calendrier est la première cause de dérive.

Un miroir tendu à l’Europe

L’affaire de Géorgie n’est pas un “problème américain”: c’est le révélateur d’une réalité industrielle mondiale. La transition vers l’électrique exige des chantiers titanesques, des compétences rares et des calendriers politiques serrés. Si l’Europe veut éviter des raids spectaculaires, des chantiers à l’arrêt et des crises diplomatiques, elle doit muscler, tout de suite, sa gouvernance sociale des gigafactories: transparence totale, contrôles intelligents, voies légales claires pour l’expertise étrangère, et tolérance zéro pour les dérives. C’est le prix — raisonnable — d’une transition crédible et durable.

2035 sous tension: Stellantis temporise, les équipementiers alertent — l’auto européenne prise en étau

En bref:

  • Antonio Filosa (Stellantis) juge l’interdiction des ventes thermiques en 2035 « pas réaliste » sans flexibilités (incentives au renouvellement, supercrédits, meilleure valorisation des hybrides, report pour VUL), invoquant marché en contraction, parc vieillissant et difficultés des utilitaires.
  • Les équipementiers alertent sur la perte industrielle et les suppressions d’emplois; risque de gel des investissements et de dépendance aux importations si l’UE n’accorde que des assouplissements conditionnés à des contreparties industrielles (BEV abordables produits en Europe, soutien batteries/recharge).

La fracture s’agrandit au sommet de l’automobile européenne. Tandis que le nouveau patron de Stellantis, Antonio Filosa, juge « pas réaliste » l’interdiction des ventes thermiques en 2035 sans « flexibilités », la base industrielle – les équipementiers français via la FIEV – tire la sonnette d’alarme et évoque une filière « quasiment perdue ». Entre calendrier climatique et choc de compétitivité, la transition électrique risque le faux-plat.

Au-delà des postures, une question centrale: comment tenir l’ambition de décarbonation sans casser l’outil industriel ni perdre la bataille du véhicule abordable face à la Chine ? Décryptage, chiffres à l’appui.

Ce que Stellantis demande (et pourquoi)

Dans des entretiens accordés début septembre, Antonio Filosa remet en cause la trajectoire telle que définie:

  • « -55% d’émissions en 2030 » et « 100% zéro émission en 2035 » jugés « irréalistes » sans assouplissements.
  • Priorité à des « leviers de flexibilité »: meilleures incitations au renouvellement du parc (prime à la casse/reconversion), supercrédits pour petites électriques, « meilleure valorisation » des hybrides, et assouplissement de 3 à 5 ans de la trajectoire CO2 des utilitaires légers.

Arguments clés avancés:

  • Marché européen contracté d’environ 18 à <15 millions de VP entre 2019 et 2025: des volumes insuffisants pour amortir la bascule vers l’électrique.
  • Parc vieillissant (âge moyen >12 ans; >250 millions de véhicules anciens en circulation): agir sur le renouvellement rapide aurait plus d’impact climat que de se focaliser uniquement sur les immatriculations neuves 100% BEV.
  • Segment VUL en difficulté, demande pro insuffisante, coûts élevés: risque direct pour des sites comme Hordain (Nord).

📌 Filosa s’aligne avec plusieurs grands acteurs: Ola Källenius (Mercedes/ACEA) juge 2035 « inatteignable », BMW propose de glisser à 2050. Bruxelles ouvre un « dialogue stratégique » avec l’industrie cette semaine, avant la clause de revoyure de 2026.


✅ À retenir

  • Stellantis ne conteste pas l’électrification, mais son rythme et sa rigidité.
  • Les « flexibilités » visent à éviter des pénalités CO2 massives, préserver l’emploi et redonner de la demande.
  • Le point dur immédiat: les utilitaires électriques, loin des volumes requis.

La riposte des équipementiers: « filière quasi perdue »

Côté équipementiers français (FIEV), l’alerte est maximale. Jean‑Louis Pech déplore une perte de vitesse structurelle:

  • Production nationale passée de ~4 millions à <1,5 million de véhicules/an.
  • 10 000 emplois en danger sous deux ans chez les fournisseurs; l’emploi global auto s’est déjà contracté (−38 600 entre 2019 et 2024).
  • Déficit commercial auto cumulé 2019‑2025: ~120 milliards d’euros.
  • Compétitivité dégradée (coûts salariaux/énergie, impôts de production), « le pouvoir n’est plus en France » pour une partie des décisions stratégiques.

Le message est clair: il faut des décisions rapides sur énergie, fiscalité de production, simplification réglementaire, et une véritable stratégie industrielle européenne allant « de la mine au véhicule » à l’image de la Chine.


📊 Chiffres clés de la transition (Europe, 1er semestre 2025)

  • Part des VUL électriques: ~8,2% (objectif implicite ~17% pour éviter des pénalités).
  • Part des voitures 100% électriques: ~15,6% (vs ~25% attendu pour rester dans les clous).
  • Âge moyen du parc: >12 ans.
    Source: échanges sectoriels et positions ACEA/Clepa.

Une ligne de fracture qui menace l’ensemble de la trajectoire

La « flexibilité » est un mot-valise. Elle peut:

  • Aider à passer un cap (lissage du calcul CO2, supercrédits temporaires, incitation au parc récent).
  • Ou, mal calibrée, diluer les incitations à investir dans le 100% électrique européen, alors que la concurrence chinoise monte en gamme et en volume.

Trois risques majeurs si l’incertitude perdure:

  • Geler les investissements industriels (batteries, plateformes, logiciels) faute de visibilité réglementaire.
  • Aggraver la dépendance aux importations sur l’électrique abordable, en particulier sur la batterie et l’électronique de puissance.
  • Éroder davantage la base d’équipementiers européens, déjà fragilisée, au profit d’écosystèmes hors UE.

💬 Citation
« Il faut passer du dialogue stratégique à l’action stratégique. Et vite. »
Antonio Filosa (Stellantis)


2035: que peut décider l’Europe? Quatre scénarios plausibles

  1. Maintien de 2035, avec assouplissements ciblés
  • Lissage renforcé du calcul des émissions (au-delà de 2027), supercrédits BEV petites voitures, mécanismes spécifiques VUL.
  • Ambition intacte, donne de l’air aux industriels
    − Complexité accrue, risque de « gestion de conformité » plutôt que d’investissement productif
  1. Maintien de 2035, mais « neutralité technologique » dans la conformité
  • Prise en compte conditionnelle des PHEV (usage réel), prolongateurs d’autonomie, carburants décarbonés, hydrogène, décarbonation côté chaîne de valeur (acier vert, usines bas carbone) convertie en « tonnes de CO2 évitées ».
  • Réintègre des solutions transitoires, soutient l’emploi
    − Débat méthodologique sensible; risque de relâchement sur le BEV si les métriques sont laxistes
  1. Report de l’échéance (2038–2040, voire 2050)
  • Calme les OEM les plus exposés, aligne le calendrier avec une montée en charge industrielle et réseau de recharge.
  • Prévisibilité industrielle, amortissement des CAPEX
    − Signal politique négatif, risque de décrochage technologique face à la Chine et aux États‑Unis sur le BEV
  1. Trajectoire différenciée par segments
  • Assouplissement dédié aux VUL et usages intensifs, maintien strict pour VP.
  • Cible le point dur (VUL), limite l’aléa pour le VP
    − Fragmentation des règles, complexité pour les groupes multimarques

🧭 Repères calendrier

  • 12 septembre 2025: « Dialogue stratégique » Commission UE–industrie (en marge de l’IAA Munich)
  • 2026: clause de revoyure des normes CO2
  • 2030: jalon –55% d’émissions pour VP/VUL
  • 2035: fin des ventes neuves thermiques (règlement actuel)

Ce qu’il faudrait activer maintenant pour éviter l’impasse

  • Parc et pouvoir d’achat
    • Prime à la casse/reconversion ciblée bas revenus et pros, fléchée vers BEV compacts/VUL électrifiés.
    • Leasing social sanctuarisé et élargi aux véhicules d’occasion récents électriques.
  • Offre industrielle européenne
    • Accélérer les plateformes BEV « low-cost » européennes (<20 000–25 000 € TTC), standardiser, mutualiser.
    • Exigence de contenu européen sur batteries/composants critiques, avec contrats d’énergie longue durée et tarifs compétitifs pour les usines.
    • Accélérer permis et financement des gigafactories, recyclage et raffinage (nickel/lithium) en Europe.
  • Règles du jeu CO2
    • Lissage pluriannuel, supercrédits temporaires et dégressifs pour petites BEV, métriques robustes d’usage réel des PHEV.
    • Piloter par « tonnes de CO2 évitées » sur toute la chaîne de valeur, sans greenwashing.
  • Infrastructures et usages pros
  • Commerce et concurrence
    • Filets anti‑dumping ciblés et proportionnés; clauses de réciprocité d’accès aux marchés publics.
    • Standardisation et cybersécurité: jouer l’atout « norme européenne » pour créer une barrière de qualité.

💡 Conseil d’expert

  • Conditionner toute « flexibilité » à des contreparties: volumes de BEV abordables produits en Europe, investissements industriels vérifiables, et trajectoires d’émissions compatibles avec 2030. La flexibilité ne doit pas devenir une rente de conformité.

🎯 Point de vigilance

  • Reporter sans stratégie alternative claire expose à perdre sur les deux fronts: l’empreinte carbone et la souveraineté industrielle. L’Europe doit sécuriser rapidement un « atterrissage » lisible pour 2030–2035, sinon le brouillard réglementaire gèlera les décisions d’investissement les plus critiques.

En quelques jours, l’UE va poser les bases de sa clause de revoyure. Si l’objectif final ne doit pas vaciller, c’est la qualité du chemin qui fera la différence: calibrer des assouplissements utiles, exiger des contreparties industrielles et rendre l’électrique vraiment accessible. Sans cela, la tenaille se resserrera entre un sommet qui rétro-pédale et une base industrielle qui s’effrite.

Volkswagen relance la partie électrique: ID.Polo et pause de l’ID.4, le double signal d’un virage stratégique

En bref:

  • Volkswagen abandonne les chiffres pour revenir à des noms historiques (ID.Polo, bientôt ID.Golf/Tiguan…), vise l’entrée de gamme abordable (~25 000 €, version GTI prévue) et industrialise les nouveaux modèles en Espagne pour réduire les coûts et améliorer l’exécution.
  • Signal concomitant : production de l’ID.4 réduite/temporisée aux États‑Unis pour cause de surstock et demande atone, tandis que le modèle reste en Europe (restylage majeur prévu en 2026) — un repositionnement pragmatique face à la concurrence et aux limites de la stratégie initiale.

Volkswagen vient d’envoyer deux signaux forts à quelques jours du salon de Munich: d’un côté, la gamme électrique abandonne les chiffres pour revenir à des noms historiques, à commencer par l’ID.Polo. De l’autre, la production de l’ID.4 est temporairement réduite aux États‑Unis pour cause de surstock. Deux décisions qui disent beaucoup d’un repositionnement en profondeur face à un marché devenu impitoyable.

Si le constructeur assure garder le préfixe “ID.”, l’ère des ID.3, ID.4, ID.7 en chiffres touche à sa fin. La nouvelle boussole de Wolfsburg s’appelle lisibilité, prix d’accès et exécution sans faux pas, alors que la concurrence (Tesla, Renault, marques chinoises) a imposé son tempo.

Ce qui change, très concrètement

  • Nomenclature: fin des numéros. L’ID.2all devient ID.Polo (présentée camouflée à Munich, commercialisation 2026). À terme, attendez‑vous à des ID.Golf, ID.Tiguan, ID.Passat.
  • Offensive “entrée de gamme”: ID.Polo visée à ~25 000 €, ID.Polo GTI en 2026, puis un petit SUV ID.Cross (alter ego électrique du T‑Cross) fin 2026. Un modèle encore plus accessible est prévu pour 2027 (ex‑“Every1”, ~20 000 €).
  • Industrialisation: l’ID.Polo et l’ID.Cross seront assemblés en Espagne (Navarre et Martorell) pour contenir les coûts, avec des jumeaux chez Skoda et Cupra.
  • Positionnement produit: retour à des voitures “normales” à batteries (style moins clivant), meilleure qualité perçue, interface revue et… retour de boutons physiques.
  • Sport: la griffe GTI revient pour les électriques (adieu “GTX”).
  • ID.4: production temporairement mise sur pause et réduite aux États‑Unis (usine de Chattanooga) à partir de fin octobre, en raison d’un surstock et d’une demande en retrait. En Europe, le modèle reste au catalogue, avec un restylage majeur prévu pour 2026.

📌 À retenir

  • Le préfixe ID. est conservé; ce sont les chiffres qui disparaissent au profit de noms historiques.
  • La réduction de production de l’ID.4 concerne les États‑Unis. Elle ne vaut pas arrêt global du modèle.

Un aveu sur la stratégie initiale

  • Sous‑marque trop abstraite. Comme chez Mercedes (EQ), la nomenclature ID. a peu “parlé” aux clients. Le lien émotionnel (Polo, Golf) est plus fort que des chiffres.
  • Mauvais timing/prix. La guerre des prix lancée par Tesla et la poussée des marques chinoises ont rendu les ID.4/ID.3 rapidement trop chères au regard de leurs prestations.
  • Exécution perfectible. Débuts entachés par le logiciel, ergonomie tactile critiquée, qualité perçue inégale: autant d’éléments qui ont freiné l’adoption.
  • Plateforme sous pression. Le MEB a tenu la rampe, mais la concurrence a progressé vite sur l’efficience et la charge rapide. VW a dû repousser sa nouvelle plateforme SSP.
  • Marché heurté. En Europe, les incitations ont fluctué, la demande s’est normalisée après le “pic” 2023‑2024 et les stocks ont gonflé sur certains SUV électriques.

En clair, ce virage n’est pas un caprice marketing: il répond à des faiblesses identifiées, et au besoin de rendre l’offre immédiatement lisible et compétitive.

ID.4, symptôme d’une équation tendue

  • États‑Unis: réduction/arrêt temporaire de l’assemblage à Chattanooga, environ 160 salariés en chômage technique. Surstock et ventes en deçà des attentes malgré des promotions agressives (contrats de location très bas).
  • Europe: maintien du modèle et gros lifting 2026 (style, interface, efficience). VW rationalise par ailleurs sa gamme: l’ID.5, trop proche de l’ID.4, doit quitter le catalogue d’ici 2027 selon plusieurs médias.

💬 Le point d’équilibre volumes/marges sur un SUV électrique “familial” reste difficile à atteindre hors Chine. L’offensive sur l’entrée de gamme (ID.Polo/ID.Cross) vise à reprendre l’initiative là où les volumes sont structurants.

Pourquoi revenir aux noms historiques

  • Clarté immédiate: on comprend d’emblée qu’une ID.Polo est l’homologue électrique d’une Polo.
  • Capital marque: meilleure mémorisation, confiance héritée, valeur résiduelle potentiellement mieux tenue.
  • Simplification réseau: argumentaire plus fluide, moins de sous‑marques à expliquer, meilleure cohérence visuelle.

🎯 Objectif implicite: gommer la frontière “à part” de l’électrique pour intégrer les BEV au cœur de la gamme, sans “effet curiosité” mais avec l’ADN VW.

Le plan 2026‑2027: “abordable, normal, européen”

  • ID.Polo (2026): citadine électrique ~4,0 m, ticket d’entrée autour de 25 000 €, jumeaux Cupra/Skoda. Version GTI (226 ch annoncés pour la variante sportive).
  • ID.Cross (fin 2026): SUV urbain, alter ego du T‑Cross.
  • Modèle ~20 000 € (2027): entrée de gamme pour remplacer l’Up! disparue, avec arbitrage serré sur la batterie et l’équipement.
  • Fabrication en Espagne: effet coût et souveraineté européenne renforcés, volumes mutualisés dans le “Brand Group Core”.

ℹ️ Bon à savoir

  • Interface revue: Volkswagen promet des commandes plus intuitives et un mix boutons/écran mieux dosé après les critiques sur les premières ID.
  • Lignes apaisées: l’électrique VW devient une VW “comme les autres”, un vrai choix de motorisation, pas un sous‑label.

Les risques du nouveau chapitre

  • Exécution produit: tenir le prix plancher avec une autonomie crédible et une charge rapide compétitive reste la quadrature du cercle.
  • Cannibalisation: cohabitation thermique/électrique sous un même nom (Polo, Golf…) à clarifier en concession pour éviter la confusion.
  • Pression concurrentielle: Renault 5 à partir de ~25 000 €, Citroën ë‑C3 et Fiat Grande Panda plus agressives, BYD/MG en embuscade sur le rapport prestations/prix.
  • Timing industriel: livrer à l’heure, avec un logiciel “propre”, sera décisif pour restaurer la confiance.

💡 Conseil d’expert

  • Si vous visez une citadine électrique en 2026: comparez de près ID.Polo, Renault 5 et ë‑C3 sur l’autonomie réelle et la vitesse de recharge (10‑80%). À prix proche, la qualité d’interface et le réseau après‑vente feront la différence.
  • Pour un SUV familial dès maintenant: l’ID.4 bénéficie souvent d’offres commerciales attractives. Si vous privilégiez l’habitabilité et le confort, testez‑la face aux Kia Niro EV, [MG ZS EV](23782) et [Tesla Model Y](25308); sinon, patienter jusqu’au restylage 2026 peut se défendre.

Au lieu d’un renoncement, Volkswagen signe un réarmement pragmatique: des noms qui parlent, des prix mieux placés et l’ambition assumée de faire des électriques des Volkswagen “comme les autres”. Reste à transformer l’essai, sans retard ni compromis techniques, là où la concurrence ne pardonne plus.

Flottes: l’éco-score et les AEN grippent le marché pro — au risque de freiner l’électrique

En bref:

  • La combinaison éco-score + durcissement des AEN réduit les choix pour les voitures de fonction, augmente le coût pour salariés et employeurs et risque d’assécher le marché de l’occasion électrique à moyen terme.
  • Mesures proposées: période transitoire ou découplage partiel AEN/éco-score et cadrage pluriannuel pour préserver les volumes flottes et la filière VO.

Le paradoxe français se durcit. Pensée pour orienter la demande vers des véhicules plus vertueux, la combinaison de l’éco-score et de la réforme des Avantages en Nature (AEN) déstabilise le marché des voitures de fonction. Résultat: des choix restreints pour les gestionnaires de parc, des coûts en hausse pour les salariés, et un risque très réel d’assécher le futur marché de l’occasion électrique.

À l’heure où les entreprises sont le moteur de l’électrification en France, la fiscalité pourrait, sans recalibrage, casser la dynamique.

Ce qui a changé depuis l’hiver 2025

  • Avantage en nature plus lourd: le barème forfaitaire a été relevé en 2025 (de 30 % à 50 % de la valeur hors « carburant » selon les cas), ce qui renchérit l’AEN imposable pour les collaborateurs et les charges sociales pour l’employeur.
  • Abattement spécifique VE désormais conditionné: l’abattement sur l’AEN des véhicules 100 % électriques est porté à 70 % avec un plafond (4 582 €) mais uniquement si le modèle est éligible à l’éco-score. Dans le cas contraire, l’abattement est de facto supprimé.
  • Effet car policy immédiat: les parcs doivent exclure de leurs listes de véhicules de fonction des modèles pourtant compétitifs en TCO, mais non « éco-scorés ».

📌 À retenir

  • L’éco-score n’est pas qu’un filtre bonus: il conditionne aussi l’abattement AEN et l’accès au leasing social qui démarre le 30 septembre 2025.
  • Les véhicules assemblés hors UE, ou dotés de grosses batteries à empreinte élevée, sont les premiers exclus.

Rappel express: l’éco-score, à quoi sert-il?

  • Calculé par l’ADEME, il intègre l’empreinte carbone « du berceau à la distribution » (matériaux, batterie, énergie de production, transport, réparabilité).
  • Objectif: privilégier la production européenne décarbonée et limiter les importations à forte intensité carbone.
  • Seuils et liste évolutifs: la liste des modèles éligibles est mise à jour régulièrement, mais demeure volatile pour les directions de flotte.

💡 Bon à savoir
Le même score ouvre droit au bonus écologique et au leasing social; il s’impose donc comme un verrou unique pour les volumes.

Premiers effets visibles côté B2B

  • Les flottes tirent l’électrique: en juillet 2025, elles ont pesé 40,3 % des immatriculations électriques en France (part historique), avec une nette accélération depuis le début de l’année.
  • Août contrasté: si les loueurs de courte durée ont dopé les volumes totaux, le canal B2B a reculé (-6,3 %), signe d’une prudence accrue.
  • BEV en entreprise: selon AAA Data, en août, l’électrique représente environ un quart des immatriculations sur le canal flotte, avec des volumes en forte hausse sur un an (+57 %), mais en deçà des dynamiques observées en Allemagne ou en Espagne.

🎯 Ce que disent les acteurs

  • Des constructeurs (européens et asiatiques) alertent: la France est la seule à mêler éco-score, AEN conditionnel et durcissements successifs, créant une complexité qui fige les décisions d’achat.
  • Des voix appellent à rouvrir l’abattement AEN à tous les VE, le temps d’un palier transitoire, pour éviter un trou d’air.

Pourquoi ça grippe: les cinq maillons faibles

  1. Choix de modèles restreint
  • Exclusions des VE non « éco-scorés » (assemblage hors UE, chaîne batterie/carbone défavorable).
  • Car policy sous contrainte: downgrades d’usage, arbitrages subis sur l’autonomie et l’équipement.
  1. Coût social et fiscal en hausse
  • Barème forfaitaire relevé: AEN imposable plus élevé pour les salariés, charges patronales accrues; tensions RH possibles sur le véhicule de fonction, avantage statutaire clé.
  1. Incertitude résiduelle et valeurs futures
  • Listes d’éligibilité mouvantes, rendant difficile la planification à 36–48 mois d’un parc et la projection des valeurs résiduelles.
  1. Frictions réglementaires multiples
  • Superposition de règles (éco-score, AEN, autres dispositifs comme taxe au poids selon configurations) brouille la lisibilité et allonge les cycles d’achat.
  1. Ralentissement des renouvellements
  • Attentisme: maintien des thermiques/PHEV existants, reports d’appels d’offres, arbitrages vers des segments inférieurs ou vers l’hybride non rechargeable.

📢 Point de vigilance marché
La France reste un marché stratégique européen pour l’électrique. Une contraction des flottes y aurait un effet cascade sur les volumes continentaux et les plans industriels.

Effet domino: le risque sur l’occasion électrique

  • Les flottes alimentent le VO: l’essentiel du stock électrique de seconde main provient des retours de LLD/LOA à 36–48 mois.
  • Si les volumes 2025–2026 s’étiolent, le marché VO 2027–2029 sera « sec »: choix réduit, prix plus fermes, démocratisation retardée.
  • L’image de valeur: l’incertitude actuelle peut dégrader les valeurs résiduelles, renchérissant encore les loyers neufs.

ℹ️ Impact consommateur
Moins de VO électriques abordables = frein supplémentaire pour les ménages hors périmètre du leasing social.

Constructeurs: qui est exposé?

  • Importés hors UE: forte exposition à l’éco-score; plusieurs gammes corporate deviennent inéligibles à l’abattement AEN.
  • Européens pas épargnés: certains modèles (batteries lourdes, chaînes d’approvisionnement carbonées) sont sous pression.
  • Stratégies d’adaptation: relocalisations en cours (ex. nouvelles capacités en Europe centrale), et reconfiguration batteries pour baisser l’empreinte.
  • Risque de concentration: car policies recentrées sur quelques modèles « éco-scorés » domestiques = moins de concurrence, moins de remises, TCO en hausse.

Comparaison rapide Europe: pourquoi l’Allemagne et l’Espagne vont mieux

  • Allemagne: cadre plus simple et lisible (exonérations de taxe de circulation sur 10 ans pour les VE immatriculés à temps), peu de filtres « fabrication »; environnement stable pour les flottes.
  • Espagne: primes d’achat généreuses et dispositifs musclés de renouvellement; élan plus net sur le BEV.
  • France: palette d’incitations forte sur le papier (exonérations TVS, aides ciblées), mais « filtre » éco-score/AEN ajoute une complexité qui bride le choix et la vitesse d’exécution.

Quelles sorties de crise? Trois options politiques concrètes

  1. Instaurer une période transitoire éco-score pour les flottes
  • 12 à 18 mois d’éligibilité AEN pour tous les VE, le temps d’aligner production et batteries sur les seuils, sans casser les volumes.
  1. Décorréler partiellement AEN et éco-score
  • Maintenir l’éco-score pour le bonus/leasing social, mais rouvrir l’abattement AEN aux VE non éligibles, avec un abattement réduit et plafonné, afin de préserver le TCO flotte.
  1. Donner de la visibilité pluriannuelle
  • Cadre fixé sur 3–4 ans (seuils, barèmes, taxes), mécanisme de « clause de grand-père » pour les commandes lancées, et trajectoire connue de baisse progressive des avantages.

Alternative débattue par la filière

  • Baisser la TVA sur tous les VE (ex. 5,5 %) en simplifiant le reste. Mesure efficace sur le TCO, mais budgétairement lourde: à arbitrer.

Conseils pratiques aux gestionnaires de flotte

  • Modélisez finement l’AEN: comparez barème forfaitaire et calcul au réel; pour des profils très roulants pro, le « réel » peut réduire sensiblement l’assiette imposable.
  • Recalibrez le TCO: intégrez la perte d’abattement AEN, la fiscalité locale, et les nouvelles valeurs résiduelles dans vos appels d’offres.
  • Priorisez des VE « éco-scorés » à forte liquidité VO: sécurisez la revente à 36–48 mois.
  • Négociez les loyers sur la base de VR prudentes et d’engagements de disponibilité (risque de délais).
  • Anticipez la recharge: mix domicile/entreprise/public optimisé, pour limiter le coût d’usage et l’insatisfaction des collaborateurs.

✅ À retenir

  • Sans ajustement rapide, la réforme éco-score + AEN risque de ralentir l’électrification des parcs, tout en renchérissant le coût social du véhicule de fonction.
  • Un relâchement transitoire et une meilleure lisibilité suffiraient à remettre les flottes en ordre de marche, condition sine qua non d’un marché VO électrique abondant et abordable demain.

En creux, le message est simple: la France a besoin de flottes fortes pour réussir son virage électrique; l’arbitrage fiscal doit les aider à avancer, pas les faire caler au démarrage.

Août 2025: derrière la R5 triomphante, le marché électrique dopé… aux ventes tactiques

En bref:

  • Août : forte hausse des immats BEV (+29%) portée par la Renault 5 e‑Tech et par les flottes/ventes tactiques (LCD, véhicules de démo), tandis que les particuliers reculent.
  • Alerte soutenabilité : ces "ventes tactiques" gonflent les chiffres mais pèsent sur les valeurs résiduelles et les marges — surveiller commandes, part particuliers et stocks VO pour juger si la croissance BEV tiendra au S4.

Renault peut savourer: la R5 e‑Tech s’installe en patronne de l’électrique en France. Mais la flamboyance des chiffres d’août masque un ressort moins reluisant. La progression des immatriculations BEV tient surtout à des canaux « tactiques » (loueurs courte durée, véhicules de démonstration) et à des flottes professionnelles très actives, tandis que la demande des ménages – et une partie du B2B hors grands comptes – s’érode.

Décryptage sans fard d’un mois où l’électrique monte, mais pas (encore) par la seule force du marché.

Ce que disent (vraiment) les chiffres

  • 87 850 VP immatriculées en août (+2,2% vs 2024), sur un niveau historique bas pour un mois d’été. Cumul 8 mois: 1 046 432, en recul de 7,1% (PFA/AAA Data).
  • 16 992 électriques (+29%): part de marché BEV 19,3% (quasi au niveau de l’essence à 20,8%). Diesel sous 5%.
  • Hybrides au-dessus de 50% YTD (50,9%), reflet de l’hybridation accélérée du parc.
  • Flottes: immatriculations totales en baisse (–7,7%), mais EV en plein boom (+56/57%), à 23,6% des livraisons.
  • Canaux « tactiques » en forte hausse: location courte durée +49,4% (6 110 u.), véhicules de démo +13,9% (12 076 u.). Chez Renault: LCD +190% (859), VD +36,5% (1 069). Chez Peugeot: LCD +72%, VD +32%. En face, canal particuliers en baisse (–3,4%), avec des reculs marqués chez Peugeot (–30%) et Renault (–8%) sur ce segment.

📌 À garder en tête: l’immatriculation ne mesure pas la demande « cœur de marché » mais les mises à la route. Quand les tactiques et les flottes portent, le signal conjoncturel peut être positif sans refléter un véritable rebond des commandes.

R5 locomotive… et vitrine de la stratégie Renault

  • Top BEV août: Renault 5 e‑Tech 1 412 u. (seul modèle >1 000). Cumul janv‑août: 19 197 u., plus de 8 300 d’avance sur le Model Y.
  • Le losange place aussi: Dacia Spring 642 (4e), Scenic e‑Tech 630 (top 5), Renault 4 e‑Tech 444 (10e). Mégane E‑Tech recule (403).
  • Le nerf de la guerre: exposition massive, réseaux mobilisés, offres LLD/LLA agressives. Les hausses de LCD/VD montrent l’effort consenti pour faire voir et essayer les modèles – judicieux à court terme pour la notoriété et le mix de parts de marché.

⚠️ Esprit critique: plus on « tactise », plus on crée un stock de quasi-neufs qui pèse sur la valeur résiduelle et peut accroître la sensibilité aux remises. L’équation R5 restera gagnante si la bascule vers des commandes particuliers s’ancre au S4.

Stellantis décroche sur l’électrique

  • Un seul modèle Stellantis dans le top 10 BEV: Peugeot e‑208 (463). Citroën ë‑C3 (422, 11e), plombée par des soucis de fiabilité rapportés; e‑3008 (297, 17e), e‑2008 (272, 19e).
  • Le groupe prépare la relance avec le retour du leasing social au 30 septembre. En attendant, il « tient » le mois grâce à Citroën en thermique/hybride, mais reste trop discret en BEV sur les canaux à forte traction.

💡 Enjeu produit-prix: l’écart perçu valeur/technologie/prix face aux offres asiatiques (MG4, BYD Dolphin/Seal) et à la R5 doit être comblé par des configurations plus compétitives et des VR mieux calibrées en LLD.

Tesla à contretemps, premiums allemands en forme… en flottes

  • Model Y 957 u. (2e) mais –54% vs août 2024; Model 3 à 369. Tesla globalement en fort recul (~–47% sur le mois), après un « sprint » de livraisons en juin et des à-coups de bonus/CEE. Le mois de septembre sera un test d’appétit réel.
  • BMW iX1 743 u. (podium) et Audi Q6 (354; ~511 en cumul Q6+SQ6): indicateurs clairs du rôle moteur des flottes/LLD haut de gamme, boostées par l’avantage en nature favorable aux BEV.
  • Signal symbolique: BYD dépasse Tesla d’une courte tête sur le mois (1 338 vs 1 331, toutes énergies confondues). MG reste la marque chinoise la plus visible (1 627).

Le piège des ventes tactiques

Encadré — À retenir

  • Définition: immatriculations à destination des loueurs courte durée et véhicules de démonstration. Outils légitimes… mais à manier avec mesure.
  • Pourquoi ça gonfle les chiffres: ces canaux sont actionnables rapidement pour « faire le mois », lancer un modèle, soutenir des objectifs de parts de marché.
  • Les indices d’août: LCD +49,4%, VD +13,9%. Chez Renault et Peugeot, ces canaux explosent pendant que les ventes aux particuliers décrochent.
  • Les risques:
    • Dévalorisation des VO récents, pression sur les marges en neuf.
    • Distorsion du signal de demande: illusion d’un marché qui repart.
    • Pour l’électrique: multiplication de « 0‑6 mois » qui cannibalisent des ventes neuves à court terme.

Conseil d’expert

  • Pour lire correctement le marché, regardez les commandes (et pas seulement les immats), la part particuliers, et les stocks VO récents. La soutenabilité de la croissance BEV se jugera au S4 sur ces trois voyants.

Ce qui nous attend d’ici fin septembre

  • Coup de pouce renforcé début juillet et financements CEE révisés: effet prix visible mais encore irrégulier sur les commandes particulières.
  • Leasing social: retour annoncé au 30 septembre, AAA Data anticipe jusqu’à 50 000 unités additionnelles sur l’année. Les citadines/compactes à coût d’usage serré seront les premières bénéficiaires.
  • Points de vigilance:
    • Prix nets et valeurs résiduelles LLD (le vrai déclencheur côté ménages).
    • Disponibilités et délais: éviter l’embouteillage de fin d’année.
    • Réseau de recharge et coût kilométrique réel: déterminants pour les pros comme pour les particuliers.

Chiffres et positions marquants du top BEV (août)

  • Renault 5 e‑Tech: 1 412
  • Tesla Model Y: 957
  • BMW iX1: 743
  • Dacia Spring: 642
  • Renault Scenic e‑Tech: 630
  • Skoda Elroq: 556
  • Hyundai Kona EV: 507
  • Peugeot e‑208: 463
  • Hyundai Inster: 448
  • Renault 4 e‑Tech: 444
  • Citroën ë‑C3: 422
  • Renault Mégane E‑Tech: 403
  • Tesla Model 3: 369

En une phrase: août valide la traction de la R5 et des flottes sur l’électrique, mais confirme aussi que le marché grand public ne repart pas, et que les ventes tactiques portent plus qu’elles ne révèlent une demande naturelle.

Volvo XC70 PHEV 200 km: l’hybride longue portée qui bouscule (vraiment) le tout-électrique en Europe ?

En bref:

  • Volvo relance le XC70 en PHEV "long range" avec ~200 km CLTC (~140–160 km WLTP) grâce à une batterie ~40 kWh, visant l’usage quotidien 100% électrique et un moteur thermique pour les longs trajets.
  • Solution de transition séduisante (moindre dépendance aux recharges publiques) mais plus lourde/complexe et confrontée aux coûts, à la réglementation européenne et à une disponibilité d’abord en Chine.

Volvo relance le nom XC70 avec un hybride rechargeable d’un genre nouveau: près de 200 km d’autonomie électrique annoncée. C’est le double des standards actuels et, potentiellement, un changement de paradigme. Au-delà de la fiche technique, cette “long range PHEV” peut-elle réellement rebattre les cartes du tout-électrique sur le Vieux Continent ? Décryptage, sans effets d’annonce.

Ce que Volvo met sur la table

  • Autonomie électrique annoncée: jusqu’à 200 km (cycle CLTC chinois).
  • Batterie: environ 39,6 kWh (chimie NMC), avec une version LFP ~21 kWh visée à ~100 km.
  • Chaîne de traction: hybride série-parallèle dédiée avec transmission hybride 3 rapports.
  • Thermique: 1.5 turbo essence (famille Aurobay), associé à un ensemble multi-moteurs électriques.
  • Puissance combinée visée: autour de 400 ch; vitesse maxi limitée à 180 km/h (typique Volvo).
  • Efficience aérodynamique: calandre fermée avec volet actif, feux arrière affleurants.
  • Habitacle: double écran 12,3" + 15,4", grand affichage tête haute AR, cockpit intelligent ECARX Antora 1000 Pro + Cloudpeak (OTA, IA embarquée).
  • Disponibilité: d’abord en Chine (précommandes ouvertes fin août 2025). Pour l’Europe, rien d’officiel à date.

📌 À retenir

  • 200 km CLTC correspondraient plutôt à 140–160 km WLTP en Europe, selon l’écart habituel entre cycles. Cela resterait, de loin, la plus grande autonomie électrique d’un PHEV grand public.
  • Un pack ~40 kWh, c’est une “demi-batterie” d’EV compacte… dans une PHEV. Le pari: rouler au quotidien en 100% électrique, et garder le thermique pour les longs trajets.

Pourquoi c’est important (bien au-delà d’un chiffre record)

Les PHEV ont souvent déçu par des autonomies électriques trop courtes (30–80 km WLTP) et une dépendance au thermique dès que l’on s’éloigne du domicile. Avec ~150 km WLTP potentiels, le XC70 change la donne:

  • Usage réel: une majorité de déplacements quotidiens (trajets domicile-travail, courses, loisirs) passent en 100% électrique, même l’hiver ou sur voies rapides périurbaines.
  • “Utility factor” en hausse: plus l’autonomie électrique est grande, plus la part roulée en zéro émission grimpe dans la vie réelle. Les écarts WLTP/terrain devraient se resserrer.
  • Dépendance à la recharge publique: fortement réduite. La recharge à domicile suffit généralement, l’appoint public devenant occasionnel.
  • Stress d’autonomie: nul sur longs trajets, grâce au thermique. Pas besoin de planifier les recharges HPC lors des départs en vacances.

En clair: c’est la proposition “meilleur des deux mondes” qui, pour certains profils d’usage, n’était jusque-là qu’un slogan.

Le revers de la médaille

Rien n’est jamais gratuit en ingénierie automobile:

  • Masse et complexité: batterie conséquente + moteur thermique + transmission hybride = poids et coûts en hausse, face à un BEV simple ou à un PHEV classique.
  • Coûts totaux: une batterie de ~40 kWh reste chère, et on ajoute le prix du thermique. Le ticket d’entrée pourrait se rapprocher d’un BEV familial bien doté.
  • Entretien: on conserve les contraintes d’un moteur thermique (vidanges, pièces d’usure…), que n’a pas un VE pur.
  • Empreinte matière: on duplique partiellement les systèmes (électrique + thermique). Pas l’idéal du point de vue sobriété industrielle.

ℹ️ Bon à savoir

  • Recharge: avec ~7,4 kW à domicile, on remet ~40 kWh en 6–7 h; à 11 kW AC, comptez 4–5 h. La présence et la puissance d’une recharge DC dépendront des versions et des marchés (à confirmer pour l’Europe).
  • Autonomie totale annoncée: jusqu’à ~1 200 km combinés sans ravitaillement/recharge, un argument grand public fort.

Le cadre européen: tremplin ou impasse programmée ?

  • Règlementation CO2: l’UE durcit l’évaluation des PHEV via les données d’usage réelles (OBFCM), afin de refléter le taux de recharge effectif. Les “faux électrons” ne compteront plus. Un long-range PHEV bien rechargé devrait, lui, s’en sortir nettement mieux.
  • 2035: fin des ventes de voitures neuves thermiques (sauf niche e-fuels). Les PHEV ne sont pas une solution long terme côté offre. Ils sont, au mieux, une étape transitoire.
  • Aides et fiscalité: la plupart des pays réduisent/retirent les incitations PHEV. Le différentiel TCO avec un BEV s’amenuise, sauf cas d’usages spécifiques (parcs, remorquage, très longues distances régulières).
  • ZFE et Crit’Air: les PHEV restent aujourd’hui bien classés, mais les politiques locales visent le zéro émission à usage. À horizon 2030, la pression urbaine va continuer de monter en faveur des VE purs.

Dans ce contexte, le XC70 “200 km” ressemble à un outil de transition efficace pour utilisateurs rétifs au 100% électrique, mais pas à un cheval de Troie anti-BEV durablement compatible avec la feuille de route européenne.

Tech embarquée: promesse séduisante, vigilance requise

L’intégration ECARX (Antora 1000 Pro + Cloudpeak) annonce un cockpit puissant, IA à l’appui (commande vocale multi-zone, automatisations, interface 2D/3D, OTA). L’ergonomie promet d’être épurée, avec un très large affichage tête haute en réalité augmentée. Reste l’enjeu logiciel: Volvo a connu des débuts compliqués sur certains modèles électriques. La stabilité et la qualité perçue seront déterminantes en Europe.

✅ Ce qu’on aime sur le papier

  • Autonomie électrique inédite pour un PHEV de série.
  • Architecture dédiée (SMA) pensée d’abord pour l’efficience électrique.
  • Aérodynamique active, interfaces modernes, ADAS de haut niveau.
  • Option LFP plus sobre en ressources (version ~100 km).

⚠️ Les zones d’ombre à éclaircir en Europe

  • Chiffres WLTP officiels d’autonomie et de consommation.
  • Puissance et connectique de recharge (AC/DC), courbe de charge.
  • Masse, capacité de remorquage et efficience sur autoroute en électrique.
  • Tarification et positionnement face aux BEV maison (EX60/EX90).
  • Équipements de série vs options (HUD, aides avancées, etc.).
  • Disponibilité, lieux de production et conformité aux règles batteries UE.

Le point marché: la Chine d’abord, l’Europe ensuite ?

Le XC70 “long range PHEV” est officiellement lancé en Chine (préventes actives depuis le 27 août 2025). La demande locale pour des hybrides à grande autonomie électrique est très forte, et l’écosystème industriel (batteries, DHT, software) y est mature. Pour l’Europe, Volvo parle d’un “pont” vers le tout-électrique: l’intérêt client est évident, mais il faudra arbitrer entre objectifs CO2, rentabilité produit et lisibilité de la gamme face aux EX60/EX90.

💡 Conseil d’expert

  • Si vous roulez essentiellement au quotidien et pouvez recharger chez vous (ou au travail), un PHEV de 150 km WLTP réels peut couvrir 90% de vos trajets en zéro émission – avec la sécurité du thermique pour les vacances.
  • Si vous parcourez beaucoup d’autoroute et que vous avez accès à des HPC fiables, un BEV moderne restera plus simple, potentiellement plus efficient et mieux aligné avec les évolutions réglementaires d’ici 2030–2035.

En somme, ce XC70 à 200 km électriques pourrait bien être le PHEV le plus convaincant du marché… mais il n’invalide pas la trajectoire européenne vers le 100% électrique: il en lisse la transition, sans en changer la destination.

Auto-import de VE chinois : le piège de l’homologation qui peut tout faire capoter

En bref:

  • L’auto‑import de VE chinois affiche des prix attractifs mais l’homologation (RTI) n’est pas garantie en France et peut bloquer l’immatriculation malgré la promesse « incluse ».
  • Droits de douane, TVA, adaptations techniques (charge, éclairages, logiciels) et frais d’homologation font souvent exploser le coût et annulent l’économie initiale.
  • Valable surtout pour professionnels/experts prêts à assumer risques d’assurance, SAV et revente ; déconseillé pour un usage familial courant.

Acheter une Xiaomi SU7, une BYD Seagull ou un Xpeng Mona introuvables en concessions européennes, livrés à domicile et « homologués » pour rouler ? C’est la promesse de nouvelles plateformes qui s’adressent directement aux particuliers. Prix d’appel agressifs, procédures « prises en charge »… mais derrière les beaux discours, l’homologation est devenue le point dur qui menace l’achat tout entier. Et ce n’est pas le seul.

Ce qui change en 2025 : l’auto-import passe à l’échelle

Des acteurs comme « China/EV Marketplace » revendiquent désormais la vente unitaire à des particuliers, avec dédouanement et « homologation européenne » en option. On y trouve:

  • des modèles déjà vendus chez nous (BYD, Xpeng, Volkswagen « made in China »),
  • des nouveautés encore absentes du Vieux Continent (Xiaomi SU7/YU7, Avatr, Wuling, etc.),
  • et des tarifs affichés bien inférieurs au réseau officiel.

L’engouement est réel, la curiosité technologique aussi. Sauf que l’écart de prix sur l’écran n’a souvent plus grand-chose à voir avec la facture finale, et qu’une promesse d’« homologation » n’est pas une garantie d’immatriculation en France.

Homologation: l’angle mort qui peut bloquer votre carte grise

L’Union européenne distingue la réception de type (homologation communautaire complète) et la réception à titre isolé (RTI), au cas par cas. Beaucoup de modèles strictement chinois n’ont pas de certificat de conformité européen (COC). Résultat:

  • la plateforme vise une RTI… qui dépend des exigences de l’État membre choisi et des adaptations techniques réalisées;
  • rien ne garantit une immatriculation en France, même si le véhicule a été « réceptionné » ailleurs; les DREAL/UTAC peuvent exiger des preuves de conformité point par point.

Points durs fréquents sur les VE importés de Chine:

  • Connectique et recharge: prise GB/T au lieu du CCS. Adaptateur DC nécessaire (≈ 850 à 1 000 €), compatibilité variable, puissance parfois dégradée; gestion du protocole de charge qui peut poser problème.
  • Logiciel/OTA et cybersécurité: serveurs localisés en Chine, mises à jour à distance non disponibles ou bridées hors du pays; conformité aux exigences UE (ex. R155/R156) incertaine sur des modèles non destinés à l’Europe.
  • eCall, ADAS, éclairage, marquages: conformité aux règlements ECE et équipements réglementaires à démontrer; parfois des modifications physiques sont nécessaires (optique, signalisation, etiquettes, etc.).
  • Documentation: sans COC, les dossiers s’allongent; la RTI peut prendre de longues semaines, parfois plusieurs mois, sans certitude d’issue.

📌 À retenir

  • « Homologation incluse » n’est pas synonyme de « carte grise française garantie ».
  • Les adaptations techniques peuvent annuler l’économie initiale… voire échouer.

Le coût réel: quand l’addition rattrape la bonne affaire

Au prix « usine » s’ajoutent inévitablement:

  • droits de douane (10 % de base) + mesures antisubventions spécifiques aux VE chinois variant selon les marques et pouvant grimper au-delà de 30 % (des cas rapportés dépassent 40 %),
  • TVA (20 % en France),
  • fret maritime et logistique,
  • frais de dédouanement (quelques centaines d’euros),
  • « homologation »/RTI (souvent annoncée autour de 2 500 €),
  • adaptations techniques (connectique de charge, éclairage, etc.).

Exemples indicatifs observés sur des annonces récentes:

  • BYD Seal « affichée » vers 21 000 € hors taxes en Chine: une fois ajoutés droits, TVA, frais d’homologation et de dédouanement, on dépasse couramment 34 000 €… avant adaptateur DC et éventuelles modifications.
  • Xiaomi SU7 « affichée » autour de 26 000 € HT: avec surtaxes, 10 % de douane et 20 % de TVA, on frôle les 49 000 € si l’on parvient à boucler la RTI.

💡 Astuce
Demandez noir sur blanc un devis « toutes taxes et frais inclus » jusqu’à la carte grise française, avec calendrier, pénalités en cas d’échec, et modalités de remboursement.

Assurance, garantie, pièces, revente: les autres pièges du quotidien

  • Assurance: sans code CNIT et sans référencement en base, de nombreux assureurs refusent ou sur-tarifient. Anticipez avec des devis fermes (VIN à l’appui).
  • Garantie: hors réseau officiel européen, la garantie constructeur est généralement inapplicable. Les OTA et campagnes de rappel/patchs peuvent être inaccessibles.
  • SAV et pièces: réseau inexistant pour certaines marques; délais et coûts élevés; immobilisation longue en cas d’avarie haute tension, BMS, électronique de puissance.
  • Revente: véhicule « exotique », connectique GB/T, interface en chinois/anglais, pas de garantie: la liquidité du marché d’occasion est faible et la décote potentiellement lourde.

ℹ️ Bon à savoir
Les hybrides rechargeables (PHEV) sont parfois moins pénalisés par les surtaxes ciblant les VE 100 %, d’où leur part croissante dans ces auto-imports. Cela ne résout ni l’assurance, ni le SAV, ni la revente.

Un nouveau front de la guerre commerciale Chine–Europe

L’auto-import touche à la fois:

  • la politique commerciale (droits additionnels sur les VE chinois),
  • la sécurité et la conformité (homologation, cybersécurité, eCall),
  • et l’équité concurrentielle (contournement des réseaux officiels et de leurs coûts de mise en conformité).

Les autorités européennes ont musclé les droits correctifs; aux États-Unis, des services similaires ont cessé face à la fiscalité. En Europe, il est probable que les contrôles se renforcent encore, notamment sur la valeur en douane, la conformité logicielle et la RTI, pour éviter des contournements systématiques.

Quand l’auto-import peut-il encore avoir du sens ?

  • Pour des professionnels/ingénieurs qui achètent un véhicule « labo » à démonter et étudier.
  • Pour des passionnés très avertis qui acceptent délibérément: incertitude d’homologation, absence de garantie, complexité d’assurance, adaptation de recharge et valeur de revente aléatoire.

Pour un usage familial au quotidien, l’équation risque/récompense est, à ce stade, défavorable.

Checklist express avant de signer

  • Homologation:
    • Y a-t-il un COC européen ? Si non, quelle RTI et dans quel pays ? Acceptée en France ?
    • Dossier technique détaillé listant chaque règlement ECE couvert et les adaptations prévues.
  • Contrat:
    • Devis TTC « carte grise FR en main »; calendrier; clauses d’échec et de remboursement.
    • Qui est le vendeur juridiquement (UE ou hors UE) et quelle loi s’applique ?
  • Technique:
    • Connectique: solution de charge AC/DC documentée, tests de compatibilité réseau public.
    • Langue/OTA/serveurs: quelles fonctions connectées resteront actives en Europe ?
    • Pièces et manuel d’entretien: sources, délais, références.
  • Risques financiers:
    • Assurance: attestation de couverture et tarif AVANT achat.
    • Valeur de revente: accepter une décote potentiellement forte.
    • Douanes: valeur déclarée, preuves de paiement, éviter tout « under-valuation » illégal.

✅ À retenir

  • Économie affichée à l’écran ≠ coût total en France.
  • L’homologation à titre isolé est le nœud du problème et peut échouer.
  • Sans garantie, sans réseau, sans assurance claire, le risque consommateur est majeur.

En bref, l’auto-import de VE chinois promet l’accès rapide à des modèles alléchants… mais l’homologation reste une loterie et additionne des coûts cachés. À moins de savoir précisément où vous mettez les roues, mieux vaut rester sur des filières officielles ou patienter que les modèles arrivent avec une conformité et un SAV garantis.

DS, fin de partie ? Pourquoi Stellantis hésite entre sauver la marque et la renvoyer chez Citroën

En bref:

  • DS peine à s’imposer (volumes faibles, échec en Chine, image premium limitée) et, face aux pertes de Stellantis et à une nouvelle gouvernance, une intégration du label chez Citroën devient une option réaliste.
  • Cela permettrait d’économiser et de mutualiser compétences/réseau mais risque de diluer le positionnement premium et d’affecter les valeurs résiduelles ; clients : surveiller garanties, réseau et offres LOA/LLD avec valeur garantie.

L’hypothèse d’une disparition de DS comme marque indépendante pour redevenir un simple label haut de gamme chez Citroën agite Stellantis. Officiellement, la direction dément tout “plan de restructuration”. Officieusement, les signaux s’accumulent. Au-delà du cas DS, c’est toute la difficulté, pour un constructeur européen traditionnel, de créer un “premium” électrique crédible face aux Allemands, à Tesla et aux nouveaux acteurs chinois.

Voici les faits, les raisons d’un possible revirement stratégique et ce que cela changerait pour les clients.

Où en est DS, vraiment ?

  • Des volumes trop faibles pour peser

    • En France, DS a immatriculé 1 186 voitures en juillet et 9 050 sur les 7 premiers mois de 2025, quand Toyota écoulait 9 164 véhicules pour le seul mois de juillet, et Stellantis 43 382 sur le mois (part DS marginale). Source: Auto-Moto, 27/08/2025.
    • En Europe, la tendance est au recul. Plusieurs statistiques sectorielles pointent une érosion pluriannuelle des immatriculations DS.
  • Un positionnement à la peine

    • Le “luxe à la française” peine à se matérialiser en valeur perçue face aux références allemandes (Audi, BMW, Mercedes) et à Tesla, qui a redessiné les codes du haut de gamme électrique.
  • Le fiasco chinois, un tournant

    • Production locale via CAPSA à Shenzhen (capacité 200 000/an), ventes qui n’ont jamais décollé: moins de 4 000 unités produites en 2018, ~980 DS 9 vendues en 2022. Fin de la production locale et retrait de la DS 9 fin 2024. Présence désormais quasi nulle en Chine.
  • Une actualité produit paradoxale

    • DS lance sa N°8 100% électrique, fleuron très ambitieux: jusqu’à 750 km WLTP, batterie 97,2 kWh “Made in France”, jusqu’à 350 ch et 4 roues motrices. La campagne “Oui, les Français vont parfois trop loin” débute le 29 août 2025. Un signal fort… mais isolé dans une gamme restreinte.

📌 Officiel vs rumeur

  • Ce que dit DS: “Aucune restructuration de quelque sorte que ce soit n’est actuellement envisagée” et “le premier critère d’une marque premium n’est pas le volume”.
  • Ce qui nourrit la rumeur: volumes faibles et décroissants, retrait chinois, retrait discret de DS 9, et contexte financier de Stellantis très dégradé au S1 2025 (perte nette ~2,3 Md€). Le nouveau CEO, Antonio Filosa, promet des “décisions difficiles”.

Les 8 raisons d’un rendez-vous manqué dans le premium électrique

  1. Image et “narratif” trop abstraits
    Le “luxe à la française” a manqué d’icônes produit indiscutables, capables d’imposer la valeur résiduelle et la désirabilité hors de l’Hexagone.
  2. Cadence et cohérence de gamme insuffisantes
    Trop peu de silhouettes, trop d’écarts entre concepts séduisants et exécutifs industriels. Le segment D/E a été abordé tard, et la bascule SUV/berlines mal synchronisée.
  3. Dépendance à des bases techniques partagées
    Le partage de plateformes STLA est rationnel, mais dans le premium, la différenciation d’architecture (châssis, E/E, NVH) est déterminante pour justifier le prix.
  4. Expérience logicielle perfectible
    Dans le haut de gamme électrique, l’infotainment, les services connectés, les mises à jour OTA et l’ADAS de pointe sont clés. DS n’a pas suffisamment distancé le reste du groupe.
  5. TCO et valeurs résiduelles en retrait
    Les flottes européennes scrutent coût total de possession et revente. Sans marché secondaire fort ni réseau mondial, les loyers s’en ressentent.
  6. Pas d’ancrage aux États‑Unis, échec en Chine
    Impossible de “faire premium global” sans au moins un des deux grands marchés de marge. Exfiltration de Chine = perte d’échelle et d’aura.
  7. Cannibalisation interne et arbitrages de groupe
    Avec 14 marques, Stellantis doit prioriser. Alfa Romeo (sport premium) et Lancia (dolce vita) occupent déjà des territoires proches. DS s’est retrouvée coincée entre Peugeot haut de gamme et ces deux labels italiens.
  8. Conjoncture défavorable
    Ralentissement de la demande BEV en Europe, guerre des prix lancée par Tesla et la Chine, normes et droits de douane mouvants: un terrain miné pour construire une prime de marque.

Pourquoi un retour du label “DS” chez Citroën ferait sens

  • Réduire les coûts fixes: mutualiser réseau, marketing, back-office, et éviter l’entretien coûteux d’une capillarité “DS Store” dédiée.
  • Clarifier la promesse: faire de DS un label Citroën “haute couture” (finition, matériaux, confort) plutôt qu’une marque autonome aux ambitions mondiales.
  • Accélérer l’électrification au bon prix: en greffant le savoir-faire DS (design, sièges, suspensions, insonorisation) sur des bases Citroën/Peugeot STLA afin de proposer des BEV premium accessibles.
  • Protéger l’intérieur de gamme Stellantis: limiter la redondance avec Alfa et Lancia, tout en rendant Citroën plus “aspirationnel”.

Risques:

  • Dilution de l’ambition premium: dans l’esprit du public, un label n’a pas le statut d’une marque. La valeur résiduelle pourrait souffrir si la lecture “haut de gamme Citroën” remplace “marque premium DS”.
  • Message politique et symbolique: voir le président troquer DS pour une Renault Rafale le 14 juillet 2025 illustre déjà la fragilité de l’imaginaire lié à DS.

Stellantis: un contexte qui pousse aux choix tranchés

  • Finances sous pression: pertes nettes de l’ordre de 2,3 Md€ au 1er semestre 2025, chiffre d’affaires en baisse, marges comprimées.
  • Gouvernance renouvelée: Antonio Filosa succède à Carlos Tavares. Cap sur la simplification, la reconquête nord-américaine, et des “décisions difficiles” à court terme.
  • Portefeuille premium à trois têtes: Alfa (sport), Lancia (lifestyle), DS (luxe français). Dans un cycle bas, trois labels premium européens, c’est beaucoup.

Comparaisons utiles

  • Lexus, 30 ans d’efforts en Europe, reste souvent une niche hors hybride. Infiniti a renoncé au Vieux Continent. Genesis progresse mais avec une stratégie à très long terme.
  • Polestar a bâti une image EV pointue mais fait face à des défis financiers/industriels.
    Moralité: créer une marque premium “from scratch” en Europe exige du temps long, des budgets géants, et une empreinte mondiale. Sans Chine ni USA, la pente est raide.

Ce qui pourrait se passer (2026-2029)

  • Scénario 1 — Maintien de DS comme marque (faible probabilité)
    Succès net de N°8, accélération produit, améliorations logicielles, et remontée des valeurs résiduelles.
  • Scénario 2 — Intégration de DS en label Citroën (scénario central)
    Rationalisation réseau, plan produit Citroën “DS” 100% électrique sur STLA Medium à l’horizon 2028, montée en gamme ciblée sur le confort et l’efficience.
  • Scénario 3 — Mise en veille progressive (faible, mais non nul)
    Arrêt des investissements significatifs, gamme réduite au strict nécessaire, exploitation opportuniste des stocks et de la notoriété résiduelle.

Pour les clients: que faut-il anticiper ?

  • Garanties et services: DS met en avant “DS Sérénité” jusqu’à 8 ans. Une intégration chez Citroën n’annule pas les engagements contractuels; en général, les garanties et l’après-vente sont honorés via le réseau du groupe.
  • Valeurs résiduelles: la trajectoire de la marque/label influera les loyers LLD/LOA. À surveiller pour ceux qui financent: les offres constructeur peuvent compenser temporairement.
  • Logiciel et mises à jour: un maintien de la base clients et des OTA est un enjeu d’image clé; généralement, les groupes assurent la continuité.

Les signaux à surveiller dans les prochains mois

  • Gouvernance et organigrammes: fusion d’équipes marketing/produit DS-Citroën.
  • Réseau: évolution des DS Stores, rapprochement avec les points de vente Citroën.
  • Nomenclature: apparition d’un “Citroën DS …” dans la communication ou les dépôts de marque.
  • Plan produit: calendrier STLA Medium, nouvelles silhouettes électriques ciblant le cœur de marché européen (C/D).

Chiffres et faits clés

  • France, juillet 2025: DS 1 186 immats; 9 050 sur janv-juil. Toyota: 9 164 en juillet. Stellantis total: 43 382 en juillet.
  • Chine: usine CAPSA Shenzhen (200 000/an), <4 000 unités en 2018, ~980 DS 9 en 2022; fin DS 9 fin 2024; retrait industriel.
  • Stellantis S1 2025: perte nette d’environ 2,3 Md€; Antonio Filosa annonce des décisions difficiles.
  • N°8: BEV, jusqu’à 750 km WLTP, batterie 97,2 kWh produite en France, jusqu’à 350 ch, AWD.

💡 Conseil d’expert
Si vous envisagez une N°8, privilégiez un financement qui protège la valeur future (LOA/LLD avec VR garantie) et surveillez les programmes de reprise constructeur. En cas d’évolution de marque, ces dispositifs jouent le rôle d’assurance.


Au-delà de la rumeur, le dossier DS révèle l’équation quasi impossible de bâtir, en Europe et à l’ère électrique, une marque premium ex nihilo sans ancrage USA/Chine, sans cadence produit implacable et sans supériorité logicielle nette; d’où la logique d’une intégration “label” qui, si elle se confirme, viserait moins à enterrer l’esprit DS qu’à le rendre économiquement soutenable.

Royaume-Uni: la prime de 3 750 £ relance l’électrique — le signal que l’Europe attendait face à la Chine ?

En bref:

  • Le Royaume‑Uni relance une aide à l’achat pour véhicules électriques (Electric Car Grant) jusqu’à £3 750, avec plafond £37 000 et critères stricts d’empreinte carbone (batterie + assemblage + SBTi).
  • Effet immédiat: regain d’intérêt, remises commerciales massives et pression pour relocaliser composants clés ; pour les constructeurs français, Band 2 est accessible, Band 1 exige une décarbonation industrielle.
  • Le modèle britannique illustre une piste pour l’UE: aides ciblées conditionnées à l’empreinte, accompagnement industriel et déploiement d’infrastructures pour préserver compétitivité et objectifs climatiques.

Le nouveau gouvernement britannique vient de remettre une subvention directe sur la table pour les voitures électriques. Montant maximal: 3 750 £, ciblée, avec des critères “verts” stricts. Alors que nombre de pays européens ont réduit ou supprimé leurs aides, Londres fait le pari inverse. Coup de pouce conjoncturel… ou modèle à suivre pour l’UE dans la bataille face aux marques chinoises ?

Ce que Londres a décidé, concrètement

  • Une Electric Car Grant (ECG) dotée de 650 M£ jusqu’en 2028-2029.
  • Plafond de prix: 37 000 £.
  • Deux niveaux:
    • Band 1: 3 750 £ pour les modèles à plus faible empreinte carbone (production batterie + assemblage + intensité carbone du réseau des pays de fabrication).
    • Band 2: 1 500 £ pour les autres modèles éligibles.
  • Critère indispensable: constructeur engagé sur des objectifs climat validés (Science Based Targets).
  • Remise appliquée automatiquement en concession (pas de paperasse côté client).

📌 À retenir: au-delà du prix, l’empreinte carbone de la chaîne de valeur devient un sésame. C’est un “bonus” qui trie les véhicules.

Les premiers modèles concernés

  • Band 1 (3 750 £): Ford Puma Gen‑E et Ford e‑Tourneo Courier. Leur combinaison “assemblage en Europe + groupe motopropulseur électrique produit au Royaume‑Uni” coche les cases de durabilité.
  • Band 2 (1 500 £): extensions rapides à des modèles populaires:
    • Stellantis: Peugeot e‑308, e‑408; DS 3, DS Nº4; (la gamme Citroën ë‑C3, ë‑C4/ë‑C4 X, ë‑C5 Aircross, ë‑Berlingo avait ouvert le bal)
    • Renault: 5 E‑Tech, 4, Mégane, Scenic; Alpine A290
    • Vauxhall: Corsa, Mokka, Frontera, Astra (berline et break), Grandland, Combo Life Electric
    • Nissan: Micra, Ariya
    • Volkswagen: huit déclinaisons d’ID.3
    • Cupra: Born (toutes batteries)

Bon à savoir: la nouvelle Nissan Leaf produite à Sunderland est pressentie pour décrocher le Band 1 à son lancement.

Pourquoi relancer une prime maintenant ?

  • Le marché britannique souffre d’un ralentissement des ventes aux particuliers (infrastructures jugées insuffisantes, anxiété d’autonomie, décotes lourdes, prix élevés).
  • L’ECG veut lever l’obstacle du prix d’achat, au moins en partie, en parallèle d’un objectif réglementaire ambitieux (quotas ZEV par constructeur).
  • Effet “signal” et lisibilité: aider le particulier avant l’échéance de l’interdiction des thermiques neuves annoncée par le gouvernement pour la décennie à venir.

Côté demande, les premiers indicateurs sont positifs: les recherches pour les modèles éligibles ont bondi “jusqu’à +80 %” selon Auto Trader. Mais la mise en œuvre au compte‑gouttes (listes validées par vagues) a aussi créé de l’attentisme en concession, plusieurs distributeurs évoquant une “pagaille” passagère.

Un bonus qui fonctionne aussi comme un filtre anti‑carbone

Le critère décisif n’est pas la nationalité du badge mais l’empreinte carbone de la fabrication. Sont favorisés:

  • des batteries produites hors des zones à électricité très carbonée,
  • un assemblage dans des pays à mix électrique plus “propre”,
  • et, bonus, une valeur locale (composants produits au Royaume‑Uni/UE).

Conséquence indirecte: de nombreux modèles fabriqués en Chine — où le charbon pèse encore sur l’électricité — risquent de ne pas se qualifier, et a minima d’être exclus du Band 1. Plusieurs marques chinoises ont d’ailleurs contre‑attaqué avec leurs propres remises commerciales (jusqu’à 3 750 £), quand BYD mise sur cinq ans d’entretien offert et une garantie batterie étendue.

Effets immédiats sur le marché britannique

  • Remises privées en cascade: Kia, Hyundai, MG, GWM Ora, Leapmotor, Skywell, Volkswagen, Skoda, Cupra, Fiat, Volvo… multiplient les offres pour s’aligner ou s’anticiper au dispositif.
  • Prix d’accès en baisse sur des modèles stratégiques: Puma Gen‑E sous 25 000 £ après prime, e‑Tourneo Courier autour de 28 440 £, Renault 5 et Citroën ë‑C3 autour de 21 500 £ remises incluses.
  • Accélération des arbitrages produit: l’inclusion des critères d’empreinte favorise l’européanisation de composants clefs (e‑drives, packs batteries) pour viser le Band 1.

ℹ️ Effet collatéral: la “liste goutte‑à‑goutte” des modèles validés entretient une logique d’attente chez certains acheteurs. Le ministère promet un traitement “premier arrivé, premier servi” et des mises à jour régulières.

Que change l’ECG pour les constructeurs français ?

  • Stellantis (Peugeot, DS, Citroën) et Renault obtiennent rapidement le Band 2 (1 500 £) sur des modèles cœur de marché. C’est un atout précieux sur un Royaume‑Uni très compétitif sous les 37 000 £.
  • Le Band 1 devient un enjeu industriel: intégrer davantage de valeur européenne (packs batteries, e‑motopropulseurs, chimies hors Chine, énergie “verte” en usine) pour décrocher 3 750 £.
  • Renault peut capitaliser sur la 5 E‑Tech et la Scenic, mais devra surveiller l’arrivée probable d’une Leaf Band 1, potentiellement redoutable en coût net d’achat.
  • Citroën tire parti de sa gamme électrique d’accès (ë‑C3), renforcée par l’aide. DS bénéficie d’un coup de pouce prix utile pour démocratiser ses nouvelles générations électriques.

🎯 Message industriel: le Royaume‑Uni récompense la “décarbonation” de la supply chain. C’est un incitatif clair à localiser des composants stratégiques en Europe/UK.

L’Europe doit‑elle s’en inspirer ?

Déjà, la France a introduit un “score environnemental” pour son bonus, excluant plusieurs modèles produits en Chine. Mais à l’échelle européenne:

  • Plusieurs pays ont réduit/éteint leurs primes (Allemagne), créant un trou d’air sur les ventes particulières.
  • L’UE a activé des droits compensateurs provisoires sur certains VE chinois, jouant le bâton plutôt que la carotte.
  • Les objectifs CO₂ 2025‑2030 se durcissent: sans relance de la demande privée, l’atteinte des cibles devient coûteuse pour les constructeurs.

Le schéma britannique apporte trois enseignements utiles:

  1. Cibler l’accessibilité prix sous un plafond strict, là où se joue le volume.
  2. Bonifier l’empreinte carbone de fabrication pour aligner l’aide publique avec les objectifs climatiques et la souveraineté industrielle.
  3. Synchroniser l’aide avec des objectifs réglementaires (quotas ZEV/CO₂), pour éviter la “marche” entre contraintes et désirabilité produit.

Comparatif éclair: Royaume‑Uni vs France

  • Royaume‑Uni: 3 750 £ (Band 1) ou 1 500 £ (Band 2), plafond 37 000 £, critères de durabilité (batterie + assemblage + SBTi), application auto en concession.
  • France: bonus écologique conditionné par un score environnemental, recentré sur les modèles à faible empreinte et les ménages modestes; dispositif de leasing social (suspendu puis révisé), mais budgets contraints.

Trois leviers pour une “réplique” européenne efficace

  • Réactiver des aides ciblées et conditionnelles
    • Bonus modulé par l’empreinte carbone (fabrication) et le prix, avec plafonds serrés et pérennité pluriannuelle.
  • Soutenir l’occasion et abaisser le TCO
    • Prime à l’achat/à la conversion sur le VE d’occasion, soutien aux batteries de seconde vie, baisse des coûts de financement et de l’assurance.
  • Accélérer l’infrastructure et la fabrication
    • Déploiement capillaire des bornes rapides, tarifs de recharge plus lisibles, et soutien à la production locale de batteries/e‑drives (contrats pour différence, énergie décarbonée garantie pour les gigafactories).

📊 Impact attendu: un mix “carotte (prime sélective) + bâton (cadre CO₂ et mesures commerciales) + offre (infrastructures/indus)” pour sécuriser volumes et marges, et contenir l’avantage coût des concurrents chinois.


✅ À retenir

  • Londres remet une prime directe et inaugure un filtre par l’empreinte carbone de fabrication.
  • Effet marché: regain d’intérêt des acheteurs, mais exécution perfectible à court terme.
  • Pour les marques françaises, l’accès au Band 2 est acquis; le Band 1 devient un enjeu industriel.
  • L’Europe a tout intérêt à coupler aides ciblées, critères de durabilité et accélération industrielle pour relancer la demande sans subventionner “à l’aveugle”.

En bref, le Royaume‑Uni envoie un signal clair: il est possible de raviver le marché particulier tout en orientant l’industrie vers une chaîne de valeur plus propre. À l’Europe de transformer l’essai avec une boîte à outils cohérente, lisible et durable.

BYD passe par la Thaïlande pour l’Europe: vrai contournement ou simple détour stratégique ?

En bref:

  • BYD a commencé à exporter depuis son usine de Rayong (Thaïlande) vers l’Europe pour tester la logistique et, si l’origine “Thaïlande” est reconnue, réduire les surtaxes appliquées aux VE d’origine Chine (droits ≈10% vs ≈27–47,6% pour import Chine).
  • Cette stratégie reste soumise aux règles d’origine (transformation substantielle), au risque d’enquêtes anticontournement de l’UE, et sera complétée par une usine en Hongrie visant à neutraliser définitivement les droits d’importation.

L’information est tombée fin août: BYD a expédié depuis sa nouvelle usine de Rayong (Thaïlande) un premier lot de plus de 900 Dolphin vers l’Europe, à destination du Royaume‑Uni, de l’Allemagne et de la Belgique. Une première traversée assurée par le roulier “BYD Zhengzhou”, et un signal clair: la Thaïlande devient un pivot industriel et logistique pour l’offensive mondiale de BYD.

Faut‑il y voir un “cheval de Troie” pour contourner les surtaxes européennes visant les voitures électriques chinoises, ou un mouvement rationnel d’optimisation industrielle dans un contexte de tensions commerciales accrues ? Décryptage, chiffres à l’appui.

Ce qui change concrètement avec le “hub” thaïlandais

  • Production locale en Asie du Sud‑Est: l’usine BYD de Rayong (ouverte en 2024) affiche 150 000 véhicules/an de capacité. Elle a déjà dépassé 90 000 livraisons cumulées à l’été 2025, et produit désormais aussi des modèles à conduite à gauche pour l’export hors ASEAN.
  • Première exportation vers l’Europe: plus de 900 BYD Dolphin embarquées fin août 2025, cap sur l’UE et le Royaume‑Uni. Objectif: tester à échelle réelle la chaîne logistique et commerciale Thaïlande → Europe.
  • Stratégie multi‑sources: au-delà de la Thaïlande, BYD accélère en Europe avec une usine en Hongrie (mise en service à partir de fin 2025‑début 2026 selon le phasage), afin de neutraliser à terme tout droit d’importation intra‑UE.

📌 À retenir

  • Courte portée: un lot de 900 voitures ne bouleverse pas immédiatement les prix en concession.
  • Long terme: si le “made in Thailand” est reconnu en douane, la voie thaïlandaise peut durablement réduire les droits à payer par rapport à des véhicules d’origine Chine.

Taxes: la Thaïlande protège‑t‑elle vraiment de la riposte européenne ?

Le cœur du sujet n’est pas la géographie, mais l’origine douanière du produit.

  • Si l’auto est d’origine Chine, elle est soumise au droit européen de base (10 %) + aux droits antisubventions spécifiques décidés par l’UE contre les BEV chinois. À ce stade, BYD est associé à un taux d’environ 17 %, quand SAIC/MG est visé à ~37,6 %. Ces montants s’ajoutent au 10 % de base.
  • Si l’auto est d’origine Thaïlande (reconnue comme telle par l’UE), elle est soumise au seul droit commun de 10 % (en l’absence d’accord de libre‑échange en vigueur). Les droits antisubventions ciblant l’origine Chine ne s’appliquent pas.

Important: l’origine “Thaïlande” n’est pas une simple étiquette. Elle découle des règles d’origine non préférentielles de l’UE: il faut une “dernière transformation substantielle” sur place. Un simple vissage de kits (CKD/SKD) ne suffit pas; un processus industriel complet (emboutissage, soudure, peinture, assemblage, etc.) avec une base de fournisseurs locaux croissante, oui. Il n’existe pas un seuil universel “40 %” pour l’origine non préférentielle; c’est la nature et l’ampleur de la transformation qui priment.

Par ailleurs:

  • Un accord de libre‑échange UE‑Thaïlande est en négociation. S’il aboutit (objectif affiché: fin 2025), certains droits pourraient baisser à terme pour les véhicules “originaires Thaïlande”.
  • L’UE peut ouvrir des enquêtes “anticontournement” si elle suspecte que des flux sont déplacés pour échapper aux mesures. C’est un risque réel si la part de valeur ajoutée locale reste faible ou si l’on constate une simple relocalisation “de façade”.

✅ En synthèse tarifaire (ordre de grandeur)

  • Origine Chine: ~10 % (droit commun) + ~17 % (BYD) à ~37,6 % (MG/SAIC) d’antisubventions.
  • Origine Thaïlande (sans ALE): ~10 %.
  • Production UE (ex. Hongrie): 0 % intracommunautaire.

Quel impact potentiel sur les prix en Europe ?

Exercice simplifié, à but illustratif:

  • Hypothèse: valeur en douane (CIF) d’une compacte électrique autour de 20 000 €.
  • Origine Chine (BYD, +17 %): droits ≈ 10 % + 17 % = 27 % → 5 400 € de droits.
  • Origine Thaïlande: droits ≈ 10 % → 2 000 € de droits.

L’écart sur les seuls droits peut donc atteindre environ 3 400 € par véhicule dans cet exemple. Sur prix client TTC, l’impact est atténué mais reste significatif une fois la TVA appliquée sur une base différente, les coûts logistiques, commerciaux et marges pris en compte. En clair: le “made in Thailand” a un potentiel levier prix non négligeable, surtout sur les segments sensibles au ticket d’entrée.

💡 Conseil d’expert
Les constructeurs n’arbitrent pas uniquement sur les droits de douane: stabilité logistique, délais navire → port, coûts d’assurance, stocks, change euro/baht, exigences réglementaires (batterie, traçabilité), etc., pèsent aussi lourd dans l’équation finale.

Pourquoi la Thaïlande, et pourquoi maintenant ?

  • Un écosystème auto déjà mûr: Rayong et la zone de Laem Chabang forment un cluster industriel et portuaire de rang mondial, avec une main‑d’œuvre formée et un réseau de sous‑traitants en expansion rapide sur l’électrique.
  • Des incitations publiques fortes en ASEAN: l’essor des VE y est alimenté par des aides, des baisses de taxes et une stratégie nationale de “vitrine EV”.
  • Un effet domino régional: d’autres marques chinoises suivent (SAIC/MG assemble la MG4 en Thaïlande depuis fin 2024), tandis que les acteurs japonais renforcent les hybrides pour rester compétitifs. La concurrence locale tire vers le bas les coûts d’assemblage et accélère l’amorçage de la supply chain.

Les limites et risques de la manœuvre

  • Anticontournement européen: si Bruxelles estime que la création de valeur est insuffisante, des mesures pourraient être étendues à des véhicules fabriqués hors de Chine. Les précédents existent… dans d’autres secteurs.
  • Règles et conformité batterie: l’UE renforce la transparence et l’empreinte carbone des batteries (passeport batterie, due diligence). Ces exigences s’appliqueront quels que soient le pays d’assemblage et peuvent rehausser les coûts de conformité.
  • Logistique maritime: même avec une flotte dédiée, multiplier les liaisons Asie → Europe allonge les délais, rigidifie les flux et crée une dépendance aux taux de fret et aux aléas géopolitiques.
  • Effet réciprocité commerciale: durcir encore le cadre contre des véhicules “made in Thailand” risquerait des contre‑mesures dans d’autres secteurs (agro, vins & spiritueux, luxe), ce que l’UE devra intégrer politiquement.

📢 Point de vigilance
La clé sera la montée en puissance du contenu local: plus BYD localise en Thaïlande (pièces, modules, pack batterie, peinture, emboutissage), plus l’origine “Thaïlande” devient juridiquement robuste, moins la stratégie est exposée à une requalification.

Et la Hongrie dans tout ça ?

L’usine BYD en Hongrie constitue l’autre pilier du plan: produire au sein du marché unique pour s’affranchir totalement des droits d’importation, rapprocher la production des consommateurs et accélérer les délais. À horizon 2026, ce site pourrait absorber une large part des modèles “volumiques” pour l’UE, laissant au “hub thaïlandais” un rôle d’appoint sur certains modèles/versions ou de flexibilité industrielle.

Concurrence: MG presque sur la même ligne

SAIC/MG a déjà une usine en Thaïlande (≈100 000/an). Son intérêt à basculer des flux Chine → Thaïlande est encore plus évident compte tenu d’un taux antisubventions nettement plus élevé que celui de BYD. Si l’UE valide durablement l’origine thaïlandaise pour des volumes significatifs, attendez‑vous à une vague plus large “Made in Thailand” chez plusieurs marques chinoises.

Environnement: quel bilan pour la transition ?

  • Mix électrique vs hybride: face au ralentissement européen du 100 % électrique, BYD a ajouté des hybrides (non touchés par les surtaxes BEV) pour tenir ses volumes, tout en maintenant l’effort EV.
  • Transport maritime: allonger la chaîne logistique alourdit l’empreinte transport. Le bilan complet dépendra du mix énergétique des usines thaïlandaises, du contenu des batteries (origine matériaux) et des gains d’échelle industriels.
  • Europe, cap sur la relocalisation: l’UE pousse à la fabrication sur son sol (batteries, cathodes, véhicules), ce qui rend d’autant plus stratégique l’usine BYD en Hongrie à moyen terme.

📊 À retenir en un coup d’œil

  • Thai‑made reconnu par l’UE: droit de 10 % (vs jusqu’à 27–47,6 % pour des véhicules d’origine Chine selon les marques).
  • Accord UE‑Thaïlande: en négociation, potentiellement favorable à moyen terme.
  • Risque anticontournement: réel si la valeur ajoutée locale reste faible.
  • BYD multiplie les ancrages: Thaïlande (flexibilité coût/logistique) + Hongrie (accès direct UE).

En filigrane, la question n’est pas tant “contourner” que “redessiner” la carte industrielle: BYD cherche des bases compétitives hors Chine pour sécuriser l’accès à l’UE tout en gardant ses coûts sous contrôle. Si Bruxelles reconnaît l’origine thaïlandaise et si l’usine hongroise tient le calendrier, l’Europe devra composer avec une offre BYD plus résiliente aux barrières commerciales… mais sous la surveillance étroite des autorités douanières, prêtes à refermer toute brèche jugée artificielle.

Fibre de carbone: recul de l’UE, mais un risque bien réel pour les voitures électriques

En bref:

  • Pas d’interdiction de la fibre de carbone actée, mais l’UE prépare des règles de fin de vie (interdiction du broyage libre, traçabilité, filières dédiées) susceptibles d’entrer en vigueur autour de 2028‑2030 et de renchérir son usage.
  • Conséquence: pression surtout sur le premium et la mobilité H2; l’industrie doit accélérer éco‑conception, recyclage (rCF) et alternatives matérielles pour éviter un handicap compétitif.

Depuis le tollé du printemps, Bruxelles a fait machine arrière sur l’idée d’un “bannissement” pur et simple de la fibre de carbone dans l’automobile dès 2029. Fin du sujet ? Pas vraiment. Entre révision de la directive sur les véhicules en fin de vie, impératifs sanitaires et guerre commerciale autour des véhicules électriques, le dossier reste explosif. Voici, factuellement, où nous en sommes et ce que cela changerait pour les VE européens.

À retenir

  • ✅ Aucune interdiction actée à ce jour: le projet d’inscrire la fibre de carbone parmi les “matières dangereuses” dans la directive VHU a été retiré dans les versions récentes du texte.
  • ✅ Le cadre évolue tout de même: l’UE prépare des obligations plus strictes de gestion en fin de vie (démantèlement, traitement des composites), avec entrée en vigueur potentielle à partir de 2029.
  • ✅ Enjeu stratégique pour les VE: l’allègement reste un levier clé d’autonomie et d’efficacité, même si l’usage de carbone reste aujourd’hui surtout premium/technique.
  • ✅ Tension géopolitique: fragiliser l’accès ou l’usage du carbone en Europe, c’est risquer un handicap compétitif au moment où les États‑Unis et la Chine accélèrent.

Où en est réellement Bruxelles ?

Le cœur du dossier se joue dans la révision de la directive “Véhicules hors d’usage” (VHU/ELV). Au printemps 2025, un amendement du Parlement a fait planer l’idée d’une classification de la fibre de carbone comme “dangereuse”, synonyme de quasi-interdiction de fait dans les voitures neuves à l’horizon 2029. Face au tollé industriel (automobile, aéronautique, sport mécanique) et aux critiques méthodologiques, la Commission et les colégislateurs ont retiré cette mention dans les versions suivantes.

Que reste-t-il aujourd’hui sur la table ?

  • Des exigences renforcées de conception pour le recyclage/démontage (eco‑design).
  • La fin du broyage “en vrac” des composites qui libère des microfibres irritantes et perturbatrices d’équipements.
  • Des obligations de filières dédiées (traçabilité, retrait des pièces, traitement à la source) pour les matériaux difficiles à recycler.

Point clé: même sans “ban”, ces exigences peuvent renchérir l’usage de composites carbone en Europe en phase de fin de vie, et donc peser sur les arbitrages techniques dès la conception.

📌 Info box — Calendrier type

  • 2025-2026: trilogues et texte final.
  • +18 à 24 mois: délai d’application après publication.
  • Effets “terrain” plausibles autour de 2028-2030 selon transposition et décrets d’application nationaux.

Pourquoi la fibre de carbone compte (et jusqu’où) pour les VE

Pour un véhicule électrique, chaque kilo gagné compte. Moins de masse, c’est:

  • une meilleure efficience (kWh/100 km),
  • moins d’usure pneus/particules,
  • des performances et un freinage plus constants,
  • potentiellement des batteries plus petites à autonomie constante.

Où la fibre de carbone est-elle déjà critique ?

  • Pièces structurelles légères en haut de gamme (châssis monocoques, toits, capots, éléments aérodynamiques).
  • Rigidification localisée (barres, longerons, renforts) sur des VE à châssis aluminium/aciers haute résistance.
  • Jantes et éléments de freinage (réduction masses non suspendues, gains dynamiques).
  • Réservoirs hydrogène (Type IV) en mobilité H2: ici, c’est un verrou technologique.

Nuance indispensable: la fibre de carbone reste coûteuse et énergivore à produire. Sur le marché de masse, l’allègement passe d’abord par les aciers à ultra-haute limite élastique, l’aluminium, les composites verre/thermoplastiques, la conception optimisée et le downsizing batterie. En clair, un “ban” frapperait surtout le premium et des usages de pointe, mais l’effet d’entraînement sur l’innovation VE serait réel.


L’argument sanitaire et environnemental que l’UE ne peut ignorer

Ce que montrent les retours d’expérience:

  • Lors du broyage, les microfibres de carbone irritent peau et muqueuses, et perturbent certains équipements électroniques industriels.
  • La séparation fibre/résine demeure difficile: pyrolyse/solvolyse progressent, mais le recyclage “fermé” de haute qualité n’est pas encore massif.
  • La production de CFRP est énergivore; l’empreinte carbone amont doit être mise en regard des gains d’usage.

D’où la logique d’une “interdiction du mauvais geste” (le broyage non maîtrisé) plutôt qu’une interdiction du matériau lui-même. C’est la direction la plus probable à Bruxelles.

💡 Bon à savoir

  • Le marché mondial de la fibre de carbone est dominé par des acteurs japonais (Toray, Teijin, Mitsubishi Chemical). L’automobile pèse aujourd’hui 10 à 20% du volume, en hausse avec l’électrification.
  • Des filières européennes de recyclage montent en puissance (recovered carbon fiber pour SMC/renforts), avec des procédés économisant jusqu’à ~90% d’énergie vs voies classiques, selon les promoteurs.

Si la contrainte se durcit: qui gagne, qui perd ?

Les perdants évidents

  • Marques européennes du haut de gamme et du sport auto (châssis/carrosseries CFRP, jantes, packs aéros).
  • Mobilité hydrogène (auto utilitaire et surtout poids lourd), où les réservoirs carbone sont indispensables.

Les gagnants possibles

  • Fournisseurs et filières du recyclage/réemploi de composites, capables d’offrir des solutions certifiées ELV‑compliant.
  • Matériaux alternatifs en Europe (aluminium, aciers UHSS, composites verre thermoplastiques, fibres naturelles).

Effet “guerre commerciale”

  • Si l’Europe se met des barrières additionnelles de coûts/complexité que d’autres zones n’adoptent pas, elle s’expose à un décrochage technologique et prix.
  • À l’inverse, un cadre intelligent (interdiction des pratiques polluantes, incitations au recyclage, exemptions ciblées sécurité) peut créer un avantage compétitif “bas carbone” exportable.

Quelles alternatives crédibles d’ici 2029 ?

  • Aciers à ultra-haute résistance + conception multi-matériaux: gros gains masse/coût sans rupture industrielle.
  • Aluminium (structures/extrusions, gigacasting): bénéfices mécaniques, recyclage mature, coût énergétique à surveiller selon mix.
  • Composites verre/thermoplastiques (PA, PP, PEEK selon cas): réparabilité et recyclage thermoplastique plus accessibles.
  • Fibres naturelles (lin, chanvre) pour pièces semi‑structurelles et intérieures: déjà en validation chez plusieurs constructeurs, intérêt CO2 et fin de vie, limites mécaniques à intégrer.
  • rCF (fibre de carbone recyclée) pour pièces non critiques: standardisation en cours, potentiel fort si qualité/approvisionnement stabilisés.
  • Efficience système: moteurs sans aimants (réduct. empreinte et masse), optimisation pneus/dimensionnements, packs batteries plus compacts via meilleure aérodynamique et rendement.

📊 Repère design

  • 10% de masse en moins sur un VE, c’est typiquement 5 à 7% d’énergie économisée en usage mixte. Cela se traduit directement en autonomie, taille de batterie ou performances.

Trois scénarios plausibles côté régulation

  1. Régulation “procédés” (scénario central)
  • Pas d’interdiction matière; obligations de démontage ciblé, interdiction de broyage libre des composites, EPR renforcée.
  • Impact: hausse coûts fin de vie, besoin d’éco‑conception et de filières dédiées. Acceptable pour l’industrie.
  1. Restrictions sectorielles + exemptions
  • Encadrement strict pour carrosserie/éléments facilement broyés, exemptions pour sécurité (réservoirs H2), sport/micro‑séries.
  • Impact: pression sur volumes non critiques, maintien des usages indispensables.
  1. Durcissement tardif
  • Si la preuve de risque/impact s’alourdit: classification stricte avec périmètre réduit d’exemptions.
  • Impact: choc sur le premium européen et sur certaines architectures VE/H2.

Ce que l’industrie peut faire dès maintenant

  • Concevoir pour le démontage: interfaces mécaniques, résines compatibles recyclage, traçabilité des pièces composites.
  • Qualifier des voies rCF et des thermoplastiques renforcés dès les programmes 2027‑2030.
  • Mutualiser des filières européennes de traitement: volumes, qualité matière, coûts logistiques.
  • Réduire la dépendance “matière noble” par des gains d’efficience: aérodynamique, gestion thermique, software, pneus, moteurs sans aimants, électronique de puissance.
  • Porter une demande claire d’exemptions sécurité et de standards de traitement harmonisés à l’échelle UE.

📢 Citations utiles à garder en tête

  • “Interdire un matériau, c’est se priver d’une solution. Interdire une mauvaise pratique, c’est pousser tout un écosystème à innover.”
  • “L’allègement le plus durable est celui qu’on n’a pas à recycler: concevoir juste, au bon endroit, avec le bon matériau.”

Au final, l’UE n’a pas interdit la fibre de carbone, et il est peu probable qu’elle s’y aventure frontalement. En revanche, l’ère du “broyage facile” touche à sa fin: c’est là que se jouera la compétitivité des VE européens, entre exigence sanitaire/environnementale et intelligence industrielle. L’allègement restera un sport d’ingénieurs; à l’Europe d’en écrire les règles sans s’auto‑handicaper.

Tesla branche l’IA de ByteDance et DeepSeek à bord en Chine: simple localisation… ou dépendance qui interroge l’Europe ?

En bref:

  • Tesla remplace son assistant vocal en Chine par Doubao (ByteDance) pour les commandes du véhicule et DeepSeek pour la conversation, hébergés via Volcano Engine, d’abord sur la Model Y L — choix dicté par la réglementation et les attentes du marché local.
  • Cette localisation interroge la souveraineté logicielle, la conformité des données et la cybersécurité en Europe : les constructeurs devront choisir entre solutions maison (Grok), partenariats européens ou architectures multi‑LLM et imposer transparence des flux, modes dégradés et séparation stricte avec les calculateurs de sûreté.

L’annonce est passée en apparence technique, elle est en réalité éminemment stratégique. En Chine, Tesla remplace son assistant vocal “classique” par un duo d’intelligences artificielles locales: Doubao (ByteDance, maison mère de TikTok) pour les commandes du véhicule, et DeepSeek pour la conversation et les informations. Un choix de conformité au marché chinois, certes. Mais aussi un révélateur d’un basculement possible des logiques de souveraineté logicielle dans l’auto.

Ce que Tesla déploie concrètement en Chine

  • Deux IA complémentaires à bord:
    • Doubao (ByteDance) gère la commande vocale des fonctions: navigation, médias, climatisation, etc.
    • DeepSeek alimente les échanges conversationnels, actualités et météo.
  • Activation mains libres par un mot d’éveil: “Hey, Tesla” (personnalisable).
  • Hébergement et intégration par Volcano Engine (cloud de ByteDance) via API chiffrées.
  • Lancement: d’abord sur la nouvelle Model Y L (version 3 rangées, marché chinois). Extension aux autres modèles en Chine probable, calendrier non précisé.
  • Mention explicite côté Tesla: les contenus IA peuvent être incomplets/incorrects; respect des lois locales (notamment sécurité nationale) rappelé dans les conditions d’utilisation.

📌 À retenir

  • En Chine, les assistants vocaux “intelligents” et intégrés aux fonctions du véhicule sont devenus la norme, y compris chez des constructeurs généralistes.
  • Tesla rattrape ainsi son retard perçu face à BYD, Geely, Zeekr ou encore Mercedes en Chine, déjà branchés sur des LLM locaux.

Pourquoi Tesla ne met pas Grok (xAI) en Chine

  • Réglementation: la Chine impose des contraintes de localisation des données et de certification des modèles, empêchant l’usage de Grok tel qu’il est déployé aux États‑Unis.
  • Compétitivité: le marché chinois attend des assistants capables d’agir sur les fonctions du véhicule. Or, aux États‑Unis, Grok dans les Tesla reste pour l’instant cantonné à un rôle “type application” (Q&R) sans contrôle de l’auto.
  • Écosystème: les IA locales (DeepSeek, Doubao) sont déjà profondément intégrées chez les concurrents et optimisées pour l’usage et la langue.

🔍 Point de comparaison rapide

  • Chine (Tesla): DeepSeek + Doubao, intégration véhicule, wake word, cloud local ByteDance.
  • États‑Unis (Tesla): Grok (xAI), usage assistant conversationnel, pas de contrôle direct du véhicule à ce stade.
  • Europe (Tesla): pas d’annonce d’équivalent au duo chinois; plusieurs constructeurs européens testent/embarquent des LLM tiers (ex. ChatGPT) pour l’infodivertissement.

Une alliance “locale” qui pose des questions globales

L’intégration de Doubao et DeepSeek répond d’abord à une logique d’accès au marché chinois. Mais elle ouvre plusieurs chantiers sensibles, en particulier vus d’Europe.

1) Souveraineté logicielle et dépendance technologique

  • Le logiciel embarqué devient l’interface centrale de l’expérience en véhicule électrique. Déléguer l’interface vocale à un LLM tiers local, c’est externaliser une brique critique d’interaction homme‑machine (HMI).
  • À court terme, le risque est limité à l’infodivertissement et aux commandes non-sécurité. À moyen terme, la frontière entre confort et fonctions “quasi-critiques” (navigation, mise à jour OTA de services, pilotage intelligent de l’énergie à bord) peut s’estomper.
  • Pour l’Europe, la question est double:
    • Acceptera‑t‑on des IA non-européennes branchées à des fonctions du véhicule, au-delà de la simple conversation?
    • Les constructeurs européens doivent-ils accélérer des alternatives “souveraines” (modèles Mistral, Aleph Alpha, alliances sectorielles) afin d’éviter une dépendance aux écosystèmes américains ou chinois?

2) Données, conformité et cybersécurité

  • En Chine: données localisées et API chiffrées via Volcano Engine. Conformité locale, mais sous un cadre juridique différent de celui de l’UE.
  • En Europe: double contrainte RGPD + futur cadre d’IA Act. Les assistants généraux (GPAI) devront documenter risques, sources et contrôles; et tout lien avec des fonctions véhicule requiert une gouvernance cybersécurité solide (UNECE R155, ISO 21434).
  • Séparation des domaines: les constructeurs devront démontrer la cloison étanche entre LLM d’interface et calculateurs de sûreté (freinage, direction, ADAS), pour contenir la surface d’attaque et les risques de comportements inattendus.

3) Standardisation et transparence

  • Les interfaces vocales deviennent des “plateformes”. Qui définit les standards, les API, la télémétrie, la gestion des erreurs?
  • Transparence des modèles: jeux de données, filtrage, gestion des hallucinations et des biais culturels. Les avertissements de Tesla sur les erreurs possibles montrent que le sujet n’est pas théorique.

Impact business: la Chine comme banc d’essai

  • Contexte: livraisons en baisse sur Shanghai sur 6 des 7 premiers mois de 2025; juillet -8,4% sur un an. La Model Y L et l’IA “localisée” sont des réponses concrètes au niveau d’exigence local.
  • Positionnement: l’IA conversationnelle et l’exécution de commandes vocales fluides sont devenues des critères d’achat en Chine. Tesla adopte une stratégie “hybride”: solutions maison (Grok) là où c’est possible, partenariats là où c’est nécessaire.

📊 Repères clés

  • Fonctions: “Hey, Tesla”, commandes vocales (clim, médias, nav), conversation (actu, météo).
  • Tech: hébergement et intégration par Volcano Engine (ByteDance), API chiffrées.
  • Modèle: DeepSeek = interaction conversationnelle; Doubao = commandes véhicule.
  • Déploiement: démarrage sur Model Y L; extension au parc chinois attendue mais non datée.

Ce que cela peut signifier pour l’Europe

Trois trajectoires plausibles pour les Tesla (et l’écosystème) en Europe:

  1. Maintien d’un “modèle maison” (Grok/xAI) encadré par l’IA Act
  • Avantage: contrôle technologique, cohérence mondiale.
  • Enjeu: adaptation fine au multilingue européen et aux contraintes de données.
  1. Partenariats européens “souverains”
  • Intégration de modèles locaux (Mistral, Aleph Alpha, etc.) via API européennes, hébergement local, contrat de traitement des données conforme RGPD/IA Act.
  • Avantage: alignement réglementaire et politique industrielle.
  • Enjeu: parité fonctionnelle/qualité vs GAFAM/BATX.
  1. Architecture modulaire multi‑LLM
  • Un “orchestrateur” sélectionne le bon modèle selon la région/fonction (conversation générale, commandes voiture, services tiers).
  • Avantage: résilience géopolitique, meilleure localisation.
  • Enjeu: complexité d’intégration, coûts d’exploitation, sécurité des frontières entre domaines.

💡 Conseil d’expert (flottes et DSI)

  • Demandez la carte précise des flux de données (où vont la voix et les transcriptions?).
  • Exigez un mode “off-line dégradé” pour commandes critiques (clim, DAB, volume).
  • Vérifiez les mécanismes de consentement, d’effacement et d’audit des sessions vocales.
  • Évaluez la séparation logique entre LLM et calculateurs de sûreté; contrôlez les journaux d’accès.

Ce qui change à bord, ici et maintenant

  • En Chine, Tesla rejoint le standard local: un assistant qui comprend et agit, sans bouton, avec des réponses plus naturelles.
  • Aux États‑Unis, l’IA embarquée reste surtout une brique conversationnelle. L’Europe pourrait basculer d’un côté ou de l’autre selon les arbitrages réglementaires et les choix de partenaires.

📌 Bon à savoir

  • La mention par Tesla de contenus IA “potentiellement incorrects” est essentielle: l’ergonomie doit anticiper les échecs (confirmations vocales pour actions sensibles, suggestions plutôt que décisions, “safe defaults” en cas d’incertitude).
  • Le “wake word” multimodal (voix + commande tactile en secours) est un garde-fou utile contre les faux positifs.

En quelques mots, Tesla s’aligne en Chine sur le tempo local en branchant l’IA de ByteDance et DeepSeek au cœur de l’expérience à bord; pour l’Europe, l’enjeu ne sera pas de courir après une démonstration technologique, mais de trancher le curseur entre performance, conformité et souveraineté logicielle.

Guerre des prix en Chine : pourquoi les survivants comme Xiaomi sont la vraie menace pour l’Europe

En bref:

  • La guerre des prix en Chine élimine la majorité des acteurs et forme une poignée de champions (Xiaomi, Leapmotor, Xpeng, BYD…) qui optimisent coûts, logiciel et chaînes — puis exportent et produisent localement pour contourner barrières, menaçant les segments B/C européens.
  • L’Europe doit accélérer le "design‑to‑cost", sécuriser l’accès aux cellules et l’énergie, industrialiser les architectures logicielles/OTA et renforcer mesures industrielles et de financement pour préserver compétitivité et TCO.

Dans la tempête chinoise des véhicules électriques, beaucoup voient un chaos destructeur. C’est une erreur de lecture. La consolidation forcée qui s’opère, dopée par une guerre des prix d’une rare violence, est en train de forger une poignée d’acteurs ultra-compétitifs. Une fois l’orage passé, ces survivants – Xiaomi, Leapmotor, mais aussi Xpeng, Seres/Huawei, sans oublier BYD – auront affûté leurs coûts, leur logiciel et leurs chaînes d’approvisionnement. Et c’est en Europe que cette nouvelle génération pourrait porter l’estocade.

Le PDG de Mercedes, Ola Källenius, prévient: « dix des 130 marques chinoises survivront »… et « deviendront des champions de la productivité ». En clair, le pire pour l’industrie européenne n’est peut‑être pas la vague actuelle, mais celle d’après : des concurrents aguerris, capitalisés, et prêts à produire localement pour contourner les barrières.

À retenir

  • ⚔️ La guerre des prix en Chine élimine les faibles et muscle les meilleurs: baisse de coûts, discipline d’exécution, logiciel en avance.
  • 🧭 Les survivants pivotent vers l’export, investissent et produisent localement (Europe, ASEAN) pour déjouer les droits de douane.
  • 🚨 Le risque pour l’Europe est systémique: pression durable sur les prix et les marges, surtout sur les segments B/C électriques.

Une consolidation qui renforce la Chine, pas l’inverse

  • Surcapacité, stocks et marges laminées: Pékin a appelé à mettre fin aux baisses « irrationnelles » et durcit les règles (notamment sécurité batteries), accélérant la sélection naturelle.
  • Le constat de Källenius (Handelsblatt): seules « environ dix » marques sur 130 passeront le cap. Celles-là dominent déjà l’optimisation des coûts, l’intégration verticale et le time‑to‑market.
  • En parallèle, les groupes chinois déplacent le centre de gravité hors du pays: selon Rhodium Group, pour la première fois en 2024, les investissements à l’étranger (≈16 Md$) ont dépassé l’investissement domestique (≈15 Md$), surtout dans les batteries et les sites d’assemblage.

📌 Chiffres clés 1er semestre 2025 (sources sectorielles, Breakingviews)

  • Leapmotor: premier bénéfice semestriel (≈30 M RMB), part de marché VE en Chine ≈3,7% (x2 vs 2022).
  • Xiaomi Auto: près de 160 000 ventes H1; perte opérationnelle ramenée à ≈300 M RMB au T2; bascule dans le vert possible fin 2025.
  • Xpeng: perte nette divisée par deux (≈1,1 Md RMB); R&D ≈12% du CA (contre ≈6–7% pour des géants plus établis).
  • BYD: toujours n°1 en Chine, mais part de marché VE retombée sous 30% récemment (≈33,8% un an plus tôt).

Xiaomi, Leapmotor, Xpeng: ce qu’ils font mieux aujourd’hui

  • Logiciel et électronique grand public:

    • Xiaomi capitalise son écosystème (OS, services, IA, UX) et une base clients massive; la voiture devient un « device » OTA, fidélisé et monétisé.
    • Xpeng pousse l’ADAS propriétaire et vend sa techno à d’autres (licence à Volkswagen).
    • Leapmotor développe en interne et « productise » sa tech pour Stellantis (plateformes, E/E, logiciel).
  • Intensité R&D et cadence produit: +8 à 12% du CA en R&D pour certains « mid‑caps » chinois; cycles de mise à jour rapprochés; conception « design-to-cost » (cell-to-pack, LFP/LMFP, giga‑casting, E/E simplifiée).
  • Go‑to‑market hybride: retail technologique (Huawei), réseaux partenaires (Stellantis pour Leapmotor), vente directe digitalisée et coûts marketing optimisés.
  • Monétisation au-delà du prix d’achat: packs logiciels, services connectés, écosystèmes d’apps. Résultat: pas besoin d’écraser éternellement les prix pour attirer.

Après la guerre, l’export: la nouvelle doctrine

  • Diversification géographique agressive: l’ASEAN est déjà une tête de pont (ventes VE +79% H1 2025; plus de 57% du marché régional pour les marques chinoises) avec remises ciblées et usines locales (Thaïlande, Indonésie).
  • Europe: montée en puissance des sites et des accords industriels (usine BYD en Hongrie; Chery en Espagne; distribution/production Leapmotor avec Stellantis en Europe). Objectif: neutraliser les droits anti‑subventions en produisant sur place et sécuriser les délais/logistique.
  • Financement et résiduel: offres de leasing agressives, garanties batterie, OTA valorisées – autant d’armes pour abaisser le TCO et « casser » la barrière psychologique du prix.

💡 Bon à savoir
Selon des analystes, les marques chinoises règlent leur stratégie de prix à la granularité hebdomadaire, par ville et par canal, en s’appuyant sur des data de vente et d’usage. Cette « micro‑tarification » est encore rare en Europe.

Pourquoi l’Europe est plus exposée qu’elle ne le croit

  • Coûts fixes hérités du thermique, plateformes multi‑énergies et E/E fragmentées pèsent sur le coût complet des BEV européens.
  • Accès aux cellules et à l’énergie: électricité industrielle encore chère dans plusieurs pays; dépendance extérieure sur LFP/LMFP; plusieurs gigafactories retardées.
  • Logiciel et OTA: le différentiel d’intégration logiciel et d’architecture électronique reste un angle mort pour une partie des généralistes.
  • Segments les plus vulnérables: B/C à 25–35 000 € (après aides), là où la valeur perçue/logiciel peut faire basculer l’achat. Les droits additionnels en Europe amortissent le choc prix, mais pas l’écart de cadence produit-coût-logiciel à moyen terme.

Ce que l’Europe peut faire maintenant (mesures concrètes)

  • Industrialiser le « design-to-cost » des BEV:
    • Généraliser LFP/LMFP sur l’entrée/milieu de gamme; passer au cell-to-pack; standardiser l’E/E et les contrôleurs; simplifier carrosserie et options.
    • Contracter des volumes fermes de cellules pour sécuriser les prix; accords long terme sur matériaux.
  • Faire baisser le TCO côté client:
    • Leasing social pérenne et neutre par origine; garanties résiduelles publiques ciblées; packages assurance/énergie; infrastructures de recharge fiables et abordables.
  • Accélérer le logiciel:
    • Architectures OTA unifiées, priorisation ADAS de « valeur d’usage », réduction des dépendances fournisseurs; mutualisation open‑source sur des briques non différenciantes.
  • Politique industrielle et énergie:
    • Contrats d’électricité compétitifs pour sites BEV/batteries; fast‑track permis/usines; conditionnalités CO2/empreinte batterie dans les achats publics; accompagnement des reconversions d’usines thermiques.
  • Coopérations intelligentes:
    • Licences technos réciproques (comme Volkswagen‑Xpeng, Stellantis‑Leapmotor), co‑développement ciblé sur des plateformes ou logiciels non stratégiques pour gagner 24–36 mois.

Trois scénarios 2026–2028

  • Base case: droits européens maintenus; production locale chinoise en Europe monte en cadence; prix sous pression, marges diluées sur B/C, premium plus résilient.
  • Protectionniste: durcissement des règles d’origine/empreinte; montée du « local content » batterie; décalage de 12–18 mois de la pression prix, mais rattrapage via implantation locale.
  • Déferlante ciblée: survivants chinois profitables imposent un « corridor de prix » Européen avec leasing agressif et offres logicielles; certains généralistes réallouent massivement vers hybrides pour défendre les volumes, au risque d’un retard BEV long.

Signaux faibles à surveiller dès maintenant

  • Xiaomi Auto publie un trimestre bénéficiaire sur l’auto seule (hors smartphones).
  • Démarrage effectif d’assemblage Leapmotor en Europe via Stellantis, puis montée en cadence.
  • Écart de loyers mensuels en LOA/LLD entre un C‑SUV chinois produit localement et son équivalent européen.
  • Scores Euro NCAP et nouveaux standards batterie: si les modèles chinois conservent 5 étoiles en série, le levier « sécurité perçue » s’effondre.
  • Réplication de deals de licence tech (logiciel/plateformes) entre acteurs chinois et européens au-delà des partenariats déjà annoncés.

En Chine, la guerre des prix ne détruit pas l’écosystème: elle le recompose. Quand la poussière retombera, l’Europe fera face non à une myriade d’assaillants dispersés, mais à une poignée de champions aguerris, efficaces et… déjà chez nous. Le temps est compté pour transformer nos coûts, nos plateformes et notre logiciel en avantages compétitifs tangibles.

Maroc, hub de la voiture électrique: tremplin pour l’Europe ou cheval de Troie chinois ?

En bref:

  • Le Maroc devient un hub EV euro‑méditerranéen solide, attirant massivement des investissements chinois en batteries et composants et offrant une plateforme nearshore compétitive via Tanger/Kénitra.
  • Mais l’accès préférentiel à l’UE n’est réaliste que si la valeur ajoutée locale — en particulier les batteries — est significative et traçable; sinon règles d’origine, règlement batteries et anti‑contournement de l’UE peuvent bloquer ou sanctionner l’opération.

Le Maroc s’impose, mois après mois, comme une plateforme automobile majeure aux portes de l’Europe. Au-delà des usines Renault et Stellantis, l’afflux d’investissements chinois dans les batteries et les composants interroge: Rabat sera‑t‑il le nearshore dont l’Europe a besoin pour accélérer sa transition, ou la tête de pont idéale pour que les constructeurs chinois contournent les barrières européennes et s’implantent durablement sur le Vieux Continent ?

À l’été 2025, l’équation est plus subtile qu’il n’y paraît. Entre opportunités industrielles, règles d’origine, et risques d’anti‑contournement, décryptage sans totem ni tabou.

Où en est vraiment l’automobile marocaine

  • Production 2024: 559 645 véhicules, +5% sur un an, 23e rang mondial (OICA). Au 1er semestre 2025: plus de 350 000 unités, +36% sur un an selon les données officielles.
  • Le Maroc dépasse déjà le Portugal et la Belgique, talonne l’Italie (591 067 en 2024) et vise… 2 millions de véhicules en fin de décennie.
  • Chaîne de valeur solide: faisceaux électriques, sièges, électronique embarquée; deux pôles d’assemblage majeurs (Tanger, Kénitra), port Tanger Med en capacité d’absorber des flux croissants.
  • Ancrage européen: Dacia Sandero, en grande partie produite au Maroc, demeure un pilier des immatriculations en Europe, notamment en Espagne.

📌 À retenir
Le Maroc n’est plus une “base low‑cost”, mais un écosystème exportateur structuré, compétitif et branché sur les chaînes logistiques euro‑méditerranéennes.

Pourquoi la Chine accélère au Maroc

  • Proximité et coûts: 14 km du marché européen, main‑d’œuvre compétitive, zones industrielles clé en main (Tanger Automotive City, Midparc), climat d’affaires stable.
  • Accès préférentiel: accord d’association Maroc‑UE depuis 2000 (préférences tarifaires si les règles d’origine sont respectées).
  • Matières et batteries: 70% des réserves connues de phosphate; montée en puissance d’une filière batteries bas‑carbone (COBCO/CNGR à Jorf Lasfar, 20 Mds MAD; projets CNGR, Gotion High‑Tech, BTR…).
  • Effet d’échelle: les ventes de véhicules et châssis chinois au Maroc ont bondi de 3 000 unités (2023) à près de 20 000 au printemps 2025, dont environ un quart en électrique.

Investissements récents côté Chine (échantillon)

  • Bethel (sécurité auto): 75 M$ — nouvelle filiale de production au Maroc.
  • Kuntai (tapis de voiture): 126,5 MDH — base de production orientée Europe.
  • Ningbo Gaofa (systèmes de contrôle/transmissions intelligentes): 20 M$.
  • Pneumatiques: Sentury et Yongsheng annoncent des unités à Tanger/Kénitra.
  • Matériaux pour batteries: COBCO/CNGR, Gotion High‑Tech, BTR…
  • BYD: stratégie africaine renforcée; projets marocains évoqués de longue date, relancés par l’essor de la filière batteries et la zone Tanger Tech (projets industriels à géométrie encore variable).

💡 Bon à savoir
Une part significative de ces investissements vise la chaîne batteries et les composants à plus forte valeur ajoutée. C’est la condition pour, demain, “marconiser” l’origine douanière d’un véhicule chinois… et accéder aux préférences UE.

Contourner les droits européens via le Maroc: possible… mais pas “gratuit”

Depuis 2024‑2025, l’UE a renforcé ses outils commerciaux vis‑à‑vis des véhicules électriques chinois (enquêtes anti‑subventions, droits additionnels provisoires puis définitifs). Fabriquer “hors de Chine” devient donc un levier stratégique pour les marques chinoises. Le Maroc, partenaire commercial privilégié de l’UE, apparaît tentant. Mais trois garde‑fous majeurs s’appliquent.

  1. Règles d’origine (PEM, UE‑Maroc)
  • Pour bénéficier des préférences tarifaires UE, un véhicule doit satisfaire des règles d’origine strictes (valeur ajoutée locale/régionale élevée et/ou transformations substantielles).
  • La Chine n’est pas dans la zone de cumul PEM: les contenus importés de Chine restent “non originaires”.
  • En pratique, il faut une vraie montée en intégration locale (carrosserie, câblage, sièges, électronique, batteries produites in situ…) pour basculer l’origine vers “Maroc”.
  1. Anti‑contournement
  • Même si les règles d’origine sont respectées, la Commission peut étendre des droits si elle constate une “simple” délocalisation destinée à contourner des mesures commerciales.
  • Il faut donc démontrer une production substantielle, des investissements réels, des capacités industrielles autonomes et une chaîne d’approvisionnement locale crédible.
  1. Règlement batterie UE

✅ En bref

  • Oui, produire au Maroc peut ouvrir l’accès préférentiel à l’UE.
  • Non, on ne “colle” pas une étiquette “Made in Morocco” sur un kit chinois sans localisation réelle.
  • La clé: la batterie et la valeur ajoutée locale. Sans elles, l’équation tarifaire et réglementaire ne tient pas.

Trois trajectoires possibles à l’horizon 2026‑2030

  1. Implantation “CKD/IKD” puis localisation progressive
  • Démarrage en kits, montée en intégration au fil des fournisseurs attirés (sièges, faisceaux, électronique, vitrages, pneus, chimie de cathodes).
  • Faisable rapidement, mais la bascule en origine marocaine exige un cap clair sur la batterie.
  1. Ancrage complet “véhicule + batterie”
  • Usine véhicules + gigafactory/cathodes/précurseurs sur place; logistique Tanger Med; supply‑chain régionalisée.
  • Coûts élevés mais pérennité réglementaire. Probable pour des volumes pan‑euromed.
  1. Maroc “multi‑locaux”: Chinois et Européens en parallèle
  • Chinois pour l’accès UE et Afrique; Européens pour le nearshoring compétitif et la flexibilité capacitaire (EV d’entrée/milieu de gamme).
  • Scénario déjà en marche: Renault/Stellantis renforcent l’écosystème; fournisseurs chinois densifient la chaîne VE.

🎯 Indicateurs à surveiller (2025‑2027)

  • Annonce d’une ligne d’assemblage VP chinoise au Maroc avec objectifs d’intégration chiffrés.
  • Démarrage effectif des unités batteries/cathodes (Jorf Lasfar, Kénitra, Tanger Tech).
  • Part locale des packs batteries, gestion de l’empreinte carbone et de la traçabilité.
  • Décisions UE sur anti‑contournement et mise à jour des règles PEM.
  • Flux export depuis Tanger Med vers l’UE, par marques et segments.

Opportunité de nearshoring pour l’Europe

  • Réduction des coûts et délais vs Asie; résilience des chaînes post‑crise; alignement avec les objectifs CO2 (mix électrique marocain en amélioration, solaire/éolien en hausse).
  • Plateforme pour véhicules d’accès (citadines, B‑SUV) et certaines dérivées utilitaires électriques, où la pression prix est maximale.
  • Accès à une base fournisseurs composites (européens, marocains, asiatiques) et à un pool de compétences qui s’étoffe (plus de 200 000 emplois auto au Maroc, montée en qualification).

Astuce de pro
Pour qu’un EV “Made in Morocco” soit vraiment compétitif en Europe d’ici 2027‑2028, trois curseurs comptent: pack batterie local bas‑carbone, logistique intégrée via Tanger Med, et sourcing composants critiques euro‑med pour sécuriser l’origine préférentielle.

Les risques et les garde‑fous

  • Risque de dépendance technologique: si la batterie et l’électronique restent importées, la marge d’origine marocaine est fragilisée.
  • Risque politique/commercial: l’UE peut élargir des mesures si elle perçoit un contournement “organisé”.
  • Concurrence ibérique: l’Espagne, premier client/freight voisin, scrute l’essor marocain (sensibilité sociale et politique sur l’emploi industriel).
  • Environnement: nécessité de garantir des standards élevés (eau dessalée/recyclée, ENR, conformité REACH/batteries UE).
  • Capital humain: succès conditionné à la formation continue (métiers chimie des matériaux, BMS, power electronics).

📢 À retenir
Le Maroc peut être un “pont vertueux” euro‑med si l’intégration locale est réelle et si la coopération technologique avec l’Europe s’intensifie. À l’inverse, une “emballage locale” sans substance s’exposerait à des sanctions.

Ce que veulent faire Rabat… et Pékin

  • Rabat: cap sur 2 M de véhicules/an, ports de Tanger et Kénitra agrandis (objectif +20% d’export en deux ans), montée en gamme batteries et électronique.
  • Pékin: utiliser le Maroc comme plateforme africaine et euro‑med, sécuriser des flux bas‑carbone, rapprocher la production des clients tout en maîtrisant le coût total.
  • Diplomatie économique: l’escale de Xi Jinping à Casablanca (fin 2024) et l’avalanche d’accords industriels en 2025 témoignent d’un partenariat qui dépasse la simple sous‑traitance.

Conseil d’expert
Pour “marconiser” l’origine d’un EV chinois: viser >50% de valeur ajoutée locale/régionale en pratique, internaliser l’assemblage de batterie, et contractualiser des engagements de contenu local vérifiables. C’est aussi un message dissuasif vis‑à‑vis d’enquêtes anti‑contournement.

Le cas BYD, symbole d’une équation ouverte

  • En Europe, BYD déploie son ancrage industriel (ex. usine en Europe centrale) pour sécuriser l’accès au marché.
  • Au Maroc, l’appétit de l’écosystème BYD est connu depuis 2017 (véhicules, bus, batteries, monorail évoqués), mais la réalité 2025 est plus granulaire: montée en puissance de la filière batteries/compounds, distribution locale, et options industrielles à calibrer selon les règles d’origine UE et les perspectives de volumes.
  • Lecture lucide: une usine véhicules BYD au Maroc n’a de sens que si la batterie et les composants à forte valeur ajoutée suivent, afin d’assurer l’origine et la soutenabilité réglementaire en Europe.

En définitive, le Maroc s’affirme à la fois comme une chance de nearshoring pour l’industrie européenne et une plateforme crédible pour les ambitions chinoises. Tout se jouera dans la profondeur d’intégration locale, la transparence environnementale des batteries et la capacité des régulateurs à distinguer industrialisation réelle et contournement déguisé.

V.E. chinois: la nouvelle offensive passe par nos usines — l’Europe sous pression

En bref:

  • En 2024 la filière V.E. chinoise a investi ~16 Md$ hors Chine (vs 15 Md$ domestiques), 74% dans les batteries, visant à produire localement pour contourner tarifs et s’ancrer sur les marchés.
  • Pour l’Europe c’est à la fois une opportunité d’emplois et un risque de dépendance technologique : il faut conditionner les implantations (contenu local, R&D, traçabilité) et renforcer le filtrage FDI.

L’industrie électrique chinoise vient de franchir un cap stratégique lourd de conséquences pour l’Europe. Pour la première fois, sa chaîne d’approvisionnement a investi davantage à l’étranger qu’en Chine. Ce n’est plus seulement une guerre d’exportations: c’est une délocalisation ciblée des capacités industrielles, batteries en tête, pour s’ancrer durablement au plus près des marchés. Une stratégie qui redessine le jeu concurrentiel, l’emploi et la souveraineté technologique du Vieux Continent.

À l’origine de ce tournant, le Rhodium Group, qui documente un basculement en 2024: la dépense “hors Chine” des acteurs V.E. (constructeurs, batteries, matériaux) a légèrement dépassé le domestique, sur fond d’excès de capacités, de guerre des prix et de barrières commerciales croissantes en Occident.

Ce que dit le rapport Rhodium (et pourquoi cela compte)

  • Investissements 2024: environ 16 Md$ à l’étranger vs 15 Md$ en Chine, après des années à 80% orientées domestique.
  • 74% de ces capitaux hors Chine vont aux usines de batteries; l’assemblage de véhicules progresse vite.
  • Chute des projets en Chine: plus de 90 Md$ annoncés en 2022, 41 Md$ en 2023, 15 Md$ en 2024.
  • Taux de réalisation: seulement 25% des projets industriels annoncés à l’étranger aboutissent (45% en Chine). Les annulations y sont deux fois plus probables.
  • Signal politique: Pékin s’inquiète du « hollowing out » (fuite des emplois/technos) et pourrait serrer la vis aux investissements sortants.

📌 À retenir

  • Marché chinois saturé + tarifs/droits compensateurs en Europe et aux États‑Unis = incitation forte à produire localement pour contourner les barrières et gagner l’appui des gouvernements hôtes.
  • La « première ligne » de cette expansion, ce sont les batteries (cellules, cathodes/anodes, packs) qui ancrent toute la valeur du V.E.

De l’export à l’implantation: comment la Chine change de pied

La logique est triple:

  • Économique: réduire le coût transport/douanes, stabiliser les marges hors d’un marché chinois asphyxié par la concurrence.
  • Politique: créer des emplois locaux, obtenir des licences et subventions, neutraliser l’opposition réglementaire.
  • Industrielle: se brancher sur les chaînes de valeur locales (constructeurs européens, plateformes communes, contrats long terme).

Exemples récents:

  • Amériques: GWM et BYD ont lancé la production au Brésil en 2025, transformant des annonces en actifs tangibles.
  • Europe: Envision a démarré sa première usine de batteries en France en juin. D’autres projets de cellules, modules et matériaux avancent, tirés par la demande des constructeurs européens.

ℹ️ Bon à savoir

  • L’implantation hors Chine prend plus de temps: 10 à 24 mois pour lancer un chantier industriel en Europe/Amérique, contre 3 à 12 mois en Chine. Le risque d’exécution (permis, raccordements, contentieux) demeure le talon d’Achille de cette stratégie.

L’Europe « attaquée de l’intérieur »? Menace réelle, opportunités conditionnelles

Produire en Europe change la donne:

  • Tarifs contournés, délais réduits, meilleure acceptation politique.
  • Emplois créés… mais avec quelle maîtrise technologique et quelle part de valeur ajoutée locale?

Effets contrastés:

  • Pour l’emploi: des gigafactories, c’est plusieurs milliers d’emplois directs et bien plus indirects. Bénéfice net dans les régions d’accueil (Europe centrale, France, Espagne…), à condition d’exiger des contenus locaux réels (électrodes, chimie, BMS) et de l’ingénierie sur place.
  • Pour les constructeurs européens: double lame. Accès à des cellules compétitives et fiables à court terme; dépendance accrue vis‑à‑vis d’IP, de standards et d’équipements chinois à moyen terme.
  • Pour la souveraineté: si la montée en cadence européenne (Northvolt, ACC, Verkor, Umicore, etc.) n’est pas consolidée, le « local made in Europe » pourrait surtout être « local made by China », avec une dépendance durable sur le midstream (cathodes/anodes, séparateurs, équipements).

🎯 Enjeux critiques pour l’UE

  • Verdissement et sécurisation des intrants: raffinage de lithium/niobium/nickel, cathodes/anodes sur sol européen, énergie décarbonée et compétitive.
  • Normes et traçabilité: Règlement Batteries (empreinte CO2, due diligence) comme filtre structurel; passeport batterie pour verrouiller des chaînes conformes.
  • Étalonnage des aides: conditionner subventions et PIIEC/NZIA à des transferts réels de compétences, à un pourcentage d’ingénierie locale et à des centres R&D souverains.

Trois scénarios pour 2026-2030

  1. Ouverture encadrée, avec exigences élevées
  • Local content progressif (cellules + cathodes/anodes), R&D locale obligatoire, gouvernance des données.
  • Avantage: emplois + montée en gamme européenne. Risque: pression à la baisse sur les coûts pour les acteurs UE moins capitalisés.
  1. Dé‑risking ciblé
  • Filtrage FDI renforcé sur les actifs sensibles (chimies, équipements stratégiques), partenariats industriels avec co‑propriété d’IP, clauses anti‑dumping automatiques si prix < coûts soutenables.
  • Avantage: équilibre entre prix pour le consommateur et souveraineté. Risque: complexité juridique, délais.
  1. Défensif pur (tarifs/quotas élevés)
  • Ralentit l’entrée chinoise mais renchérit l’électrification, avec risque de riposte (matières critiques) et de retard de décarbonation.
  • Avantage: répit pour les acteurs européens. Risque: perte de parts de marché V.E. au profit de l’occasion/thermique + inflation.

Qui gagne, qui perd à court terme?

  • Consommateurs: prix plus bas si capacités locales chinoises entrent en service; attention à l’« effet ciseau » si concurrence locale s’étiole.
  • Constructeurs européens: gagnent du temps et de la compétitivité via un supply batterie local; perdent du levier de négociation si 2‑3 fournisseurs asiatiques dominent.
  • Écosystème européen des batteries: gagne en volume (intégration de sites et sous‑traitants); perd en valeur si le midstream/équipements restent captifs de technologies chinoises.
  • Territoires: gagnants nets s’ils obtiennent des usines avec amont (électrodes) + R&D; gagnants relatifs si ce n’est « que » de l’assemblage.

💡 Conseil d’expert
Dans chaque accord d’implantation, sécuriser:

  • Une trajectoire chiffrée de contenu local (électrodes, pack, BMS).
  • Un centre R&D européen doté de droits de PI partageables.
  • Des clauses de résilience (stocks mini, multi‑sourcing européen).
  • Des critères d’énergie décarbonée et d’efficacité (LCOE, PPA verts) pour baisser l’empreinte et le coût complet.

Points de vigilance pour les 12‑18 mois

  • Taux de concrétisation: combien de projets passent réellement en construction en Europe face aux 25% de réussite moyenne à l’étranger?
  • Politiques commerciales: finalisation/ajustement des droits anti‑subventions UE; réponses de la Chine.
  • Énergie et CAPEX: compétitivité électrique (nucléaire/hydraulique/éolien) et soutien public conditionné aux transferts technos.
  • Permitting: délais d’autorisations, raccordements, accès foncier industriel.
  • Mouvements de Pékin: signaux de contrôle des investissements sortants sur les secteurs stratégiques.

📢 Chiffres clés

  • 2024: ~16 Md$ investis à l’étranger par la filière V.E. chinoise vs 15 Md$ en Chine.
  • 74% des investissements hors Chine: usines de batteries.
  • Taux d’achèvement: 25% à l’étranger vs 45% en Chine.
  • Domestique: pic >90 Md$ (2022) → 41 (2023) → 15 (2024).

En clair, la Chine ne se contente plus d’exporter ses V.E.: elle vient produire au cœur des marchés. À l’Europe de transformer cette pression en levier de réindustrialisation — ou d’en subir la dépendance.